Les efforts déployés pour développer la dimension de genre dans les opérations dirigés par l'OTAN sont diversement appréciés

  • 23 Oct. 2013 -
  • |
  • Mis à jour le: 14 Nov. 2013 11:55

Selon les conclusions d'une revue indépendante, l'Alliance et ses partenaires d'opérations ont accompli des « progrès significatifs » dans la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l'ONU dans les opérations dirigées par l'OTAN en Afghanistan et au Kosovo – mais « la marge de progrès est importante ».

Members from the Afghan National Army female training brigade prepare to march off the Kabul Military Training Center parade square after receiving their graduation certificates on August 29, 2013 in Kabul, Afghanistan during Operation ATTENTION.  Photo: MCpl Frieda Van Putten, Canadian Armed Forces  Des membres de la brigade d’instruction féminine de l’Armée nationale afghane se préparent à quitter le terrain de rassemblement du Centre d'entraînement militaire de Kaboul (Afghanistan), après avoir reçu leur diplôme, le 29 août 2013, dans le cadre de l’opération Attention.      Photo : Cplc Frieda Van Putten, Forces armées canadiennes AT2013-0210-06

copyright : Canadian Armed Forces – F. Van Putten

La Revue des incidences pratiques de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l'ONU sur la conduite des opérations et des missions de l'OTAN a été commandée par les dirigeants des pays de l'Alliance au sommet de Chicago, en 2012. L'objectif était de faire le point sur les efforts engagés pour intégrer la dimension de genre dans la planification, la conduite et l'évaluation des opérations, et d'élaborer des recommandations pour renforcer les travaux futurs dans ce domaine.

« L'OTAN est l'une des premières organisations internationales à conduire une telle revue », indique le secrétaire général adjoint de l'OTAN pour les opérations, Stephen Evans. « Je rappellerai, et c'est un point essentiel, que la revue a été confiée à un organisme indépendant jugé fiable pour mener une évaluation critique des progrès et des réalisations accomplis à ce jour ».

Le Centre nordique pour les questions de genre dans les opérations militaires (implanté au Centre international des forces armées suédoises) a été identifié comme le partenaire de choix pour entreprendre tâche. Il a une expertise et une expérience reconnues dans ce domaine, et il a une bonne connaissance des structures, des processus et des opérations de l'OTAN.

Le Centre a accepté de conduire la revue en étroite coopération avec l'Agence suédoise de recherche pour la défense. Il a constitué une équipe internationale, composée d'analystes et de chercheurs expérimentés ayant des compétences dans l'analyse de la défense, la recherche sur les activités militaires, les évaluations, la recherche sur les questions de genre et les opérations dirigées par l’OTAN, ainsi qu'une parfaite connaissance de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l'ONU. Certains membres de l'équipe ont servi aux côtés des forces de l'OTAN en Afghanistan et au Kosovo, et ont une connaissance approfondie des activités et opérations militaires aux niveaux opératif et tactique.

Conduite de la revue


copyright NATO Training Mission AFG

L'équipe chargée de la revue s'est rendue sur le terrain, tant en Afghanistan qu'au Kosovo, là où des troupes dirigées par l'OTAN étaient déployées.  La Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) et la Force pour le Kosovo (KFOR) se caractérisent par des mandats différents, par des environnements de sécurité différents et changeants, et par des normes culturelles et sociales distinctes pour ce qui est des rôles et des relations entre hommes et femmes – aussi les deux missions constituent-elles une base appropriée pour l'étude de la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l'ONU.

« Nous avons tenté de dresser un aperçu global des opérations de l'OTAN, de leurs effets et de leurs incidences sur les communautés locales », indique Helené Lackenbauer, chef de l'équipe chargée de la revue.  « Au Kosovo, nous nous sommes rendus dans le nord (Mitrovica), dans le sud (Prizren) et dans la capitale, Pristina. Nous souhaitions couvrir des régions se caractérisant par des types de conflit différents et par une composition ethnique diversifiée. En Afghanistan, nous avons été confrontés à une grave situation de sécurité, et nous n'avons pu nous rendre qu'à Kaboul et dans deux provinces du nord (commandement régional Nord) ».

L'équipe a mené quelque 145 entretiens et rencontré près de 300 personnes, dont : du personnel militaire international (KFOR et FIAS) dans toutes les branches, fonctions et unités possibles ; des membres des forces de sécurité nationales (Force de sécurité du Kosovo et forces de sécurité nationales afghanes) ; du personnel de différentes missions de police internationales ; des membres des forces de police locales ; des représentants gouvernementaux et des conseillers internationaux ; des représentants d’organisations internationales, d'ambassades, d'organisations non gouvernementales internationales et locales,  d'organisations locales de la société civile ; et des populations locales, y compris des femmes, des hommes et des enfants.

