Synthèse du débat de fond sur les armes légères et de petit calibre et la dimension de genre

  • 22 Sep. 2022 -
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  • Mis à jour le: 11 Nov. 2022 09:35

Le 22 septembre 2022, le Bureau de la conseillère pour les questions de genre (GENAD) de l’État-major militaire international (EMI) a tenu un nouveau débat de fond mensuel, consacré cette fois au lien entre la dimension de genre et les armes légères et de petit calibre (ALPC). Cette session a permis d’examiner le rôle de la dimension de genre pour ce qui est de combler les lacunes en matière d’information et relever les défis actuels dans le domaine du contrôle des armes légères, de la gestion des munitions et du déminage.

Plusieurs experts étaient présents, M. Callum Watson, coordonnateur des questions de genre de Small Arms Survey, Mme Jovana Carapic, gestionnaire de programme pour l’équipe consultative sur la gestion des munitions (AMAT) du Centre international de déminage humanitaire de Genève (CIDHG), et Mme Maysa Hajjaj, conseillère pour les questions de genre et la diversité au CIDHG – Programme Genre et antimines (GMAP).

Hommes et masculinités

M. Watson a commencé par décrire les principaux éléments de la dimension de genre dans les travaux de Small Arms Survey. Il a expliqué le caractère fortement genré des statistiques sur la violence et les décès liés à l’utilisation d’armes à feu dans le monde et la nécessité de disposer de données désagrégées. En 2020, 76 % des victimes de mort violente étaient des hommes, jeunes pour la plupart, qui sont parfois eux-mêmes la cause première de ce phénomène. Avant que l’on dispose de ce type de données désagrégées, la vulnérabilité des hommes n’a peut-être pas été prise en compte dans la situation générale s’agissant des ALPC. M. Watson a en outre indiqué que les hommes sont en même temps les principaux auteurs de tels actes, en précisant que « la violence liée aux armes à feu a souvent un lien direct avec les rôles masculins ». Cela est en partie attribuable au fait que les hommes assument la majorité des rôles de combat dans les forces armées, et qu’ils ont des rôles comportant des risques élevés dans la police, la gendarmerie et les patrouilles aux frontières. Cette situation est parfois voulue, mais pas toujours. Il a ensuite expliqué comment ces rôles, ces attentes et ces a priori fondés sur le genre, différents selon le lieu, le contexte, le moment et la culture, pouvaient générer de la violence de manières différentes et créer un manque de confiance dans les autorités et les forces de l’ordre. C’est pourquoi lorsque des organisations comme l’OTAN s’associent à d’autres pays, il convient de s’intéresser à la question de la discrimination dans le secteur de la sécurité et de souligner qu’il est important de répondre aux besoins sécuritaires différents des femmes, des hommes, des filles et des garçons afin d’instaurer la confiance au sein des populations civiles et de garder le monopole sur l’usage de la force.

Gestion des munitions et des armes

Mme Carapic a pour sa part évoqué les progrès et les défis dans le domaine de la gestion des munitions et des armes, soulignant le travail et l’engagement de l’équipe AMAT du CIDHG et d’autres organisations se consacrant elles aussi à ces questions. Elle a expliqué qu’il était nécessaire de renforcer la sécurité grâce à la coopération, au partage de l’information et aux partenariats dans une optique d’assistance technique pratique et durable en matière de gestion des munitions. S’agissant des questions de genre et de la gestion des munitions, Mme Carapic a fait ressortir les lacunes en matière de données et d’analyse, et a expliqué qu’il convenait d’approfondir la réflexion sur les perspectives de genre et leurs implications en ce qui concerne la gestion des munitions tout au long de leur cycle de vie, afin d’aborder les incidences négatives des explosions accidentelles sur les femmes, les hommes, les filles et les garçons et leurs moyens de subsistance. À titre d’exemple, des données désagrégées par genre de 2020 pour 15 cas nous apprennent que 10 % des victimes d’explosions accidentelles étaient des femmes, 50 % des enfants et 40 % des hommes. Ces chiffres aident à comprendre quels groupes sont les plus touchés. Mme Carapic a évoqué les récents travaux commandés par le Bureau des affaires de désarmement des Nations Unies sur le genre et la gestion des munitions pendant leur cycle de vie, en précisant les moyens concrets employés pour tenir compte des considérations de genre dans divers aspects concernant les munitions – planification, acquisition, gestion des stocks et élimination. Elle a par ailleurs non seulement insisté sur la nécessité d’inclure davantage les femmes dans les activités de gestion des munitions – qui vont au-delà de la question de la réforme du secteur de la sécurité –, mais également sur le rôle essentiel de la dimension de genre lorsqu’elle permet de rendre les opérations plus sûres, sécuritaires et efficaces.

Femmes, paix et sécurité, désarmement et lutte antimines

Enfin, Mme Hajjaj a attiré l’attention sur la pertinence du programme Femmes, paix et sécurité pour le désarmement et la lutte antimines, ainsi que sur la directive du Conseil de sécurité de l’ONU, selon laquelle « toutes les parties doivent veiller à ce que les programmes de déminage et de sensibilisation au danger des mines tiennent compte des besoins particuliers des femmes et des petites filles ». Elle a notamment abordé le besoin d’une coopération et d’un dialogue pour améliorer les normes et les critères. Il peut s’agir de coopération sur le terrain ou encore de la nécessaire interaction entre les organismes de lutte antimines et la population pour combler les lacunes en informations vitales. Elle a expliqué comment des rôles et des responsabilités propres au genre et à la diversité peuvent déterminer de quelles informations disposent souvent les femmes, les hommes, les filles et les garçons sur la contamination, la propriété, l’utilisation des terres et les priorités et besoins de leurs communautés. L’OTAN peut contribuer à la mise en place d’un environnement sûr offrant les mesures de protection nécessaires, notamment en intégrant la dimension de genre pour comprendre les schémas de mobilité uniques et spécifiques qui ont une incidence sur l’exposition à des risques. Ainsi, au Soudan du Sud, les femmes et les filles, parce que ce sont souvent elles qui vont chercher de l’eau ou accomplissent des tâches agricoles, connaissent bien certaines zones géographiques particulières. Les adolescents, eux, se voient confier la garde de troupeaux, souvent à l’écart des villages, et connaissent ainsi des lieux méconnus des autres membres de leur communauté.

En définitive, l’intégration de la dimension de genre peut améliorer les pratiques de protection et contribuer à l’instauration d’un environnement sûr. La pertinence du programme pour les femmes, la paix et la sécurité et de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU pour les travaux liés aux ALPC montre à quel point il est nécessaire d’intégrer la dimension de genre pour créer un environnement sûr tenant compte des contributions et des besoins différents des femmes, des hommes, des filles et des garçons.