La défense antimissile balistique
La prolifération des missiles balistiques représente une menace croissante pour les populations, le territoire et les forces des pays de l'OTAN. De nombreux pays situés à proximité de l’OTAN disposent déjà de missiles balistiques ou s’emploient à en mettre au point ou à en acquérir. La défense antimissile balistique (BMD) est une des missions permanentes de l’Alliance et relève de la défense aérienne et antimissile intégrée (IAMD) de l’OTAN. La BMD de l’OTAN est strictement défensive et contribue à mener à bien la tâche fondamentale de dissuasion et de défense de l’OTAN. Les capacités BMD constituent un élément essentiel de l’éventail des capacités stratégiques de l’OTAN, avec les forces conventionnelles et la dissuasion nucléaire, auxquelles s’ajoutent les capacités spatiales et les capacités cyber.

Station BMD Aegis Ashore des États-Unis sur la base militaire de Deveselu, Roumanie
- L'Alliance a le devoir de protéger les populations, le territoire et les forces des pays européens de l'OTAN, compte tenu des menaces croissantes liées à la prolifération des missiles balistiques, en particulier au sud-est de ses frontières.
- En 2010, les Alliés ont décidé de développer une capacité BMD élargie pour mener à bien la tâche fondamentale de l'OTAN qu'est la mission de dissuasion et de défense.
- En juillet 2016, les Alliés ont déclaré atteinte la capacité opérationnelle initiale de la BMD de l’OTAN, qui offre une capacité accrue de défense des populations, du territoire et des forces de l’Alliance dans toute la partie sud-est du territoire de l’OTAN contre une attaque potentielle de missiles balistiques.
- Depuis, l’Alliance continue à développer la capacité BMD de l’OTAN. Les Alliés demeurent attachés à la pleine mise en œuvre de la BMD de l’OTAN, comme les chefs d’État et de gouvernement des pays de l’OTAN l’ont rappelé au sommet de Madrid de 2022.
- La capacité BMD de l'OTAN comprend des moyens financés en commun - en particulier des moyens de commandement et de contrôle - et des contributions volontaires fournies par plusieurs Alliés, comme l’approche adaptative phasée des États-Unis pour la défense antimissile en Europe.
- Un nombre croissant d’Alliés apportent déjà leurs contributions ou entreprennent de mettre au point ou d'acquérir des moyens BMD supplémentaires, tels que des navires modernisés dotés de radars BMD, des systèmes de défense aérienne et antimissile basée au sol, ou encore des capacités avancées de détection.
- La capacité BMD de l’OTAN est de nature défensive. Elle représente un investissement à long terme destiné à contrer les menaces liées aux missiles balistiques émanant de l’extérieur de la zone euro-atlantique.
Introduction
La BMD de l’OTAN est destinée à contrer la menace croissante que représente la prolifération des missiles balistiques à proximité de la frontière sud-est de l'Alliance. Ces dernières années par exemple, les Alliés se sont dits préoccupés par l’intensification des tirs d’essai de missiles et par la portée et la précision des missiles balistiques de l’Iran. L'objectif de la BMD de l'OTAN reste d'assurer la couverture totale et la protection de l'ensemble des populations, du territoire et des forces des pays européens de l’OTAN contre les missiles balistiques provenant de l’extérieur de la zone euro-atlantique.
Cet objectif essentiel s'appuie sur les principes de l’indivisibilité de la sécurité des Alliés et de la solidarité au sein de l’OTAN, du partage équitable des risques et des charges, ainsi que de l’effort raisonnable. Il tient compte également du niveau de la menace, de la soutenabilité financière et de la faisabilité technique, et des dernières évaluations communes de la menace agréées par l’Alliance. Si les efforts internationaux devaient permettre de réduire les menaces qu'engendre la prolifération des missiles balistiques, la défense antimissile de l'OTAN pourra être adaptée en conséquence, et elle le sera.
Des capacités de défense antimissile balistique efficaces servent à compliquer l’établissement de plans hostiles par des adversaires potentiels. Elles peuvent aussi permettre de gagner un temps précieux en période de crise en donnant aux responsables civils et militaires un délai supplémentaire pour décider comment réagir de façon appropriée à une menace. La défense antimissile peut venir compléter le rôle des armes nucléaires dans la dissuasion mais elle ne peut pas s'y substituer.
La BMD de l’OTAN est destinée à assurer la défense contre des menaces potentielles émanant de l’extérieur de la zone euro-atlantique. Elle n'est pas dirigée contre la Russie, et elle ne portera pas atteinte à la dissuasion stratégique russe.
Composantes
La BMD de l'OTAN s'appuie sur des contributions nationales volontaires, y compris des intercepteurs et des capteurs à financement national et des accords de stationnement. Elle se base également sur la structure des systèmes de commandement et de contrôle mise en place dans le cadre du programme BMD de l’OTAN, qui est financé en commun par tous les Alliés.
