Stratégie de mise en œuvre de la transformation numérique de l’OTAN

Reference: PO(2024)0296

  • 17 Oct. 2024 -
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  • Mis à jour le: 17 Oct. 2024 16:38

Contexte 

1.    Dans le concept stratégique de 2022, les Alliés ont insisté sur la nécessité de consolider l’avance technologique de l’OTAN, afin d’accroître davantage encore sa capacité de dissuasion et de défense, et sur la nécessité de renforcer l’engagement de l’Alliance à l’égard de la défense collective. Ils se sont en outre engagés à adapter la structure de commandement de l’OTAN (NCS), en la faisant entrer pleinement dans l’ère de l’information, de sorte qu’elle puisse exploiter les technologies du numérique pour renforcer l’efficacité de son action militaire.

2.    En octobre 2022, ils ont adopté la vision pour la transformation numérique de l’OTAN1 , un document d’intention qui donne des perspectives d’ensemble sur la manière dont l’OTAN compte favoriser l’adoption des technologies qui lui permettront de mener des opérations multimilieux, de garantir l’interopérabilité dans tous les milieux, d’améliorer sa connaissance de la situation et de faciliter les consultations politiques et la prise de décision fondée sur des données.
Objectif

3.    La vision pour la transformation numérique de l’OTAN sera mise en œuvre au moyen de la présente stratégie, qui vise à réformer les modes de fonctionnement de l’Organisation en lui permettant d’exploiter le potentiel des technologies modernes et des méthodes de travail qui leur sont associées ainsi que de combler les lacunes existantes. Cette transformation prendra la forme d’un effort continu, qui durera plusieurs années et comportera de multiples facettes, allant du personnel jusqu’aux processus en passant par la technologie, et qui sera alimenté par les activités d’analyse prospective de l’OTAN. 

4.    La réussite de cette stratégie sera tributaire des contributions des Alliés ainsi que de l’adoption d’un nouveau paradigme de coopération – s’étendant au secteur privé, à la société civile et aux universités2  – portant sur une série d’éléments : écosystème allié de partage des données, dorsale numérique, cadre d’interopérabilité numérique, architectures OTAN, etc.
 

Résultats stratégiques attendus 

5.    La stratégie de mise en œuvre de la transformation numérique est une initiative de réforme qui combine des activités de modernisation, d’optimisation et de transformation3  dans les domaines du personnel, des processus et de la technologie afin de parvenir aux objectifs stratégiques suivants :

5.1.    Une Alliance prête pour les opérations multimilieux : parvenir à la suprématie sur le champ de bataille nécessite de pouvoir simultanément dominer l’adversaire dans tous les milieux, orchestrer les activités militaires, synchroniser les activités non militaires et produire des effets convergents à la vitesse requise. La pleine concrétisation des opérations multimilieux (MDO) nécessitera, outre une dorsale numérique permettant une intégration sans faille du commandement et du contrôle (C2) dans tous les milieux, les éléments fondamentaux suivants : amélioration de la connaissance de la situation, orchestration des effets opérationnels, intégration de la gestion des risques et de l’assurance numérique de la mission, adoption de nouvelles capacités, agrégation des données, renforcement de la sécurité et de la protection des données. La mise en œuvre des MDO s’inscrira dans le prolongement des efforts de planification actuellement déployés pour concrétiser le concept de dissuasion et de défense pour la zone euro-atlantique (DDA). 

5.2.    Une interopérabilité garantie dans tous les milieux : l’interopérabilité numérique est le socle sur lequel repose la transformation numérique de l’OTAN. Elle nécessite des normes modernes et des processus de gouvernance cohérents permettant de faire en sorte que les capacités soient parées pour l’avenir, homogènes et interopérables dans toute l’Alliance, que la sécurité et l’interopérabilité soient prises en compte dès leur conception, et que ces capacités soient développées suivant des approches fiables et modernes.

5.3.    Une meilleure connaissance de la situation : la transformation numérique améliorera la connaissance de la situation, ce qui permettra aux dirigeants politiques et militaires de mieux anticiper les risques et de réagir plus rapidement aux crises. Elle permettra de tirer parti d’un ensemble combiné de réseaux de capteurs, de sources de données multiples et d’outils d’analyse avancés afin de parvenir à une vision d’ensemble de la situation dans les différents milieux, générée en temps réel.

5.4.    Des consultations politiques facilitées et un processus optimisé de prise de décision fondée sur des données : accélérer et améliorer la prise de décision nécessite un accès persistant à des données fiables provenant de tous les domaines (militaires et politiques), des services avancés d’analyse et de consultation bénéficiant à l’Alliance et des processus optimisés de consultation et de décision sous-tendus par un écosystème de partage de données à l’échelle de l’Alliance. 
 

