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Version électronique 1998 Manuel de l'OTAN

 

Préface

Au cours de la dernière décennie, la sécurité européenne et le partenariat euro-atlantique, sur lequel elle s'appuie, ont connu de profonds changements. Aujourd'hui, à la veille du troisième millénaire et alors que l'Alliance s'apprête à célébrer son cinquantième anniversaire, un cadre large et ouvert à tous pour l'examen des problèmes de sécurité a été mis en place, au profit de l'Europe tout entière. Il offre, s'agissant de la coopération et de la poursuite d'objectifs communs, des perspectives qui n'auraient pas pu être envisagées il y a moins de dix ans. Comment cela s'est-il produit ?

En 1989 a commencé un processus de changement politique fondamental dans les relations Est-Ouest. Le Mur de Berlin, qui s'était dressé pendant près de quarante ans comme le symbole d'une Europe divisée, a enfin été démantelé; les Etats communistes à parti unique ont disparu de l'ensemble de l'Europe centrale et orientale, des Etats libres et indépendants ont été établis dans les républiques de l'ex-Union soviétique, et la division de l'Europe de l'après-guerre a pris fin.

Depuis sa fondation, en 1949, jusqu'à la fin de la Guerre froide, quatre décennies plus tard, l'Alliance de l'Atlantique Nord a joué un rôle fondamental pour créer les conditions nécessaires à ces changements. Garante de la sécurité, de la liberté et de l'indépendance de ses membres, et instrument de la promotion des valeurs démocratiques et de l'émergence d'institutions démocratiques en Europe, elle a aidé à faire disparaître les antagonismes Est-Ouest d'une manière qui a rendu possible l'établissement de relations de sécurité nouvelles et constructives, proposées à tous les pays.

La transformation de l'environnement de sécurité a aussi eu un profond impact sur l'Alliance de l'Atlantique Nord elle-même. Elle lui a permis d'entamer son propre processus d'adaptation, tout en continuant de remplir sa fonction essentielle - assurer la sécurité de ses membres - et de poursuivre son objectif politique fixé de longue date, l'établissement en Europe d'un ordre pacifique juste et durable. L'Alliance conserve la capacité de défendre ses membres contre toute menace visant leur intégrité territoriale ou leur indépendance politique. Toutefois, elle s'emploie surtout à prévenir l'apparition de telles menaces, par l'instauration de relations pacifiques et amicales dans l'ensemble de la zone euro-atlantique.

La fin de la Guerre froide a permis à l'Alliance de réduire très sensiblement le niveau de ses forces armées et d'introduire des changements importants dans leur état de préparation et leur déploiement. Elle a aussi multiplié ou nettement élargi les tâches de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord. On peut citer, entre autres, l'instauration d'un processus de dialogue, de coopération et de partenariat avec les Etats d'Europe centrale et orientale et avec d'autres pays membres de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE 1), l'établissement de relations de travail étroites avec d'autres institutions jouant un rôle en rapport avec la sécurité européenne, telles que les Nations Unies, l'OSCE et l'Union de l'Europe occidentale (UEO), et la mise en place de nouvelles structures de commandement ainsi que de nouvelles structures de forces reflétant l'évolution de l'environnement stratégique.

L'OTAN a entrepris la transformation politique et militaire de ses structures au début des années 90. En juillet 1990, dans une déclaration publiée à l'issue d'une réunion au sommet et appelée la Déclaration de Londres sur une Alliance de l'Atlantique Nord rénovée, les dirigeants alliés ont annoncé leur intention d'adapter l'Alliance au nouvel environnement de sécurité. Un peu plus d'un an après, en novembre 1991, au Sommet de Rome, ils ont publié un nouveau Concept stratégique et une Déclaration sur la paix et la coopération. Ensemble, ces documents ont tracé la voie à suivre pour réorganiser et rationaliser les structures et procédures politiques et militaires de l'Alliance, réduire sensiblement l'effectif des forces alliées et leur niveau de préparation, et reconfigurer les forces de l'Alliance de façon à les rendre mieux à même d'accomplir les nouvelles missions de gestion des crises et de maintien de la paix, tout en préservant la capacité de défense collective.

