Communiqué final

Président : M. J. Luns

  • 04 May. 1981 - 05 May. 1981
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  • Mis à jour le: 04 Nov. 2008 17:35

<p>Menaces pour la sécurité et la stabilité internationale - Fermeté dans la défense et persévérance dans la recherche de solutions pacifiques - l'Afghanistan - l'Acte final d'Helsinki - La Pologne - Stabilité économique et sociale de l'ensemble de l'All

I

Le Conseil de l'Atlantique Nord s'est réuni en session ministérielle à Rome les 4 et 5 mai 1981, gravement préoccupé par les menaces qui continuent de peser sur la sécurité et sur la stabilité internationale. Déterminés à faire face à ces menaces par des mesures efficaces, notamment en faisant preuve de fermeté dans la défense et de persévérance dans la recherche de solutions pacifiques, les Ministres ont déclaré ce qui suit:

  1. La force et la cohésion de l'Alliance demeurent indispensables pour garantir la sécurité de ses membres et contribuer ainsi à la stabilité des relations internationales. Cette stabilité ne sera assurée que si tous les pays agissent avec modération et sens des responsabilités. L'Union soviétique affirme qu'elle souscrit elle aussi à ces principes, mais ses affirmations ne sont pas confirmées par ses actes. Les relations Est-Ouest plus constructives que recherchent les Alliés exigent que par des signes tangibles l'Union soviétique montre qu'elle est prête à mettre fin à l'accroissement préoccupant de son potentiel militaire, à renoncer au recours à la force et à l'intimidation et à cesser de créer ou d'exploiter des situations de crise et d'instabilité dans le tiers-monde.
  2. L'invasion et l'occupation de l'Afghanistan par l'Union soviétique constituent un exemple particulièrement flagrant de violation des principes de modération et de responsabilité dans la conduite des affaires internationales. Cette occupation entre dans sa seconde année et impose un tribut de plus en plus lourd en souffrances et en vies humaines. Elle demeure et demeurera totalement inacceptable pour les Alliés et pour l'opinion mondiale. L'URSS a ignoré les condamnations de ses actions par la communauté internationale, ainsi que les appels des Nations Unies, de la Conférence islamique et du Mouvement des non-alignés. Il est indispensable que les forces soviétiques soient retirées et qu'intervienne un règlement politique qui permette au peuple afghan d'exercer pleinement ses droits à l'indépendance et à l'autodétermination et aux deux millions de réfugiés de regagner leurs foyers.
  3. En Europe, les efforts faits pour rétablir la coopération et les échanges Est-Ouest sur la base de l'Acte final d'Helsinki ne peuvent qu'être fortement contrecarrés par l'emploi ou la menace de la force aux fins d'intervention dans les affaires d'autres pays. La Pologne doit être laissée libre de résoudre ses propres problèmes. Toute intervention extérieure aurait les plus graves conséquences pour l'ensemble des relations internationales et modifierait fondamentalement toute la situation mondiale. Pour leur part, les Alliés continueront de s'en tenir strictement à leur politique de non-intervention, et ils appellent tous les autres Etats à faire de même.
  4. Dans cette situation, les Alliés renforceront leur capacité de décourager l'agression et agiront, individuellement ou collectivement, en vue d'inciter l'Union soviétique à faire preuve de retenue et de sens des responsabilités dans les affaires internationales, de manière à asseoir les relations Est-Ouest sur des bases stables. Conformément à la politique établie de l'Alliance, ils poursuivront ces objectifs notamment dans les domaines suivants:
  5. Ils assureront leur solidarité par une étroite consultation au sein du Conseil atlantique sur tous les problèmes ayant des incidences sur la sécurité et les relations Est-Ouest. Dans cet esprit, ils s'efforceront, notamment par une assistance aux pays membres dont le développement économique est moins avancé, de renforcer la stabilité économique et sociale de l'ensemble de l'Alliance, conformément à l'article 2 du Traité de l'Atlantique Nord.
  6. Dans le domaine des capacités militaires, le développement de la puissance militaire du Pacte de Varsovie a fait apparaître une tendance préoccupante et défavorable dans l'évolution du rapport des forces Est-Ouest, particulièrement en Europe. Les Alliés s'accordent à penser qu'il est fondamental pour la sécurité de l'Alliance, la mise en oeuvre d'une politique de modération et la préservation de la paix d'assurer un équilibre militaire global entre l'OTAN et le Pacte de Varsovie. Ils sont résolus à fournir toutes les ressources nécessaires pour assurer le renforcement requis de leurs forces de dissuasion et de défense.
  7. Le non-alignement authentique est un important facteur de stabilité dans le monde. Les Alliés continueront de se consulter entre eux et d'oeuvrer avec d'autres pays en vue d'affermir la stabilité et de réduire les risques de crise dans le tiers monde, spécialement là où est menacée l'indépendance de nations souveraines. Le maintien de cette indépendance, ainsi que de la paix et de l'équilibre international correspond à un intérêt vital de l'Ouest. Les situations de crise ou de conflit, en particulier quand elles affectent des régions sensibles comme le Proche-Orient, l'Asie du Sud-Est et du Sud-Ouest ou l'Afrique australe, doivent faire l'objet de règlements politiques; les Alliés souhaitent y travailler en coopération avec d'autres.

