Le défi de la transformation

  • 01 Jan. 2005 - 31 Mar. 2005
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  • Mis à jour le: 04 Nov. 2008 02:06

John J. Garstka s’intéresse au concept de transformation, au rôle qu’il joue dans les organisations tant commerciales que militaires, ainsi qu’à certains aspects de la transformation de l’OTAN.

John J. Garstka s’intéresse au concept de transformation, au rôle qu’il joue dans les organisations tant commerciales que militaires, ainsi qu’à certains aspects de la transformation de l’OTAN.

 La transformation consiste à procéder à un changement soutenu et intentionnel, souvent sur une grande échelle, dont l’objectif stratégique réside dans la création ou le maintien d’un avantage concurrentiel, ou encore dans le fait de contrebalancer un avantage acquis par un concurrent futur ou existant. Le concept s’applique aux organisations confrontées à des défis et à des opportunités face auxquels le recours à des méthodologies éprouvées s’avère inefficace pour procéder à des améliorations progressives des organisations, processus et technologies existants, ou encore de la gestion des ressources humaines et des modèles professionnels. La nécessité d’une transformation peut se présenter dans les secteurs public et privé.

L’impulsion en faveur de la transformation est variable. Dans certains cas, cette transformation est stimulée par une rapide détérioration de la position concurrentielle de l’organisation, entraînant des changements imprévus et non anticipés de l’environnement concurrentiel, ou par une évolution dont la rapidité était jusque-là inconnue. Dans d’autres cas, la transformation est motivée par des opportunités nouvelles et résulte du désir de générer ou de renforcer un avantage concurrentiel, en exploitant une technologie nouvelle ou émergente. Cela exige souvent des changements au niveau de l’organisation, des processus ou des ressources humaines. Dans le cas que l’on qualifie souvent de « transformation radicale de la conjoncture », des dirigeants ou une gestion inefficaces peuvent entraîner la détérioration de la position concurrentielle d’une entreprise à un point tel qu’une perspective de transformation s’avère indispensable pour restaurer l’avantage concurrentiel.

L’évaluation de l’avantage concurrentiel

L’on dit qu’une organisation possède un avantage concurrentiel lorsqu’elle obtient une compétitivité supérieure à celle d’un ou de plusieurs concurrents. La position concurrentielle constitue une mesure relative des performances. Du point de vue pratique, elle se mesure en comparant les capacités intégrées des concurrents dans un environnement de compétition. Parmi les capacités au niveau commercial, on peut par exemple citer la conception, la production, la commercialisation, la vente et la distribution des produits. Dans le domaine militaire, les exemples incluent les possibilités en matière de manœuvre, de frappe, de logistique, ainsi que de commandement et de contrôle. Dans le monde commercial comme dans le domaine militaire, une organisation évalue sa position concurrentielle actuelle et future en répondant aux questions suivantes :

Position concurrentielle actuelle :

  • Qui sont les concurrents actuels et quelles sont leurs capacités ?
  • A quel niveau se situent les capacités actuelles de l’organisation par rapport à celle de ses concurrents ?
  • A quel rythme l’organisation actuelle enrichit-elle, adapte-elle et améliore-elle ses capacités actuelles par rapport à ses concurrents ?
  • Quelle est la probabilité d’émergence de nouveaux concurrents à court terme ?

Position concurrentielle future :

  • Qui sont les futurs concurrents potentiels et quelles sont leurs capacités probables ?
  • Quand de nouveaux concurrents sont-ils susceptibles de faire leur apparition ?
  • Quelles sont les futures capacités prévues de l’organisation ?
  • Quelles actions entreprendre dès maintenant pour dissuader les futurs concurrents potentiels ?
  • Quelles actions entreprendre dès maintenant pour créer un futur avantage concurrentiel si la      dissuasion échoue ?

Les réponses à ces questions permettent de déterminer la position concurrentielle actuelle d’une organisation et fourniront une estimation de sa future position concurrentielle. Dans certains cas, les réponses ne sont pas tranchées, car elles impliquent des incertitudes, une certaine ambiguïté et l’évaluation des risques. Cela conduit souvent à des désaccords et stimule les débats au sein de l’organisation. Si un consensus peut être atteint en ce qui concerne l’existence d’une insuffisance concurrentielle – actuelle ou future –, le dialogue peut débuter sur les moyens d’action potentiels destinés à renforcer la position concurrentielle. C’est à ce moment, après l’obtention d’un consensus sur la nécessité de changements, que la transformation doit être considérée comme un moyen d’y parvenir.

