Des OVNI marins
Ce disque de métal qui évolue sous l'eau et qui ressemble à une soucoupe volante, représente peut-être une avancée pour la protection de l'environnement et des moyens civils et militaires sous-marins. Il s'agit d'un petit engin, appelé véhicule sous-marin autonome (AUV) – ou drone sous-marin – servant de plateforme à un équipement sonar spécialisé, dans le cadre d'un projet de recherche mené par l'OTAN – le premier du genre.
Des scientifiques du Centre de recherche sous-marine de l'OTAN (NURC), basé à La Spezia (Italie), ont collaboré avec des compagnies pétrolières et d'autres partenaires afin de développer une technologie de sonar pouvant servir à empêcher les fuites dans les infrastructures sous-marines et à protéger les ports et les moyens militaires contre les mines. L'AUV est utilisé pour véhiculer le sonar à ouverture synthétique interférométrique (InSAS) sous la mer pendant plusieurs jours de suite, le but étant de collecter les données du milieu marin envoyées par des prototypes de capteurs placés à intervalles réguliers sur les fonds marins.
Grâce aux images prises pendant des semaines, des mois, voire des années, les scientifiques peuvent mesurer et détecter les plus petits changements qui se produisent dans le milieu marin – ceux-ci peuvent être causés par un glissement de terrain, l'érosion, les activités de pêche, d'extraction de pétrole ou de gaz, ou encore par des activités hostiles telles que des attaques terroristes.
« Par conséquent, l'InSAS peut être utilisé à des fins commerciales – comme la protection des infrastructures gazières et pétrolières ou celle de l'environnement – et militaires – notamment la protection des ports et des moyens militaires, et la détection de mines et d'IED marins », explique M. Edoardo Bovio, responsable du développement commercial au NURC.
Appréhender l'environnement marin
« Le projet permet la surveillance prolongée des fonds marins, dans des eaux peu profondes, le but étant de détecter d'éventuels changements bathymétriques du niveau de l'épaisseur du plancher océanique sur une période de temps donnée », ajoute M. Bovio.
L'équipement sonar spécial InSAS permet à la fois de traiter des images spatiales haute résolution et de procéder à des relevés bathymétriques précis en utilisant des réflecteurs spéciaux placés sur les fonds marins. Depuis 2008, il fait l'objet de tests dans un parc aquatique de la région des Cinque Terre (Italie). Les contours accidentés du littoral empêchent toute activité de pêche susceptible de gêner les mesures.
« L'AUV se déplace sous l'eau en suivant des itinéraires préétablis et en transmettant des signaux acoustiques de faible puissance à une fréquence élevée, de façon à ne pas perturber la vie aquatique », explique M. Bovio, un ingénieur électricien diplômé et expérimenté, qui a intégré le NURC en 1980. « En raison des capacités de navigation extrêmement fiables du véhicule, il est possible de répéter la mesure à intervalles réguliers (se déclinant en semaines, en mois ou en années) et de procéder à un enregistrement comparatif des images afin de détecter toute modification du milieu marin. »
Une conception novatrice
Les réflecteurs conçus par l'équipe du NURC, destinés à être placés au fond de la mer, ont une forme conique, ce qui les rend détectables dans toutes les directions par imagerie sonar. Même si l'équipe du projet, forte d'une vingtaine de membres, a rencontré des problèmes en amont – corrosion des câbles, difficultés au niveau du déploiement et de la récupération des réflecteurs – ces nouveaux réflecteurs coniques ont, depuis, fourni des mesures détaillées et précises de leur environnement. C’est la première fois que les fonds marins sont cartographiés et surveillés de cette façon.
Le succès de ce projet, qui a été financé par une importante compagnie pétrolière, confirme la place prépondérante des travaux du NURC dans les activités internationales de recherche sous-marine. « Le projet InSAS donne au NURC une excellente occasion de mettre en exergue et d'approfondir ses compétences de base en ce qui concerne les opérations à la mer, l'exploitation d'AUV pour les mesures acoustiques, le traitement des données acoustiques SAS et InSAS, et la conception de réflecteurs sonar dotés de caractéristiques spécifiques », fait remarquer M. Bovio. « Cette capacité inégalée a des applications dans de nombreux domaines tant civils que militaires. »
Secteur « science et technologie » de l'OTAN
Le NURC est l'un des organismes OTAN pour la science et la technologie, qui regroupe des scientifiques et des ingénieurs issus de tous les pays de l'Alliance et de ses partenaires afin qu'ils trouvent ensemble des solutions pour répondre, aujourd'hui et demain, aux urgences capacitaires de l'OTAN dans le domaine maritime.
« Le Centre, qui adapte régulièrement ses activités en fonction de l'évolution des besoins et des nouvelles technologies, met actuellement l'accent sur la robotique et le comportement de plateformes multiautonomes en milieu marin, et sur leur utilisation pour la guerre maritime – mais il s'agit de capacités qui concernent tous les domaines », explique le directeur du NURC, M. Dirk Tielbürger.