![]() |
Mise à jour: 06-Oct-2005 10:17 | Conférences |
Fr./Eng. |
Enseignements tirés de récents attentats terroristes :
Conférence du cor Ljubljana (Slovénie) - 27 juin au 1er juillet 2005 Rapport du Président
1. La Mission des États-Unis auprès de l’OTAN et le Centre européen George C. Marshall ont organisé, avec le soutien du Ministère des affaires étrangères de la République de Slovénie, une conférence d’experts, sous les auspices du Conseil OTAN-Russie, sur le thème « Enseignements tirés de récents attentats terroristes : mise en place d'institutions et de capacités nationales » qui s’est tenue à Ljubljana (Slovénie), du 27 juin au 1 er juillet 2005. Cette conférence est prévue par leplan d'action du COR contre le terrorisme. Plus de 150 experts représentant 20 pays du COR ont participé à cette activité, dont le principal objectif était de rassembler, dans un forum d’experts sans équivalent, des décideurs et des personnels de première intervention, réunis là pour échanger des informations sur l'état de préparation des pays et la réponse aux attentats terroristes. Les premiers orateurs, notamment M. Dimitrij Rupel, Ministre des affaires étrangères de la Slovénie, ont souligné l'importance et l'opportunité de cette conférence, qui s’inscrivait dans le prolongement d’une série déjà considérable d’activités liées à la coopération OTAN-Russie contre le terrorisme. M. Rupel a également souligné l’importance de coordonner les efforts engagés par la communauté internationale contre le terrorisme, et la nécessité de préserver les valeurs démocratiques fondamentales face à la menace terroriste. Cette conférence visait à promouvoir un échange d’idées et d’expériences ouvert et informel entre les participants ; les opinions exprimées ne représentent donc pas nécessairement la position officielle des pays ou des positions agréées du Conseil OTAN-Russie. Etudes De Cas 2.
Les débats ont été axés sur des études de cas, présentées par quatre équipes de conférenciers nationales (États-Unis, Turquie, Espagne et Russie). Les orateurs ont décrit les réponses données aux niveaux local et national à de récents attentats terroristes de grande envergure et expliqué en détail les problèmes que pose la gestion des conséquences de ce type d’attentat. Ils ont montré comment les enseignements tirés avaient été intégrés ensuite dans les pratiques nationale et locale de gestion des conséquences. Certains intervenants ont également parlé de la nature et de la motivation des auteurs de ces attentats et souligné la nécessité de recueillir et de partager rapidement, de façon coordonnée et souple, les données du renseignement. États-Unis 3.
L'équipe américaine a présenté un rapport détaillé sur le système américain de gestion des situations d’urgence, tel que celui-ci a été mis en application après l'attentat à la bombe de 1993 contre le World Trade Centre à New York et après les attentats terroristes du 11 septembre 2001. Immédiatement après ces attentats, des priorités initiales ont été établies dans le cadre du Plan d’opérations d'urgence de la ville de New York et du Federal Response Plan (Plan de réponse fédéral) du Président : livraison de matériels de sauvetage à la ville de New York, mise en place de centres de mobilisation, évaluation des dégâts causés aux infrastructures, et évaluation des besoins en matière de déblaiement. Ces mesures ont été mises en œuvre par le biais de douze « fonctions de soutien d’urgence » (ESF) : transports, communications, bâtiment et travaux publics, lutte contre l'incendie, information et planification, système d'information géographique, prise en charge d’un très grand nombre de victimes, soutien en ressources, services sanitaires et médicaux, recherche et sauvetage en milieu urbain, matières dangereuses, ravitaillement, et énergie. 4. Les principaux enseignements tirés de ces attentats sont les suivants:
5. La plupart de ces enseignements ont été pris en compte lors de la création du Département de la sécurité intérieure (Department of Homeland Security) et dans la mise en œuvre des directives présidentielles sur la sécurité intérieure, ainsi qu’avec l’adoption d’un nouveau Plan de réponse national (National Response Plan). Turquie 6. L’équipe turque a décrit la nature du terrorisme qui frappe la Turquie, la planification et l’exécution des attentats terroristes de novembre 2003 à Istanbul, ainsi que la structure de la police nationale turque et la réponse aux attentats. Au cours des 30 dernières années, la Turquie a dû faire face à un terrorisme idéologique d'extrême‑droite et d'extrême-gauche, à un terrorisme séparatiste (PKK), et, depuis le début des années 90, à un terrorisme religieux (salafiste). Les différents groupes opérant dans les limites de ces catégories très générales ont pour objectif de renverser le gouvernement laïque turc. Depuis les années 90, des groupes terroristes nationaux ont étendu leurs ramifications au niveau international, en particulier avec des groupes liés à Al-Qaida. 