Communiqué
Président: Lord Carrington
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Le Conseil de l'Atlantique Nord s'est réuni en session ministérielle à Bruxelles les 11 et 12 décembre 1986. Les Ministres ont déclaré ce qui suit:
- Notre objectif fondamental reste de préserver la paix dans la liberté: il faut prévenir la guerre sous toutes ses formes, nucléaire et conventionnelle convaincus que la sécurité de notre Alliance est indivisible, nous continuerons d'avoir des consultations étroites sur toutes les questions affectant nos intérêts communs.
- Nous continuerons de rechercher toutes les possibilités d'entretenir un dialogue large et constructif qui permettra de faire droit aux préoccupations des peuples de l'Est comme de l'Ouest. Nous réaffirmons que nous sommes attachés au développement de la coopération Est-Ouest, qui comprend le dialogue politique, les relations commerciales et les échanges culturels, et à laquelle tous les Etats prennent part dans des conditions d'égalité. Respecter les droits de l'homme et encourager les contacts entre les individus restent essentiels.
Les réunions de haut niveau qui ont eu lieu récemment, notamment la rencontre de Reykjavik entre MM. Reagan et Gorbatchev, constituent des étapes importantes sur le plan des relations Est-Ouest.
- La stratégie de dissuasion de l'Alliance, fondée sur l'existence de moyens de défense adéquats dans les domaines conventionnel et nucléaire, a prouvé sa valeur en préservant la paix et en nous permettant de résister à toute intimidation. Elle reste pleinement valable. Face à l'accroissement constant des forces soviétiques, l'Alliance doit continuer d'accorder une priorité absolue au maintien de cet ensemble efficace de moyens de dissuasion.
- La maîtrise des armements et le désarmement font partie intégrante de notre politique de sécurité. Nous restons attachés à la conclusion d'accord équitables qui visent à assurer une plus grande stabilité à des niveaux réduits de forces et d'armements. Ces accords doivent accroître la sécurité en Europe et ne pas affaiblir le lien entre les membres européens et nord-américains de l'Alliance. Des mesures de vérification efficaces sont une condition primordiale de tout accord. Seul le maintien à tout moment d'un équilibre global et stable permettra d'accomplir des progrès concernant la maîtrise des armements.
- Après la rencontre de Reykjavik, nous soutenons les efforts que les Etats-unis déploient en vue de parvenir avec l'Union Soviétique à des accords de maîtrise des armements équilibrés, équitables et effectivement vérifiables. Plutôt que de se limiter à figer les niveaux des arsenaux existants, les accords à Genève devraient chercher à réaliser des réductions substantielles des forces nucléaires offensives, selon des modalités qui renforcent la paix et augmentent la stabilité. Nous nous félicitons donc des progrès accomplis à Reykjavik vers un accord sur des réductions de 50 % des forces stratégiques offensives des Etats-Unis et de l'Union Soviétique et vers un accord sur les missiles nucléaires intermédiaires à plus longue portée. Nous appuyons pleinement les Etats-Unis dans leur volonté de négocier, en toute priorité, des accords précis sur cette base, et nous invitons instamment l'Union Soviétique à oeuvrer en ce sens à Genève.
Les possibilités de progrès dans certains domaines, en particulier les négociations sur les FNI à plus longue portée, ne doivent pas être subordonnées à la conclusion d'accords dans d'autres domaines non apparentés. L'insistance de l'Union Soviétique sur un tel lien serait contraire aux assurances qui ont été données au plus haut niveau.
Sur la base de la décision prise par l'OTAN en décembre 1979 à propos de la modernisation des FNI à plus longue portée et d'une limitation des armements englobant ces forces, les Alliés concernés souscrivent sans réserve à l'élimination envisagée en Europe des FNI à plus longue portée, basées à terre, des Etats-Unis et de l'Union Soviétique ainsi qu'à la limitation à 100 du nombre d'ogives en Asie et aux Etats-Unis, mais leur objectif ultime demeure l'élimination totale de ces FNI à plus longue portée. Ils soulignent qu'un accord sur les FNI ne doit pas négliger les déséquilibres qui existent en ce qui concerne les missiles à plus courte portée des FNI américaines et soviétiques, et doit prévoir l'engagement de procéder à des négociations ultérieures sur ces missiles.
Nous avons également examiné l'état des négociations que les Etats-Unis et l'Union Soviétique poursuivent à Genève sur des systèmes défensifs et spatiaux, qui visent à prévenir une course aux armements dans l'espace et à renforcer la stabilité stratégique. Nous soutenons fermement ces efforts.