    La stabilité des pays du tiers-monde et leur non-alignement authentique sont subordonnés à la liberté pour ces pays d'assurer leur développement économique et social sans ingérence extérieure. Tous les états doivent s'abstenir d'exploiter des problèmes sociaux ou de provoquer l'instabilité afin de s'assurer des avantages politiques. De même, ils doivent tous contribuer activement au renforcement des économies des pays en développement et à la lutte contre la faim, la pauvreté et le sous-développement. Pour leur part, les nations occidentales offrent aussi à ces pays les échanges commerciaux, la technologie et le respect de la souveraineté politique qui sont d'une importance vitale pour l'indépendance et le bien-être économique de ces derniers.

    Certains pays alliés disposent ou sont déterminés à se doter de moyens leur permettant de décourager l'agression et d'aider les nations qui le souhaiteraient à faire face à des menaces dirigées contre leur sécurité ou leur indépendance.

  8. Ils maintiendront un dialogue avec l'Union soviétique et s'emploieront ensemble à promouvoir une détente authentique ainsi qu'à développer les relations Est-Ouest chaque fois que le comportement de l'Union soviétique le permettra. Les principes et dispositions de l'Acte final d'Helsinki constituent un code de conduite s'imposant à tous ses signataires. A la réunion de la CSCE de Madrid, les Alliés recherchent des résultats concrets et équilibrés, susceptibles de déboucher sur une meilleure application de ces principes et dispositions, notamment en ce qui concerne le respect des droits de l'homme, l'amélioration des contacts entre les personnes, une plus libre circulation de l'information et un accroissement de la sécurité et de la coopération. Ceci attesterait clairement que le processus de la CSCE garde toute sa valeur.

    Les Alliés rappellent leur attachement à la proposition française d'une conférence sur le désarmement en Europe qui viserait à parvenir, dans un premier temps, à un accord sur un ensemble cohérent de mesures de confiance militairement significatives, contraignantes et vérifiables, applicables sur l'ensemble du continent européen, de l'Atlantique à l'Oural. Soulignant l'importance qu'ils attachent à ce qu'une telle conférence soit partie intégrante du processus de la CSCE, ils considèrent qu'il reviendrait à une prochaine réunion sur les suites de la CSCE d'examiner, à la lumière des progrès réalisés au terme de l'étape initiale de la Conférence et en tenant compte des autres négociations en cours, les moyens de poursuivre leurs efforts dans la voie de la sécurité et du désarmement. Tout en se félicitant des progrès accomplis jusqu'à présent, ils expriment l'espoir que, dans le cadre d'un résultat équilibré, un accord pourra être réalisé à Madrid sur un mandat précis, sans ambiguïté et incorporant les critères mentionnés ci-dessus.

  9. Avec la dissuasion et la défense, le désarmement et le contrôle des armements font partie intégrante de la politique de l'Alliance en matière de sécurité. Les Alliés expriment leur soutien pour des négociations conduisant à l'adoption de mesures significatives propres à mettre un frein à la puissance militaire soviétique et menant aussi à l'amélioration de la sécurité. Cette politique vise à assurer un équilibre militaire stable, si possible à des niveaux de forces réduits. Les Alliés soulignent l'importance qu'ils attachent à un contrôle des armements stabilisateur, équitable et vérifiable par la limitation des armements stratégiques soviétiques et américains. Ils reconnaissent que des négociations sur le contrôle des armements ne peuvent être fructueuses que dans un climat international confiant.
  10. Les Alliés qui participent aux négociations de Vienne sur les réductions mutuelles et équilibrées de forces restent déterminés à établir une parité authentique des effectifs sous la forme d'un plafond collectif commun, sur la base de données agréées. Ils regrettent qu'aucun progrès sérieux n'ait été réalisé dans les négociations, ce qui est dû en grande partie au fait que les pays de l'Est participants ne sont toujours pas disposés à fournir la contribution indispensable à la clarification du problème des données.
  11. Les Alliés continuent à attacher une importance particulière au maintien de la situation calme régnant à Berlin et alentour. Le strict respect et la pleine application de l'accord quadripartite du 3 septembre 1971 demeurent d'une importance vitale pour la sécurité en Europe, les relations Est-Ouest et la situation internationale dans son ensemble. L'Alliance continue d'appuyer les efforts que fait la République fédérale d'Allemagne pour obtenir l'annulation de la mesure d'augmentation du change minimum obligatoire qu'a imposée la RDA et qui a un effet particulièrement défavorable sur le nombre de touristes et de visiteurs se rendant en RDA et à Berlin-Est.