Les dirigeants alliés ont continué sur la voie de la transformation à la réunion au sommet tenue à Bruxelles en janvier 1994. Parmi les décisions prises à cette réunion, il convient de citer en tout premier lieu l'annonce de l'initiative du Partenariat pour la paix. Il s'agissait d'une invitation ouverte adressée aux Etats participant au Conseil de coopération nord-atlantique (CCNA) 2 et aux autres Etats de la CSCE/l'OSCE 3 afin qu'ils se joignent aux pays de l'OTAN pour mener à bien un vaste programme de coopération pratique destiné à faciliter la coopération dans l'accomplissement de tâches de maintien de la paix et de gestion des crises ainsi que de tâches humanitaires. Un aspect essentiel du Partenariat pour la paix, auquel adhèrent aujourd'hui vingt-sept pays partenaires en plus des seize Alliés, est la possibilité qu'il offre à chaque Partenaire de mener des activités de coopération intensive avec l'Alliance sur une base bilatérale, en fonction de ses intérêts et de ses possibilités propres. Le Partenariat pour la paix est décrit en détail au chapitre 4.

Au Sommet de Bruxelles ont également été prises des décisions qui visaient à rendre les structures de l'OTAN plus souples et mieux adaptées au nouvel environnement de sécurité en Europe. Parmi ces décisions figurait l'adoption du concept des Groupes de forces inter-armées multinationales (GFIM) (voir le chapitre 3). L'intérêt des GFIM réside en particulier dans leur polyvalence, qui améliore la capacité de l'Alliance d'accomplir toute la gamme de ses tâches et de ses missions - de la défense collective au maintien de la paix et à la gestion des crises. Ils peuvent en même temps venir à l'appui d'opérations conjointes menées avec la participation de pays non partenaires de l'OTAN. Ils peuvent aussi fournir à l'Alliance un moyen essentiel d'apporter un soutien à des opérations dirigées par l'Union de l'Europe occidentale, dans le cadre de la contribution alliée au renforcement de l'Identité européenne de sécurité et de défense au sein de l'OTAN.

Le Sommet de Bruxelles a aussi vu le lancement d'autres grandes initiatives s'inscrivant dans le processus de transformation et d'adaptation de l'Alliance. L'une d'elles avait pour but de contribuer à prévenir la prolifération des armes nucléaires et des autres armes de destruction massive grâce à des mesures appartenant à la fois au domaine politique et à celui de la défense. Une autre visait à promouvoir le dialogue, la compréhension mutuelle et la confiance entre les pays membres de l'OTAN et des pays non OTAN de la région méditerranéenne.

A la réunion du Conseil de l'Atlantique Nord 4 tenue à Berlin en juin 1996, une étape décisive a été franchie vers la mise en oeuvre, dans le prolongement des initiatives du Sommet de Bruxelles, de mesures destinées à adapter l'Alliance aux circonstances nouvelles, en particulier sur le plan interne. Des directives supplémentaires ont été données au Comité militaire de l'OTAN pour ses travaux visant à réformer la structure de commandement de l'Alliance et à la mettre davantage en adéquation avec le nouvel environnement de sécurité en Europe ainsi qu'avec les défis qui pourraient se présenter à l'avenir. En outre, d'importantes mesures ont été agréées en vue de faire avancer la mise au point de dispositions permettant aux Alliés européens de jouer un plus grand rôle dans les structures militaires et les structures de commandement de l'OTAN, et de faciliter l'utilisation des moyens et capacités de l'OTAN à l'appui de futures opérations de maintien de la paix et de gestion des crises dirigées par l'UEO. Toutes ces mesures doivent préserver l'efficacité militaire de l'Alliance, permettre à celle-ci d'entreprendre de nouvelles missions, et contribuer à la construction d'une Identité européenne de sécurité et de défense au sein de l'Alliance.

Au cours des semaines qui ont précédé le Sommet de Madrid, tenu en juillet 1997, deux événements importants ont marqué les efforts poursuivis par l'Alliance afin de développer le partenariat et la coopération dans l'ensemble de la zone euro-atlantique. Le premier a eu lieu le 27 mai 1997, à Paris, où les dirigeants alliés et le président Eltsine ont signé l'Acte fondateur sur les relations, la coopération et la sécurité mutuelles entre l'OTAN et la Fédération de Russie. Ce document a non seulement institué un mécanisme de consultation et de coopération - le Conseil conjoint permanent (CCP) OTAN-Russie - mais aussi défini des domaines spécifiques d'intérêt mutuel dans lesquels l'OTAN et la Russie peuvent construire un partenariat solide, efficace et durable.