7. L’équipe turque a expliqué que la préparation des attentats terroristes d'Istanbul de 2003 avait commencé dès 2001. Des ressortissants turcs, dont bon nombre avaient séjourné dans les Balkans, en Tchétchénie, en Afghanistan ou au Pakistan, ont établi des contacts avec des dirigeants d’Al-Qaida en Afghanistan qui leur ont procuré de l’argent et organisé un entraînement dans des camps talibans en Afghanistan. Les cibles ont été choisies en raison surtout de leur accès facile, dû à l’insuffisance du dispositif de sécurité alentour. Les explosifs utilisés - des substances chimiques disponibles dans le commerce - ont été faciles à trouver et n’ont pas coûté cher. Aucun des agresseurs n'avait de casier judiciaire. 8. La gestion des conséquences au lendemain des attentats a été efficace, et une enquête bien coordonnée, menée par les forces de police turques, a permis d’identifier et d’arrêter rapidement la plupart des auteurs des attentats. Un mandat d'arrêt international a été délivré à l'encontre des suspects qui ont réussi à quitter le pays. 9. Les principaux enseignements tirés de ces attentats sont les suivants :
Espagne 10. L’équipe espagnole a fait des exposés détaillés sur l’expérience vécue par l’Espagne au lendemain des attentats terroristes perpétrés à Madrid le 11 mars 2004. Les orateurs ont présenté une analyse détaillée de l’identité et du mode opératoire de la cellule terroriste responsable des attentats, ainsi que des méthodes d’investigation utilisées par les autorités judiciaires espagnoles. Ils ont également donné un aperçu du système espagnol d’aide médicale d’urgence et ont expliqué comment celui-ci avait géré les conséquences des attentats du 11 mars 2004. 11. Le groupe qui a perpétré les attentats du 11 mars n’était pas lié directement à Al-Qaida, ni à aucun autre réseau terroriste international, bien que les auteurs des attentats aient affirmé être des partisans d’Al-Qaida. Le groupe était composé de jeunes d'origine marocaine pour la plupart, résidant légalement à Madrid, qui avaient progressivement adhéré à l'idéologie radicale du djihad international, principalement en s’informant sur les sites Web islamistes radicaux. Ils avaient financé leurs opérations en se livrant à différentes activités délictueuses (vols à l’étalage ou autres, trafic de stupéfiants, etc.). Les 13 engins explosifs improvisés ont été fabriqués avec des substances acquises en Espagne. 12. L’équipe espagnole d’aide médicale d’urgence, composée de professionnels et de volontaires, a réagi rapidement et efficacement aux attentats. Les ambulances et autres véhicules de secours sont arrivés dans les minutes qui ont suivi les attentats, et les personnels d'intervention d'urgence se sont efforcés de répartir les blessés entre différents hôpitaux situés à proximité. La troisième et la quatrième explosions ont posé des problèmes de ressources et de personnel, car la quasi-totalité des ressources disponibles était alors déjà absorbée par les deux premières. 13. Les principaux enseignements tirés des attentats de Madrid sont les suivants :
Russie 14. L’équipe russe a fait part de l’expérience vécue par la Russie lors de la prise d'otages du théâtre Doubrovka de Moscou, en octobre 2002, lors des attentats-suicide d’août 2004 (près d’une station de métro à Moscou et contre un avion civil) et de la prise d’otages dans une école primaire de Beslan, en septembre 2004. Les orateurs ont souligné la complexité des interventions d’urgence en cas de prise d’otages et ont exposé les aspects juridiques et constitutionnels de la législation antiterroriste russe qui sont applicables dans ce cas. Ils ont en outre parlé de la nature de la menace terroriste en Russie et ont donné des informations détaillées sur le système russe d’intervention et de sauvetage d’urgence et sur les conséquences socio-psychologiques du terrorisme pour les civils, et en particulier pour les enfants. 15. Les efforts visant à élaborer une législation antiterroriste exhaustive se poursuivent en Russie. Les orateurs ont mis l’accent sur les discussions en cours sur le renforcement de la coordination entre les instances compétentes, comme le Conseil de sécurité, la commission fédérale antiterroriste et les ministères pertinents. Ils ont également souligné la nécessité d’éviter les chevauchements d’activités et de responsabilités, de façon à stimuler les échanges d’informations. 16. Les orateurs ont salué l’efficacité du système d’aide médicale d'urgence pendant et immédiatement après le siège de Beslan. L’acheminement de personnel spécialisé supplémentaire sur le site a été rapide, de même que l’évacuation et l’hospitalisation des victimes. La création de groupes d’intervention spécialisés, bénéficiant du soutien d’équipes de réserve, a contribué à la bonne coordination des interventions d’urgence au sein d’une structure clairement définie. 17. Les principaux enseignements tirés des attentats terroristes survenus en Russie sont les suivants :
