NATO 2099 : l’avenir de l’OTAN imaginé dans un roman graphique

  • 18 Jul. 2024 -
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  • Mis à jour le: 29 Jul. 2024 11:47

L’année 2024 est celle du 75e anniversaire de l’OTAN. Pour marquer le coup, le Collège de défense de l’OTAN (NDC) a imaginé ce à quoi l’OTAN — et le monde — pourrait ressembler en 2099, soit dans 75 ans.

NATO 2099 graphic novel imagines the future of the Alliance

L’histoire racontée dans le roman graphique NATO 2099 prend place dans un monde marqué par une série d’attaques maritimes planétaires dévastatrices intervenues dans les années 2050. Au cours de ces Sea Wars, de petits groupes d’acteurs malveillants se sont servis de drones pour faire exploser les navires de guerre de forces navales nationales, pour prendre en otage des navires de croisière contre rançon et pour commettre des actes terroristes contre des civils. Après s’être alliés pour vaincre ces réseaux de groupes terroristes et de milices privées, les gouvernements du monde entier ont signé un traité qui a permis de maintenir la paix pendant presque 40 ans. Mais aujourd’hui, en 2099, une nouvelle menace se profile, cette fois-ci dans l’espace…

Composition du roman

En octobre 2023, le Collège de défense de l’OTAN (NDC) a lancé, dans tous les pays de l’Alliance, un appel à auteurs, invitant ces derniers à imaginer, dans un récit fictionnel, à quoi ressemblerait l’OTAN en 2099, soit 75 ans après son 75e anniversaire.

Début 2024, le NDC avait reçu des récits d’auteurs de science-fiction originaires de tous les pays de l’Alliance et également de certains pays partenaires. Après lecture, quatre thèmes récurrents sont clairement ressortis des différentes productions : l’OTAN dans l’espace, les effets du changement climatique sur la sécurité et la défense, le recours à l’intelligence artificielle (IA) dans le domaine militaire et la nomination d’une femme à la tête de l’OTAN.

Dans les mois qui ont suivi, trois auteurs principaux de l’équipe éditoriale du NDC se sont attelés à rassembler ces quatre thèmes clés dans un même récit de fiction, en fusionnant les productions des 34 auteurs participants. Ils ont ensuite collaboré avec l’artiste Jaouen Salaün, assisté par Nicolas Minvielle et Roxane Montfort, pour finaliser le roman, enrichi de centaines d’illustrations.

Ils ont également décidé de publier certains des récits envoyés par les auteurs participants à titre d'accroche. À cet effet, le 4 avril 2024, jour du 75e anniversaire de l’Organisation, le NDC a publié une anthologie de science-fiction (NATO 2099 - The science fiction anthology) composée de 15 histoires rassemblant une multitude d’éléments imaginaires (qui reflètent le point de vue des auteurs, pas celui de l’OTAN ni du NDC). Parmi ces éléments, on retrouve notamment :

  • des armes télépathiques ;
  • une ville flottant sur l’océan construite grâce aux bénéfices tirés de l’exploitation de l’eau douce des icebergs ;
  • une IA « voyou » conçue à l’origine pour préserver la conscience du dirigeant de la Chine ;
  • l’adhésion du Japon, de l’Australie et d’autres pays de l’Indo-Pacifique à l’OTAN ;
  • l’adhésion à l’OTAN d’un État-nation sans frontière dirigé par une IA ;
  • une IA dans le rôle de secrétaire général de l’OTAN ;
  • un sommet de l’OTAN à Kyïv (Ukraine) en 2099 ;
  • une Russie qui cherche à s’allier à l’OTAN, la Chine ayant pris pour cible l’est de la Sibérie et ses ressources ;
  • des bibliothèques devenues des cibles militaires très convoitées, car elles servent désormais à entraîner les IA ;
  • du thé de synthèse, des sauterelles soufflées et d’autres aliments exotiques ;
  • une longue ode à l’histoire passée et future de l’OTAN, sous forme de poème.
Extrait du roman graphique NATO 2099 © Collège de défense de l’OTAN

Extrait du roman graphique NATO 2099 © Collège de défense de l’OTAN

La science-fiction à des fins de planification de défense

Le roman graphique NATO 2099 repose sur deux sources d’inspiration majeures.

