Il y a une vie après le talibanisme
Ancien commandant taliban, Noor Mohammad Jami parle d’une voix douce. II s’est rallié au processus de paix il y a un an et vit dans la province occidentale de Farah.
« Cela fait 30 ans que nous nous entretuons entre Afghans. » dit-il. « Je regarde les autres pays et je les vois se développer, et je me demande pourquoi nous détruisons notre pays. »
Noor est commerçant. Il confie sa boutique à son fils lorsqu’il va prodiguer ses conseils à l’assemblée locale pour la paix et servir de médiateur dans des litiges opposant des habitants de son village.
« Mes enfants vont à l’école et lorsqu’ils reviennent, ils travaillent dans leurs propres boutiques. Je m’occupe aussi de régler les problèmes des gens de mon village. Lorsqu’il y a un problème, les anciens viennent me voir pour que je trouve une solution, » explique Noor.
Menaces de représailles
Noor affirme que sa sécurité n’a jamais été menacée à Farah, mais il se tient à l’écart de son village. Il a reçu des lettres de menace des talibans. C’est pour cette raison que le gouvernement l’autorise à porter un fusil.
« Tout le monde sait qu’à chaque réunion, je reçois de nombreux appels des commandants talibans, » nous confie Noor. « Ils disent : tu n’es plus musulman, et nous offrirons 100 000 à 200 000 dollars de récompense à qui te tuera ou kidnappera tes enfants. »
D’autres ex-talibans de la région se sont eux aussi ralliés au processus de paix. Les anciens combattants talibans rendent leurs armes lourdes et rejoignent les rangs de la société afghane. En échange, le gouvernement local promet de leur trouver du travail et une formation et de les protéger contre les représailles.
Paix et réintégration
« Ils ont le droit de faire de la politique, de suivre une formation, de travailler pour le gouvernement et de solliciter un emploi de fonctionnaire, et personne ne peut s’y opposer, » a déclaré Roohul Amin, gouverneur de la province de Farah, lors d’une récente cérémonie de réintégration.
Le programme de réintégration, qui a été lancé officiellement l’an dernier au mois de juillet, a permis de rallier jusqu’à présent 149 ex-combattants dans la province de Farah, et plus de 3 500 dans tout le pays. Ce résultat est relativement modeste si on le compare au nombre présumé de combattants sur le terrain, mais les participants sont recrutés dans l’espoir qu’ils se tiendront à l’écart des combats.
Noor estime que le programme est un succès. Mais il ajoute que d’autres combattants devraient se décider à participer au processus de paix, même s’ils ne veulent pas travailler avec le gouvernement.
« Chaque Afghan devrait décider individuellement de revenir pour soutenir le gouvernement. S’il veut en plus travailler pour le gouvernement, c’est très bien. Mais s’il ne veut pas, il peut aussi lancer sa propre affaire. »