Le second événement s'est déroulé quelques jours plus tard, le 30 mai 1997, à Sintra, au Portugal : un Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA) a été créé, et il a été décidé d'améliorer de façon substantielle la portée et la qualité du Programme de partenariat pour la paix. Le CPEA est le cadre général où sont traités tous les aspects de la coopération que l'Alliance poursuit, dans toute une série de domaines, avec ses Partenaires, y compris au titre du Partenariat pour la paix. Il permet en particulier de mieux cibler les discussions multilatérales qui se tiennent, sur des questions de politique et de sécurité, entre tous ses membres.

Au Sommet de Madrid, en juillet 1997, le processus de changement et d'adaptation interne et externe de l'OTAN a atteint un stade crucial. Les Chefs d'Etat et de gouvernement des pays alliés ont pris des décisions de première importance dans le cadre de leur politique générale de renforcement de la paix et de la stabilité dans la zone euro-atlantique. Ils ont invité la République tchèque, la Hongrie et la Pologne à entamer des pourparlers d'adhésion avec l'OTAN en vue de leur entrée dans l'Alliance comme membres à part entière. Par ailleurs, ils ont approuvé le maintien d'une politique «de la porte ouverte» pour d'autres adhésions et la poursuite de dialogues intensifiés avec les Partenaires désireux d'entrer à l'OTAN. Ils ont annoncé la mise en oeuvre d'un Programme de partenariat pour la paix sensiblement renforcé, ainsi que l'intensification des consultations avec les Partenaires par le biais du Conseil de partenariat euro-atlantique et celle du dialogue mené par l'Alliance avec des pays méditerranéens non membres de l'OTAN.

En ce qui concerne l'adaptation interne, les participants au Sommet de Madrid ont approuvé les progrès réalisés dans la construction d'une Identité européenne de sécurité et de défense au sein de l'Alliance et dans le renforcement de la coopération institutionnelle avec l'Union de l'Europe occidentale.

Le second jour du Sommet de Madrid, le 9 juillet 1997, les dirigeants alliés ont signé avec le Président de l'Ukraine, M. Koutchma, une Charte sur un partenariat spécifique entre l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord et l'Ukraine. Ce document énonce les principes du développement des relations OTAN-Ukraine et définit des domaines de consultation et de coopération. Il jette les bases d'un partenariat OTAN-Ukraine spécifique et efficace, destiné à favoriser une plus grande stabilité et à promouvoir des valeurs démocratiques communes en Europe centrale et orientale.

Les événements évoqués ci-dessus sont décrits plus en détail dans les chapitres qui suivent. Avant d'aborder ceux-ci, il peut être bon de rappeler le rôle fondamental de l'OTAN. Le chapitre 1 expose ce qu'est l'OTAN. Les chapitres suivants analysent la manière dont l'Alliance mène ses activités, les mesures par lesquelles elle s'est adaptée au changement, son rôle spécifique dans des secteurs clés tels que le maintien de la paix et la maîtrise des armements, et le contexte général de la coopération multinationale dans le domaine de la sécurité.


1 L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, ou OSCE, comprend tous les pays européens ainsi que les Etats-Unis et le Canada. L'interaction de l'Alliance avec l'OSCE, de même que ses relations avec les Nations Unies, l'Union de l'Europe occidentale (UEO) et d'autres organisations internationales, est décrite dans les sections liés;es.

2 Le Conseil de coopération nord-atlantique, ou CCNA, a été créé par l'OTAN en 1991 comme forum de consultation et de coopération réunissant les membres de l'Alliance et les pays partenaires d'Europe centrale et orientale. En mai 1997, le CCNA a été remplacé par le Conseil de partenariat euro-atlantique, ou CPEA, où sont représentés 44 pays.

3 La Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, ou CSCE, instituée en 1972, est devenue une organisation, qui a pris le nom d'OSCE au début de 1995.

4 Le rôle du Conseil de l'Atlantique Nord est décrit au chapitre 2. La structure de l'OTAN dans son ensemble est décrite aux chapitres 10 à 13.


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