Une vérification effective serait, dans tous les cas, une condition essentielle. Nous continuerons à analyser toutes ces questions et à nous consulter étroitement à leur sujet dans les enceintes appropriées de l'Alliance (1)
- Les armes nucléaires ne peuvent être envisagées isolément. Nous cherchons aussi à faire des progrès dans d'autres domaines de la maîtrise des armements, étant donné notamment que des réductions des armes nucléaires conféreront une importance accrue à la suppression des disparités entre les forces conventionnelles et à l'élimination des armes chimiques. Une solution efficace de ces problèmes est la condition essentielle d'une stabilité et d'une sécurité effectives et durables en Europe.
- Lors de notre dernière session, à Halifax, nous avons souligné l'importance que nous attachons à la maîtrise des armements conventionnels et décidé d'étudier, au sein d'un groupe de haut niveau, l'ensemble des questions en cause. Nous avons approuvé le premier rapport de ce groupe et nous avons également adopté la Déclaration de Bruxelles sur la maîtrise des armements conventionnels.
- Ceux d'entre nous qui participent aux pourparlers sur les MBFR réaffirment qu'ils sont déterminés à parvenir rapidement a un accord substantiel et vérifiable et appellent l'Est à donner une réponse constructive à l'initiative occidentale du 5 décembre 1985. Ils sont d'avis qu'un tel accord contribuerait efficacement au lancement d'autres négociations élargies, cette fois, à l'ensemble de l'Europe (2)
- L'accumulation constante d'armes chimiques par l'Union Soviétiquesuscite de vives inquiétudes, tout comme la prolifération et l'utilisation de ce type d'armes. A Genève, à la Conférence du désarmement, nous recherchons l'adoption d'une convention qui réponde à notre objectif à savoir l'interdiction générale, complète et véritable des armes chimiques et la destruction de tous les stocks existants. Un tel accord serait possible si l'Union Soviétique faisait preuve d'une attitude constructive à l'égard de tous les aspects d'un régime de vérification efficace. Nous invitons l'URSS à se joindre à nous pour lever les obstacles qui subsistent.
- La réunion de Vienne sur les suites de la CSCE revêt une très grande importance pour le développement de relations stables et constructives entre l'Est et l'Ouest et pour l'amélioration durable des relations à long terme entre tous les Etats participants. Nous déplorons le fait que des pays du Pacte de Varsovie ne tiennent pas suffisamment leurs engagements, notamment dans le domaine des droits de l'homme et des contacts entre les personnes. Nous continuerons d'insister sur le respect absolu de tous les accords conclus dans le cadre de la CSCE.
Nous accueillons avec satisfaction les résultats de la CDE à Stockholm. L'application intégrale des mesures de confiance et de sécurité agréées augmentera la transparence et permettra de renforcer la confiance et de mieux prévoir les activités militaires dans l'ensemble de l'Europe. Ces mesures marquent ainsi une avancée par rapport à l'Acte final d'Helsinki et démontrent la validité de l'approche par étapes définie à Madrid.
Nous insisterons pour que la réunion de Vienne aboutisse à des résultats équilibrés et substantiels et pour qu'un grand respect de ses obligations par l'Est et des progrès dans les trois Corbeilles permettent de renforcer le processus de la CSCE.
- Nous respectons la souveraineté et l'indépendance de tous les Etats. Nous resterons vigilants et continuerons de nous consulter sur les événements survenant en dehors de la zone du Traité susceptibles de menacer notre sécurité commune.
- Nous demandons instamment à l'Union Soviétique de mettre fin à son occupation militaire inacceptable de l'Afghanistan, qui entrera bientôt dans sa huitième année. La communauté internationale exige le retrait rapide et complet des forces armées soviétiques et un règlement politique qui rétablisse l'Afghanistan dans son indépendance et son statut de pays non aligné. Ceci créerait les conditions favorables au retour des réfugiés dans la sécurité et dans l'honneur, et permettrait au peuple afghan de déterminer librement son avenir.
- Nous condamnons fermement le terrorisme. Nous avons intensifié la lutte contre ce fléau quelles qu'en soient les formes et l'origine. Nous invitons tous les Etats à unir leurs efforts pour l'éliminer.
