Les forces spéciales de l’OTAN s'entraînent à sauver des vies

  • 24 Mar. 2014 -
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  • Mis à jour le: 30 May. 2014 09:31

Les auxiliaires sanitaires des forces d'opérations spéciales (SOF) de l'OTAN utilisent des simulateurs perfectionnés de médecine de combat pour acquérir les compétences qui leur permettront de sauver des vies, à l'occasion d'un stage de cinq jours au Centre interallié de formation médicale (ACME), implanté au SHAPE en Belgique. Ce centre est équipé des simulateurs médicaux les plus avancés et permet au personnel de se former dans des conditions réalistes de combat et d'apprendre à prodiguer les soins vitaux aux blessés.

A German Army SOF medic attends to a mannequin with a chest wound at the ACME training facility in February 2014. The ACME serves as research and testing capability, testing SOF-specific medical equipment in a simulated environment.

On 26 February 2014, a German Army SOF medic attends to a mannequin with a chest wound at the Allied Centre for Medical Education (ACME) training facility. (Photo by U.S. Air Force Staff Sgt Andrew Davis)

Un kamikaze vient de se faire exploser. Il y a de la fumée partout.  On entend des cris et des voix dans cet épais brouillard. Deux soldats ont été blessés et le kamikaze est mort. Quatre membres des SOF sécurisent le périmètre et emportent les blessés dans un endroit sûr à l'intérieur d'une hutte dans un village voisin. Les médecins examinent les blessés.  L'un d'entre eux a eu les deux jambes arrachées.  Il faut rapidement stopper l'hémorragie et procéder à son évacuation. L'autre peut marcher mais il doit être mis à l'abri. L'hélicoptère de transport a été appelé par radio mais son arrivée n'est prévue que dans dix minutes.  Il transportera les blessés vers un C-130 en attente, avec à son bord une équipe chirurgicale qui pourra assurer leur survie en pratiquant une chirurgie de sauvetage.

Malgré les apparences, nous ne sommes pas dans un village en Afghanistan ou dans toute autre région frappée par la guerre. Nous nous trouvons dans le nouveau centre médical des SOF, extrêmement réaliste, ouvert en octobre 2013 au Quartier général des opérations spéciales de l'OTAN (NSHQ).

Le soldat blessé qui a perdu ses deux jambes est en fait un mannequin intégrant les dernières technologies en matière de simulation traumatique et capable de saigner et d'interagir avec le médecin. Il fournit des stimuli visuels et tactiles réalistes et réagit de manière réaliste au traitement administré. Le deuxième soldat est un vrai acteur, qui a été déguisé en blessé au combat et qui présente des blessures et des saignements simulés par un équipement dernier cri. L'environnement dans lequel les participants évoluent est également fictif : fumée, bruit de l'avion de transport, intérieur du C-130, désert, etc. tout fait partie du décorum.

« Ce centre, ce stage et, d'une manière plus générale, l'initiative de développement de la médecine des SOF de l'OTAN, ont pour vocation d'optimiser la capacité des SOF à sauver des vies mais également l'emploi des SOF par l'Alliance, » indique le lieutenant-colonel Dan Irizarry de l'armée de terre américaine, conseiller santé au NSHQ.

Le scénario du kamikaze faisait partie d'un stage de simulation de la médecine de combat organisé en février 2014.  Onze stagiaires issus des SOF et des services de santé des forces conventionnelles de sept pays Alliés (Belgique, Danemark, Italie, Pays-Bas, Norvège, Pologne et États-Unis) ont été répartis en deux groupes pour apprendre à développer et à transmettre leurs compétences respectives de médecine de combat à l'aide de simulateurs. Certains jouaient le rôle de stagiaires dans le cadre d'un scénario tandis que d'autres jouaient le rôle d'instructeurs, en créant, en jouant et en débriefant le scénario pour tester et développer leurs compétences en médecine de combat.

« Le scénario était très réaliste, j'ai trouvé intéressant de passer dans toutes les pièces reproduisant des environnements différents : soins sous le feu, soins tactiques en campagne ou encore évacuation sanitaire, » explique une stagiaire américaine lors du débriefing. « Dans la première pièce, on sentait vraiment le stress, et avec le soldat couvert de sang, on s'y serait cru, » poursuit-elle.

Après ce stage, les diplômés SOF utiliseront les nouvelles compétences acquises pour former leur collègue dans leur garnison ou alors ils pourront les amener au Centre afin de profiter de toutes les installations. Les diplômés seront également en mesure d'orienter la formation et les grandes décisions de leur pays dans ce domaine. Le colonel Irizarry cite un exemple : « Un officier récemment passé par le NSHQ occupe à présent un poste à responsabilité au sein des SOF tchèques. »  « Il a envoyé ses auxiliaires sanitaires en formation chez nous et certains d'entre eux sont chargés de former les forces nationales conventionnelles. » 

Promouvoir l'interopérabilité

Une composante essentielle de la mission du NSHQ est de promouvoir l'interopérabilité des forces d'opérations spéciales. En effet, l'organisation structurelle et les processus doctrinaux en la matière diffèrent d'un pays à l'autre.  « L'un des objectifs clés de la formation pour chaque stagiaire est d'établir des liaisons avec les différents éléments SOF et de comprendre leur fonctionnement.  Cela favorise l'interopérabilité, » dit le lieutenant-colonel Kjell Boman, un médecin des SOF suédoises affecté à la section médicale du NSHQ.

