Déclaration du Sommet de Chicago concernant l’Afghanistan

publiée par les chefs d’État et de gouvernement de l’Afghanistan et des pays contribuant à la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) dirigée par l’OTAN

  • 21 May. 2012
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  • Communiqué de presse (2012) 065
  • Issued on 21 May. 2012
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  • Mis à jour le: 21 May. 2012 19:49

Préambule

  1. Nous, les pays contribuant à la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) et le gouvernement de la République islamique d'Afghanistan, nous sommes réunis aujourd'hui à Chicago pour réaffirmer notre ferme engagement à l’égard d’un Afghanistan souverain, sûr et démocratique. Dans le droit fil de la stratégie que nous avons adoptée au sommet de Lisbonne, la mission de la FIAS se terminera d'ici à la fin de 2014. Mais l'Afghanistan ne se retrouvera pas seul ensuite : nous réaffirmons que le partenariat étroit qui est le nôtre se poursuivra après la période de transition.

  2. Au cours de nos dix années de partenariat, la vie des hommes, des femmes et des enfants afghans s'est sensiblement améliorée, qu'il s'agisse de la sécurité, de l'éducation, de la santé, de la conjoncture économique ou des droits et libertés garantis. Davantage doit être fait, mais nous sommes résolus à travailler ensemble afin de préserver les progrès substantiels que nous avons accomplis au cours des dix années écoulées. Les pays qui contribuent à la FIAS continueront par conséquent de soutenir l'Afghanistan dans sa marche vers l'autonomie en matière de sécurité, vers une meilleure gouvernance, et vers le développement économique et social. L’Afghanistan ne pourra ainsi plus jamais redevenir un sanctuaire pour les terroristes, qui menacent le pays, la région et le monde. Un Afghanistan sûr et stable apportera une contribution importante à la région, où la sécurité, la stabilité et le développement sont indissociables.

  3. Les pays de la FIAS et l’Afghanistan s'associent pour rendre hommage à tous ceux et celles – civils ou militaires, Afghans ou étrangers – qui ont perdu la vie ou qui ont été blessés en combattant pour notre sécurité commune et pour un Afghanistan prospère, pacifique et stable. Nous saluons en particulier le courage des forces armées de l'Afghanistan et des pays de la FIAS qui vivent, s'entraînent et combattent côte à côte au quotidien. Nous sommes déterminés à ce que tous ces sacrifices trouvent leur sens dans notre partenariat solide et de long terme, qui contribuera à un avenir meilleur pour le peuple afghan.

Principes généraux

  1. Notre action s'inscrit dans le cadre de l'engagement de la communauté internationale au sens large, dont les grandes lignes ont été tracées par la conférence de Kaboul de juillet 2010, par le processus d'Istanbul sur la sécurité et la coopération régionales, lancé en novembre 2011, et par la conférence de Bonn de décembre 2011.

  2. Nous rappelons les engagements mutuels fermes pris à la conférence de Bonn du 5 décembre 2011, qui constituent la base de notre partenariat de long terme. Dans ce contexte, le gouvernement de la République islamique d’Afghanistan confirme sa détermination à honorer son engagement en faveur d’une société démocratique, fondée sur l’état de droit et la bonne gouvernance, avec notamment des progrès dans la lutte contre la corruption, et dans laquelle sont respectés les droits de l’homme et les libertés fondamentales des citoyens, y compris l'égalité entre hommes et femmes et la participation active des uns et des autres dans la société afghane. Les élections qui vont avoir lieu devront être organisées dans le plein respect de la souveraineté afghane et conformément à la Constitution afghane. Leur transparence, leur inclusivité et leur crédibilité seront également d’une importance capitale. Dans ce contexte, des progrès continus vers la réalisation de ces objectifs encourageront les pays de la FIAS à maintenir leur soutien jusqu’en 2014 et au-delà.

  3. Nous insistons sur l’importance d’une participation pleine et entière de toutes les Afghanes à la vie politique et aux processus de reconstruction, de paix et de réconciliation en Afghanistan et sur la nécessité de respecter les dispositions institutionnelles protégeant les droits de la femme. Nous restons attachés à la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU sur les femmes, la paix et la sécurité. Nous sommes aussi conscients de la nécessité de protéger les enfants contre les effets préjudiciables des conflits armés, comme le prévoient les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU applicables à cette question.

