Communiqué final

Conseil de l'Atlantique Nord en session ministérielle

  • 10 Jun. 1993
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  • Mis à jour le: 05 Nov. 2008 00:02

  1. Notre réunion d'Athènes se déroule avec pour toile de fond le conflit le plus violent que le continent européen ait connu depuis plus d'une génération. Les combats et les actes de cruauté qui se poursuivent placent l'ensemble de la communauté internationale devant un formidable défi. Nos consultations d'aujourd'hui ont porté avant tout sur les problèmes de sécurité des Balkans et sur les moyens de ramener la paix dans l'ex-Yougoslavie et d'empêcher que le conflit ne s'étende à d'autres zones. Nous sommes déterminés, individuellement et en tant qu'Alliance, à soutenir les efforts des Nations Unies et d'autres institutions pour mettre fin à cette guerre.
  2. Il faut que tous les intéressés comprennent qu'une extension du conflit aurait de graves conséquences. A cet égard, nous soutenons les propositions visant à accroître le nombre des inspecteurs de la CSCE, particulièrement au Kosovo. Nous nous félicitons également de l'offre qu'ont faite les Etats-Unis d'envoyer des troupes en complément du contingent des Nations Unies se trouvant déjà dans l'Ancienne République yougoslave de Macédoine.
  3. Nous soutenons l'établissement de zones de sécurité en Bosnie-Herzégovine pour la protection de la population civile, telles qu'elles ont été définies dans les résolutions 824 et 836 du Conseil de sécurité des Nations Unies. Comme suite à la résolution 836 et au mandat élargi de la FORPRONU relatif aux zones de sécurité, nous offrons nos moyens de protection aériens en cas d'attaque contre la FORPRONU dans l'accomplissement de son mandat global, si elle en fait la demande. Nous avons demandé aux autorités militaires de l'OTAN, qui ont déjà engagé des travaux préliminaires, de procéder rapidement à la planification détaillée du soutien aérien que nous sommes prêts à apporter, en coordination avec la FORPRONU et les autres pays contributeurs. L'établissement de zones de sécurité est une mesure temporaire vers un règlement négocié fondé sur les principes du plan Vance-Owen qui garantissent pleinement la souveraineté, l'intégrité territoriale et l'indépendance politique de la République de Bosnie-Herzegovine. Dans ce contexte, nous accueillons aussi avec satisfaction les mesures énoncées dans le programme d'action commun signé à Washington le 22 mai 1993. L'OTAN reste prête à contribuer à la mise en oeuvre d'un tel règlement, de concert avec d'autres et sous l'autorité du Conseil de sécurité des Nations Unies. Nous continuerons de faire respecter rigoureusement les embargos décrétés par les Nations Unies dans l'Adriatique, conjointement avec l'UEO, ainsi que la zone d'interdiction de survol déclarée par les Nations Unies au dessus de la République de Bosnie-Herzégovine. Nous n'excluons aucune éventualité à l'appui de mesures nouvelles et plus sévères décidées par les Nations Unies.
  4. D'autres conflits régionaux se poursuivent dans la zone de la CSCE. Ils mettent en danger le processus de changement pacifique et la naissance du nouvel ordre de sécurité dans la coopération que notre Alliance cherche à instaurer. Conformément aux fonctions essentielles de l'Alliance, nous sommes déterminés à nous consulter pleinement dans le cadre de l'OTAN sur ces nouveaux défis. La prévention des conflits, la gestion des crises et le maintien de la paix seront d'une importance cruciale pour assurer la stabilité et la sécurité dans la zone euro-atlantique au cours des années à venir. Notre Alliance continue d'avoir un rôle clé pour la sécurité de l'Europe. Tout en réaffirmant que le but premier des forces armées de l'Alliance est de garantir la sécurité et l'intégrité territoriale des Etats membres, nous contribuerons à l'exécution de ces nouvelles tâches afin de renforcer notre sécurité et la stabilité européenne.

Le lien transatlantique

  1. Le partenariat transatlantique demeure vital pour la sécurité et la stabilité européennes. La promotion du changement pacifique en Europe requiert une Alliance atlantique forte et dynamique. Les défis devant lesquels nous nous trouvons pour bâtir la démocratie et assurer la sécurité par la coopération partout en Europe ne peuvent être assumés globalement par l'Europe seule ou par l'Amérique du Nord seule, mais doivent l'être dans le cadre de larges efforts conjoints. Pour que l'OTAN puisse accomplir sa mission de défense collective et ses nouvelles tâches mentionnées ci-dessus, notamment à l'appui du maintien de la paix, et pour qu'elle puisse coopérer avec les pays d'Europe centrale et orientale et d'Asie centrale, il est essentiel qu'existe une forte dimension transatlantique. La présence substantielle de forces armées américaines en Europe et le maintien de l'engagement, tant politique que militaire, des Etats Unis et du Canada, ainsi que leur participation active à la sécurité européenne demeureront indispensables.

