Communiqué final
Comité des plans de défense et du Groupe des plans nucléaires
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- Le Comité des plans de défense et le Groupe des plans nucléaires de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord se sont réunis en session ministérielle à Bruxelles les 25 et 26 mai.
- Un des principaux objectifs de notre réunion était de définir l'orientation politique des activités de planification de la défense à mener au sein de l'OTAN, tant au niveau national que collectivement, d'ici à l'an 2000 et au-delà. Nos discussions ont eu pour toile de fond le changement radical qui s'opère en Europe, à un rythme qui ne s'est pas ralenti depuis la publication de la directive précédente, il y a deux ans. De nombreux pays d'Europe centrale et orientale ont fait des progrès considérables vers l'objectif d'une Europe constituée de démocraties politiquement et économiquement stables. Globalement, ces changements ont accru la sécurité de l'Alliance. Mais ce résultat ne doit pas faire oublier l'instabilité qui règne en plusieurs endroits du continent. Si la menace politique et militaire d'hier n'existe plus, en revanche, le risque s'est accru de voir éclater des crises qui pourraient nécessiter la mise en oeuvre de forces militaires à l'appui d'actions plus importantes menées au plan politique en vue de les résoudre. La persistance de conflits armés en Europe et à sa périphérie inquiète particulièrement tous les Alliés. Au-delà de la tragédie humaine immédiate qu'ils provoquent, ces conflits font souvent peser un risque d'escalade et de débordement dans les pays voisins.
- La situation dans l'ex-Yougoslavie et, en particulier, la guerre en Bosnie-Herzégovine et les atrocités dont elle est le théâtre, qui sont un outrage à tous les principes, à toutes les valeurs d'une société civilisée et qui se poursuivent en dépit de toutes les tentatives de règlement pacifique, nous préoccupent gravement. Nous avons contribué, individuellement et collectivement, aux initiatives des Nations Unies pour alléger les souffrances grâce à la fourniture d'une aide humanitaire et appuyé les efforts qu'elles ont entrepris dans le but de mettre fin au conflit. L'Alliance a joué un rôle important dans l'exécution de mandats donnés par le Conseil de sécurité des Nations Unies. Elle assure le respect de la zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Bosnie-Herzégovine depuis le 12 avril et, dans l'Adriatique, des navires de l'OTAN et de l'Union de l'Europe occidentale veillent à la mise en oeuvre des sanctions décrétées par les Nations Unies et appliquent un blocus maritime de la Serbie et du Monténégro.
- Nous restons foncièrement attachés à ce que ce conflit, qui menace la souveraineté et l'intégrité territoriale de la République de Bosnie-Herzégovine, trouve une solution passant par la mise en oeuvre du plan de paix Vance-Owen. Nous accueillons avec satisfaction les efforts visant à promouvoir un règlement durable et équitable de ce conflit. Dans ce contexte, nous avons examiné les développements les plus récents et, en particulier, le programme d'action commun pour la Bosnie-Herzégovine rendu public le 22 mai par des membres du Conseil de sécurité des Nations Unies (la France, l'Espagne, le Royaume-Uni, les Etats-Unis et la Fédération de Russie). Nous avons pris note de l'importance accordée aux zones de sécurité, ainsi qu'aux sanctions et autres mesures destinées à faire pression sur les Serbes de Bosnie et à les amener à accepter le plan de paix. Les Nations Unies devront définir clairement la portée de tout nouvel engagement dans ces domaines. Nous restons disposés à examiner favorablement toute nouvelle demande d'assistance que nous adresseraient les Nations Unies en vue de la mise en oeuvre de résolutions du Conseil de sécurité.