Livrables stratégiques 

6.    La transformation numérique sera mise en œuvre à travers un processus continu, cohérent et régi par des règles claires qui nécessitera de mobiliser des ressources humaines et financières proportionnelles au niveau d’ambition affiché. Les volets cybersécurité et cyberdéfense sont inclus dans certains axes d’effort de la présente stratégie et reliés aux initiatives correspondantes de l’OTAN et des Alliés.

7.    Pour atteindre les buts énoncés dans la vision pour la transformation numérique, il conviendra de produire les livrables stratégiques suivants.

7.1.    Initiatives numériques de l’Alliance : la transformation numérique s’appuiera sur l’initiative du réseau de mission fédéré (FMN)4  pour harmoniser et synchroniser les efforts de planification et d’élaboration de capacités interopérables des Alliés, de l’entreprise OTAN, des partenaires et des autres organisations internationales. La transformation numérique offre également aux Alliés qui se sont déjà engagés sur la voie de l’innovation l’occasion de proposer leur expérience et leurs solutions à l’Alliance, par la création d’une enceinte permettant aux services de l’OTAN de faciliter l’élaboration de programmes de coopération bilatéraux ou multinationaux, et aux solutions nationales d’être proposées et développées au profit de toute l’Alliance.

7.2.    Alignement des programmes : l’entreprise OTAN s’emploiera à harmoniser et améliorer les divers mécanismes de livraison de capacités afin d’accélérer la mise en œuvre des programmes. 

7.3.    Effectifs prêts pour le numérique : la transformation numérique s’appuiera sur les travaux en cours de réalisation pour faire en sorte que le personnel de l’entreprise OTAN soit prêt pour le numérique. Elle facilitera ainsi l’élaboration et la mise en œuvre de politiques tenant compte du numérique ainsi que l’instauration d’une culture de l’innovation au sein de l’Alliance. Outre des programmes de formation, les travaux visant à faire en sorte que le personnel soit prêt pour le numérique incluront des programmes de bourses, de détachements et d’échanges entre les Alliés, l’OTAN, le secteur privé et le monde universitaire. 

7.4.    Forces de combat prêtes pour le numérique : pour être moderne et efficace, la structure de forces de l’OTAN (NFS) a besoin de capacités modernisées et d’effectifs entraînés, préparés lors d’exercices nationaux et collectifs et prêts à exploiter les avantages offerts par les technologies et à opérer avec succès dans le cadre de MDO. 

7.5.    Services d’information et de communication (TIC) pour une Alliance guidée par les données : pour améliorer la connaissance de la situation et les processus de consultation et de décision, il faut de nouvelles méthodes de coopération et des services TIC modernes et résilients, capables d’aider les dirigeants politiques et militaires dans leur tâche : accès sécurisé à des données fiables, environnement logique unifié – avec outils d’analyse avancés et capacités IA – pour l’exploitation de ces données, architecture centrée sur les données offrant un accès persistant aux services TIC dans toute l’Alliance. 

7.6.    Gouvernance centrée sur les données : il convient que l’OTAN façonne l’environnement informationnel de manière à garantir l’intégrité opérationnelle ainsi qu’un flux sans entraves et résilient de données provenant de sources diverses, mais intégrées. L’exploitation de ces données doit être réalisée suivant des normes de gestion appropriées et des normes de partage harmonisées, être protégée et guidée au moyen d’un cadre de gouvernance des données et de moyens de contrôle adéquats, et être assortie de capacités adéquates en matière de gestion des données, de science des données et d’IA. 

7.7.    Cadre d’interopérabilité numérique : il est nécessaire d’améliorer la gouvernance des activités d’interopérabilité numérique des Alliés de manière à établir des relations interorganisationnelles, à rationaliser les processus sous-tendant les services de bout en bout et à faire en sorte que les politiques existantes et nouvelles favorisent les efforts d’interopérabilité. Pour les Alliés qui le souhaitent, on élaborera une approche commune consistant à proposer des services TIC fédérés et répondant à certaines exigences de sécurité, de protection et de gestion des données. L’interopérabilité numérique va au-delà du développement de nouvelles technologies : elle comprend également l’innovation, les acquisitions, les opérations et la prise en charge durable des produits hérités. La mise en œuvre du cadre d’interopérabilité numérique contribuera à la qualité des données et des services TIC ainsi qu’à l’émergence d’un environnement où les entités des pays de l’Alliance et de l’entreprise OTAN pourront pleinement coopérer et fédérer leurs services TIC. Le secteur privé a par ailleurs un rôle essentiel à jouer dans la définition des normes nécessaires à la promotion de la pleine interopérabilité numérique au sein de l’Alliance.