Exécution de la feuille de route de Lisbonne et mise en œuvre du partenariat durable

  1. À Lisbonne, en novembre 2010, nous avons décidé que le transfert de la responsabilité de la sécurité, de la FIAS aux forces de sécurité nationales afghanes (ANSF), se ferait de manière échelonnée, pour qu’à terme les Afghans puissent assumer l’entière responsabilité de leur sécurité. L'OTAN/la FIAS et le gouvernement de la République islamique d'Afghanistan demeurent attachés à cette stratégie de transition, qui a débuté en juillet 2011. Le processus de transition, irréversible, est en bonne voie et s'achèvera d'ici à la fin de 2014. Nous sommes par ailleurs conscients, dans ce contexte, de l’importance d’une approche globale et de la poursuite des progrès dans les domaines de la gouvernance et du développement.

  2. La troisième série de provinces où va s’engager le processus de transition a été annoncée par le président Karzaï le 13 mai 2012. Cela signifie que 75 % de la population afghane vivra bientôt dans des zones où les ANSF exerceront au premier chef la responsabilité de la sécurité. D'ici à la mi-2013, toutes les zones d'Afghanistan auront entamé leur transition, et les forces afghanes seront responsables au premier chef de la sécurité dans tout le pays. Une étape importante de la feuille de route de Lisbonne aura ainsi été franchie. La FIAS réduit ses forces graduellement et de manière responsable, pour achever sa mission d'ici au 31 décembre 2014.

  3. Le succès que connaît la transition a été rendu possible par les progrès significatifs des ANSF depuis Lisbonne en termes de capacité et de professionnalisme. Les soldats afghans prennent de plus en plus souvent la direction d'opérations sur le sol afghan. L’armée comme la police ont prouvé qu'elles étaient capables de maintenir la sécurité dans les zones où la transition a déjà commencé.

  4. Toutefois, l’achèvement de la transition ne signifiera pas la fin de l’engagement de la communauté internationale en faveur de la stabilité et du développement dans le pays. L'Afghanistan et l'OTAN réaffirment leur détermination à développer encore, dans tous ses aspects, le partenariat durable qu'ils ont conclu à Lisbonne en 2010, et ce jusqu’en 2014 et au-delà, notamment dans le cadre de programmes conjoints de renforcement des capacités, comme l'initiative pour le développement de l'intégrité. Dans ce contexte, l'OTAN et le gouvernement de la République islamique d'Afghanistan vont maintenant approfondir leurs consultations en vue de donner forme au partenariat durable.

  5. Dans l’intervalle, nous nous félicitons du fait qu'un certain nombre de pays de la FIAS ont conclu, ou sont en voie de conclure, des accords de partenariat bilatéraux avec le gouvernement de la République islamique d’Afghanistan. Ces cadres bilatéraux formeront la base d’une coopération et d’une amitié entre ces pays et un Afghanistan indépendant, souverain et démocratique, dans le respect de l’égalité et de l’intérêt mutuel.

L’après-2014

  1. Pour préserver et mettre à profit les progrès significatifs et les réalisations communes, les pays de la FIAS réaffirment leur engagement durable à l’égard de la sécurité de l'Afghanistan après 2014 ; le gouvernement de la République islamique d’Afghanistan se félicite une nouvelle fois du soutien qui lui est ainsi apporté.

  2. L’action de la FIAS, y compris la Mission OTAN de formation en Afghanistan, a été déterminante s’agissant d’amener les ANSF aux niveaux qu’elles ont aujourd’hui atteints. Le gouvernement de la République islamique d’Afghanistan réaffirme que l’OTAN a un rôle crucial à jouer, avec les partenaires et aux côtés d'autres acteurs, pour ce qui est de former, de conseiller et d’aider les ANSF, et il invite l’OTAN à maintenir son soutien. Lorsque le transfert de la sécurité sera achevé, fin 2014, l'OTAN sera passée d'une mission de combat à une nouvelle mission, de formation, de conseil et d'assistance, dont la nature sera différente de celle de l’actuelle mission de la FIAS.

  3. Nous sommes convenus d’œuvrer à l’instauration d’une telle mission, qui sera placée sous la direction de l’OTAN. Nous veillerons à ce que cette mission nouvelle repose sur une base juridique solide, comme une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU.

Maintien en puissance des ANSF

  1. L'Afghanistan est déterminé à développer, avec le soutien des pays de la FIAS, des ANSF qui soient soumises à la Constitution et aptes à garantir la sécurité de tous les Afghans. Ces forces travailleront sous une direction civile effective, dans le respect de l'état de droit et des droits de l’homme.