- C'est en tenant compte de la situation très complexe dans laquelle nous aménageons la structure de forces et les capacités de l'Alliance que nous avons examiné un premier rapport traitant des incidences d'un soutien aux activités de maintien de la paix des Nations Unies et de la CSCE sur la planification de la défense, rapport dont nous avions demandé la rédaction en décembre dernier. La tâche est délicate : elle consiste à renforcer encore l'aptitude de l'OTAN à répondre rapidement et efficacement aux demandes de soutien relatives à des activités de ce type. Le rôle premier des forces militaires de l'Alliance, c'est-à-dire garantir la sécurité et l'intégrité territoriale des Etats membres, n'a pas changé. A côté de cela, le soutien aux activités de maintien de la paix prend une importance croissante et peut nécessiter des prélèvements supplémentaires sur nos ressources nationales et collectives. Nous sommes parvenus à la conclusion qu'en règle générale, des forces polyvalentes bien entraînées et dotées de l'équipement approprié sont les mieux à même de remplir des tâches de maintien de la paix, ce qui ne veut pas dire qu'elles n'auront pas besoin, pour des missions particulières, d'un entraînement et de matériel complémentaires. Les dispositions que nous avons prises dans le but d'assurer notre défense collective conviennent tout à fait pour constituer et entraîner des forces en vue de toutes ces missions. Nous revoyons aussi nos plans concernant la logistique, l'infrastructure et les communications, afin de pouvoir apporter un soutien efficace aux activités de maintien de la paix. Les travaux vont se poursuivre dans ces domaines comme dans d'autres, et nous ferons le point à notre prochaine réunion.
- Le fait d'oeuvrer avec nos partenaires de la coopération au soutien des activités de maintien de la paix menées sous l'égide des Nations Unies ou de la CSCE contribue puissamment à la sécurité et à la stabilité en Europe. Nous nous félicitons du travail qu'effectue le Conseil de coopération nord-atlantique afin de donner à la coopération dans ce domaine un cadre conceptuel et de déterminer des actions concrètes qui amélioreront notre capacité d'agir ensemble au service du maintien de la paix. Nous assumerons pleinement notre rôle dans ce processus de coopération. Nous serons heureux de pouvoir entreprendre avec nos partenaires de la coopération un programme intensif d'activités pratiques, qui pourrait comporter des actions conjointes en matière de planification, de formation et d'exercices.
- Nous avons approuvé la Directive ministérielle 1993, qui marque, à l'OTAN, le début d'un nouveau cycle bisannuel d'établissement des plans de forces. Il s'agit d'un document essentiel pour la planification de la défense, qui fournit aux autorités militaires de l'Alliance des orientations pour l'élaboration des propositions de forces destinées aux pays membres et examine les facteurs politiques, militaires, civils et économiques susceptibles d'influer sur l'évolution des forces de l'OTAN. Il évalue l'incidence probable de ces facteurs sur la mise en oeuvre de la stratégie de l'Alliance et la préparation de ses propositions de forces, et trace les lignes directrices des plans logistiques, des plans civils d'urgence et de la coopération en matière d'armements. La cohésion de l'Alliance dépend du partage équitable des charges, y compris les coûts, ainsi que des avantages de la défense commune. Certes, l'effort global que les pays membres consentent en matière de défense est un élément important de ce partage, mais la contribution qu'ils fournissent à la coopération et au dialogue avec les démocraties naissantes d'Europe centrale et orientale est également bénéfique pour la sécurité de l'Alliance. En conformité avec le Concept stratégique de l'Alliance, nous avons souligné qu'il est important de dégager des ressources adéquates, tant pour préserver l'efficacité de la contribution militaire à la défense commune que pour garantir la mise en oeuvre des missions et des rôles nouveaux de l'OTAN.
- Le processus d'adaptation à la nouvelle stratégie de l'Alliance et de réalisation de la nouvelle structure de forces est en bonne voie. Au moment où nous adaptons nos forces à de nouveaux défis, l'apport de nouveaux moyens que réclame la structure de forces plus mobile et plus souple de l'OTAN constitue une autre dimension non négligeable du partage des responsabilités de la défense commune. Notre but est de disposer d'un choix de moyens et de formations, dont plusieurs auront un caractère multinational, qui nous permette de réagir avec souplesse à une large gamme d'éventualités envisageables. Les forces de réaction tiendront une place importante dans cette structure, et un potentiel efficace est déjà en train de se constituer. Par exemple, des éléments de nos forces de réaction maritimes assurent l'application des sanctions décrétées contre l'ex-Yougoslavie; le Corps multinational de réaction rapide du CAE devrait devenir pleinement opérationnel d'ici à 1995, et l'Etat-major de planification des forces de réaction (Air) est entré en activité en avril. La restructuration des forces de défense principales, lesquelles représentent la majeure partie du dispositif de l'Alliance, progresse elle aussi à grands pas. La création de trois nouveaux corps d'armée multinationaux (deux, germano-américains, et un, néerlando-allemand), destinés aux forces de défense principales, est en cours au sein de la structure militaire intégrée; un accord a été conclu qui définit les modalités de la mise à disposition, dans le cadre de l'Alliance, du corps d'armée européen créé par la France et l'Allemagne.
