L'ambiance dans les rues
À Tripoli, des scènes de joie éclatent ça et là. Rien ne montre encore que les habitants de la capitale libyenne se lassent de leur liberté nouvellement acquise.
Cela fait près de trois semaines que la ville a été reprise aux forces de Kadhafi, et il ne faut pas aller bien loin le soir pour croiser des gens qui chantent et qui dansent encore, toujours vêtus du drapeau rouge, vert et noir de la révolution.
Il n'y a peut-être pas encore autant d'animation qu'avant dans les restaurants et les cafés de Tripoli, mais, au fur et à mesure des arrivages sporadiques de produits frais, les restaurants improvisent des menus, et la nouvelle des endroits qui sont ouverts se répand rapidement.
« Les magasins rouvrent leurs portes ; la situation devient plus calme, plus sûre ; il me semble qu'elle s'améliore », assure une femme sur la place principale de Tripoli. Son amie confie toutefois : « C'est tout de même un peu dangereux ; où qu'on aille, il y a des gens armés partout ».
Le désarmement pose clairement problème et, sur le plan de la sécurité, la structure fragmentée des différentes brigades du Conseil national de transition (CNT) risque à tout moment de compromettre les progrès observés jusqu'à présent. Le rétablissement des services de police figure au premier rang des priorités du conseil réuni en toute hâte à Tripoli.
Une nécessité : l'eau et l'électricité
Il est essentiel, pour un retour rapide à la normale, que les services d'électricité et d'eau soient vite rétablis. C'est ici que le choix de l'OTAN de ne pas s'en prendre aux infrastructures porte ses fruits.
Bien sûr, beaucoup reste encore à faire pour que la vie reprenne son cours normal à Tripoli. Le ramassage des ordures constitue un problème car la plupart des travailleurs de ce secteur étaient des étrangers et ont maintenant fui la ville. Si certains craignent de revenir, d'autres se sont déjà remis au travail. Il y a également ceux qui sont venus des pays arabes voisins ou de l'Afrique subsaharienne pour gagner leur vie en Libye dans les emplois ingrats dont les Libyens ne veulent pas.
À l'intérieur du complexe interdit
Les habitants de Tripoli ont aussi saisi l'occasion pour satisfaire leur curiosité.
La toute nouvelle attraction touristique n'est autre que la tentaculaire résidence de Kadhafi, située au cœur de la ville. Cet édifice, dont l'opulence tapageuse n'est plus qu'un souvenir, inspirait précédemment de la crainte aux citoyens ordinaires.
« Les gens sont tout excités de découvrir ce qui s'y cache » indique Majdeh, qui visite les lieux pour la première fois. « Il était interdit de s'arrêter devant ces murs. Maintenant, les gens sont tout excités de découvrir comment Kadhafi y vivait, comment il nous gouvernait, et comment il tenait la Libye sous son joug depuis cet endroit », ajoute-t-il.
Sous le régime de Kadhafi, on l'appelait la « maison du diable » et il était hautement déconseillé de manifester un quelconque intérêt pour elle. « Si un Libyen s'approchait trop près de l'entrée, ou ralentissait en passant à côté, les gardes levaient leur arme sur lui », déclare Anwer. « Pouvoir être ici et brandir notre drapeau, le drapeau de la Libye libre, c'est une vraie victoire. »
Poursuivre la mission
La mission de l'OTAN visant à protéger les civils est maintenue car le conflit se poursuit contre les poches de résistance pro-Kadhafi. La rapidité avec laquelle le CNT pourra en finir avec le reste des forces de l'ancien régime conditionnera son aptitude à normaliser la situation en Libye.
Les habitants de Tripoli savent qu'il y a encore beaucoup à faire avant de pouvoir réellement qualifier la situation de « normale », mais ils ont apparemment la patience d'attendre.
« Nous sommes maintenant très heureux que la vie puisse reprendre son cours », indique Tahir, employé à l'aéroport de Tripoli. « Bien sûr, cela se fera petit à petit, pas vraiment vite mais graduellement, et nous sommes prêts à l'accepter. »