  2. À la conférence internationale sur l'Afghanistan tenue à Bonn le 5 décembre 2011, la communauté internationale dans son ensemble a décidé de contribuer à la formation, à l'équipement, au financement et au développement capacitaire des ANSF après la période de transition. Les Alliés et leurs partenaires au sein de la FIAS réaffirment leur ferme attachement à ce processus et joueront leur rôle dans le soutien financier des ANSF. Nous appelons aussi la communauté internationale à s'engager en faveur de ce soutien de long terme. Le rythme et l’ampleur d’une réduction graduelle et encadrée des ANSF, de leur pic d’effectifs à un niveau soutenable, seront soumis à conditions et décidés par le gouvernement de la République islamique d’Afghanistan en consultation avec la communauté internationale. Le modèle préliminaire pour l’effectif total futur des ANSF, défini par la communauté internationale et le gouvernement de la République islamique d’Afghanistan, prévoit 228 500 hommes et un budget d'environ 4,1 milliards de dollars par an, et il sera revu périodiquement en fonction de l'évolution de l'environnement de sécurité.

  3. Le maintien en puissance d’ANSF capables et en nombre suffisant incombe au gouvernement de la République islamique d’Afghanistan, appuyé en cela par la communauté internationale. Dans le cadre de cette communauté internationale au sens large, et en nous fondant sur les mécanismes existants, nous jouerons notre rôle s’agissant d’élaborer des mécanismes de financement et des modalités d’utilisation des fonds qui soient appropriés, cohérents et efficaces pour tous les éléments concernés des ANSF. Ces mécanismes seront caractérisés par la flexibilité, la transparence, la redevabilité et le coût-efficacité, et ils comporteront des mesures anticorruption. Une distinction sera faite également entre le financement des forces armées et celui de la police, et le financement nécessaire à la poursuite du développement des capacités au sein des ministères et des organismes de sécurité afghans concernés.

  4. À mesure que se développera l’économie nationale et qu’augmenteront les recettes de l’Afghanistan, la contribution annuelle de ce dernier ira croissant, à partir d'un plancher de 500 millions de dollars en 2015, l’objectif étant que le pays puisse, au plus tard en 2024, assumer pleinement la responsabilité financière de ses forces de sécurité. Ainsi, au cours de la « décennie de la transformation », les donateurs internationaux devraient pouvoir réduire leurs contributions financières à mesure que le gouvernement de la République islamique d’Afghanistan assumera une plus grande responsabilité sur le plan financier.

  5. En se développant et en se professionnalisant davantage, la police nationale afghane évoluera vers une force civile de maintien de l’ordre, soutenable, crédible et comptable de son action, qui assumera la responsabilité principale de la sécurité intérieure. Cette force sera capable de fournir des services de police à la population afghane dans le cadre global du régime de l’état de droit de l’Afghanistan. Cela devra se faire sur la base d’un plan adéquat, qui sera élaboré par le gouvernement de la République islamique d'Afghanistan avec l’aide, lorsqu’il y a lieu, du Conseil international de coordination de la police (IPCB) ou de son successeur. La police comme l’armée joueront un rôle crucial pour ce qui est d’assurer la sécurité et la stabilité et de contribuer à une gouvernance légitime et à une croissance économique durable dans tout le pays.

Vers un Afghanistan pacifique, stable et prospère

  1. Un processus politique assorti d'une réconciliation et d'une réintégration réussies est la clé d’un Afghanistan pacifique et stable. Dans ce contexte, nous réaffirmons l'importance des principes décidés à la conférence de Bonn. C’est ainsi que le processus conduisant à la réconciliation doit être véritablement dirigé et pris en charge par les Afghans, et il doit être inclusif et représentatif des intérêts légitimes de tous les Afghans, quel que soit leur sexe ou leur statut. La réconciliation passe aussi par la réaffirmation de la souveraineté, de la stabilité et de l'unité de l'Afghanistan, la renonciation à la violence, la rupture des liens avec le terrorisme international, et le respect de la Constitution afghane, y compris ses dispositions relatives aux droits de l'homme, en particulier les droits de la femme.

  2. L'avènement d'un Afghanistan pacifique, stable et prospère apportera une contribution concrète au développement économique et social dans l'ensemble de la région et fera avancer la lutte contre les trafics de stupéfiants, les migrations illégales, le terrorisme et la criminalité. Dans ce contexte, la coopération régionale et l’aide à la stabilité en Afghanistan seront déterminantes. Deux événements importants devraient permettre d'obtenir l'engagement des partenaires régionaux et internationaux essentiels. La conférence ministérielle sur le processus d’Istanbul qui va se tenir à Kaboul permettra de lancer une première série de mesures de confiance au niveau régional, tandis qu’à la conférence de Tokyo, la communauté internationale et les dirigeants afghans examineront le cadre d’une aide future au développement.

  3. Notre mission n'est pas encore terminée. Mais à la lumière des résultats substantiels que nous avons obtenus, et grâce à notre engagement ferme et commun, nous ne doutons pas que le partenariat fort qui est le nôtre conduira l'Afghanistan vers un avenir meilleur.