Annexe 'Ciel ouvert' - Elements de base

  • 14 Dec. 1989 - 15 Dec. 1989
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  • Mis à jour le: 04 Nov. 2008 20:59

I. INTRODUCTION

  1. Le 12 mai 1989, le président Bush proposait l'instauration d'un régime dit 'ciel ouvert', par lequel les participants accepteraient d'ouvrir mutuellement leur espace aérien pour permettre le survol de leur territoire afin de renforcer ainsi la confiance et la transparence en ce qui concerne leurs activités militaires.

    Cette proposition reprenait en l'élargissant un concept avancé dans les années 50, mais qui n'avait pu trouver d'application pratique parce que le climat des relations internationales de l'époque n'y était pas favorable.

    Aujourd'hui, cette nouvelle initiative s'inscrit dans un contexte très différent : en effet, la transparence devient un thème central des relations Est-Ouest et ces dernières années ont été marquées par des avancées importantes dans le domaine des mesures de confiance et celui de la maîtrise des armements.

  2. Les dispositions prévues en matière de notification et d'observation d'activités militaires par l'Acte final d'Helsinki ont été améliorées et rendues obligatoires par l'Accord de Stockholm, conclu dans le cadre de la CDE en 1986.

    S'agissant de la maîtrise des armements, en 1987, le Traité sur les forces nucléaires intermédiaires a constitué, mis à part son objet propre, un précédent très important par l'ampleur de son dispositif de vérification.

    Tout laisse penser aujourd'hui que d'autres progrès encore plus spectaculaires devraient être réalisés dans des délais rapprochés. A Vienne en particulier, a été engagée une double démarche : il s'agit d'une part, d'approfondir encore les mesures de confiance et de transparence entre les 35 pays de la CSCE et, d'autre part, de parvenir à un accord sans précédent sur l'élimination de grandes quantités d'armements conventionnels entre les pays de l'Alliance atlantique et ceux de l'Organisation du Traité de Varsovie.

    On s'attend par ailleurs à des développements importants dans d'autres secteurs du désarmement, en particulier dans le domaine chimique, ainsi que dans celui des négociations stratégiques soviéto-américaines.

  3. Tous ces accords comporteront bien évidemment leur régime propre de vérification, celui-ci ayant souvent un caractère très intrusif. En outre, aux dispositions spécifiques prévues par chaque traité en matière de vérification, s'ajouteront les moyens habituels dont peuvent disposer les Etats pour s'assurer du respect des accords (moyens techniques nationaux).

    Il apparaît cependant utile, en particulier dans le contexte actuel d'amélioration des relations Est-Ouest, de réfléchir également à d'autres possibilités de créer un contexte général favorable aux efforts entrepris en matière de confiance et de désarmement.

    Dans ce contexte, le concept du 'ciel ouvert' a une valeur toute particulière. L'acceptation par un pays d'tre survolé représente en soi un acte politique très important, qui manifeste en effet sa disponibilité à l'ouverture ; d'autre part, l'inspection aérienne constitue un moyen de vérification particulièrement efficace, parallèlement à la transparence générale des activités militaires évoquée plus haut.

    Cette double caractéristique d'un régime 'ciel ouvert' ferait de ce dernier un complément précieux aux efforts actuellement poursuivis au plan Est-Ouest, principalement dans le contexte des négociations de Vienne, mais aussi en relation avec d'autres entreprises de désarmement (START, désarmement chimique).

    Il paraîtrait souhaitable de faire maintenant porter l'accent sur la région européenne, en incluant aussi l'ensemble des territoires de l'Union soviétique, des Etats-Unis et du Canada. De la même façon, nous serons prêts à prendre en considération, en temps opportun, le désir de tout autre pays européen de participer au régime 'ciel ouvert'. Cet élément pourrait être complémentaire de leurs efforts en vue d'accroitre la confiance et de limiter les armements conventionnels, et il serait conforme aux objectifs de ces négociations.