Les capacités au centre de la transformation

Si l’on accepte l’hypothèse que les capacités constituent le facteur principal qui permet aux organisations de rivaliser entre elles, les efforts en vue d’un développement ou d’un renforcement de l’avantage concurrentiel devraient reposer sur ces capacités. De la sorte, la transformation devrait principalement se focaliser sur l’optimisation des capacités.

Du point de vue conceptuel, l’on peut considérer que les capacités rassemblent quatre composants : les personnes, les processus, l’organisation et la technologie. Cela implique que les capacités puissent être renforcées par le biais de l’innovation et du changement au niveau des composants. Lorsque les changements progressifs au niveau des composants impliquent un soutien de l’innovation, les technologies d’innovation traditionnelles s’avèrent généralement adéquates. Toutefois, lorsque le renforcement ou le développement des capacités exige la synchronisation des innovations dans deux composants au moins, ou lorsque l’innovation au niveau des composants est perturbatrice, des méthodologies de transformation sont habituellement requises.

Une focalisation sur les capacités de transformation implique les éléments et relations suivants :

  • La transformation constitue un processus continu, qui crée et préserve l’avantage concurrentiel.
  • La transformation englobe la co-évolution des processus, des organisations, des technologies et du capital humain, qui – pris ensemble – renforcent les capacités existantes et permettent l’apparition de nouvelles capacités.
  • La transformation élargit la base de capacités existante, par le biais de la création de nouveaux       domaines et compétences concurrentiels. Elle réévalue donc les attributs concurrentiels existants.
  • La transformation cherche à affecter l’avantage concurrentiel courant ou futur, en identifiant les       modifications des principes sous-jacents ou des séries de règles émergentes.
  • La transformation implique l’identification de nouvelles sources de pouvoir, qui – si elles sont       exploitées – peuvent renforcer l’avantage concurrentiel.
  • Enfin, la transformation se focalise sur le composant humain du changement, en entraînant       l’apparition de dirigeants en mesure de canaliser le changement et en créant une culture       organisationnelle à la fois ouverte au changement et capable de soutenir l’innovation,       d’apprendre et de prendre des risques.

Ces éléments fournissent un cadre de réflexion sur la transformation et sur la structuration des initiatives y afférentes. Manifestement, ce sont les spécificités de la situation concurrentielle de l’organisation qui détermineront l’ampleur, le rythme et l’intensité des initiatives requises pour atteindre les objectifs stratégiques désirés. En conséquence, la réponse à la question « Qu’entendez-vous par transformation et à quoi ressemble-t-elle ? » est souvent « Cela dépend des spécificités de la situation concurrentielle dans laquelle se trouve une organisation. »

La transformation et les organisations commerciales

Dans le secteur commercial, la décision d’un dirigeant de lancer son entreprise dans une transformation majeure est, en règle générale, motivée par une position concurrentielle érodée résultant de changements dans l’industrie ou l’environnement concurrentiel. Cette situation peut être le résultat de changements dans la structure de la réglementation, du comportement des concurrents ou de l’émergence d’un nouveau produit ou d’une nouvelle technologie de production.

Dans le secteur commercial, les efforts de transformation pour renforcer les capacités ou en développer de nouvelles peuvent être proactifs, comme dans le cas du passage préemptif de Dell à la distribution directe et à la fabrication par flux tendus sur le marché de l’ordinateur personnel. La transformation peut également être réactive, en réponse à une décision d’un concurrent, comme dans le cas des réponses des concurrents aux efforts incessants de Dell visant à réduire ses coûts et à s’adjuger de nouvelles parts du marché. Compaq et HP ont fusionné pour tenter d’obtenir un avantage d’échelle ; IBM a tout simplement jeté le gant, en annonçant la vente de ses activités liées aux ordinateurs personnels à la société chinoise Lenovo, puis en se recentrant sur les services destinés aux entreprises.

La possibilité pour la transformation de créer ou de renforcer un avantage concurrentiel en optimisant une capacité par le biais de l’exploitation d’une technologie nouvelle est illustrée par le passage de Dell à la distribution directe. C’est l’Internet qui a permis et accéléré ce processus, en rendant possible la distribution directe à un plus faible coût, soutenue par une organisation de vente directe et de vente par téléphone. L’expérience de Dell démontre également que l’exploitation de la technologie peut exiger des changements au niveau des structures organisationnelles, des processus et des individus. Chez Dell, à la suite du développement des activités, le système de livraison a été entièrement repensé et l’équipe de direction presque entièrement remaniée, avec l’arrivée de talents extérieurs.

