Déclaration sur la situation dans les Balkans

Diffusée à l'issue de la réunion du Conseil de l'Atlantique Nord en session des Ministres de la défense tenue à Bruxelles le 8 juin 2000

  • 08 Jun. 2000
  • |
  • Communiqué de presse M-NAC-D-1(2000) 063
  • Issued on 08 Jun. 2000
  • |
  • Mis à jour le: 03 Nov. 2008 18:00

  1. L'Alliance reste déterminée à promouvoir la sécurité, la stabilité, la paix et la démocratie dans les Balkans, y compris par les opérations menées sous la direction de l'OTAN en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo. Nous réaffirmons que nous soutenons l'intégrité territoriale et la souveraineté de tous les pays de la région. Nous exprimons notre sincère gratitude pour le dévouement, le professionnalisme et le courage remarquables dont font preuve les hommes et femmes de tous pays qui composent le personnel militaire de la SFOR et de la KFOR. Nous assurons de notre profonde sympathie les familles des soldats qui ont perdu la vie, et ceux qui ont été blessés au cours de ces opérations. Nous restons reconnaissants pour la contribution inestimable que les Partenaires de l'OTAN et d'autres pays apportent à la stabilisation et à la reconstruction dans la région.
  2. Nous restons déterminés à jouer pleinement notre rôle pour permettre la réalisation des objectifs de la communauté internationale tels qu'énoncés dans la résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies. Nous continuerons d'œuvrer pour un Kosovo pacifique, multiethnique, multiculturel et démocratique, où chacun, indépendamment de son origine ethnique ou de son appartenance religieuse, puisse vivre en paix et en sécurité et jouir des libertés et des droits de l'homme universels, y compris des droits des personnes appartenant aux minorités ethniques, sur un pied d'égalité, notamment par une pleine participation aux institutions démocratiques. La KFOR joue pleinement son rôle en soutenant l'effort humanitaire international au Kosovo. Nous prenons note des progrès substantiels qui ont été accomplis au cours de l'année écoulée depuis le déploiement de la KFOR au Kosovo. Durant cette période, la situation au Kosovo sur le plan de la sécurité s'est nettement améliorée. Depuis l'arrivée de la KFOR, plus d'un million de réfugiés et de personnes déplacées, victimes d'une campagne de purification ethnique extrêmement brutale, ont regagné leurs foyers. La criminalité accompagnée de violence, même si elle pose toujours un problème, a radicalement diminué. Les forces de la République fédérale de Yougoslavie (RFY) continuent de respecter généralement les termes de l'Accord militaro-technique. Nous réaffirmons notre attachement à l'établissement d'un Corps de protection du Kosovo (CPK) civil, apolitique et multiethnique qui œuvre dans l'intérêt de toutes les communautés, sous le contrôle étroit de la Mission des Nations Unies au Kosovo (MINUK) et sous la supervision et la direction opérationnelle quotidienne de la KFOR. Le respect du code de discipline du CPK doit être assuré. Nous soulignons que toute infraction à ce code sera traitée avec fermeté. Nous nous félicitons des mesures prises par la KFOR pour confisquer et détruire les armes détenues illégalement. Nous exprimons notre soutien résolu à la MINUK et au Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies. Nous attachons une grande importance à la poursuite d'une coordination étroite avec la MINUK et nous continuerons de l'appuyer, en fonction des moyens et des capacités disponibles, dans les efforts qu'elle déploie pour instaurer une société démocratique multiethnique fondée sur la primauté du droit, la tolérance et le respect des droits de l'homme. Il reste toutefois beaucoup à faire, en particulier pour la protection des personnes appartenant aux minorités ethniques. Ceci constitue l'un des problèmes les plus délicats auxquels sont confrontées la KFOR et la MINUK.

    Nous restons profondément reconnaissants pour le soutien pratique et politique que les pays voisins, en particulier l'Albanie et l'ex-République yougoslave de Macédoine ª, continuent d'apporter à la KFOR. Nous attachons beaucoup de prix à la poursuite de la coopération entre les forces de l'OTAN et les forces russes en Bosnie et au Kosovo, et maintenons notre engagement en faveur du développement de la coopération entre militaires de l'OTAN et de la Russie conformément à l'Acte fondateur OTAN-Russie.