L’Allemagne héberge le centre de commandement de la BMD de l’OTAN sur la base aérienne de Ramstein. Les États-Unis contribuent à la BMD de l'OTAN au travers de leur programme d'approche adaptative phasée pour la défense antimissile en Europe (EPAA). La Türkiye héberge un radar BMD américain à Kürecik. La Roumanie héberge une station Aegis Ashore des États-Unis sur la base aérienne de Deveselu, et la Pologne héberge une autre station Aegis Ashore, dont la construction sera bientôt achevée, à la base militaire de Redzikowo. En outre, dans le contexte de l'EPAA, l'Espagne accueille dans sa base navale de Rota quatre navires Aegis multimissions dotés de capacités BMD, qui peuvent être utilisés pour la mission BMD de l’OTAN, le cas échéant.
Plusieurs alliés offrent en outre des systèmes de défense aérienne et antimissile intégrée (notamment des systèmes Patriot ou SAMP/T) ou des navires supplémentaires. D'autres sont également en train de mettre au point ou d'acquérir des moyens dotés de capacités BMD qui pourraient, à terme, être mis à disposition pour la BMD de l'OTAN.
Mécanismes
Le Comité de la politique de défense aérienne et antimissile intégrée (IAMD PC) est l'organe de haut niveau relevant du Conseil de l'Atlantique Nord qui supervise et coordonne toutes les activités menées au niveau politico-militaire pour développer la capacité BMD de l'OTAN. Il donne également des avis politico-militaires sur la BMD de l'OTAN au Conseil de l’Atlantique Nord dans le cadre de son mandat général relatif aux aspects politiques de l’IAMD de l’OTAN.
La Conférence des directeurs nationaux des armements (CDNA) est le comité de haut niveau responsable de la direction du programme BMD, dont le but est de développer les fonctions de commandement et de contrôle nécessaires pour la BMD de l’OTAN.
Les autorités militaires de l'OTAN sont responsables de la mise au point d'un cadre doctrinal militaire pour la BMD et pour la planification, la formation et l'exécution opérationnelles dans ce domaine.
Plusieurs autres comités de haut niveau de l'OTAN traitent la BMD de l'OTAN dans des contextes plus larges, comme ceux de la préparation du secteur civil et de la gestion de crise.
Évolution
Au sommet de Lisbonne en 2010, les chefs d’État et de gouvernement des pays de l'Alliance sont convenus de traiter la défense antimissile balistique de manière holistique en développant un système OTAN de défense aérienne et antimissile intégrée (NATINAMDS), et notamment une capacité BMD territoriale. Avant cela, les initiatives de l’OTAN dans le domaine de la BMD étaient axées sur la défense contre les missiles balistiques de théâtre (TBMD) - en d’autres termes, une BMD pour la protection des forces armées déployées sur un théâtre d’opération. Le passage à la BMD territoriale s’inscrit dans le cadre d’une initiative plus large visant à défendre les forces, les populations et le territoire des pays européens de l’OTAN. Le NATINAMDS est basé sur le système OTAN de défense aérienne intégrée (NATINADS) qui existait précédemment.
Au sommet de Chicago, en 2012, l’Alliance a déclaré que la capacité BMD intérimaire de l'OTAN était atteinte. Les Alliés ont aussi entériné une revue de la posture de dissuasion et de défense, qui précise que la défense antimissile peut venir compléter le rôle des armes nucléaires dans la dissuasion, mais qu’elle ne peut pas s'y substituer.
Au sommet de Varsovie de 2016, les Alliés ont déclaré atteinte la capacité opérationnelle initiale de la BMD de l’OTAN, qui offre une capacité accrue de défense des populations, du territoire et des forces de toute la partie sud-est du territoire de l’OTAN contre une attaque potentielle de missiles balistiques.
Au sommet de Madrid de 2022, les chefs d’État et de gouvernement des pays de l’Alliance ont adopté le concept stratégique 2022 de l’OTAN, le document d’orientation principal pour les activités de l’Alliance, y compris la BMD. S’agissant du nouvel environnement stratégique, qui continue d’évoluer, le concept stratégique 2002 fait observer que « des acteurs autoritaires s’en prennent à nos intérêts, à nos valeurs et à nos démocraties. Faisant fi des règles internationales et dérogeant à leurs engagements internationaux, ils investissent dans des capacités conventionnelles, nucléaires et missilières avancées, en entretenant le flou quant à leurs objectifs ».
Le concept stratégique 2022 souligne par conséquent que « la posture de dissuasion et de défense de l’OTAN combine de façon appropriée capacités nucléaires, capacités conventionnelles et capacités de défense antimissile, complétées par des capacités spatiales et des capacités cyber. Elle est défensive, proportionnée et pleinement conforme à nos engagements internationaux ».
