La situation en Union Soviétique
Déclaration du Conseil de l'Atlantique Nord réuni en session ministérielle (1)
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<p>Réunion du Conseil en session extraordinaire pour examiner la situation en Union soviétique - Position de principe en ce qui concerne la tentative de coup d'Etat - Condamnation d'actes inconstitutionnels, du recours à la violence et des pertes en vies
- Les ministres des Affaires étrangères des pays membres de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord se sont réunis aujourd'hui en session extraordinaire pour examiner l'évolution très inquiétante de la situation en Union soviétique.
Les nouvelles qui nous parviennent d'Union soviétique, alors même que nous sommes réunis, nous encouragent et nous rassurent. Nous suivrons le cours des événements avec une extrême attention et les plus grands espoirs. Dans la présente déclaration, nous réaffirmons notre position de principe en ce qui concerne la tentative de coup d'Etat.
Nous condamnons fermement l'éviction inconstitutionnelle du président Gorbatchev, la tentative de coup d'Etat et le recours à la violence pour intimider les membres du mouvement de réforme et supprimer les institutions démocratiques. Nous déplorons vivement les pertes en vies humaines de la nuit dernière.
- En quelques années à peine, l'Europe s'est transformée. Les événements historiques reflétés dans la Charte de Paris annonçaient une ère nouvelle de démocratie, de paix et d'unité en Europe, fondée sur la primauté du droit. Ce processus de transformation, si clairement menacé par ceux qui ont essayé de s'emparer du pouvoir à Moscou, doit se poursuivre.
- Nous demandons le rétablissement immédiat du président Gorbatchev dans ses fonctions légitimes et la reprise du processus de réforme politique et économique en Union soviétique. Nous soutenons les dirigeants démocratiquement élus en Union soviétique et leur opposition à une reprise de pouvoir inconstitutionnelle. Nous demandons que M. Boris Eltsine, le président démocratiquement élu de la Russie, et d'autres dirigeants démocratiquement élus, puissent exercer leurs fonctions légitimes. Nous attachons la plus haute importance à la sécurité et à la liberté des membres du mouvement de réforme et de ceux qui pourraient être opposés aux récents événements; nous tiendrons les autorités pour responsables de leur sort. Nous sommes opposés à l'usage de la force où que ce soit en Union soviétique, en particulier contre les gouvernements des Républiques soviétiques. Les Alliés sont profondément inquiets des actes de répression et de violence de l'armée, qui continuent d'être signalés dans les Etats baltes. Nous lançons un appel pressant aux responsables pour qu'ils s'abstiennent de toute. menace ou recours à la force contre les gouvernements et les représentants démocratiquement élus des peuples des républiques baltes et d'ailleurs.
- La tentative d'éviction du président Gorbatchev, en contradiction directe avec le principe de la primauté du droit, soulève de sérieuses interrogations sur l'avenir de l'Union soviétique et ses relations avec l'Europe et le reste du monde. La subordination des autorités militaires au processus démocratique est un point qui revêt pour nous une importance particulière dans ce contexte. Nous insistons pour que l'Union soviétique se conforme à tous les engagements auxquels elle a souscrit et à tous les traités qu'elle a conclus sur le plan international, à l'inclusion de ceux qui se rapportent aux retraits de troupes et au désarmement. La suspension des libertés civiles, notamment des libertés de réunion et d'expression, est incompatible avec 1'Acte final d'Helsinki et la Charte de Paris pour une nouvelle Europe. Les principes démocratiques et les droits de l'homme énoncés dans ces documents doivent être respectés. Dans le cas contraire, il y aurait un sérieux recul, qui mettrait gravement en péril l'ordre de paix qui se met en place en Europe. Nous sommes résolus à ne rien faire qui puisse impliquer que nous conférions la moindre légitimité aux responsables des actes inconstitutionnels qui ont été perpétrés en Union soviétique. En conséquence, nous nous abstiendrons de tout contact avec eux au niveau politique. Nous demandons que les représentants des Etats signataires de la Charte de Paris soient autorisés à voir le président élu de l'Union soviétique, lui-même signataire de la Charte, et qu'ils puissent s'entretenir avec lui.