  4. A cette fin, le régime 'ciel ouvert' devrait suivre les grandes lignes ci-après :
    • l'engagement des parties à plus de transparence par le moyen de survols aériens sur la totalité de leur territoire national, en principe sans autres limitations que celles imposées par la sécurité des vols ou celles que prescrit le droit international ;
    • la possibilité pour les participants d'effectuer de tels vols d'observation sur une base nationale ou de façon conjointe avec leurs alliés ;
    • l'engagement de toutes les parties à conduire et à recevoir de tels vols d'observation sur la base de quotas nationaux ;
    • l'établissement de procédures agréées destinées à garantir à la fois la transparence et la sécurité des vols ;
    • la possibilité pour les parties d'utiliser le résultat de tels survols pour accroître la transparence des activités militaires et pour assurer le respect des mesures de contrôle des armements, actuelles ou à venir.

II. OBJET

L'objet principal du 'ciel ouvert' est d'encourager une transparence réciproque de la part des Etats participants et de permettre l'observation des activités militaires qui se déroulent sur leurs territoires respectifs, ainsi que des installations militaires qui s'y trouvent, renforçant ainsi la confiance et la sécurité. Le 'ciel ouvert' peut permettre d'atteindre ces objectifs comme complément à la fois des moyens techniques nationaux de collecte de données et des dispositions concernant l'échange d'informations et la vérification établies par les accords actuels et futurs de maîtrise des armements.

III. PARTICIPATION ET CHAMP D'APPLICATION

Initialement, peuvent participer au régime 'ciel ouvert' tous les membres de l'Alliance atlantique et de l'Organisation du Traité de Varsovie. Tous les territoires des participants en Amérique du Nord et en Asie, de même qu'en Europe, seront inclus.

IV. QUOTAS

  1. . La 'comptabilité' du régime 'ciel ouvert' se fondera sur les quotas qui limitent le nombre des survols. Les quotas seront fixés d'après la taille géographique des pays participants. La durée des vols peut également être limitée en fonction de la taille géographique. Pour les grands pays, le quota devrait permettre plusieurs vols par mois au-dessus de leur territoire. Toutes les parties auront le droit de participer à de tels vols d'observation sur une base nationale, soit individuellement, soit conjointement avec leurs alliés.
  2. La mise en application effective d'un système de quota suppose qu'il soit entendu qu'un pays n'effectuera pas de vols au-dessus du territoire d'un autre pays appartenant à la même alliance.
  3. Le total des quotas pour les Etats participants devrait être fixé de telle sorte qu'il y ait correspondance approximative entre les totaux fixés pour l'OTAN et l'Organisation du Traité de Varsovie et, dans ces totaux, pour l'URSS et les pays nord-américains de l'OTAN.
  4. Chaque participant, quelle que soit la dimension de son territoire, sera tenu d'accepter un quota d'au moins un survol par trimestre.
  5. Les pays de moindre superficie, c'est-à-dire ceux auxquels s'applique le quota minimal, peuvent se regrouper en une seule unité territoriale, dans le but d'accueillir les survols prévus au titre du régime 'ciel ouvert', et accepter conjointement le quota correspondant à la superficie terrestre totale de ladite unité territoriale.

V. AVIONS

Le ou les pays procédant à un vol d'observation utiliseront des aéronefs civils ou militaires non armés, à voiture fixe, capables de transporter des observateurs du pays hôte.

VI. CAPTEURS

De nombreux types de capteurs pourront étre utilisés, à une exception importante près : il sera interdit d'utiliser des dispositifs servant à la collecte et à l'enregistrement de renseignements sur les émissions électromagnétiques. Une liste des catégories et types de capteurs interdits sera établie d'un commun accord par les Etats participants et sera actualisée chaque année.

VII. COOPERATION TECHNIQUE INTERALLIEE

Les membres d'une même alliance pourront arrêter entre eux des dispositions multilatérales ou bilatérales concernant le partage des avions ou des capteurs et l'organisation de survols conjoints.