« L'intérêt de cette formation est qu'elle rassemble des nombreux stagiaires de nationalités différentes qui partagent leur expérience et qui collaborent comme dans la réalité, lorsque des militaires de différents pays se retrouvent sur le terrain, » indique un stagiaire danois.

Les stages SOF de l'OTAN dispensés à l'ACME ne visent pas uniquement les SOF. Le personnel de santé des forces conventionnelles est encouragé à assister à ces stages pour une meilleure compréhension et un renforcement des liens entre les chaînes de santé nationales au sens large, et le chaîne de soutien santé des SOF, de taille plus réduite.  

« Nous fournissons une plate-forme de simulation d'entraînement que l'Alliance peut utiliser dès à présent et qui pourra servir à l'avenir à renforcer et à maintenir la capacité et l'interopérabilité des SOF sur le plan médical en établissant des liens entre ces forces pour de futures opérations », ajoute le lieutenant-colonel Irizarry.

Le Centre contribue également aux opérations de l'avant. Des simulateurs d'amputations multiples seront déployés cette année pour tester les compétences des auxiliaires sanitaires SOF de la FIAS.  « Il s'agit d'une étude interne destinée à aider les commandants SOF des pays à déterminer si les auxiliaires sanitaires ont les compétences nécessaires pour répondre aux besoins des futures opérations dans des conditions rudimentaires au-delà d'une fenêtre d'évacuation de 60 minutes”, poursuit-il.  

Enfin, les pays peuvent demander un scénario de formation spécifique pour leurs propres médecins SOF. L'unité d'aviation néerlandaise a approché le Centre pour que ses convoyeurs de l'air puissent bénéficier d'une formation dans la salle simulant l'environnement d'un C-130.

Être à la pointe de la médicalisation de l'avant

« La capacité de l'ACME SOF à être flexible, agile, précis et rapide le place à la pointe de la médicalisation de l'avant », explique le lieutenant-colonel Irizarry.  « Nous sommes le banc d'essai des nouveaux produits, techniques et concepts, qui peuvent donc être validés par les SOF puis transmis à l'Alliance dans son ensemble.  Par exemple, les orientations actuelles relatives aux soins tactiques des blessés en situation de combat, que l'OTAN dans sa majorité applique aujourd'hui pour les premiers soins, ont été élaborées par les SOF à la fin des années 90. »  

Pour étayer ce concept, l'ACME SOF réunit des partenaires de l'industrie, des organisations gouvernementales et non gouvernementales ainsi que des universitaires au sein d'un réseau collaboratif, qui peut être mis à profit pour répondre aux besoins des SOF de l'Alliance et du personnel de santé de l'OTAN d'une manière plus générale.

Par exemple, certains simulateurs sont achetés en faisant appel aux services de l'Agence OTAN de soutien (NSPA), qui a la possibilité de négocier un prix OTAN ainsi que des conditions avantageuses pour les pays désireux de commander ces produits.  « Les pays de l'OTAN qui cherchent à acquérir des simulateurs peuvent faire appel à l'expertise du Centre et nous pourrons leur fournir un avis militaire éclairé pour les guider dans leurs décisions, » indique le lieutenant-colonel IrizarryDe plus, grâce aux relations étroites qu'il entretient avec les partenaires de l'industrie, l'ACME SOF est en mesure de préconiser des améliorations ou d'orienter la conception des produits afin qu'ils répondent mieux aux besoins de l'Alliance.

Des forces spécialisées et mobiles

Situé au SHAPE à Mons (Belgique), le Quartier général des opérations spéciales de l’OTAN est le point de départ de l'élaboration, de la coordination et de la conduite de toutes les opérations spéciales de l'Alliance, l'objectif étant d'optimiser le recours aux forces spéciales. Sa composition multinationale est l'une des plus diversifiées de l'OTAN.

Les SOF de l’OTAN sont de petites unités rapidement déployables qui tirent parti de leur vitesse d'intervention et de l'effet de surprise.  Les SOF peuvent intervenir sur terre, mer et air et peuvent opérer indépendamment ou à l'appui des forces conventionnelles.

L’un des nombreux atouts des SOF est leur capacité à se projeter rapidement pour faire face aux crises émergentes et à s’infiltrer dans des environnements incertains ou politiquement sensibles.

Au sommet de Chicago de 2012, les Alliés ont décidé de renforcer les capacités des SOF à s'entraîner et à mener des opérations ensemble. La médecine de combat est l'un de ces domaines.