Rencontre avec l’équipage du New York, ce navire américain bâti en mémoire des victimes du 11-Septembre

  • 10 Sep. 2021 -
  • |
  • Mis à jour le: 14 Sep. 2021 08:04

Le New York n’est pas un navire comme les autres : moitié bâtiment de transport amphibie de chalands de débarquement et de personnel (LPD) appuyant les opérations de la marine des États-Unis à travers le monde, et moitié musée vivant à la mémoire des victimes des attentats du 11-Septembre. Il renferme des dizaines de petits objets commémoratifs – casque de sapeur-pompier, plaque du métro de New York, etc. –, et 7,5 tonnes d’acier récupéré du World Trade Center ont été fondues dans sa proue.

L'équipage se rappelle chaque jour l’héritage que préserve cet étonnant navire, ainsi que l’engagement solennellement pris de ne jamais oublier, comme le dit la devise du navire (« Never Forget »).

Rencontre avec le lieutenant Clay Edinger, l’aumônier qui rend un hommage quotidien aux personnes disparues


Photo reproduite avec l’aimable autorisation de la marine des États-Unis

Le lieutenant Clay Edinger est l’aumônier du New York: il offre à bord un soutien spirituel aux marins et aux marines. Sa journée typique consiste à discuter avec les responsables du navire et à écouter leurs préoccupations, ainsi qu’à aller trouver les marins sur leur lieu de travail et à prendre de leurs nouvelles. Lorsque le navire est en mer, l’aumônier perpétue chaque jour une tradition, celle de rendre hommage à l’une des victimes du 11-Septembre au cours de la prière du soir diffusée par le système d'annonce par haut-parleurs.

« À ma connaissance, c’est le premier aumônier du New York qui a instauré cette tradition », indique M. Edinger, avant d'ajouter : « On a à bord un registre contenant une courte biographie ou note nécrologique de chaque victime ; on le lit page par page. Les informations que je partage sont celles qui, je l’espère, donnent à l’équipage matière à méditer – qu'il s’agisse de la fidélité d'une personne qui faisait partie d'une équipe, de la grâce d’une mère ou d’un père, ou encore de quelques notes amusantes nous rappelant qu’il est normal de rire. J’essaie aussi de m’en inspirer pour la prière que je fais ensuite ».

Comme la tradition n’est perpétuée que lorsque le navire est en mer, seul un tiers du registre environ a déjà été lu (le New York navigue depuis 2008). Le récit de la vie des personnes disparues – qui n’est pas seulement biographique, mais contient aussi des informations sur leurs passe-temps, leurs passions ou leurs amours – trouve souvent un écho auprès des membres de l’équipage et les aide à se rappeler pourquoi ils ont décidé de servir leur pays.

« De nombreux marins m’ont dit qu’une histoire que je leur avais racontée les avait personnellement marqués », relate l’aumônier. « J’apprécie vraiment de pouvoir rendre hommage aux personnes disparues et, comme on le dit ici, de ne jamais oublier. »

Le lieutenant Edinger – ou « Chaps » (diminutif du terme anglais « aumônier ») comme l’appelle l’équipage – se souvient de ce qu’il a vécu le 11 septembre 2001, lorsqu'il était en dernière année d’université et a appris la nouvelle des attentats entre deux cours.

« Je me souviens m’être arrêté au milieu du dortoir et avoir entendu quelqu’un prononcer les mots « bombe » et « World Trade Center », se rappelle-t-il. « J'ai pris mon ordinateur pour tenter de savoir ce qui se passait, mais tous les sites d'information étaient saturés, si bien que je n’ai rien pu trouver. Lorsque nous avons rejoint l’une des salles communes pour voir ce que diffusaient les chaînes de télévision, nous n’en croyions pas nos yeux.... Je me souviens être allé en cours d’histoire du Moyen-Orient plus tard dans la semaine et avoir soudainement discuté de l’actualité au Moyen-Orient. »

S'il était contractuellement prévu que Clay Edinger rejoigne le corps des marines des États-Unis (initialement comme officier du génie de combat) après l’obtention de son diplôme, les événements du 11-Septembre et les jours qui ont suivi – et notamment les actes héroïques des innombrables personnes qui ont sacrifié leur vie pour en sauver d'autres – n’ont fait que renforcer sa conviction de vouloir servir son pays.