- Le maintien d'une situation calme à Berlin et alentour, y compris le libre accès à la ville et la préservation de son statut et de sa sécurité intérieure, demeure d'une importance fondamentale pour les relations Est-Ouest. Le 750ème anniversaire de Berlin sera l'occasion de marquer l'importance actuelle et historique de la cité. Les pays membres de l'Alliance appuient les efforts que déploie la République fédérale d'Allemagne, par le dialogue et la coopération avec la RDA, en vue d'obtenir des améliorations concrètes dans l'intérêt du peuple allemand, et notamment des Berlinois, et de renforcer la paix en Europe.
- Nous avons pris note de progrès encourageants dans les efforts que nous faisons pour accroître la coopération en matière d'armements entre tous les pays membres de l'Alliance. Nous poursuivrons activement ces efforts. Les récents travaux du GEIP constituent une contribution importante au dialogue transatlantique dans ce domaine.
- Dans l'esprit de l'article 2 du Traité de l'Atlantique Nord, nous réaffirmons l'importance de la coopération et de l'aide mutuelle au sein de l'Alliance, qui se traduisent notamment par le programme " la science au service de la stabilité ". Nous réaffirmons également la nécessité d'améliorer la collaboration dans le secteur des industries de la défense, pour permettre plus particulièrement à la Grèce, au Portugal et à la Turquie de moderniser leurs industries dans ce domaine.
- Dans un rapport soumis au Conseil de l'Atlantique Nord il y a trente ans, les Ministres des affaires étrangères du Canada, de l'Italie et de la Norvège préconisaient d'intensifier les consultations politiques, d'améliorer et de développer la coopération et d'accroître l'unité et la solidarité au sein de la communauté atlantique. Commémorant cette année les travaux du Comité des Trois, nous reconnaissons que ces principes conservent toute leur valeur.
- La réunion du printemps de 1987 du Conseil de l'Atlantique Nord en session ministérielle se tiendra à Reykjavik, au mois de juin.
En plus du communiqué, les Ministres des affaires étrangères ont décidé de publier les passages suivants du procès-verbal de la réunion qu'ils ont tenue à Bruxelles les 11 et 12 décembre 1986.
Coopération en matière d'armements
Les Ministres ont examiné le rapport de la Conférence des directeurs nationaux des armements (CDNA). Rappelant qu'ils ont approuvé en décembre 1985 une stratégie d'intensification de la coopération en matière d'armements, ils ont noté avec satisfaction que cette stratégie fournit un cadre politique utile pour resserrer la coopération en matière d'armements entre les pays européens et nord-américains et entre les membres de l'Alliance qui ont des niveaux de développement différents. Ils ont souligné qu'une telle coopération accrue doit jouer un rôle déterminant dans les efforts entrepris pour améliorer les moyens de défense conventionnels de l'Alliance. Dans ce contexte, les Ministres ont examiné l'état d'avancement des projets mis en chantier à la suite de l'Amendement Nunn et ils ont noté que plusieurs de ceux-ci ont atteint le stade où des décisions importantes doivent se prendre sur les programmes correspondants. Ils sont convenus de suivre l'évolution de ces programmes avec une attention particulière.
Les Ministres ont noté que les pays du GEIP, forts de l'expérience acquise à ce jour, ont présenté un certain nombre de "principes de collaboration" que leurs Alliés nord-américains ont accueillis favorablement. Les Ministres ont décide de maintenir l'accent sur l'exploitation des technologies naissantes dans le cadre des programmes d'équipement, notamment à long terme, et ils ont réaffirmé l'importance qu'ils attachent au partage des technologies entre les Alliés ainsi qu'à la protection des technologies susceptibles d'application militaire.
Coopération et aide économiques au sein de l'Alliance
Les Ministres ont réaffirmé que la sécurité alliée ne dépend pas seulement de la dissuasion militaire et de la cohésion politique mais aussi de la bonne santé de l'économie de tous les pays membres de l'OTAN. Prenant note du rapport personnel du Secrétaire général sur la coopération et l'aide économiques au sein de l'Alliance, dans lequel celui-ci s'inquiète des écarts importants qui subsistent entre les niveaux de vie des pays membres les plus riches et les moins prospères de l'Alliance, les Ministres ont souligné qu'une coopération et une aide accrues sont nécessaires, particulièrement dans le secteur des industries de la défense, afin que la Grèce, le Portugal et la Turquie soient en mesure d'améliorer le potentiel technologique de leurs industries de défense et de les rendre plus disponibles pour les acquisitions des Alliés dans ce secteur. Les Ministres ont également pris note de la déclaration du Secrétaire général, selon laquelle l'interdépendance entre la politique économique et la politique de sécurité n'est pas à négliger Le Secrétaire général a jugé encourageant de constater que les alliés les plus prospères ont une conscience de plus en plus vive des difficultés que connaissent la Grèce, le Portugal et la Turquie, et il reste convaincu qu'ils continueront de tenir compte des besoins spécifiques de ces trois pays et qu'ils feront jouer leur influence, à cette fin, dans les enceintes internationales appropriées.
