Défendre nos pays face aux menaces des missiles balistiques
Tribune du secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg
L'objectif de l’OTAN est clair : protéger les citoyens et le territoire de ses pays membres contre toutes les menaces.
Il s'agit non seulement des attaques classiques, terrestres, aériennes ou maritimes, mais aussi de la menace bien réelle que représentent les missiles balistiques provenant de l'extérieur de la zone euro‑atlantique. Il est en effet évident que nombre de pays développent des programmes de missiles balistiques. Et, en tant que membres d'une alliance défensive, nous ne pouvons pas ignorer cette menace. La défense antimissile est un outil important pour la défense collective, tâche fondamentale de l'OTAN.
C'est pourquoi, au sommet de Lisbonne, en 2010, les dirigeants des vingt-huit pays de l'Alliance ont décidé de développer la capacité de défense antimissile balistique de l'OTAN. Depuis lors, nous construisons ce système de manière transparente.
Notre programme de défense antimissile représente un investissement à long terme face à une menace à long terme. Nous voulons parvenir à une couverture et à une protection totales pour les Alliés européens de l'OTAN contre les attaques de missiles balistiques provenant de l'extérieur de la zone euro-atlantique.
Au moyen de l'approche adaptative phasée pour la défense antimissile en Europe, les États-Unis investissent considérablement pour notre défense collective. Les quatre navires Aegis multimission, qui sont maintenant basés en Espagne, apporteront une contribution importante au système de défense antimissile de l'OTAN. Lors d'un déplacement aux États-Unis au printemps dernier, j'ai vu par moi‑même ce que ces impressionnants bâtiments peuvent faire : repérer des cibles multiples à des centaines de kilomètres et abattre des missiles en plein vol.
Cette semaine, nous allons passer à une nouvelle étape importante. Après l'activation du site de défense antimissile Aegis Ashore à Deveselu, en Roumanie, ce jeudi, notre capacité se trouvera encore renforcée, ce qui accroîtra grandement la couverture défensive du territoire de l'OTAN contre les attaques de missiles à moyenne et à courte portée.
Je suis reconnaissant au gouvernement et au peuple roumains de contribuer à la défense collective de l'OTAN en accueillant ce nouveau site, et je suis ravi de pouvoir assister à la cérémonie organisée pour son inauguration.
De manière tout aussi importante, la Pologne a décidé d'accueillir un deuxième site Aegis Ashore à Redzikowo, où les travaux de construction débuteront ce vendredi afin que le site soit opérationnel d'ici à 2018. Ces sites, en Roumanie et en Pologne, renforceront considérablement nos capacités de défense.
D'autres Alliés apportent aussi leur contribution. L'Espagne met à disposition une base pour les navires Aegis. L'Allemagne, quant à elle, met à disposition un centre de commandement de défense antimissile. La Turquie accueille une station radar de détection lointaine. Le Royaume-Uni investit dans davantage de radars au sol. Le Danemark et les Pays-Bas équipent leurs frégates de nouveaux radars.
Il est important de noter que, comme son nom l'indique, le système que nous construisons a une vocation défensive. Les projectiles que nous utiliserons pour neutraliser les missiles assaillants ne contiendront pas d'explosifs, ils ne feront que « percuter » ces missiles. En d'autres termes, nous ne pourrions pas les utiliser de manière offensive, même si nous le voulions.
Le système ne représente pas non plus une menace pour la capacité de dissuasion nucléaire stratégique de la Russie. Tant d'un point de vue géographique que physique, il est impossible pour le système OTAN d'abattre des missiles balistiques intercontinentaux russes. Les intercepteurs sont trop peu nombreux et ils sont trop au sud ou trop près de la Russie.
Nous l'avons répété clairement maintes fois aux autorités russes. Cependant, la Russie a rejeté toutes les propositions de l'OTAN concernant une coopération en matière de défense antimissile, notamment l'établissement de centres conjoints et d'un régime de transparence pour la défense antimissile. Moscou a unilatéralement interrompu le dialogue avec l’OTAN sur cette question en 2013.
L'OTAN poursuivra le dialogue avec la Russie chaque fois qu'elle le pourra. Et à l'heure actuelle, alors que les tensions sont vives, il est de la plus grande importance de maintenir les canaux de communication ouverts. Dans le même temps, l'OTAN va continuer de renforcer sa défense pour protéger les Alliés contre toutes les menaces, notamment les missiles balistiques.
En ma qualité de secrétaire général de l'OTAN, je suis très fier de ce que nos travaux sur la défense antimissile donnent comme image de l'Alliance ; nous sommes déterminés dans nos efforts pour protéger nos pays et nous avons du personnel hautement qualifié qui a conçu et construit et qui maintenant exploite certaines des technologies les plus avancées du monde pour assurer notre sécurité.
Notre réussite témoigne aussi de la valeur du travail d'équipe entre les deux rives de l'Atlantique, et elle prouve que nous nous adaptons à un avenir incertain et que nous voulons, en tant qu'alliance de vingt-huit pays, investir dans notre défense collective.
Nous ne pouvons pas savoir avec certitude quels défis nous attendent. Les soixante-sept ans d'histoire de l'OTAN nous l'ont bien montré. Nous avons bien vu aussi qu'il importe d'être préparés à défendre nos pays contre toute menace à tout moment. À cet égard, la cérémonie de cette semaine à Deveselu et le début des travaux à Redzikowo représentent d'importants pas en avant.
Jens Stoltenberg est le secrétaire général de l'OTAN. Cette tribune a été publiée dans le journal roumain Adevărul et dans le journal polonais Gazeta Wyborcza le jeudi 12 mai 2016.