Le rôle essentiel des femmes au sein de la police nationale afghane

  • 05 May. 2011 -
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  • Mis à jour le: 11 May. 2011 11:10

En Afghanistan, les femmes représentent environ la moitié de la population. Pourtant, elles sont très peu nombreuses au sein de la police.

Selon des chiffres récents (mars 2011), sur les 122 000 fonctionnaires de la police nationale afghane, on ne compte que 1 073 femmes. Dans cette société dominée par les hommes, bon nombre des femmes qui choisissent cette carrière font par ailleurs l'objet d'une stigmatisation culturelle. Or, pour répondre aux besoins relatifs à la désignation de fonctionnaires de police de sexe féminin, il faut faire appel aux aptitudes de ce potentiel relativement inexploité, surtout si le ministère de l'Intérieur entend atteindre son objectif et faire entrer dans les rangs de la police 1 333 femmes supplémentaires chaque année.

Les possibilités et les avantages offerts sont évidents, mais de nombreuses femmes afghanes doivent encore rompre avec les traditions et, souvent, résister à la pression exercée par leur famille si elles décident de s'engager dans la police.

La touche féminine

« Pendant la guerre [contre l'Union soviétique], je vivais à l'étranger en tant que réfugiée, et j'ai vu des hommes et des femmes travailler ensemble au service de leur pays », dit une policière. « Alors, quand je suis revenue, j'ai décidé de m'engager dans la police pour aider mon peuple et aussi pour soutenir financièrement ma famille. J'aime mon travail. Je veux continuer à apprendre, poursuivre mes études, compléter ma formation, et servir mon pays. Mon travail consiste à assurer la sécurité à l'ambassade d'Inde, et plus spécifiquement à fouiller les femmes qui se présentent à l'ambassade », ajoute-t-elle.

Les femmes peuvent se spécialiser dans la plupart des tâches policières. Cependant, la tradition islamique qui impose de séparer les hommes et les femmes fait que la demande concerne principalement les policières, puisqu'il est fait appel à elles pour s'occuper des femmes qui sont coupables ou victimes de délits, ou pour traiter d'autres affaires sensibles.

« Les femmes, jeunes ou âgées, réagissent toujours bien à mon égard », dit la policière. « Elles disent que, grâce à Dieu, c'est une femme qui est maintenant chargée de les fouiller. »

Une nouvelle expérience

Lors d'un récent stage de formation de base destiné à la police afghane en uniforme, des policières nouvellement désignées ou très expérimentées venues de tout le pays ont suivi des cours sur les différents aspects du travail policier, qu'il s'agisse du service au client, des contrôles de sécurité, ou de la conduite de patrouilles, et dans des domaines allant des infractions de droit commun au terrorisme. Les stagiaires ont également appris la tactique et le maniement des armes. Les cours étaient donnés par des instructeurs masculins de la police afghane, ainsi que par des conseillères de la mission OTAN de formation en Afghanistan (NTM-A). Pour un grand nombre des participantes, il s'agissait de la première expérience de tir au fusil ou de combat corps à corps.

« C'était formidable, j'aime tirer, et j'aurais voulu que le stage dure deux semaines de plus », déclare Shafiqa Yousify, une mère de trois enfants employée au service approvisionnements de son commissariat. "Je suis si heureuse ; je n'avais jamais touché à un fusil. Si j'ai un pistolet, je saurai maintenant comment m'en servir et me protéger. »

Rompre avec la tradition

Shafiqa Yousify, qui a quitté l'école après la neuvième année, espère néanmoins poursuivre ses études et devenir agent de police. Elle encourage d'autres femmes à faire de même.

« Ne vous occupez pas des gens. Ne vous occupez pas de la société, » dit-elle. « Si vous voulez prendre la décision de devenir fonctionnaire de police, faites-le. Peu importe le qu'en-dira-t-on. La seule chose qui compte, c'est que vous portiez cet uniforme aux côtés de vos frères, et que vous aidiez votre société et votre peuple. Ne vous souciez pas de savoir si les gens disent du bien ou du mal de vous. Faites seulement votre travail correctement. »

Les traditions sont solidement implantées en Afghanistan, et la plupart des femmes portent des vêtements civils entre leur domicile et le lieu du stage, qui se déroule dans une enceinte gardée, à Kaboul. Elles font cela essentiellement pour éviter la confrontation. Cependant, toutes les stagiaires ne se montrent pas aussi prudentes. Hanifa Nayebeaba est la seule femme qui porte ostensiblement son uniforme en dehors du stage. « J'aime beaucoup mon uniforme, et je veux le porter en permanence, » dit-elle. « Il y a des gens qui me font des reproches, et d'autres qui me félicitent. La plupart d'entre eux disent « Que Dieu vous bénisse et vous protège, continuez à faire ce que vous faites ». J'ignore les critiques, et je continue d'agir comme bon me semble ».

Parmi toutes les matières enseignées lors du stage, celle que Hanifa Nayebeaba a préférée était la formation tactique, y compris le combat corps à corps, le maniement des menottes, et l'utilisation de la matraque. Elle encourage d'autres femmes à rejoindre les rangs de la police. Familles, laissez vos filles s'engager dans la police. Sœurs, aidez votre pays et endossez l'uniforme », dit-elle.

Un avenir pour les femmes

Hanifa Nayebeaba n'est pas la seule à exhorter d'autres femmes à devenir fonctionnaires de police. « Si elles le souhaitent, elles doivent s'engager », dit Nadia Gultar, une autre stagiaire. « Peu importe dans quel domaine. Si vous pensez que c'est bien, allez-y. Si vous pensez que ce n'est pas bien, alors vous n'êtes pas faite pour ce métier. »

Pour Nadia Gultar, les deux dernières semaines du stage ont été difficiles. la première fois qu'elle a dû manier un fusil, elle était effrayée et intimidée. L'une des conseillères de la NTM-A l'a aidée. « Elle est venue vers moi et m'a prise dans ses bras », raconte-t-elle. « Après m'avoir encouragée, elle m'a aidée à tenir mon fusil et j'ai appuyé sur la gâchette. J'en suis capable à présent. »

Maintenant qu'elles sont diplômées, certaines des policières reprendront les fonctions qu'elles exerçaient précédemment. D'autres recevront leur première affectation et entameront une nouvelle carrière.