- La situation politique continue cependant d'évoluer rapidement, et nos autorités militaires procèdent par conséquent à un réexamen approfondi de la structure et des niveaux de forces de l'Alliance pour s'assurer que l'OTAN demeure tout à fait capable de faire face aux nouveaux problèmes en matière de sécurité. Nous avons accueilli avec satisfaction un rapport sur le travail accompli à ce jour et nous attendons avec intérêt un rapport final que nous devrions recevoir en décembre. Nous avons demandé que les conclusions qui y figureront soient prises en compte lors de la définition des objectifs de forces 1994 de l'Alliance, que nous examinerons au printemps prochain.
- L'engagement des Alliés nord-américains vis-à-vis de la paix et de la stabilité en Europe et la présence de forces des Etats-Unis sur le continent restent d'une importance vitale pour la sécurité européenne, indissociable de celle de l'Amérique du Nord. Nos efforts en vue de développer une nouvelle structure de forces cohérente ont été secondés par la décision bienvenue des Etats-Unis de maintenir en Europe un potentiel militaire significatif, apte à contribuer à l'éventail complet des tâches de l'OTAN.
- Parallèlement, et en harmonie avec la transformation de l'Alliance, l'Union de l'Europe occidentale affirme son rôle et renforce le pilier européen de l'Alliance. Depuis le transfert de son Conseil et de son Secrétariat à Bruxelles, en janvier dernier, nos relations de travail, déjà étroites, se sont encore resserrées, dans l'esprit de transparence et de complémentarité entre nos deux organisations. Nous continuerons de rechercher des arrangements d'un bon rapport coût-efficacité et nous resterons attentifs à éviter les doubles emplois, face aux défis issus du nouvel environnement de la sécurité.
- Nous avons mis à profit cette réunion pour réaffirmer notre attachement à une coopération effective dans le domaine des armements. Nous nous félicitons des accords récents visant à réformer les politiques, les structures et les procédures de coopération en matière d'armements au sein de l'OTAN, afin de mieux les adapter aux défis des années 90. Nous avons noté que la Conférence des Directeurs nationaux des armements (CDNA) a entrepris d'étudier les possibilités qui s'offrent à l'OTAN d'adopter une approche commune en vue de l'établissement d'un système de surveillance au sol et a proposé, pour l'Alliance, un code de conduite régissant le commerce de défense. Nous nous félicitons également des nouvelles initiatives prises par la CDNA en vue d'améliorer la coordination des travaux menés à l'intérieur de l'Alliance dans le domaine de la défense aérienne élargie et de mettre au point une nouvelle stratégie visant à promouvoir au sein de l'OTAN la recherche et le développement technologique dans le secteur de la défense.
- Nous avons approuvé un rapport traitant du renouvellement du Programme d'infrastructure de l'OTAN financé en commun, qu'il avait été demandé de revoir d'urgence. Le renouvellement permettra à cet important programme de rester pleinement dans la ligne de notre concept stratégique et de notre structure de forces, tout en offrant la souplesse que requièrent les missions et les rôles nouveaux de l'OTAN. Conscients de la limitation des ressources, nous avons décidé que le programme renouvelé devrait être axé sur le financement commun des moyens d'infrastructure nécessaires en plus de ceux dont on peut raisonnablement s'attendre à disposer face aux ressources nationales, sans exclure cependant le financement commun exceptionnel, cas par cas.
- Nous avons également pris note avec satisfaction du mandat du Bureau principal des ressources qui a été établi et investi de la responsabilité de toutes les questions ayant trait à l'affectation des ressources militaires financées en commun par l'OTAN. Cet organisme veillera a ce que l'utilisation des moyens très limités dont dispose l'OTAN obéisse à une intégration et à une rentabilité croissantes; sa création permettra de rationaliser et de simplifier les structures et les procédures existantes des comités de l'OTAN.