« La personne dont l'histoire m’a le plus marqué est le père Mychal Judge », raconte le lieutenant Edinger. « C’était l’un des prêtres et aumôniers des pompiers de la ville de New York. Et c’est aussi la première victime officielle des attentats terroristes. Après l’impact du premier avion, le père Judge s’est précipité vers le hall de la tour Nord, priant pour ceux dont le corps gisait à même la rue. Il a été frappé par un débris de la tour Sud lorsque celle-ci s’est effondrée. Sa photo est affichée dans la chapelle du New York ».

Le lieutenant Edinger perpétue ce même esprit de service lorsqu’il officie devant les marins et les marines dans la chapelle du New York, ou lorsqu'il se trouve ailleurs sur le navire – qu’il aille rendre visite à l'équipe de surveillance de nuit sur le pont et observe la vaste obscurité silencieuse des océans, ou qu’il passe un hiver (très froid) en Norvège aux côtés de ressortissants d’autres pays de l’Alliance.

Rencontre avec le matelot Gianna Curcio, une New-Yorkaise née après le 11-Septembre


Photo prise par le deuxième classe spécialiste des communications de masse Vanessa C. Behrend

Sachant l’histoire particulière du New York, il n’est pas surprenant que de nombreux New-Yorkais aient choisi de servir à bord du navire qui porte le nom de l’État dont ils sont originaires. C’est notamment le cas de Gianna Curcio, matelot venant de Staten Island dont l’histoire personnelle est liée au 11-Septembre.

« Je n’étais pas encore née », raconte Curcio, 18 ans, au sujet des attentats. « Mais ma mère travaillait à l'intérieur de la Bourse de New York lorsque les tours se sont écroulées sur le bâtiment, l’écrasant et lui faisant perdre, deux mois plus tard, les premiers jumeaux qu’elle attendait ».

Malgré cette terrible expérience, sa mère s’est pleinement rétablie et a donné naissance à deux autres jumeaux un peu plus d’un an plus tard : Curcio et son frère.

« Cela me montre à quel point ma mère a été forte », raconte Curcio. « Certaines femmes auraient pu laisser tomber après avoir perdu un enfant, mais ma mère n’a pas abandonné après en avoir perdu deux. On pourrait penser qu’elle n’aurait pas voulu retourner en ville, mais elle l’a fait et elle y travaille encore aujourd'hui. »1

Curcio s’est engagée dans la marine des États-Unis peu après son dix-huitième anniversaire, inspirée aussi bien par sa mère que par son père, qu’elle décrit comme les « personnes les plus courageuses qu’[elle] connaisse ».

« Servir dans la marine signifie beaucoup pour moi », dit-elle. « Cela signifie que je fais partie des 1 % de gens qui décident de rejoindre l’armée, de servir leur pays et de se battre pour leur peuple ».

Qu’il soit chargé de la surveillance de la sécurité ou de la maintenance du navire, le matelot Curcio est fier de tous les efforts qu’il déploie à l’appui de la mission du New York, et il est reconnaissant du rôle qu’il joue dans la perpétuation des traditions du navire.

« Cela me rend humble de servir à bord d'un navire qui bat pavillon new-yorkais et qui symbolise la force ».

L’OTAN célèbre le 20e anniversaire des attentats terroristes du 11-Septembre. C'est à la suite de ces attentats que l'OTAN a invoqué l'article 5 du Traité de Washington pour la première fois de son histoire, exprimant ainsi sa solidarité avec les États-Unis et leur fournissant ultérieurement un soutien opérationnel. Pour en savoir plus sur la défense collective et l'article 5 après les attentats du 11-Septembre, cliquez ici..

  1. Cette citation est tirée d’un article du blog d'information de la marine des États-Unis.