Le rôle de l'Alliance à l'appui du maintien de la paix

  1. L'Alliance a démontré qu'elle était prête à soutenir des opérations de maintien de la paix des Nations Unies ou de la CSCE, ce qui lui impose de nouvelles exigences. Les forces, les structures internes et les procédures de l'Alliance sont en train d'être adaptées au nouveau contexte de sécurité. L'Alliance poursuivra encore ce processus de façon que nous puissions aussi répondre plus rapidement et plus efficacement à des demandes de soutien d'opérations de maintien de la paix et que tous les Alliés puissent être pleinement associés au nouveau rôle de maintien de la paix de l'Alliance, étant admis que la participation nationale restera sujette à décision nationale. Nous soulignons qu'il importe de fournir des ressources adéquates, à la fois pour maintenir une contribution militaire efficace à la défense commune et pour garantir l'exécution des nouvelles tâches de l'OTAN.

Coopération avec les pays d'Europe centrale et orientale et d'Asie centrale

  1. Nous mettons actuellement au point avec nos partenaires du Conseil de coopération nord-atlantique (CCNA) une définition commune des approches conceptuelles du maintien de la paix. Afin que nos forces puissent mieux coordonner leur action lorsqu'elles accomplissent ensemble des tâches de maintien de la paix, nous développons notre coopération dans ce domaine. Le fait que des pays non membres lui soient ainsi associés permet de mesurer toute l'ampleur de la mutation de l'Alliance et sera un facteur important pour le renforcement en Europe de la confiance et de la sécurité fondée sur la coopération. Cet effort est complémentaire de celui de la CSCE, comme en témoigne le fait que celle-ci y ait été associée par le biais de la Suède, qui en est le président en exercice.
  2. L'édification d'institutions démocratiques durables et la conduite de réformes politiques et économiques efficaces dans nos pays partenaires du CCNA restent de la plus haute importance pour la stabilité européenne. A cet égard, nous nous félicitons des résultats du référendum d'avril en Russie, qui ont clairement indiqué le désir du peuple russe de faire avancer les réformes et de ne pas retourner aux formules discréditées du passé. La coopération avec les pays d'Europe centrale et orientale et d'Asie centrale, particulièrement dans le cadre du CCNA, est un élément clé de la stratégie suivie par l'Alliance pour préserver la paix et encourager le progrès par un effort constructif conjoint. Le développement de la coopération en matière de maintien de la paix élargit substantiellement le champ de nos activités de coopération et reflète notre engagement partagé en faveur de la paix. La coopération concrète entre nos pays continue de se développer grâce à l'application du programme de travail de 1993.

Coopération avec d'autres institutions

  1. Notre Alliance ne peut faire face à des conflits régionaux et contribuer à la sécurité et à la stabilité en Europe, selon l'objectif qu'elle s'est fixé, que par une coopération étroite avec d'autres institutions, dans le cadre de notre concept d'institutions se renforçant mutuellement:
    • Le conflit dans l'ex-Yougoslavie a donné lieu à l'application par l'OTAN de plusieurs résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui est responsable au premier chef du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Les relations entre les deux organisations se sont développées de façon très substantielle et efficace. Répondant à l'invitation du Secrétaire général des Nations Unies, l'Alliance a suggéré des moyens par lesquels elle pourrait généralement concourir à la réalisation du concept exposé dans l'"Agenda pour la paix". Les Secrétaires généraux des deux organisations ont établi des contacts directs, et nous accueillerions volontiers la poursuite des contacts à différents niveaux. La communication et la coordination entre l'OTAN et les Nations Unies doivent être encore améliorées. Nous avons demandé au Secrétaire général de proposer au Conseil en session permanente des mesures appropriées à cette fin.
    • Les travaux de la CSCE continueront à bénéficier de notre soutien actif. Nous souhaitons voir se poursuivre les débats sur les questions de sécurité européenne au Forum de la CSCE pour la coopération en matière de sécurité, de façon que des résultats puissent être obtenus à temps dans tous les domaines actuellement examinés au Forum. La CSCE a un rôle central à jouer dans la diplomatie préventive. La prévention des conflits est un facteur décisif pour la sécurité et la stabilité en Europe. Nous saluons la contribution importante de la CSCE à la prévention des conflits et ses efforts dans le sens d'un règlement pacifique des différends. Nous encourageons la poursuite du développement des capacités de la CSCE dans ce domaine. A cet égard, nous jugeons positive la décision de la CSCE de renforcer ses capacités opérationnelles par des réformes structurelles et par la nomination d'un secrétaire général. Nous nous félicitons des arrangements permettant à l'OTAN de participer aux travaux de la CSCE et de coopérer avec celle-ci. Nous veillerons à développer l'interaction et la coopération entre l'OTAN et la CSCE.
    • Le transfert de l'UEO à Bruxelles a contribué à développer l'interaction et à resserrer les relations de travail journalières entre l'OTAN et cette organisation, dans l'esprit de transparence et de complémentarité auquel l'une et l'autre sont attachées. La participation de chacun des Secrétaires généraux à des réunions du Conseil de l'autre organisation a été très utile à cet égard. Les deux organisations ont contribué en coopération étroite et de façon complémentaire aux efforts déployés par la communauté internationale face au conflit dans l'ex-Yougoslavie, comme en témoigne clairement l'opération Sharp Guard dans l'Adriatique. Les deux organisations ont décidé de renforcer leur coopération dans l'Adriatique en créant une structure de commandement unique pour leurs navires participant à cette opération, sous la direction conjointe des deux Conseils. Nous accueillons favorablement l'initiative commune de l'UEO et des Etats riverains visant à renforcer l'application des sanctions des Nations Unies sur le Danube.

