Communiqué final
Président : M. M. Brosio
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<p>Etat de l'Alliance - Mesures consécutives au retrait de la France - Sécurité européenne et Allemagne - Caractère défensif du Traité - Le règlement des problèmes européens - Rapport à préparer sur les relations Est-Ouest - La prolifération nucléaire -
- Le Conseil s'est réuni en session ministérielle à Bruxelles les 7 et 8 juin 1966.
- Le Conseil a discuté de l'état de l'Alliance. Après un franc échange de vues, les Ministres ont été d'accord pour considérer que l'Alliance atlantique est aussi nécessaire aujourd'hui que jamais pour sauvegarder la liberté et l'héritage commun de ses peuples, fondés sur les principes de la démocratie, les libertés individuelles et le règne du droit. L'objectif premier de l'Alliance atlantique est la défense commune de tous les pays membres; à cette fin, ces derniers se sont engagés à maintenir et à accroître leur capacité individuelle et collective de résistance à une attaque armée, en agissant individuellement et conjointement, d'une manière continue et effective, pour développer leurs propres moyens et se prêter mutuellement assistance.
- Les Ministres sont convenus d'examiner, conformément aux principes et obligations du Traité, et dans un esprit de coopération, les problèmes soulevés dans les mémorandums français du mois de mars dernier, afin de parvenir, dans les plus brefs délais, à des solutions qui soient acceptables pour tous les intéressés et qui continuent à assurer la sécurité. A cette réunion, le Conseil:
- a pris note de la déclaration faite par M. Luns au sujet des discussions auxquelles quatorze Ministres ont procédé le 6 juin;
- a décidé le transfert des quartiers généraux de l'OTAN hors de France;
- a adressé aux pays du Benelux une invitation unanime à fournir un nouvel emplacement pour le Commandement Suprême Allié pour l'Europe;
- a décidé qu'une certaine simplification de la structure du Commandement devrait être effectuée. Celle-ci sera réalisée en premier lieu pour Centre-Europe, en combinant dans un seul commandement et dans un seul quartier général les états-majors actuellement répartis entre les quartiers généraux du Commandant en Chef de Centre-Europe et les Commandants en Chef des forces terrestres et aériennes de Centre-Europe. Ce quartier général sera transféré à un nouvel emplacement situé soit au Benelux, soit en Allemagne;
- a constaté que des études complémentaires seront nécessaires en vue d'établir les besoins précis et les possibilités d'accueil des divers pays; a noté que les Etats du Benelux, la République fédérale d'Allemagne, le Secrétaire général et les autorités militaires de l'OTAN ont été pri鳠de procéder immédiatement à ces études, et a noté en outre que, dès que les renseignements demandés seront disponibles, des décisions définitives devront être prises d'urgence;
- a adressé à l'Italie une invitation unanime à accueillir le Collège de Défense de l'OTAN;
- a décidé que le Groupe permanent sera supprimé et remplacé par de nouveaux organismes appropriés comprenant un état-major international intégré;
- a pris note de la déclaration faite par M. Luns concernant le siège du Conseil, ainsi que de la déclaration du Ministre des Affaires Etrangères de France à ce sujet.
- En ce qui concerne la procédure de négociation, les Ministres sont convenus que :
- les questions à régler conjointement entre les alliés à la suite des communications de la France feront l'objet, en premier lieu, de discussions au sein du Conseil Permanent;
- les principales de ces questions concernent le rôle et les missions des forces françaises stationnées en Allemagne, y compris leur coopération avec les forces de l'OTAN et les dispositions relatives au commandement;
- d'autres questions, telles que la participation de la France au plan NADGE et aux projets d'infrastructure OTAN feront l'objet de discussions de la même manière;
- le Conseil Permanent pourra naturellement prendre toutes les dispositions qu'il jugera utiles pour procéder à la discussion de ces questions. Il pourra, par exemple, décider de créer des groupes réduits pour examiner l'ensemble de ces questions ou certaines d'entre elles. Lorsque les problèmes politiques auront été examinés et qu'un accord suffisant sera intervenu, l'élaboration des arrangements militaires nécessaires aura lieu par voie de discussions entre le Haut Commandement français et le SACEUR;
- si tout progrès se révèle impossible au sein du Conseil Permanent, la discussion sera reprise à l'échelon ministériel.
- Dans leur tour d'horizon de la situation internationale, les Ministres ont étudié les relations des pays membres avec l'Union soviétique et les pays d'Europe orientale.
- Etant donné les objectifs fondamentaux de l'Union soviétique, le niveau de ses forces armées et le fait qu'elle continue d'affecter une importante proportion de ses ressources économiques et techniques à des fins militaires, les Ministres ont conclu à la nécessité pour les pays occidentaux de maintenir leurs forces à un niveau approprié pour assurer la dissuasion et la défense.
- Les Ministres ont longuement étudié les principaux problèmes intéressant la sécurité européenne. Ils ont réaffirmé les termes de leur déclaration du 16 décembre 1958 relative à Berlin. Ils ont déploré qu'aucun progrès n'ait été accompli sur l'importante question de la réunification de l'Allemagne et que les manoeuvres tendant à discréditer la République fédérale d'Allemagne se poursuivent. Prenant note de l'initiative positive prise par le Gouvernement allemand dans sa note du 25 mars 1966, les Ministres ont réaffirmé que la solution de la question allemande est l'un des problèmes essentiels dans les relations Est-Ouest, et sont convenus qu'il était nécessaire de rechercher sans relâche un règlement pacifique qui tienne compte du droit fondamental du peuple allemand à la réunification.