Comité sur le défis de la société moderne (CDSM)
Les Ministres ont pris note du rapport annuel pour 1986 du Secrétaire général concernant les travaux du Comité sur les défis de la société moderne et ont exprimé leur satisfaction de voir se maintenir les activités du CDSM à un haut niveau. Ils ont pris note de l'achèvement, au cours de cette année, de deux études pilotes (la conservation et la restauration des monuments et l'utilisation et le traitement des boues résiduelles des agglomérations), ainsi que de la décision d'en lancer trois nouvelles: l'évaluation du risque de pollution accidentelle résultant du transport par mer de substances dangereuses, les techniques de régénération appliquées aux terrains et aux eaux souterraines contaminés, et la protection des sites des observatoires astronomiques et géophysiques, ce qui porte à 15 le nombre de projets actuellement menés sous l'égide du Comité.
Terrorisme
Se référant au paragraphe 13 de leur communiqué de décembre 1986, les Ministres ont une nouvelle fois condamné avec force les actes de terrorisme qui se multiplient dans le monde. Ils ont noté avec une profonde préoccupation que ces actes constituent une menace pour les citoyens de leurs pays, en même temps qu'un défi pour les institutions libres et démocratiques et pour la conduite de relations internationales normales. Les Ministres ont à nouveau souligné la nécessité d'efforts de coopération efficaces pour prévenir et éliminer ce fléau.
La situation en Méditerranée
Les Ministres ont pris note du rapport sur la situation en Méditerranée.Compte tenu des répercussions qu'ont et que peuvent avoir sur la sécurité de l'Alliance les événements se produisant dans cette région, ils ont prié le Conseil permanent de continuer ses consultations à ce sujet et de leur présenter de nouveaux rapports lors de leurs futures réunions.
Problèmes hors zone
Les Ministres ont réaffirmé que des événements se produisant en dehors de la zone du Traité peuvent affecter les intérêts communs de leurs pays en tant que membres de l'Alliance. Des consultations seront organisées en temps opportun sur de tels événements s'il est reconnu que ces intérêts communs sont affectés. Des moyens militaires suffisants doivent être disponibles dans la zone du Traité pour maintenir un dispositif de défense adéquat. Les Alliés qui en ont la possibilité s'efforceront d'apporter un soutien aux Etats souverains demandant une aide face à des menaces dirigées contre leur sécurité et leur indépendance. Ceux des Alliés qui sont en mesure de faciliter le déploiement de forces hors de la zone du Traité pourront le faire sur la base de décisions nationales.
Commerce Est-Ouest
Rappelant de précédentes déclarations, les Ministres ont réaffirmé que des échanges menés sur une base commercialement saine et mutuellement avantageuse, de façon à éviter d'accorder un traitement préférentiel en faveur de l'Union Soviétique, concourent à l'établissement de relations Est-Ouest constructives. Dans le même temps, il convient que les rapports économiques bilatéraux avec l'Union Soviétique et les pays d'Europe de l'Est demeurent compatibles avec les préoccupations générales des Alliés en matière de sécurité. Celles-ci comportent la nécessité d'éviter de créer une dépendance à l'égard de l'URSS ou de contribuer à son potentiel militaire. Afin d'éviter que l'Union Soviétique continue d'utiliser certaines formes d'échanges pour renforcer sa puissance militaire, l'Alliance demeurera vigilante dans son examen régulier des aspects de sécurité des relations économiques Est-Ouest. Ses travaux contribueront ainsi à éclairer les gouvernements alliés dans la conduite de leur politique dans ce domaine.
- La Grèce rappelle sa position sur les questions nucléaires et les problèmes relatifs aux systèmes spatiaux, telle qu'elle a été exprimée lors de précédentes réunions ministérielles de l'OTAN.
- Rappelant sa position à l'égard de la négociation MFBR, la France a émis une réserve sur cette phrase.