SÉCURITÉ ÉNERGÉTIQUE : L’AGENDA DE L’OTAN
Nous devons faire de la diversification énergétique une priorité transatlantique stratégique et réduire la dépendance de l’Europe aux sources d’énergie russes.
En effet, si l’on fait abstraction des nouvelles préoccupations nées de la crise ukrainienne, l’approvisionnement énergétique est source de sérieux défis politiques, économiques et sécuritaires pour bon nombre de pays de l’OTAN : la dépendance de l’Europe aux importations de pétrole et de gaz va croissant, à l’instar des besoins énergétiques de puissances émergentes telles la Chine et l’Inde ; l’instabilité politique hante de nombreux États producteurs ou de transit ; la course à l’énergie et à d’autres ressources suscite des différends territoriaux dans plusieurs parties du monde ; les actes de terrorisme et les cyberattaques contre des raffineries, des pipelines et des centrales électriques sont monnaie courante dans une multitude de pays, sans parler de la piraterie dans les principaux passages maritimes stratégiques. Enfin, citons le fardeau énergétique des opérations militaires : toujours plus lourd en termes logistique et financier, le déploiement, parfois à grande distance, de forces militaires appelle la définition de nouvelles mesures d’efficacité énergétique.
La sécurité énergétique : partie intégrante de l’appréciation de la situation stratégique par l’OTAN
Autant de raisons pour lesquelles la connaissance stratégique des développements énergétiques mondiaux et régionaux fait partie intégrante de l’agenda énergétique de l’OTAN. Le processus de consultation politique de l’Organisation, qui s’appuie sur un partage du renseignement, permet aux Alliés de débattre en toute confidentialité des développements énergétiques influant sur leur sécurité au sens le plus large. À cet égard, le séminaire du Conseil de l’Atlantique Nord sur les développements énergétiques mondiaux qui s’est tenu en janvier 2014 a constitué un jalon important. Cet événement informel, soutenu par des experts extérieurs, a été le théâtre d’intenses débats sur les implications sécuritaires d’un paysage énergétique en mutation. L’OTAN n’étant pas une institution spécialisée dans ce secteur, elle fait souvent appel à l’expertise d’autres organisations internationales, telles que l’Agence internationale de l’énergie, ainsi qu’à des groupes de réflexion et des universités.
La place toujours plus importante qu’occupe la réflexion sur l’énergie dans les débats internationaux laisse à penser que la sécurité énergétique pourrait s’inscrire de façon permanente dans les programmes de formation de l’OTAN. Diplomates et chefs militaires auraient alors l’opportunité de se familiariser avec les questions énergétiques et apparentées, telles que la course aux ressources et le changement climatique, qui dicteront les développements sécuritaires à venir. C’est dans cette optique que les structures de formation de l’OTAN et les établissements nationaux mettent actuellement au point des stages de formation – le premier stage, consacré à la connaissance de la situation énergétique étant prévu pour fin octobre 2014 à l’École de l’OTAN à Oberammergau.
Contribution de l’OTAN à la protection des infrastructures énergétiques critiques
Qui plus est, ces derniers temps, terroristes et insurgés ont perpétré quelque 500 attaques annuelles contre des cibles du secteur énergétique : sabotage de gazoducs et d’oléoducs, attaques de camions-citernes, assassinat et enlèvement du personnel associé et perturbation des systèmes d’alimentation électrique, pour n’en citer que quelques-unes. Si la plupart de ces attaques se concentrent dans une poignée de régions bien précises, comme l’Afrique de l’Ouest, les agressions contre les infrastructures énergétiques peuvent faire sentir leurs effets bien au-delà de leur point d’impact : la volatilité du marché énergétique fait qu’une seule attaque peut provoquer une flambée des prix mondiaux. Un acte terroriste peut entraîner l’envolée des primes d’assurance. Et l’interruption des approvisionnements – si brève soit-elle – peut avoir une cascade de conséquences économiques et psychologiques. Ainsi, tout porte à croire que les infrastructures énergétiques resteront une cible de choix.
La plupart des pays de l’OTAN dépendent des importations d’énergie en provenance de régions extérieures à l’Alliance, raison pour laquelle ils s’intéressent de près à la sécurité des infrastructures dans les pays producteurs ou de transit. C’est aussi pourquoi le partage des meilleures pratiques en matière de protection des infrastructures critiques reste l’un des axes de coopération avec les pays partenaires le plus souvent proposé par l’OTAN pour ce qui est de la sécurité énergétique. Les activités dans ce domaine bénéficient de la longue expérience de l’Organisation dans la gestion des crises et des conséquences et dans la planification civile d’urgence, ainsi que de la participation effective du secteur privé. En outre, l’OTAN est chaque jour mieux à même d’apporter son concours à la protection des infrastructures énergétiques au travers des opérations de lutte contre la piraterie qu’elle mène dans l’Océan indien.
Mais c’est surtout la capacité de l’OTAN à assurer la liberté de navigation maritime qui figure parmi ses contributions les plus marquantes dans le domaine énergétique. Et, comme le transport de pétrole et de GNL s’effectue de plus en plus par la mer, la sûreté des voies de communication maritimes va gagner en importance. De même, en intégrant des scénarios énergétiques dans les exercices qui s’y prêtent, l’OTAN veille à ce que son interface et ses procédures politico-militaires soient en adéquation avec les impératifs de la gestion de crises complexes. La participation de pays partenaires et d’autres organisations internationales à certains de ces exercices témoigne de l’intrication de ces défis ainsi que de la volonté de l’OTAN de travailler en équipe. Développer leurs compétences en matière de protection des infrastructures énergétiques critiques, tel est l’objectif que se sont fixé les pays de l’Alliance et les partenaires : ces derniers peuvent donc enrichir les programmes de formation de l’OTAN dans ce domaine en apportant leur propre expertise.
Des forces toujours moins énergivores
Pour ce faire, l’OTAN s’est dotée d’un cadre pour la défense verte et a créé un groupe d’experts – l’Équipe Énergie intelligente (SENT) – qui travaille en étroite collaboration avec d’autres acteurs de l’Organisation, notamment des experts du génie militaire et des carburants.
Réduire la facture énergétique, contenir à un minimum les risques pour le soldat et afficher une sensibilité à l’environnement sont autant d’intérêts que partagent Alliés et partenaires, raison pour laquelle certains partenaires participent au projet SENT. Le programme OTAN pour la science au service de la paix et de la sécurité (SPS) contribue lui aussi à la sécurité énergétique : outre un soutien à SENT, il constitue une plateforme pour la coopération avec les universités et les instituts de recherche, d’où émanent les technologies les plus novatrices.
La bonne compréhension et la pleine prise en compte, dans toutes les instances militaires de l’OTAN, de l’efficacité énergétique militaire passent par son intégration dans les programmes de formation et d’entraînement de l’OTAN. À cet égard, le Centre d’excellence pour la sécurité énergétique implanté en Lituanie joue un rôle de premier plan. De même, il étudie les changements de comportement requis pour ancrer fermement ce nouveau paradigme : désormais, la planification et la conduite des futures missions de l’OTAN devront tenir compte de l’économie et de la préservation des ressources énergétiques.
Conclusion