La première est une compilation d’essais futuristes produite par la France lorsqu’elle occupait la présidence du Conseil de l’UE (du 1er janvier au 30 juin 2022), chacun de ces essais provenant d’un pays membre de l’UE différent.

La seconde est le programme Red Team Défense, géré par l’Agence française de l’innovation de défense depuis 2019. La Red Team est composée d’auteur(e)s et de scénaristes de science-fiction travaillant étroitement avec des experts scientifiques et militaires. Elle a pour mission d’imaginer les menaces pouvant directement mettre en danger la France et ses intérêts. Elle doit notamment s'employer à anticiper les aspects technologiques, économiques, sociétaux et environnementaux de l’avenir susceptibles d'engendrer des potentiels de conflictualité à l’horizon 2030-2060, de façon à ce que les forces armées puissent se préparer à relever de tels défis.

D’autres Alliés ont également eu recours à la science-fiction à des fins de planification dans les domaines de la sécurité et de la défense. En 2005, le ministère de la Défense nationale du Canada a publié un roman de science-fiction, intitulé Crisis in Zefra, dans lequel les membres d’une force de maintien de la paix canadienne se retrouvent confrontés à de nouvelles menaces et à des technologies d’un genre nouveau alors qu’ils surveillent les élections dans un pays africain imaginaire en l’an 2025. De son côté, le commandement responsable de l’instruction et de la doctrine (TRADOC) de l’armée de terre des États-Unis a lancé l’initiative « Mad Scientist Laboratory » en 2016, laquelle est à l’origine d’un recueil de récits de science-fiction sur la guerre du futur, intitulé Science Fiction: Visioning the Future of Warfare 2030-2050. Le Projekt Cassandra, financé par le ministère fédéral allemand de la Défense entre 2017 et 2019, avait quant à lui pour objectif d’utiliser la littérature comme un « système d’alerte précoce », l'idée étant de ne pas être pris au dépourvu par des événements « imprévisibles » pourtant déjà décrits dans des œuvres littéraires régionales. D’autres initiatives similaires ont également été lancées dans d’autres pays de l’Alliance.

Extrait du roman graphique NATO 2099 © Collège de défense de l’OTAN

Extrait du roman graphique NATO 2099 © Collège de défense de l’OTAN

L’OTAN de demain, comme celle d’aujourd’hui, subsiste grâce à la résilience

Prévoir l’avenir peut s'avérer extrêmement dystopique, en particulier si l’on tient compte des effets catastrophiques du changement climatique et de l’utilisation des nouvelles technologies par des régimes autoritaires. L’équipe éditoriale du NDC a donc été surprise par le ton généralement positif des productions reçues.

En effet, les auteurs imaginent un monde où la technologie de fusion est à l’origine d’un système énergétique mondial durable et où l’extraction du carbone dans l’atmosphère constitue un secteur économique important. Mais aussi un monde où il est possible de trouver des solutions diplomatiques avec d’anciens adversaires, y compris de s’accorder sur un désarmement nucléaire total, et où le reboisement et la restauration de l’environnement deviennent la priorité des armées mondiales, lesquelles ont remplacé le fusil par la houe et les balles par des graines. Malgré les défis qui se profilent à l’horizon, la vision dominante qui ressort de ces récits sur l’OTAN en 2099 est celle de l’espoir.

Bien entendu, nombre de ces histoires dépeignent également des événements négatifs, tels que la tentative d’invasion de Taïwan ou le retrait des États-Unis de l’OTAN (puis leur réadhésion). Mais dans l’ensemble, l'OTAN de l’an 2099, telle qu’elle est décrite dans l’anthologie et dans le roman graphique, a résisté aux tempêtes et est devenue plus forte. En 2099, comme en 2024, les clés du succès de l’Organisation résident dans sa résilience, dans son unité face aux crises, quelles qu’elles soient, et dans sa capacité d’adaptation, qui lui permet de relever tous les nouveaux défis qui se présentent, et ce, dans tous les cas de figure, qu’ils aient déjà été envisagés ou non.