7.8.    Processus prêts pour le numérique : il est crucial de définir des processus agiles et adaptés aux besoins si l’on entend accélérer la conception, l’acquisition, la fourniture et l’exploitation de la dorsale numérique. De même, il est impératif de trouver le juste équilibre entre la nécessité d’innover et celle de mettre en place des mécanismes de contrôle efficaces. Il est essentiel que l’OTAN repense ou continue de réformer, dans le respect des procédures applicables, certains processus fondamentaux dans des domaines tels que la consultation politique, la planification des opérations et des capacités, les achats et acquisitions ou encore les homologations de sécurité, dans la double perspective de répondre à l’évolution des besoins engendrée par certaines nouvelles tendances et de tirer parti des solutions technologiques émergentes. Il faudra dès lors actualiser les politiques, la doctrine et les méthodes de travail dans de multiples domaines. 

7.9.    Dorsale numérique : la dorsale numérique de l’OTAN sera développée de manière à répondre aux besoins répertoriés dans les grandes catégories liées à l’agenda OTAN 2030. L’Alliance a besoin de systèmes centrés sur les données, interconnectés et capables de s’intégrer aisément et de manière sécurisée à travers les divers périmètres organisationnels et nationaux, et ce en temps de paix comme pendant les missions et opérations. Cela signifie que la dorsale numérique devra donner les moyens techniques d’assurer une connectivité universelle et de permettre le transport de données non seulement dans et entre les milieux d’opérations traditionnels (air, terre, mer), mais également dans les nouveaux milieux que sont l’espace et le cyberespace, et entre les pays de l’Alliance et les pays partenaires, comme décrit dans le concept de l’Alliance pour les opérations multimilieux. La dorsale numérique relie entre eux les capacités, les capteurs, les effecteurs et les décideurs des sphères militaires et politiques, favorise l’intégration et l’interopérabilité entre les différents domaines et plateformes, et permet une collaboration sans heurts. Elle accueille également le tissu de données (data fabric) qui permet aux utilisateurs et aux services d’accéder aux données et de les traiter rapidement et de manière sécurisée à tous les niveaux. Parmi ses composants essentiels figurent les réseaux fédérés et le cloud computing, et elle est conçue suivant un paradigme d’architecture orientée services.

7.10.    Écosystème de partage de données de l’Alliance : le partage des données est un impératif pour l’Alliance, et il convient de répondre à cet impératif par des efforts systématiques. Dans la poursuite des objectifs de l’Alliance, l’échange de données interopérables devra devenir la norme ainsi qu’une responsabilité collective pour les Alliés et pour l’entreprise OTAN. Les initiatives de partage de données avec les partenaires du secteur privé et du monde de la recherche, dans les pays de l’Alliance, seront encouragées et renforcées lorsqu’il y a lieu. Pour fonctionner correctement, le partage des données doit transcender les silos opérationnels, s’appuyer sur la volonté d’échange des communautés existantes et tirer parti d’initiatives telles que le cadre de données de base OTAN (NCDF). Il doit viser des usages s’inscrivant à l’appui des politiques et stratégies des Alliés, et respecter les principes OTAN d’utilisation responsable de l’intelligence artificielle et des données. Il est tout particulièrement important de stimuler la coopération dans le domaine du partage des données d’entraînement si l’on entend permettre à l’Alliance de réaliser ses ambitions en matière d’exploitation des données et d’IA, soutenir des initiatives alliées de promotion de l’innovation telles que le DIANA et renforcer la position de l’Alliance par rapport à ses compétiteurs stratégiques. Cette initiative résultera en la mise en place d’un écosystème de partage de données de l’Alliance qui permettra d’échanger, d’étiqueter, de relier entre elles et d’exploiter des données venant d’Alliés, de l’entreprise OTAN, mais aussi du secteur privé et des partenaires de recherche des pays de l’Alliance.

7.11.    Coopération avec le secteur privé et le monde universitaire : l’OTAN élargira sa coopération avec les partenaires du secteur privé et du monde universitaire et elle élaborera, en s’appuyant sur les initiatives en cours, des mécanismes propices à une collaboration mutuellement enrichissante, pouvant inclure, par exemple, des contacts coordonnés de niveau exécutif ou encore un contrat-cadre portant sur divers domaines technologiques, allant de la science des données à l’IA en passant par l’informatique quantique et les technologies spatiales. 
 

  1. PO(2022)0405
  2. Industry, civil society and academia are from Allies and Partner Nations.
  3. Including all elements recognized as part of emerging and disruptive technologies.
  4. The Federated Mission Networking (FMN) initiative is one of the main constructs to agree on roadmaps and specifications for delivering interoperable capabilities, even though at the current point of time the FMN scope does not yet entail the entirety of Alliance’s interoperability requirements.