Questions régionales

  1. Nous avons examiné un certain nombre de questions régionales, en particulier le conflit dont traite actuellement la conférence de la CSCE sur le Haut Karabakh et d'autres sources de tension sur le territoire de l'ex-Union soviétique, ainsi que la nécessité d'un prompt achèvement du retrait des forces étrangères des Etats baltes. Nous nous consulterons aussi demain avec nos partenaires du Conseil de coopération nord-atlantique sur toutes ces questions.

La Méditerranée

  1. La sécurité en Europe est fortement influencée par la sécurité en Méditerranée. C'est pourquoi nous encourageons tous les efforts de dialogue et de coopération visant à renforcer la stabilité dans cette région. L'exemple de la meilleure compréhension et du partenariat dans la coopération auxquels nous sommes parvenus avec les pays d'Europe centrale et orientale pourrait inspirer de tels efforts.

Non-prolifération, maîtrise des armements et désarmement

  1. Nous restons déterminés à poursuivre nos objectifs de maîtrise des armements, particulièrement en ce qui concerne la non-prolifération et l'application intégrale des accords existants. A cet égard :
    • nous réitérons notre ferme soutien au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), dont nous souhaitons la prorogation inconditionnelle et indéfinie en 1995. Nous nous emploierons à en renforcer le régime de vérification. Nous nous félicitons de la décision du Bélarus d'adhérer au traité et demandons instamment au Kazakhstan et à l'Ukraine de se conformer sans tarder à leur engagement d'y accéder en tant qu'Etats non dotés d'armes nucléaires. Nous invitons instamment aussi tous les pays qui ne l'ont pas encore fait à devenir parties au TNP en tant qu'Etat sinon dotés d'armes nucléaires. Nous appelons la Corée du Nord à revenir sur son intention déclarée de se retirer de ce traité et à s'acquitter de ses obligations au titre des garanties de l'AIEA;
    • nous nous réjouissons de la conclusion du Traité START II et souhaitons vivement que les deux accords START soient ratifiés par toutes les parties et mis en vigueur rapidement. Dans ce contexte, nous saluons la ratification de START I par le Bélarus et le Kazakhstan. Nous appelons l'Ukraine à ratifier START I et à permettre l'application de ses dispositions, et nous appelons à la ratification et à la mise en application de START II. Nous comptons voir le Bélarus, le Kazakhstan et l'Ukraine remplir pleinement les engagements qu'ils ont pris d'éliminer toutes les armes nucléaires de leur territoire le plus tôt possible. Les Alliés continueront d'offrir leur soutien pour faire en sorte que les armes nucléaires de l'ex-Union soviétique puissent être éliminées rapidement et dans des conditions de sûreté et de sécurité, conformément aux accords existants;
    • nous insistons sur l'importance cruciale du Traité sur les FCE et de son application intégrale pour la sécurité européenne. Nous appelons tous les autres signataires à respecter pleinement les dispositions de ce traité. En particulier, nous attachons une grande importance à ce que les obligations de réduction soient remplies en temps voulu, et notamment à ce que des données coordonnées relatives aux obligations de réduction soient fournies par les Etats successeurs de l'ex-Union soviétique dans le cadre du Traité sur les FCE, comme le prévoit le document final d'Oslo.

    Nous avons l'intention de nous consulter demain sur ces questions et d'autres questions de maîtrise des armements et de désarmement avec nos partenaires du Conseil de coopération nord-atlantique.

Conclusion

  1. Trois ans après les changements révolutionnaires en Europe, nous pouvons relever plusieurs résultats importants. Mais il faut faire plus. L'objectif ultime qui est depuis longtemps celui de l'Alliance, l'établissement d'un ordre de paix juste et durable en Europe, est encore loin d'être atteint. Nous continuerons, individuellement et en tant qu'Alliance, de nous attacher avec vigueur et détermination à lutter contre la résurgence de querelles et à promouvoir la compréhension mutuelle, la paix et la coopération.

Nous remercions la République hellénique de la courtoise hospitalité qui nous a été réservée.

La réunion d'automne du Conseil de l'Atlantique Nord en session ministérielle se tiendra à Bruxelles le 2 décembre 1993.