La transformation et les organisations militaires

Le département américain de la Défense définit la transformation comme « un processus qui modèle la nature évolutive de la concurrence et de la coopération militaires, par le biais de nouvelles combinaisons de concepts, de capacités, de personnes et d’organisations qui exploitent les avantages de notre pays et le protègent contre les vulnérabilités asymétriques pour soutenir sa position stratégique, ce qui contribue à consolider la paix et la stabilité dans le monde ».

Cette définition de la transformation renforce le rôle central du développement et de l’optimisation des capacités pour la transformation militaire, tout en soulignant la nature proactive du processus de transformation. Dans un contexte de défense, les quatre principaux composants de la capacité – les personnes, les processus, l’organisation et la technologie – peuvent être étendus pour inclure des composantes supplémentaires. Au département américain de la Défense, cela correspond à la construction de la Doctrine, de l’Organisation, de la Formation, du Matériel, du Leadership et Enseignement, du Personnel et des Installations. Les relations correspondantes entre les quatre principaux éléments et les éléments américains étendus sont les suivantes :

  • Personnes – Personnel, Leadership et Enseignement, et Formation
  • Processus – Doctrine
  • Organisation – Organisation
  • Technologie – Matériel et Installations

Ce cadre simple met en lumière les dimensions principales du changement pour les forces militaires et fournit un mécanisme pour communiquer clairement et succinctement les changements qui peuvent être menés dans les forces militaires « en transformation ». Il fournit également une perspective utile permettant de réexaminer le passé et d’élaborer des stratégies pour faire face aux défis de la mise en œuvre de la transformation militaire.

Les transformations militaires dans l’histoire

Les transformations militaires réussies ont toutes entraîné la mise en place de nouvelles capacités de combat. Cette mise en place a presque toujours impliqué des changements évolutifs de certains ou de tous les principaux composants liés à la technologie, aux processus, à l’organisation et aux personnes. Le résultat net de ces changements évolutifs a eu un impact révolutionnaire sur l’avantage concurrentiel au combat, à chaque fois que, chez les concurrents, le développement de capacités n’a pas suivi.

Dans de nombreux cas, la source de cet avantage concurrentiel a été le résultat de l’exploitation d’une innovation dans un composant essentiel pour les capacités. Au nombre des exemples figurent la phalange romaine (innovation organisationnelle), la poudre à canon (innovation technologique), la cryptographie (innovation au niveau des processus) et les armées professionnelles (innovation au niveau des personnes). Dans certains cas cependant, la seule innovation au niveau des composants s’avère inadéquate pour renforcer de manière importante la capacité de combat. Cela survient souvent lorsque l’innovation technologique permet une amélioration de l’ordre de magnitude (qui correspond à un facteur de changement de dix) dans un domaine militaire essentiel. Cette multiplication par dix est survenue avec l’apparition de l’aviation embarquée sur des porte-avions (portée de l’engagement), des unités de combat mécanisées (rapidité de manœuvre) et de la défense aérienne (portée de la détection). Dans chacun de ces cas, diverses combinaisons de technologies, de processus, d’organisation et de personnes ont été requises pour obtenir une nouvelle capacité de combat. Ces cas illustrent les défis associés à l’identification et à l’exploitation de nouvelles sources de puissance afin de développer de nouvelles capacités. Ils révèlent également les facteurs de réussite cruciaux pour une transformation militaire.

Innovation au niveau des technologies, des processus et de l’organisation

Lors de l’apparition de la guerre mécanisée, la plus importante innovation en termes de capacité fut une innovation technologique, sous la forme du char. Une fois parvenue à maturité, cette innovation permit aux éléments mécanisés des armées de couvrir des centaines de kilomètres en une seule journée, comparé aux distances de quelques dizaines de kilomètres parcourues dans le même temps par les armées se déplaçant à pied ou à cheval. Les armées britannique, française et allemande mirent des chars au point et étudièrent divers moyens de les utiliser. Seule l’armée allemande parvint toutefois à associer avec bonheur l’innovation technologique aux innovations au niveau des processus et de l’organisation, afin de créer une nouvelle capacité de combat. Rétrospectivement, ce qui peut apparaître comme un processus et des problèmes organisationnels relativement simples constitua, à l’époque, un point majeur de divergence et de désaccord au sein des grandes armées britannique et française, ce qui entrava leur transformation.