- Nous avons réaffirmé le rôle essentiel que jouent pour l'Alliance des forces nucléaires efficaces - y compris des forces substratégiques bien réparties dans l'ensemble de sa zone européenne - maintenues au niveau minimum nécessaire pour assurer la sécurité et la stabilité. La réduction et la restructuration de l'arsenal et du dispositif européens des forces nucléaires substratégiques de l'OTAN, que nous avions approuvées lors de notre réunion à Taormina en octobre 1991, ont été achevées bien avant la date prévue. Après l'élimination, l'année dernière, de toutes les armes nucléaires tactiques navales et à lanceur terrestre, ce sont maintenant les armes à vecteur aérien qui ont fait l'objet d'une substantielle réduction. Suivant ainsi l'évolution du contexte de sécurité, l'arsenal nucléaire européen de l'OTAN a diminué de plus de 80 % par rapport à ce qu'il était il y a deux ans.
- Nous nous félicitons de ce que, comme il l'a annoncé précédemment, le gouvernement russe, à l'instar de l'OTAN, a retiré toutes les armes nucléaires tactiques navales des sous-marins et bâtiments de surface. Nous nous réjouissons aussi de la signature, par les Etats-Unis et la Russie, du Traité START II, dont la mise en oeuvre se traduira par une nouvelle réduction, d'une portée historique, des forces nucléaires stratégiques des deux pays. L'application de ce traité est liée à l'entrée en vigueur du Traité START I; il est donc très important pour le processus du désarmement que toutes les parties ratifient cet accord et respectent les engagements pris aux termes du Protocole de Lisbonne. Nous sommes très attachés à l'élimination rapide des armes nucléaires tactiques et stratégiques de l'ex-Union soviétique, conformément aux obligations précitées et à d'autres engagements, et nous nous félicitons de l'aide que s'efforcent d'apporter plusieurs pays alliés pour que le stockage et le démantèlement des armes et l'élimination de leur matériau fissible se fassent dans de bonnes conditions de sûreté et de sécurité.
- Compte tenu des dangers que fait courir la prolifération de ce type d'armement, le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) est essentiel à la sécurité et à la stabilité : nous chercherons à ce que tous les pays y accèdent et adhèrent à un régime de vérification renforcé. A cet effet, nous appelons tous les pays qui ne sont pas encore parties au traité à y souscrire le plus tôt possible en tant qu'Etats non dotés d'armes nucléaires. Nous appuyons la prorogation indéfinie du TNP en 1995. L'intention signifiée récemment par la République populaire démocratique de Corée de se retirer du TNP demeure très préoccupante. Nous engageons le gouvernement de ce pays à renouveler son adhésion à ce traité, à revenir sur sa déclaration et à honorer ses obligations concernant la non prolifération.
- L'application intégrale du Traité FCE, notamment l'exécution, dans les délais, des réductions qu'il impose, reste d'une importance considérable pour la sécurité européenne. Nous coopérons étroitement avec nos partenaires pour leur permettre de remplir leurs obligations. Nous participons activement aussi aux débats qui se déroulent actuellement au sein du Forum de la CSCE pour la coopération en matière de sécurité, à Vienne. En particulier, nous soutenons les efforts tendant à promouvoir une plus grande transparence dans les plans de défense, qui devrait contribuer à instaurer une meilleure compréhension et une confiance accrue entre les pays participant au processus de la CSCE.
- La finalité première de la planification de la défense de l'OTAN reste de garantir l'état de préparation des forces alliées et de leurs structures de soutien, pour contribuer aux objectifs globaux de l'Alliance en matière de sécurité. Il faut aussi préserver la cohérence des programmes nationaux de défense afin que l'Alliance puisse assumer l'éventail complet des tâches qui lui sont dévolues, à un moment ou les données de la sécurité obligent nos forces armées à répondre à des exigences plus diversifiées que jamais. Une stabilisation des dépenses de défense ainsi qu'une utilisation plus rentable de nos ressources nationales et collectives s'imposent donc si nous voulons que l'Alliance soit capable de relever avec rapidité et efficacité les défis de demain.