Communiqué final

Président : M. J. Luns

  • 13 Nov. 1979 - 14 Nov. 1979
  • |
  • Mis à jour le: 06 Nov. 2008 00:02

<p>La menace nucléaire - SALT II - Evolution du potentiel stratégique soviétique - Disparités des forces nucléaires de théâtre - Vulnérabilité des systèmes nucléaires de théâtre - Ecart croissant entre les potentiels nucléaires de théâtre à longue portée

Le Groupe des plans nucléaires de l'OTAN s'est réuni en session ministérielle à La Haye les 13 et 14 novembre 1979. Les ministres de la défense participant à cette vingt-sixième réunion semestrielle du Groupe étaient: M. José Desmarets, Belgique, M. Allan McKinnon, Canada, M. Poul Sogaard, Danemark, M. Hans Apel, République fédérale d'Allemagne, M. Attilio Ruffini, Italie, M. Willem Scholten, Pays-Bas, M. Thorvald Stoltenberg, Norvège, M. Francis Pym, Royaume-Uni, et M. Harold Brown, Etats-Unis. La Grèce et la Turquie étaient représentées par leurs ambassadeurs auprès de l'OTAN, M. Nicolas Athanassiou et M. Osman Olcay. La réunion était présidée par M. Joseph M. A. H. Luns, Secrétaire général de l'OTAN. Y assistaient également le Président du Comité militaire de l'OTAN et les Grands commandants de l'OTAN.

Après avoir entendu l'exposé des Etats-Unis sur la situation actuelle des forces nucléaires de ce pays, les ministres ont évoqué la menace nucléaire et ses incidences pour la sécurité de l'OTAN. Ils ont réaffirmé l'intérêt actif qu'ils portent à une ratification prochaine du Traité SALT II.

Rappelant que l'Union soviétique a atteint la parité approximative avec les Etats-Unis en ce qui concerne les forces stratégiques, les ministres ont examiné les incidences que pourrait avoir l'évolution de son potentiel stratégique. Ils ont reconnu que la parité étant atteinte dans ce domaine, les disparités des forces nucléaires de théâtre revêtent une importance toute particulière pour l'équilibre nucléaire global. Ils ont rappelé que, si beaucoup des systèmes nucléaires de théâtre de l'OTAN, surtout ceux à longue portée, sont vulnérables et, dans certains cas, déjà anciens, I'Union soviétique de son coté a continué d'accroÎtre et d'améliorer ses forces nucléaires de théâtre. Compte tenu de ces facteurs, il existe d'ores et déjà un écart entre les potentiels nucléaires de théâtre à longue portée et cet écart ne cesse de s'élargir. C'est pourquoi les ministres ont réaffirmé la nécessité de moderniser les forces nucléaires de théâtre de l'OTAN. Ils ont aussi réaffirmé qu'il importe, en parallèle, de rechercher la limitation des armements.

Les ministres ont été d'accord pour estimer qu'il ne faut pas laisser certaines déclarations récentes d'hommes politiques soviétiques concernant les tendances nucléaires en Europe dissimuler l'accroissement inquiétant du potentiel nucléaire de théâtre à longue portée de l'URSS et l'aggravation de la menace nucléaire qui pèse sur l'Alliance. Ils ont marqué qu'ils voient dans l'introduction du missile SS-20 et du bombardier Backfire une source de préoccupation particulière. Ils ont rappelé que, si le nombre total de lanceurs soviétiques pouvant être dirigés contre la zone européenne de l'OTAN a été légèrement réduit ces dernières années, le déploiement du SS-20, avec ses trois véhicules de rentrée indépendants (MIRV), s'est traduit par une augmentation sensible du nombre d'ogives soviétiques capables d'atteindre la zone européenne de l'OTAN dans son ensemble. Ils ont noté que le SS-20, dont la portée est deux fois plus grande que celle de la plupart des missiles qu'il remplace, pourrait être dirigé vers l'Europe à partir de zones situées bien au-delà des régions occidentales de l'Union soviétique, qu'il est considérablement plus précis que les systèmes antérieurs et représente donc une menace plus sérieuse pour l'Ouest et que sa mobilité lui confère une capacité de survie nettement supérieure. Les ministres ont noté que le Backfire a un rayon d'action beaucoup plus grand et peut porter davantage d'armes que les bombardiers à moyen rayon d'action soviétiques des types précédents et que ses systèmes électroniques perfectionnés et son aptitude à voler à grande vitesse à basse altitude renforcent sa capacité de pénétration des défenses anti-aériennes.