Les divergences quant au changement de processus tournaient autour de la question de savoir si les chars devaient soutenir l’infanterie ou vice versa. L’élément humain était au cœur de la discussion, dont l’issue était déterminante pour le maintien et le renforcement du statut des élites combattantes existantes – l’infanterie et la cavalerie – ou sa diminution. Une fois que les innovations technologiques et de processus eurent été acceptées au sein de l’armée allemande, le défi à relever s’avéra être la détermination des meilleures formes organisationnelles pour exploiter ces innovations. Plus concrètement, les questions organisationnelles auxquelles répondre tournèrent autour de la taille des unités mécanisées : fallait-il créer des brigades Panzer ou des divisions Panzer ?

L’impact net des changements évolutifs dans chacun de ces domaines – associés à l’utilisation efficace de la radio et d’un soutien aérien rapproché – fut la transformation de la guerre terrestre. Cela permit à l’Allemagne de rapidement vaincre la Pologne en 1939 et la France et ses alliés en 1940.

L’importance des innovations au niveau des personnes

Le potentiel perturbateur de certains types d’innovations dans la manière de combattre pour le mode de vie des élites existantes représente l’un des défis essentiels pour la transformation militaire. Cela fut le cas avec l’apparition de la guerre mécanisée, et de l’aviation embarquée sur des porte-avions. La composante humaine du changement constitue le facteur le plus compliqué de la transformation, que celle-ci survienne dans le secteur privé, public ou militaire. Il en résulte que les dirigeants chargés de guider le changement doivent se focaliser sur l’élément humain.

L’accélération de l’innovation grâce à l’apprentissage permanent

L’un des facteurs qui compliquent la transformation militaire réside dans la nécessité de démontrer l’efficacité opérationnelle potentielle d’un nouveau concept. Dans le cas de l’aviation embarquée et de la guerre mécanisée à l’époque de l’entre-deux-guerres, les concepts opérationnels initiaux et les technologies associées ne parvinrent pas à rivaliser en performances avec les capacités existantes. Rares furent ceux qui se rendirent compte de l’impact potentiel des concepts opérationnels et des technologies une fois qu’ils seraient parvenus à maturité. Dans les deux cas, l’aptitude à mener une série d’expériences, d’exercices et de jeux de stratégie militaire se renforçant mutuellement s’avéra essentielle pour permettre aux dirigeants visionnaires d’accélérer l’apprentissage et d’obtenir des preuves pour soutenir les investissements dans les capacités émergentes. Dans le cas de la guerre mécanisée, une masse critique de personnes au sein de l’armée allemande fut capable de prendre conscience de la manière dont les forces mécanisées pouvaient être utilisées beaucoup plus rapidement que leurs homologues dans les armées britannique, française et polonaise.

La transformation et l’OTAN

Lorsque l’on examine l’OTAN sous le prisme de la transformation, il est important de se poser les questions dont nous venons de parler au sujet de l’avantage concurrentiel présent et futur. La réponse à ces questions peut fournir un aperçu utile du degré suivant lequel la transformation est indispensable et du rythme auquel les initiatives doivent être lancées.

Il existe un large consensus pour considérer que l’ « environnement concurrentiel » actuel de l’OTAN est en mutation. L’environnement concurrentiel comparativement statique de la Guerre froide a cédé la place à un paysage sécuritaire extrêmement fluide et complexe. L’association de nouveaux concurrents et de leurs capacités existantes et émergentes crée un nouveau défi pour la sécurité. Ces nouveaux concurrents incluent des acteurs transnationaux et non constitués par des Etats, qui ne présentent pas nombre des attributs d’identification familiers tels que territoires, frontières et bases fixes, tout en étant guidés par une série diversifiée d’aspirations et de motifs, et qui, de surcroît, opèrent en fonctions de règles différentes.

La réponse de l’OTAN à ce nouvel environnement concurrentiel consiste à chercher à gérer les risques en créant une force dotée de nouvelles capacités et de nouveaux attributs concurrentiels, dans le but de contrer les menaces actuelles et émergentes. Lors du Sommet de Prague en 2002, les Alliés sont tombés d’accord pour considérer que les forces de l’OTAN doivent présenter une agilité, une capacité de déploiement et une capacité de soutien renforcées. Le degré du changement requis pour créer une force dotée d’une série intégrée de capacités appropriées répond manifestement aux critères de la transformation. Qui plus est, le moteur principal en est la Force de réaction de l’OTAN (NRF).

