L’OTAN et la science : focus sur le système de commandement de nouvelle génération pour la gestion des incidents

  • 09 Dec. 2020 -
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  • Mis à jour le: 09 Dec. 2020 10:01

L’OTAN et la science : focus sur le système de commandement de nouvelle génération pour la gestion des incidents

Entretien avec le scientifique Gregory Hogan

Lieu : Podgorica, Monténégro

Intitulé du projet : Système de commandement de nouvelle génération pour la gestion des incidents (NICS)

Description du projet : Lorsque des primo-intervenants sont amenés à collaborer dans le cadre d'une force internationale de réponse à une catastrophe, ils doivent pouvoir partager rapidement des informations – entre militaires et civils, au-delà des frontières géographiques et linguistiques. L'OTAN a apporté son soutien à l'adaptation d'une plateforme logicielle dans les Balkans occidentaux qui permet d'échanger des cartes, des vidéos et des images en temps réel. Il s'agit du système de commandement de nouvelle génération pour la gestion des incidents, ou NICS en abrégé, qui a été mis au point par des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT), aux États-Unis. Le système, qui a déjà été utilisé dans la lutte contre les feux incontrôlés en Californie, est à présent déployé dans les Balkans occidentaux par l'intermédiaire de ce projet.

 

  1. De quelle manière le NICS a-t-il évolué depuis le début du partenariat entre le MIT et le programme pour la science au service de la paix et de la sécurité (programme SPS) de l'OTAN ?

    À l'origine, le NICS avait été pensé pour être utilisé aux fins de la réponse et de la coordination en temps réel face à des feux de végétation à grande échelle, sur le modèle du système américain de commandement pour la gestion des incidents (ICS). Ce système utilise un format souple pour le partage de l'information, et les travaux que nous avons menés sur un ensemble plus diversifié d'incidents avec les pays participant au projet nous ont permis d'élargir le champ d'utilisation du NICS à d'autres situations que les feux de végétation. Celui ci contribue désormais véritablement à répondre à tout type de danger, dans n'importe quel pays.

    Le NICS a été conçu au moyen de technologies libres. Lorsque nous avons débuté notre coopération avec le programme SPS de l'OTAN, la technologie d'authentification utilisée par le NICS n'était plus prise en charge par la communauté des logiciels libres. Nous en avons profité pour réfléchir à la manière dont nous assurons la sécurité du système et au choix de la technologie qui permettrait de répondre au mieux aux besoins et aux exigences de la communauté d'utilisateurs au sens large. Cette démarche nous a permis d'améliorer considérablement notre stratégie d'authentification.
     
  2. Quel est l'un des principaux défis ou obstacles que vous avez dû surmonter pour adapter cette technologie à différentes situations et à différents pays ?

    L'un des plus grands défis consiste à configurer le système de sorte qu'il puisse fonctionner de manière légèrement différente selon les pays sans pour autant devenir plus complexe. Il s'agit par exemple d'instaurer des contrôles d'accès différents pour certaines fonctionnalités et de disposer de différents modes de visualisation des données afin de répondre aux besoins de chaque pays. Notre objectif est de fournir aux quatre pays des Balkans occidentaux qui participent au projet (Bosnie Herzégovine, Croatie, Monténégro et Macédoine du Nord) un seul et même système simplifié permettant de répondre à leurs besoins respectifs de manière simple et durable.
     
  3. Que pouvez vous nous dire au sujet des tests qui ont été menés dans le cadre d'exercices sur le terrain dans les Balkans occidentaux ?

    Les exercices du Centre euro-atlantique de coordination des réactions en cas de catastrophe (EADRCC) nous ont offert de formidables occasions de tester les capacités du NICS avec différentes équipes d'intervention et différents pays. Nous avons abordé chaque exercice avec minutie, en définissant clairement nos objectifs et les résultats que nous espérions obtenir.
     

    En 2017, en Bosnie-Herzégovine, nous avons d’abord travaillé dans l’ombre des intervenants : ceux-ci s’acquittaient de leurs tâches comme à leur habitude, mais des utilisateurs du NICS accompagnaient chaque équipe d’intervention afin de collecter des informations, d’en assurer le suivi et de faire rapport au commandement pour la gestion des incidents. Cette manière de procéder nous a permis de nous rendre compte de ce qui pouvait être raisonnablement accompli au vu des tâches à effectuer.

    L’édition 2017 de l’exercice de l’EADRCC a servi de base aux tests que nous avons effectués l’année suivante en Serbie, lors desquels les intervenants ont utilisé eux-mêmes l’application mobile du NICS pour faire remonter des informations (sous la forme d’images, de messages ou encore de balises cartographiques) depuis le terrain. Les trois équipes qui participaient à l’exercice s’occupaient chacune d’un domaine de compétence : CBRN (chimique, biologique, radiologique et nucléaire), sauvetage en milieu aquatique, et recherche et sauvetage en milieu urbain (USAR). En tentant de les localiser sur la carte, nous nous sommes rapidement rendu compte qu’il n’était pas aisé de distinguer ces équipes les unes des autres. C’est de ce constat qu’est née l’une des fonctionnalités les plus intéressantes du NICS, à savoir les flux de données de géolocalisation personnalisés. Les utilisateurs du NICS peuvent à présent créer et personnaliser des flux pour suivre un nombre quelconque de personnes. Chaque équipe se voit attribuer un marqueur unique et devient géolocalisable. Ces flux donnent la position des équipes en temps réel et peuvent être partagés avec d’autres systèmes d'information géographique (SIG) tels que Google Earth.
     

  4. Le NICS peut il également être utilisé pour coordonner la réponse à la pandémie de COVID 19 ?

    Absolument ! La Macédoine du Nord a rapidement adapté le système à ses besoins et s'en sert afin de coordonner sa propre réponse à la crise liée à la COVID 19 et de fournir à la population des conseils et des informations en temps réel. On trouvera ici davantage d'informations sur l'adoption du NICS par la Macédoine du Nord à l'appui de sa réponse à la COVID 19.

    Une fonctionnalité similaire à celle des flux de données de géolocalisation, qui avait été conçue à la suite de l'exercice mené en Serbie, est celle qui permet aux utilisateurs du NICS de créer des espaces de collaboration, qui sont en fait des cartes personnalisées. Dans le cas de la réponse à la COVID 19, un espace de collaboration peut renseigner les emplacements de sites de dépistage et de zones placées en quarantaine, ainsi que d'autres informations utiles. Ces cartes peuvent ensuite être publiées sur des sites web accessibles au public. Ainsi, dès que des informations actualisées parviennent aux professionnels de la gestion de crise, les utilisateurs du NICS peuvent mettre à jour la carte créée dans l'espace de collaboration, et les informations publiées sur un site web public deviennent immédiatement accessibles au plus grand nombre.
     
  5. Envisagez vous d'apporter des innovations au NICS à l'avenir ? Dans quelle direction souhaiteriez vous voir la technologie évoluer en vue de répondre aux futurs besoins en matière de réponse aux situations d'urgence ?

    Il y a encore beaucoup à faire, en collaboration avec d'autres organismes d'intervention, au niveau du partage et de l'intégration des données dans des systèmes existants afin de permettre une utilisation plus efficace des ressources, un accès immédiat à l'information et l'automatisation de processus manuels.

 

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