Compte tenu de cette situation, les ministres ont étudié l'impératif urgent que représente la modernisation des forces nucléaires de théâtre de l'OTAN dans le cadre du Programme de défense à long terme, ainsi que la nécessité de rechercher parallèlement des mesures connexes de limitation des armements. Dans ce contexte, les ministres ont noté que la modernisation des systèmes nucléaires de théâtre, par l'introduction de nouveaux systèmes à longue portée hautement précis et aptes à survivre basés dans la zone européenne de l'OTAN, améliorerait le dispositif de dissuasion de l'Alliance et renforcerait le lien entre les forces classiques de l'OTAN et les systèmes stratégiques intercontinentaux des Etats-Unis et qu'en outre, grâce à l'accroissement des forces nucléaires de théâtre à longue portée de l'OTAN, elle comblerait une lacune dans la gamme de l'escalade et élargirait l'éventail des options de riposte modérée et contrôlée. Un ajustement en hausse des forces nucléaires de théâtre à longue portée réduirait au minimum le risque que les Soviétiques puissent penser - même s'ils se trompent - qu'ils pourraient utiliser des forces à longue portée pour lancer, ou menacer de lancer, des attaques limitées conte la zone européenne de l'OTAN à partir d'emplacements situés au coeur du territoire soviétique. Les ministres sont convenus que les besoins des forces classiques devraient garder la priorité dans les plans de forces et qu'il ne saurait être question que l'Alliance augmente sa dépendance à l'égard des armes nucléaires ou abaisse le seuil nucléaire.

Préparant le débat et la prise de décisions qui doivent intervenir en décembre, les ministres sont convenus que ceux-ci devraient être fondés sur deux rapports, celui du Groupe de haut niveau concernant la modernisation des forces nucléaires de théâtre à longue portée et celui du Groupe spécial sur la limitation des armements, compte tenu de leurs délibérations à la présente réunion du Groupe des plans nucléaires. Ainsi qu'il était prévu, aucune décision n'a été prise. Les ministres ont réaffirmé que modernisation et négociations de limitation des armements englobant les forces nucléaires de théâtre à longue portée devraient être utilisées comme moyens complémentaires pour atteindre l'objectif fondamental, qui est de maintenir et d'améliorer la sécurité de l'Alliance et de renforcer la stabilité et la détente en général. Dans ce contexte, les ministres se sont félicités du travail constructif qui a été effectué pour élaborer des propositions de limitation des armements en vue d'amener l'Union soviétique à participer à des négociations visant à réduire la disparité du niveau des forces nucléaires et, par là, à favoriser le maintien de la paix à un même niveau de sécurité. En outre, les ministres ont noté que l'OTAN pourrait apporter des ajustements à son arsenal nucléaire de théâtre global en Europe en retirant un nombre assez important d'ogives, mesure qui ferait partie intégrante d'un programme de modernisation des forces nucléaires de théâtre à longue portée. Ils sont convenus que cette question appelait un complément d'étude.

Après avoir examine le programme de travail futur du Groupe des plans nucléaires, les ministres ont accepté avec plaisir l'invitation que leur a faite le ministre de la défense de la Norvège de tenir leur prochaine réunion dans ce pays au printemps de 1980.