VIII. DEROULEMENT DE LA MISSION

  1. Les avions commenceront leurs vols d'observation à partir de points d'entrée agréés et désignés au préalable, et ils les termineront à des points de sortie également désignés au préalable ; les points d'entrée et de sortie prévus pour chaque Etat participant seront fixés par celui-ci et énumérés dans une annexe à l'accord.
  2. Le pays hôte mettra à disposition le genre d'équipements de soutien, de services techniques et d'installations normalement fournis aux avions commerciaux. Des mesures seront prises pour que les avions d'observation puissent faire des escales de ravitaillement.
  3. L'Etat procédant à l'observation donnera notification de l'arrivée de ses représentants à un point d'entrée avec un préavis de 16 heures. Toutefois, si le point d'entrée se trouve sur une côte ou sur une frontière et qu'aucune portion du territoire de l'Etat d'accueil ne doit être survolée avant l'arrivée audit point d'entrée, ce délai pourra être raccourci.
  4. L'équipage de l'avion d'observation devra déposer un plan de vol dans les six heures qui suivront son arrivée au point d'entrée.
  5. Après l'arrivée, et une fois le plan de vol déposé, un délai de 24 heures devra être respecté avant le survol. Ce délai doit permettre de s'assurer que la route prévue ne pose aucun problème de sécurité aérienne et de fournir les services techniques nécessaires. Pendant cette période, on se livrera à une inspection poussée des avions (sans toutefois leur faire subir de dégâts matériels), de façon à vérifier qu'ils ne sont pas équipés de capteurs ou d'enregistreurs non autorisés.
  6. . Avant le vol, des contrôleurs du pays hôte pourront embarquer à bord de l'avion d'observation. Une fois en vol, ils s'assureront que l'équipage suit le plan de vol, et ils contrôleront le fonctionnement des capteurs. Ils auront toute liberté de mouvement à l'intérieur de l'avion.
  7. Le vol se fera depuis le point d'entrée agréé jusqu'à un point de sortie également agréé ; les observateurs du pays hôte quitteront alors l'avion. Les points d'entrée et de sortie peuvent être les mêmes. Ils sera interdit de s'attarder au-dessus d'un même emplacement. Les appareils ne seront pas tenus d'emprunter exclusivement les couloirs aériens réservés au trafic commercial. En principe, on pourra uniquement leur interdire de traverser l'espace aérien dont la fermeture à tous autres avions aura été annoncée publiquement, pour des raisons de sécurité aérienne valables. On peut inscrire au nombre de ces raisons les circonstances particulières qui font courir un danger extrême à l'avion et à ses occupants. Chaque pays prendra les dispositions voulues pour que les annonces publiques concernant ces portions dangereuses de l'espace aérien soient largement et rapidement diffusées ; chaque pays établira une liste, à annexer à l'accord, des lieux où peuvent être consultées ces annonces publiques. Les altitudes minimales fixées pour de tels vols peuvent varier en fonction de considérations de sécurité aérienne. Le degré de contrôle exercé depuis le sol sur les avions sera déterminé à l'avance par accord entre les parties, selon des règles compatibles telles que celles que reconnaît l'OACI. Dans la mise en pratique de ces considérations et procédures, on partira du postulat qu'il faut encourager le plus grand degré de transparence compatible avec la sécurité aérienne.
  8. L'application du régime 'ciel ouvert' se fera sans préjudice pour les Etats autres que les Etats participants.

IX. RESULTATS DE LA MISSION

Les membres d'une mme alliance conviendront ensemble de la façon dont il y a lieu de partager les renseignements recueillis lors des survols effectués en vertu du régime 'ciel ouvert'. Chaque partie décidera de la manière dont elle entend exploiter ces renseignements.

X. VOLS DE TRANSIT

Si un avion survole un Etat participant pour se rendre dans l'Etat participant où doit être effectué un vol de surveillance, ce vol de transit ne sera pas défalqué du quota de l'Etat survolé, pourvu que l'avion emprunte exclusivement les couloirs de circulation réservés au trafic civil.

XI. TYPE D'ACCORD

Le régime 'ciel ouvert' sera instauré par le biais d'un traité multilatéral conclu entre les parties concernées.

XII. ORGANISME CONSULTATIF POUR LE REGIME 'CIEL OUVERT'

Afin de promouvoir les objectifs et la mise en application du régime 'ciel ouvert', les Etats participants établiront un organisme chargé de résoudre les questions liées au respect des dispositions du traité et d'adopter toutes mesures pouvant être nécessaires pour améliorer l'efficacité du régime.