Telle qu’elle est envisagée, la NRF devrait constituer une force de réaction rapide de 20 000 hommes, préparée au combat et capable de se déployer en cinq à trente jours, tout en pouvant être soutenue durant trente jours. Chaque NRF est destinée à revêtir la forme d’une équipe interarmées, dont les ressources comprennent des forces terrestres de la taille d’une brigade, des ressources aériennes et des capacités de commandement et de contrôle pour soutenir jusqu’à 200 sorties par jour, ainsi que des forces navales. Pour pouvoir être déployées, ces forces doivent être expéditionnaires. Cela exige des changements technologiques au niveau de la capacité de transport aérien stratégique et des innovations au niveau des effectifs, qui doivent se composer de soldats et d’aviateurs capables de se déployer en dehors de leurs frontières nationales.

Pour être efficace en tant qu’équipe interarmées combinée et intégrée, la NRF exigera des innovations technologiques afin de déployer des systèmes modernes et interopérationnels de commandement et contrôle. De plus, pour disposer d’une capacité de soutien, elle exigera le développement de capacités logistiques efficaces, solides et adaptables. L’obtention d’améliorations au niveau de la capacité de soutien exigera des innovations dans les domaines des processus, de l’organisation et de la technologie.

Le besoin d’une interopérabilité renforcée représente l’un des plus importants défis pour les forces armées de tout pays isolé ; il est particulièrement aigu pour l’OTAN. Ce qui fait toutefois de la NRF un moteur plus puissant encore pour la transformation de l’Alliance, c’est son lien avec le concept relatif à la Capacité en réseau de l’OTAN (NNEC). Ce lien offre un potentiel devant permettre aux forces de l’Alliance d’améliorer leur interopérabilité et de mieux exploiter les nouvelles sources de puissance associées au partage de l’information. L’exploitation de ce potentiel dans l’environnement fiscal existant et la transformation du concept NNEC en réalité impliqueront toutefois inévitablement des choix difficiles au niveau des dépenses.

La nécessité d’investir dans des capacités en réseau engendre une opportunité de développement et d’expérimentation d’un concept en collaboration centré sur l’affirmation des performances d’une coalition de forces en réseau pour toute la gamme probable d’opérations. Si cette approche est adéquatement mise en œuvre, elle devrait également contribuer à l’obtention des preuves empiriques nécessaires au soutien de l’OTAN lorsque les Etats membres procéderont à des investissements dans les vecteurs essentiels pour les capacités en réseau. Un défi très important à relever pour accélérer la mise en œuvre du concept NNEC de l’OTAN consiste à améliorer la capacité des Alliés à tirer des enseignements des expériences réciproques acquises des forces en réseau lors d’opérations, d’exercices et d’expérimentations. Le déploiement du Corps germano-néerlandais en Afghanistan a par exemple fourni une opportunité d’apprentissage en profondeur quant à la faisabilité de l’utilisation de moyens de communication en réseau et articulés sur des satellites dans un environnement de coalition.

Un mécanisme émergent visant à l’accélération de l’apprentissage organisationnel dans ce domaine est le stage sur les opérations réseau centriques. Ce cours destiné à des cadres sera proposé à partir de juin 2005 par le Commandement allié Transformation, en collaboration avec le Centre d’excellence de l’OTAN pour le commandement et le contrôle et le Bureau de la transformation des forces du département américain de la Défense.

Lorsque l’on examine l’éventail complet des initiatives de transformation de l’OTAN, la création du Commandement allié Transformation se distingue comme une innovation organisationnelle importante, qui promet de continuer à contribuer considérablement à la transformation en cours au sein de l’Alliance. Le travail de ce Commandement et celui des centres d’excellence de l’OTAN en cours de création fournissent une base solide, qui facilitera la transformation soutenue de l’Alliance. Lorsqu’ils évaluent la réussite des transformations militaires, les historiens accordent une place prépondérante aux dirigeants qui sont capables de conduire le changement et aux cultures qui sont ouvertes aux changements, tolèrent les débats et soutiennent les innovations. Seul le temps dira si l’OTAN a rassemblé ces facteurs de réussite essentiels. Lorsque l’on examine les progrès déjà réalisés à ce jour, les perspectives semblent toutefois très prometteuses.

John J. Garstka est directeur adjoint pour les concepts et les opérations au Bureau de la transformation des forces du Département américain de la Défense.