  3. Bien que la situation au Kosovo sur le plan de la sécurité soit relativement stable, nous sommes préoccupés par le niveau toujours élevé de la tension et de la violence inter-ethniques. Nous condamnons tous les actes de violence, que leurs motivations soient ethniques, politiques ou criminelles. Nous félicitons la KFOR pour les mesures énergiques qu'elle a prises à l'encontre des extrémistes de tous bords. Nous regrettons vivement que des groupes minoritaires restent à la merci d'actes de violence commis par des extrémistes albanais du Kosovo. Nous sommes aussi préoccupés par le fait que Kosovska Mitrovica reste un foyer potentiel de tensions inter-ethniques. La désignation récente d'un administrateur régional pour Mitrovica montre clairement que la MINUK est déterminée à imposer son autorité dans l'ensemble du Kosovo. Nous encourageons la KFOR et la MINUK à poursuivre leurs efforts afin de promouvoir la coexistence et de maintenir un environnement sûr pour toutes les communautés de cette ville. Nous apprécions et soutenons les mesures prises par la MINUK pour intensifier la lutte qu'elle mène contre la criminalité organisée, le trafic et la détention illégale d'armes et la traite des femmes, ainsi que ses efforts de mise en place d'un système judiciaire et d'une force de police qui fonctionnent pleinement. Nous condamnons toutes les attaques contre la KFOR. Nous saluons la décision courageuse prise début avril par des Serbes du Kosovo de participer, avec des Albanais du Kosovo et avec d'autres, aux structures administratives intérimaires mixtes (JIAS). Nous prenons note avec regret de leur décision de suspendre temporairement leur participation et nous les engageons très fermement à la reprendre. Nous invitons instamment tous les membres des JIAS à coopérer d'une manière constructive. Nous appelons tous les membres de la communauté kosovar à prendre part aux élections municipales de cet automne.

    Nous sommes particulièrement préoccupés par la situation au voisinage de la limite interne entre le Kosovo et la Serbie. Nous appuyons sans réserve l'action que poursuit la KFOR afin de renforcer son contrôle aux frontières et aux limites du Kosovo, ainsi que ses interventions résolues contre tous ceux qui cherchent à faire du Kosovo une base pour des activités violentes qui seraient menées ailleurs. Nous considérons toute agitation ou instabilité dans ces zones comme une menace qui pèse sur nos efforts destinés à instaurer la paix et la stabilité dans l'ensemble de la région. Nous mettons fermement en garde contre toute tentative visant à déstabiliser encore la situation.