- Le caractère défensif du Traité de l'Atlantique Nord est indiscutable. En signant celui-ci, les pays alliés se sont expressément engagés à se conformer aux principes de la Charte des Nations Unies, en s'abstenant d'employer la force pour régler les différends internationaux. En outre, le caractère défensif de l'Alliance s'est manifesté à plusieurs reprises par la modération dont les différents Etats membres ont fait preuve depuis dix-sept ans, même en face de provocations et d'actes hostiles affectant la zone du Traité. Grâce aux conditions de sécurité créées et maintenues par une défense commune efficace de la zone de l'Atlantique Nord, la consultation politique entre partenaires permet de prendre des initiatives qui peuvent contribuer non seulement à la stabilité des relations Est Ouest, mais encore au bien-être général de l'humanité.
- Pour progresser vers la solution des problèmes complexes que pose un règlement européen, il est indispensable que tous soient fermement décidés à régler les questions en litige. Mettre pacifiquement un terme à la division de l'Europe demeure au premier rang des préoccupations de l'Alliance, son objectif étant une Europe à nouveau entière et une Allemagne à nouveau unie.
- Dès à présent, les pays membres s'attachent à améliorer encore les relations entre les peuples de l'Europe orientale et de l'Europe occidentale, et à réduire entre ceux-ci la méfiance et la crainte. Ils sont convaincus que de nouveaux résultats tangibles peuvent maintenant être obtenus dans les domaines culturel, économique, scientifique et technique.
- Les Ministres ont invité les Représentants permanents à continuer d'étudier attentivement les possibilités d'amélioration des relations Est-Ouest, et à préparer un rapport approfondi sur ces questions en vue de sessions auxquelles assisteraient dans toute la mesure du possible les Ministres des Affaires étrangères des différents Etats. Ce rapport, qui devrait traiter de toutes les initiatives qui pourraient être prises dans ce domaine, couvrirait entre autres les problèmes liés à la sécurité européenne et à la réunification de l'Allemagne.
- Les Ministres ont marqué l'intérêt qu'ils ne cessent de porter au progrès vers un désarmement général, complet et contrôlé. Ils ont exprimé les graves préoccupations que leur cause le problème de la prolifération nucléaire et de ses conséquences pour le monde. Ils se sont déclarés résolus à poursuivre leurs efforts pour résoudre ce problème. En particulier, les gouvernements que concerne la Conférence de Genève des Dix-huit puissances ont réaffirmé leur intention de tout mettre en oeuvre pour aboutir à des résultats positifs.
- En ce qui concerne les relations gréco-turques, les Ministres ont pris note du rapport du Secrétaire général relatif à sa "Mission de surveillance" et confirmé leur accord sur la poursuite de ses activités à cet égard. Ils ont accueilli avec satisfaction l'annonce, faite par les Ministres des Affaires étrangères de Grèce et de Turquie, que "les Gouvernements de Grèce et de Turquie, inspirés par le désir sincère de faciliter une solution pacifique et concerté du problème de Chypre et d'améliorer leurs relations, ont décidé de prendre contact et de procéder à des échanges de vues au sujet de la question de Chypre et des relations gréco-turques. La procédure à suivre durant ces entretiens sera fixée d'un commun accord". Les Ministres ont réaffirmé leur satisfaction de voir se maintenir a Chypre la présence de la Force des Nations Unies, et ils ont déclaré qu'ils apportaient leur soutien aux efforts déployés par les Nations Unies pour sauvegarder la paix et améliorer la situation dans l'Ile.
- Les Ministres ont réaffirmé leur désir de promouvoir la coopération économique dans l'esprit de l'Article 2 du Traité de l'Atlantique Nord. Ils ont reconnu la nécessité de conjuguer leurs efforts pour faciliter la recherche dans les domaines scientifique, technique et de la production, ainsi que pour étendre la coopération et l'échange des connaissances afin que, dans un monde où le progrès scientifique est si rapide, l'écart entre l'Europe et l'Amérique du Nord, dans le domaine des réalisations technologiques, puisse être réduit.
- Tous les pays économiquement avancés, ceux de l'Est comme ceux de l'Ouest, ont la commune obligation de s'attaquer ensemble aux problèmes fondamentaux auxquels les pays en voie de développement doivent faire face. Les progrès des règlements politiques et du désarmement faciliteront cette action en libérant des ressources et des énergies qui permettraient à l'humanité d'améliorer son sort.
- Reconnaissant la nécessité de poursuivre les efforts accomplis pour apporter une aide de défense à la Grèce et à la Turquie dans le cadre de l'Alliance, afin que la contribution de ces pays à la défense commune demeure efficace, le Conseil a adopté une résolution recommandant une extension de la participation à ce programme d'aide.
- Les Ministres ont pris connaissance d'un rapport intérimaire sur les activités du Comité spécial de Ministres de la Défense que le Conseil a créé en 1965. Un nouveau rapport sera soumis au Conseil lors de la session ministérielle de décembre.
- Etant donné l'importance que la science et la technologie revêtent pour la puissance militaire de l'Alliance et la vitalité économique de ses membres, les Ministres ont pris note avec satisfaction des améliorations récemment apportées à la procédure de coopération entre membres de l'Alliance en matière d'étude, de mise au point et de production de matériels militaires. Ils ont encouragé les pays membres à présenter des projets qui se prêteront à une coopération.
- Ils ont noté qu'une réunion des Ministres de la Défense se tiendra en juillet pour étudier plus avant l'institution d'une procédure d'établissement des Plans de forces permettant de mettre un programme quinquennal au point et de l'ajuster annuellement.
- Une réunion du Conseil au niveau ministériel se tiendra en décembre 1966.