La société cinématographique Simorgh propose des possibilités de formation et de carrière à de jeunes Afghans.

  • 29 Nov. 2011 -
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  • Mis à jour le: 13 Dec. 2011 14:30

Après la classe, une petite fille afghane dessine, étendue sur le sol du salon au milieu de ses crayons, sur fond de télévision allumée.

Elle trace avec application le portrait d'une femme : hijab, grands yeux et gentil sourire. Puis, visiblement mécontente du résultat, elle déchire la feuille et recommence. Elle refait encore et encore le même visage jusqu'à s'endormir en rêvant de la mère qu'elle a perdue. Son père rentre du travail et la trouve paisiblement allongée sur la moquette.

Cette scène touchante est tirée du court métrage afghan « Moi et ma mère », écrit par Halima Hasemi, scénariste pour Simorgh, une société cinématographique basée à Herat.

Fondée dans les années 60, l'industrie cinématographique afghane n'a cependant jamais connu l'essor de ses voisines Bollywood (en Inde) et Lollywood (au Pakistan).

Audience mondiale

Malgré tout, Simorgh a produit près de 100 œuvres (courts métrages, longs métrages et pièces de théâtre), qui ont été présentées à travers le monde. S'inscrivant dans la reconstruction culturelle du pays, elle met l'accent sur la participation des femmes afghanes. Par ailleurs, des représentants de Simorgh se sont déjà rendu en Inde et en Allemagne pour participer à des salons et des ateliers, une gageure quand on sait que la société fonctionne presque entièrement sur ses fonds propres.

« Dès le début, le cinéma m'a captivée », raconte Halima. « Mais lorsque j'ai commencé à travailler et que je me suis familiarisée avec ce milieu, ce qui m'a véritablement poussé à continuer, c'est de porter un regard sur notre société et faire connaître les problèmes des femmes. » Bien que ses films aient été projetés dans tout l'Afghanistan et chez le voisin iranien, Halima affirme qu'il y a peu d'argent à gagner dans le cinéma.

« Nous faisons des films à petit budget, car Simorgh n'a pas de gros moyens à y investir. Jusqu'à présent, la société a produit tous ses films sur ses fonds propres. Malheureusement, pour l'instant, nous n'avons reçu aucune aide de la part du gouvernement ou d'ONG pour ce type d'activités », explique Halima.

Développer les jeunes talents

La société Simorgh consacre une large part de ses ressources à la formation de jeunes hommes et femmes afghans à l'écriture, à l'interprétation et au montage. Pendant notre visite, il y a en classe une quinzaine de jeunes femmes occupées à séquencer leur premier court métrage à l'aide d'un logiciel informatique. Masooma, une apprentie scénariste, nous explique que la société est fière de pouvoir garder toutes les activités en interne.

« Une fois que nous avons fini d'écrire le scénario, nous commençons le tournage. Tout ce qui est en rapport avec le film, du montage à l'interprétation, est fait par des étudiants en cinéma que Simorgh a choisis. Ici, chacun doit être capable de tout faire par lui-même », affirme Masooma.

Défis financiers et politiques

Produire des films et faire du cinéma est toujours risqué, et pas simplement à cause de l'instabilité financière. Des objections contre certains films se sont élevées dans certains milieux conservateurs de la société afghane en particulier sur des questions sensibles telles que les droits des femmes. De plus, la création d'une industrie cinématographique n'est pas une priorité pour le gouvernement aux prises avec de nombreux autres défis. De ce fait, acteurs, scénaristes et réalisateurs sont logés à la même enseigne et doivent trouver de l'aide là où ils le peuvent, c'est-à-dire souvent essentiellement au près de leur famille.

« Votre premier fan, c'est vous, et le deuxième, c'est sera votre famille », affirme Housseine, un jeune acteur qui aime jouer les premiers rôles à l'écran. « Avec ce double soutien, tout le monde peut monter sur les planches. Mais il faudrait un troisième coup de pouce, celui du gouvernement. »

Les artistes comme lui espèrent qu'à l'avenir, le gouvernement sera en mesure de soutenir l'industrie cinématographique et théâtrale afghane balbutiante, mais pour l'instant, ils se tournent vers d'autres pays pour y trouver une source d'inspiration et imaginer comment la culture afghane pourrait évoluer si on lui donnait sa chance dans un pays pacifié.