II

  1. Les Alliés qui ont-participé à la décision OTAN de décembre 1979 sur la modernisation des forces nucléaires de théâtre à longue portée (LRTNF) et sur une limitation des armements englobant ces forces ont réaffirmé leur adhésion à cette décision. Ils ont souligné que, devant l'accroissement des déploiements de LRTNF soviétiques, qui dans le cas des SS-20 dépassent le déploiement total de LRTNF prévu par l'OTAN, la modernisation des LRTNF de l'OTAN est plus indispensable que jamais et constitue la seule base réaliste d'une limitation parallèle des TNF. Depuis la décision de décembre 1979, les menaces et les efforts soviétiques tendant à diviser les Alliés n'ont fait que renforcer leur résolution de prendre les mesures nécessaires pour maintenir la dissuasion, corriger le déséquilibre dans le domaine des LRTNF et assurer leur sécurité. La dernière proposition soviétique d'un moratoire sur les déploiements de LRTNF est totalement inacceptable pour ces Alliés. Elle les enfermerait dans une position d'infériorité en bloquant l'ensemble du programme de modernisation de l'OTAN. En outre, cette proposition permettrait aux Soviétiques d'accentuer la menace contre l'OTAN en ne prévoyant pas de limitation pour les systèmes qui, en étant déployés à l'est de l'Oural, seraient capables d'atteindre le territoire allié.

    Ces Alliés se félicitent que les Etats-Unis aient l'intention d'engager pour la fin de l'année des négociations avec l'Union soviétique sur une limitation des TNF, dans le cadre des SALT. Le Secrétaire d'Etat des Etats-Unis compte discuter du calendrier et des modalités de ces négociations avec M. Gromyko en septembre aux Nations Unies. Ces négociations s'appuieront sur une évaluation actualisée de la menace contre l'Alliance et sur une étude des besoins fonctionnels relatifs aux TNF de l'OTAN qui seront effectuées en toute priorité dans le cadre du Groupe consultatif spécial et du Groupe de haut niveau.

En plus du communiqué, les Ministres des affaires étrangères ont décidé de publier les passages suivants du procès-verbal de leur réunion des 4 et 5 mai 1981:

La coopération et l'aide économique au sein de l'Alliance

Compte tenu de la persistance de difficultés économiques qui touchent tout particulièrement les pays membres dont le développement est moins avancé les Ministres ont noté que la Turquie a besoin d'une aide supplémentaire pour surmonter ses graves problèmes économiques et que cette question sera examinée prochainement à l'OCDE. Ils se sont déclarés satisfaits de l'amélioration générale de la situation économique du Portugal au cours de l'année écoulée, en notant toutefois qu'une poursuite de l'aide est nécessaire. Ils se sont félicités de l'accession de la Grèce à la Communauté européenne, escomptant qu'elle renforcera les liens de ce pays avec les autres membres et qu'elle entraînera à terme une amélioration régulière de l'économie hellénique. Les Ministres ont souligné qu'un appui constant est indispensable pour résoudre les problèmes économiques à long terme de ces trois pays, ce qui contribuerait à la consolidation de la force et de la solidarité de l'Alliance.

A cet égard, ils ont une nouvelle fois souligné la nécessité de tenir compte des intérêts que les accords de coopération comportent pour ces pays, tant en ce qui concerne les matériels de défense que le domaine scientifique en général, de manière à ce qu'ils puissent jouer un rôle plus complet dans le contexte d'une utilisation plus efficace des ressources de l'Alliance dans son ensemble.

La situation en Méditerranée

Les Ministres ont pris note du rapport sur la situation en Méditerranée préparé sur leurs instructions et ils ont souligné à nouveau la nécessité de maintenir l'équilibre des forces dans l'ensemble de la région. Ils ont prié le Conseil permanent de continuer ses consultations à ce sujet et de leur présenter un nouveau rapport à leur prochaine réunion.

Infrastructure

Les Ministres ont examiné un rapport sur des éléments fondamentaux du programme en cours.

Plans civils d'urgence - état de préparation civile

Les Ministres ont examiné un rapport sur l'état de préparation civile de l'Alliance. Ils ont noté que des progrès avaient été réalisés au cours des deux dernières années mais ont été d'accord pour estimer qu'il fallait intensifier les travaux de planification et accroître l'allocation de ressources budgétaires afin de pouvoir remédier aux faiblesses et aux insuffisances qui subsistent. Ceci aiderait les plans civils d'urgence à mieux jouer leur rôle dans le renforcement de la sécurité de l'Alliance. A cette fin, les Ministres ont émis une directive portant sur l'élaboration des plans civils d'urgence au cours des quatre années à venir.

Science et technologie

Les Ministres ont reconnu que les ressources scientifiques et l'aptitude à l'innovation technologique constituent une contribution majeure aux gains de productivité et, par là, à l'expansion économique et à la compétitivité internationale. Ils ont exprimé leur préoccupation devant les problèmes qui se posent à la recherche et à l'expérimentation du fait de la situation économique actuelle dans de nombreux pays de l'Alliance. Les Ministres ont instamment préconisé le renforcement de la capacité d'innovation dans le secteur productif et celui de la recherche fondamentale dans les universités, ils ont invité les membres de l'Alliance à promouvoir des mesures qui soient propres à favoriser la mobilité des scientifiques et des techniciens et ingénieurs ainsi qu'à encourager Le progrès technique dans un esprit véritablement international.