- Dans ces conditions, nous estimons que tant que l'ordre constitutionnel et les libertés démocratiques n'auront pas été rétablis en Union soviétique, notre participation à la Conférence de Moscou sur la dimension humaine ne peut se justifier et que cette réunion devait être reportée. Les Alliés estiment qu'il y aurait lieu de convoquer dans les meilleurs délais une réunion d'urgence des hauts fonctionnaires de la CSCE, pour examiner les événements survenus en Union soviétique. Nous nous interrogeons aussi sur l'opportunité de prendre d'autres mesures dans le cadre de la CSCE, au sujet des événements d'Union soviétique.
- En juin dernier, à Copenhague, nous avons déclaré que la consolidation et la sauvegarde, sur l'ensemble du continent, de sociétés démocratiques libres de toute forme de coercition ou d'intimidation, sont pour nous une préoccupation directe et bien réelle. Constatant l'inquiétude grandissante des pays d'Europe centrale et orientale, nous exprimons à nouveau notre conviction que notre propre sécurité est indissociablement liée à celle de tous les autres pays européens, en particulier à celle des démocraties naissantes. Nous comptons que l'Union soviétique respectera l'intégrité et la sécurité de tous les Etats d'Europe. En signe de solidarité avec les nouvelles démocraties d'Europe centrale et orientale, nous rechercherons les moyens de renforcer encore notre contribution au processus de réforme politique et économique dams ces pays. Nos mécanismes de liaison diplomatique avec ces démocraties revêtent désormais une importance accrue. Nous sommes fermement partisans du règlement, par le dialogue et par des moyens pacifiques, de tous les conflits, intérieurs et internationaux, qui pourraient menacer la sécurité européenne. A cet égard, nous demandons aussi instamment à toutes les parties concernées de manifester la plus grande retenue dans la crise que traverse actuellement la Yougoslavie. Les Alliés expriment leur appui aux efforts déployés dans le cadre de la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe et de la Communauté européenne pour résoudre cette crise.
- A nos réunions de Londres et de Copenhague, nous avons proposé de créer un partenariat constructif avec l'Union soviétique, comme avec les autres pays d'Europe centrale et orientale. Les actions illégitimes qui sont actuellement menées en Union soviétique ne manqueront pas d'avoir une influence négative sur les relations de 1'Alliance avec ce pays. Le mécanisme de liaison demeurera un moyen de communication avec l'Union soviétique, mais nous devrons réexaminer d'urgence d'autres activités dans ce domaine. Nous avons décidé de suspendre nos programmes d'échanges officiels avec l'Union soviétique, en attendant des éclaircissements sur la situation dans ce pays. Nous soulignons que l'Union soviétique ne peut compter sur le maintien de 1'aide occidentale que si elle poursuit sur la voie d'une démocratie authentique et d'une véritable réforme orientée vers le marché, et si elle revient à un gouvernement constitutionnel. Les gouvernements des pays alliés agiront en conséquence, individuellement et de concert.
- L'Alliance atlantique reste déterminée à contribuer à construire une Europe entière et libre avec tous les Etats du continent, y compris l'Union soviétique. Dans ce contexte, des relations normales ne pourront être rétablies que si l'Union soviétique revient au processus constitutionnel et au strict respect de tous les principes de la Charte de Paris.
- Le 23 août 1991 le Conseil a publié la déclaration suivante au sujet de la suspension des mesures concernant l'Union soviétique.
"En raison du retour de M. Gorbatchev dans ses fonctions et du rétablissement de l'ordre constitutionnel en Union soviétique, le Conseil est convenu aujourd'hui que les mesures prises par les ministres des Affaires étrangères, le 21 août 199l, sont rapportées, puisqu'elles n'ont plus lieu d'être."