Les incidences plus larges des opérations


copyright Austrian MOD

« Nous souhaitions plus particulièrement rencontrer des femmes et des hommes au niveau local, pour connaître leur point de vue quant à l'impact de la KFOR/FIAS sur leur vie et sur la situation de sécurité », ajoute Mme Lackenbauer. « Les rencontres avec des représentants de la société civile ont été particulièrement importantes, ceux-ci fournissant une aide et des services précieux à la population, en Afghanistan comme au Kosovo, et ayant une bonne connaissance de la situation ».

Mme Lackenbauer souligne que les habitants comme les représentants de la société civile insistent sur le fait que la FIAS et la KFOR aident à améliorer les conditions de sécurité, permettant ainsi aux services publics d'aider la population, notamment les femmes et les filles.  Elle est toutefois préoccupée par le fait qu'en Afghanistan, ces fragiles avancées pourraient disparaître, et elle souligne aussi l'importance de prendre des mesures de protection pour les femmes, en particulier dans les provinces où les insurgés restent présents et exercent une influence sur la population locale. 

« Je suis de tout cœur avec les Afghanes, qui s'angoissent pour leur avenir. Depuis 2001, leurs droits ont été renforcés et leur situation s'est améliorée, en ce qui concerne la santé, l'éducation, la liberté de circulation et la participation à la vie publique. Je crains vraiment un retour en arrière après 2014 », avertit‑elle.

« La communauté internationale doit rester déterminée à défendre les droits des femmes. Les femmes elles‑mêmes affirment que la communauté internationale est leur meilleur alliée, car elle peut faire pression sur le gouvernement afghan », ajoute-t-elle.

Évaluation de la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU

En écho aux conclusions de la revue, l'ambassadeur Evans souligne qu' « il ne fait aucun doute que les questions de genre sont pertinentes pour toutes les opérations militaires – celles-ci doivent tenir compte des besoins distincts des hommes, des femmes, des garçons et des filles en matière de sécurité.  C'est la clé de leur efficacité ».

« Il est intéressant de constater que l'opération en Afghanistan a aidé à sensibiliser davantage les troupes aux questions de genre et à l'importance que celles-ci revêtent pour les opérations militaires », fait observer Mme Lackenbauer. « La FIAS a plus prêté attention que la KFOR aux questions de genre et la situation des femmes. D'après moi, cela s'explique par les relations extrêmement cloisonnées entre hommes et femmes en Afghanistan, et leurs incidences sur le dispositif de protection des forces de la FIAS et sur la capacité de ces dernières à mener des opérations ».

L'ambassadeur Evans se félicite de ce que la revue reconnaît les « progrès significatifs » accomplis dans l'adoption des mécanismes et cadres d'orientation nécessaires, ainsi que dans l'intégration de la dimension de genre dans les opérations et missions dirigées par l'OTAN. « Mais il reste encore du chemin à parcourir », admet-il. « Les efforts doivent maintenant porter sur les questions pratiques. Nous devons nous assurer que l'intégration de la dimension de genre soit prise en compte dans toutes les phases de nos opérations – de la planification des opérations à leur conduite, en passant par l'évaluation des progrès », ajoute-t-il. « Il faut commencer par former et sensibiliser suffisamment nos forces, quel que soit leur niveau, aux questions de genre, de sorte qu'elles soient ainsi mieux équipées pour intégrer cette dimension dans leurs activités quotidiennes et dans la planification des missions ».

« Notre rôle doit toutefois se limiter à promouvoir la dimension de genre et la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l'ONU dans le secteur de la sécurité.  Hors de ce cadre, d'autres acteurs de la communauté internationale sont mieux placés pour s'acquitter de la tâche ». 

Mme Lackenbauer rappelle qu'il faut former, encore former et toujours former : « L'intégration de la dimension de genre reste contestée par certains officiers militaires, en dépit de tout ce que nous avons appris sur les incidences d'un conflit armé sur les femmes, les hommes, les garçons et les filles. Les questions de genre ne sont pas intégrées dans les plans d'état-major ; elles sont plutôt un élément ad hoc, qui ne se manifeste vraiment que lorsque quelqu'un est là pour les rappeler. La solution à ce problème passe par la formation et les exercices ».

L'OTAN a déjà pris des mesures pour remédier aux insuffisances recensées dans la revue. Les autorités militaires de l'OTAN ont élaboré un solide plan de mise en œuvre, qui indique précisément comment le secteur militaire tentera de donner suite aux recommandations de la revue. Ce plan a été entériné par les ministres de la Défense le 23 octobre 2013.

« Il ne fait aucun doute que les conclusions de la revue et la suite que leur donnent l'Organisation ainsi que chaque pays auront des répercussions sur la planification et la conduite de toute opération future de l'OTAN », conclut l'ambassadeur Evans.