Grandes étapes
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afficher la chronologie
Mai 2001
L'OTAN lance parallèlement deux études de faisabilité portant sur un futur système de défense antimissile de théâtre (TBMD) de l’Alliance.
Novembre 2002
Au sommet de Prague, les dirigeants des pays de l’Alliance demandent qu’une étude de faisabilité sur la défense antimissile soit réalisée, dont le but sera d’examiner les options relatives à la protection du territoire, des forces et des populations des pays de l’Alliance contre toute la gamme des menaces liées aux missiles balistiques.
Avril 2006
L’étude conclut qu’une capacité de défense antimissile balistique territoriale est techniquement faisable.
Avril 2008
Au sommet de Bucarest, les dirigeants des pays de l’Alliance décident que l'implantation en Europe de moyens BMD des États-Unis doit être intégrée dans toute architecture future de défense antimissile à l’échelle de l’OTAN.
Septembre 2009
Les États-Unis annoncent un programme d'approche adaptative phasée pour la défense antimissile en Europe (EPAA).
Novembre 2010
Au sommet de Lisbonne, les dirigeants des pays de l'Alliance décident de développer une capacité BMD pour mener à bien la tâche fondamentale de défense collective de l’OTAN. Pour ce faire, ils décident d’élargir le programme TBMD existant afin de protéger non seulement les forces mais aussi les populations et le territoire des pays européens de l'OTAN. Dans ce contexte, l'EPAA et d'autres contributions des pays sont jugées précieuses pour l'architecture BMD de l'OTAN.
Septembre 2011
La Türkiye annonce sa décision d'accueillir un radar de défense antimissile des États-Unis dans le cadre de la capacité BMD de l'OTAN.
Septembre 2011
La Roumanie et les États-Unis signent un accord sur l'accueil d'un système Aegis Ashore des États-Unis sur le territoire roumain, dans le cadre de la capacité BMD de l'OTAN.
Septembre 2011
Un accord entre la Pologne et les États-Unis sur l'accueil d'un système Aegis Ashore des États-Unis sur le territoire polonais entre en vigueur.
Octobre 2011
L'Espagne et les États-Unis annoncent un accord sur l’accueil de navires Aegis dans le port de Rota, en Espagne, dans le cadre d’une autre contribution des États-Unis à la capacité BMD de l'OTAN.
Avril 2012
L'OTAN installe et teste avec succès l'architecture de commandement et de contrôle au Commandement aérien allié à Ramstein, en Allemagne.
Mai 2012
Au sommet de Chicago, les Alliés déclarent que l'OTAN a atteint une capacité BMD intérimaire, ce qui constitue une première étape significative sur le plan opérationnel.
2013-2014
Dans le cadre du Conseil OTAN-Russie (COR), l’OTAN et la Russie entament des discussions sur la défense contre les missiles balistiques de théâtre (TBMD), notamment sur une évaluation des niveaux possibles d'interopérabilité entre les systèmes TBMD des pays de l'OTAN et ceux de la Russie. En 2013, la Russie suspend unilatéralement les discussions sur la défense antimissile dans le cadre du COR. En réponse à l'annexion illégale et illégitime de la Crimée par la Russie en 2014, l'OTAN suspend toute coopération pratique avec la Russie, y compris dans le domaine de la défense antimissile balistique.
2014
Arrivée du premier destroyer Aegis des États-Unis à Rota, en Espagne, en février. Arrivée du second destroyer Aegis des États-Unis à Rota en juin.
2015
Arrivée du troisième destroyer Aegis des États-Unis à Rota en avril. Arrivée du quatrième destroyer Aegis des États-Unis à Rota en septembre.
Mai 2016
Le site Aegis Ashore de Deveselu, en Roumanie, est déclaré opérationnel.
Juillet 2016
Au sommet de Varsovie, les dirigeants des pays de l’Alliance déclarent atteinte la capacité opérationnelle initiale de la BMD de l’OTAN, qui offre une capacité renforcée pour défendre les populations, le territoire et les forces de toute la partie sud-est du territoire de l’OTAN contre une attaque potentielle de missiles balistiques.
Juillet 2018
Au sommet de Bruxelles, les dirigeants des pays de l’OTAN confirment que le prochain jalon majeur sera l'achèvement de l'élément fondamental du système de commandement et de contrôle de la BMD de l'OTAN, l’objectif étant d'améliorer encore la planification et l’exécution des opérations BMD. Ils reconnaissent également qu'il faut poursuivre les travaux pour atteindre la capacité opérationnelle totale.
Juillet 2022
Au sommet de Madrid, les dirigeants des pays de l’Alliance réaffirment leur attachement à la pleine mise en œuvre de la BMD de l’OTAN.