  4. Nous demeurons résolus à faire en sorte que les forces et les capacités de la KFOR soient maintenues aux niveaux nécessaires, compte tenu des défis auxquels elle sera confrontée à l'avenir. Ces défis consistent à maintenir un environnement sûr dans un Kosovo encore troublé, à décourager et prévenir la violence ethnique, à assurer la sécurité et la protection de toutes les minorités, à aider au retour des réfugiés, qu'ils appartiennent à la communauté albanaise, à la communauté serbe ou à une autre communauté, et à soutenir l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) dans la conduite, à l'automne, d'élections municipales libres, équitables et répondant aux exigences de sécurité.
  5. Nous nous félicitons de ce que le Corps européen ait fourni le commandant ainsi que les éléments essentiels de l'état-major de la KFOR.
  6. Nous nous félicitons de la restructuration de la SFOR, qui a été menée à bien, et sommes convaincus que cette force plus souple, aux effectifs allégés, conservera toute sa capacité de remplir son mandat. La SFOR continuera de contribuer au maintien d'un environnement sûr en Bosnie-Herzégovine, assurant les conditions d'un progrès vers la mise en œuvre intégrale des dispositions militaires et civiles de l'Accord de paix de Dayton. Nous félicitons la SFOR pour son rôle dans la démilitarisation de Brcko et la conduite efficace des récentes élections municipales, ainsi que pour son ferme soutien et son étroite coopération avec le Bureau du Haut Représentant, le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) (comme l'attestent les nouvelles arrestations de personnes accusées de crimes de guerre), le Groupe international de police des Nations Unies, l'OSCE et le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR). Nous soutenons les conclusions de la réunion ministérielle du Conseil de mise en œuvre de la paix tenue les 23 et 24 mai 2000, qui mènera plus avant le processus d'intégration de la Bosnie-Herzégovine dans les structures euro-atlantiques en tant qu'Etat démocratique. Nous nous associons au Haut Représentant pour souligner l'importance du soutien au retour des réfugiés, de la réforme fondamentale de l'économie et de la mise en place des institutions de l'Etat.
  7. Il reste toutefois beaucoup à faire, et nous veillerons à ce que la SFOR continue de favoriser, en fonction des moyens et des capacités disponibles, les progrès dans les domaines suivants : retour des minorités, conduite des élections à l'automne, élaboration d'une politique de sécurité et de défense commune pour la Bosnie-Herzégovine, renforcement de la coopération entre les forces armées des Entités, restructuration fondamentale des forces des deux Entités, et poursuite des arrestations de personnes accusées de crimes de guerre. Nous veillerons également à ce que la SFOR continue d'aider le Bureau du Haut Représentant et la mission des Nations Unies en Bosnie-Herzégovine dans la lutte contre les services secrets illégaux, la corruption et le crime organisé, et dans la mise en œuvre d'une réforme de l'appareil judiciaire et de la police. Nous appelons les autorités de Bosnie-Herzégovine à poursuivre leurs efforts en vue de l'application intégrale des dispositions de l'Accord de paix de Dayton et de la réalisation des objectifs énoncés par le Conseil de mise en œuvre de la paix, y compris la transformation de la Commission permanente aux affaires militaires en une institution de défense au niveau de l'Etat et l'accroissement de son efficacité, l'élaboration d'une politique de sécurité nationale, de même que la poursuite de la réduction et de la restructuration des forces armées des deux Entités d'une manière compatible avec les impératifs de sécurité à long terme. Nous nous félicitons, à cet égard, des premiers résultats obtenus en 1999 et de l'engagement de procéder à de nouvelles réductions de forces de 15%, ainsi que de diminuer et de rendre plus transparents les budgets de défense des Entités. Nous sommes convenus de fournir les ressources et le soutien nécessaires à la SFOR restructurée.
  8. Nous soutenons pleinement les travaux du TPIY et appelons tous les membres des Nations Unies à faire de même. L'action du TPIY destinée à faire payer les crimes de guerre à leurs auteurs, quelle que soit leur origine, consolidera la primauté du droit et contribuera à l'instauration d'une paix durable. Nous réaffirmons la détermination de la SFOR et de la KFOR à continuer de coopérer étroitement avec le TPIY.
  9. L'intégration des pays de l'Europe du Sud-Est dans la communauté euro-atlantique est essentielle pour la paix et le développement de la région. L'Alliance poursuit cet objectif par le biais du Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA) et du Partenariat pour la paix (PPP) ainsi que de son Initiative pour l'Europe du Sud-Est (SEEI), qui, tous, servent et complètent les objectifs du Pacte de stabilité pour l'Europe du Sud-Est. Nous avons reçu aujourd'hui un rapport sur la SEEI et la contribution de l'Alliance à la réalisation de ces objectifs. Ce rapport met en évidence les progrès qui ont été accomplis en vue de promouvoir la stabilité par un accroissement de la coopération régionale, et indique les domaines nécessitant des travaux complémentaires. Nous attendons avec intérêt de recevoir à notre prochaine réunion un rapport sur l'avancement des diverses actions relevant de la SEEI.
  10. Les changements historiques qui sont intervenus récemment en Croatie constituent une contribution de première importance à la stabilité régionale et peuvent servir d'exemple aux pays de la région qui ne font pas encore partie de la communauté euro-atlantique. Nous encourageons la Croatie à poursuivre son vaste programme de réformes. Nous nous félicitons vivement de l'adhésion de la Croatie au CPEA et au PPP. Nous coopérerons étroitement avec ce pays au sein de ces institutions, en particulier dans le domaine des opérations de soutien de la paix comme dans celui de la réforme et du contrôle démocratique des forces armées croates.
  11. Nous espérons que le moment viendra où il sera permis à la démocratie de s'épanouir également en RFY. Nous sommes grandement préoccupés par la répression que le régime de Belgrade exerce vis-à-vis des médias et des protestations de l'opposition, et en particulier par les informations faisant état d'arrestations massives d'étudiants et d'autres membres de l'opposition. Le caractère nettement politique de la récente condamnation, par un tribunal serbe, de cent quarante-trois Albanais du Kosovo accusés de terrorisme est également très préoccupant. Nous appelons les autorités serbes à s'abstenir d'organiser de tels procès politiques et à respecter les normes internationales de la justice pénale. Nous déplorons la détention dans des prisons serbes d'Albanais du Kosovo et de membres de toutes les communautés du Kosovo, et nous réclamons leur libération immédiate et leur retour dans des conditions de sécurité, ainsi que des explications détaillées sur le sort des personnes disparues. Seul un changement démocratique véritable, qui garantisse le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qui protège les droits de toutes les minorités, y compris celles de la Voïvodine et du Sandjak, ouvrira la voie au retour, à terme, de la RFY au sein de la famille euro-atlantique des nations et facilitera son intégration à la communauté internationale. Nous restons également préoccupés par la persistance des tensions entre Belgrade et le gouvernement démocratiquement élu du Monténégro, et continuons de suivre la situation de très près. Réitérant notre intérêt pour la stabilité et la sécurité de la région, ainsi que du Monténégro, nous appelons les deux parties à régler leurs différends d'une manière pacifique et pragmatique, et à s'abstenir de toute mesure déstabilisatrice. Nous comptons que les élections locales du 11 juin se dérouleront de manière pacifique et équitable.

    Nous remercions le général Wesley Clark, soldat et chef militaire aux qualités exceptionnelles, pour sa remarquable contribution en tant que SACEUR, et souhaitons la bienvenue à son successeur, le général Joseph Ralston.

ª La Turquie reconnait la République de Macédoine sous son nom constitutionel