Groupes de travail18. Neuf groupes d’experts, composés de professionnels travaillant dans des domaines spécifiques en rapport avec la lutte contre le terrorisme, ont examiné plus en détail les politiques et les priorités nationales dans ces domaines, ce qui a permis un échange d’informations très instructif, ainsi qu’un débat franc et ouvert sur les points qui pourraient être améliorés. On trouvera ci-après le compte rendu des discussions fait par les rapporteurs des groupes de travail. Sécurité des sites19. Un groupe de travail a délibéré sur les problèmes de sécurité des sites, en particulier sur l’évaluation de la vulnérabilité des cibles, sur les systèmes d’alerte rapide en matière de renseignement, et sur l’amélioration de la gestion des conséquences après des attaques terroristes. Le groupe a fait observer que, s’il n’existe pas d’approche unique susceptible de garantir la sécurité des sites, il serait néanmoins très utile de disposer d’un système renforcé global de recueil et de partage de données du renseignement (au niveau national comme au niveau international), d’améliorer l’utilisation des technologies disponibles (comme la biométrie), et d’organiser de fréquents exercices, formations ou simulations, en y associant des organismes des secteurs public et privé. Préparation et interventions du secteur médical20. Un autre groupe de travail s’est intéressé à la vulnérabilité des hôpitaux et à la préparation de leurs services d’intervention d’urgence ; il a notamment fait une analyse comparative des procédures et pratiques médicales en vigueur dans différents systèmes nationaux. Les participants ont examiné comment les pays du COR pourraient souhaiter mettre l’accent sur l’amélioration de la formation et des qualifications des personnels médicaux d’urgence, en établissant, par exemple, des directives opérationnelles, sur la base de principes communs applicables en la matière, et en mettant sur pied des programmes d’aide psychologique à l’intention du public. Police civile et investigations21. Des experts de la police civile ont discuté des normes juridiques ainsi que du rôle et des méthodes d’investigation utilisées par les autorités de police dans les affaires terroristes. Certains pays du COR ont considéré qu’il est utile d’adopter une législation temporaire solide pour combattre le terrorisme, quitte à retirer celle-ci une fois que la menace terroriste s’éloigne. Le groupe a également analysé les mesures préventives à prendre pour faire appliquer la législation antiterroriste, comme l’amélioration de la législation sur l'immigration, la neutralisation des missions de reconnaissance hostiles, la lutte contre la criminalité organisée, notamment par l’interception des transactions financières, ainsi que des enquêtes approfondies sur les installations de stockage suspectes et les vols de véhicules. Les participants ont souligné la nécessité de mettre en commun les informations et les ressources entre les autorités de police, mais aussi entre les gouvernements. Rôles et tâches des forces armées22. Des experts militaires ont discuté du rôle des forces armées dans la lutte contre le terrorisme. Le groupe a reconnu la nécessité de poursuivre la transformation des institutions militaires afin de répondre plus efficacement à la menace terroriste. Dans le même temps, la plupart des participants ont fait observer que les forces armées devaient jouer un rôle de soutien dans la lutte contre le terrorisme. Elles pourraient, par exemple, se charger de la détection des explosifs, de la défense CBRN, ou de la formation des personnels concernés. Les participants ont également examiné la nécessité de définir le rôle des forces armées dans la lutte contre le terrorisme, dans le cadre d’arrangements nationaux et internationaux spécifiques. Surveillance et contrôle de l'espace aérien23. Des experts de la sécurité de l'aviation ont procédé à des échanges de vues sur les mesures antiterroristes spécifiques prises par les pays du COR, comme l’amélioration de la couverture radio et radar, les nouvelles procédures d'interception des menaces aériennes, les systèmes d’alerte visuelle, les moyens de défense aérienne basés au sol, le renforcement du contrôle des personnels, des passagers et des bagages, le recours à des agents de la police de l'air et l’amélioration des procédures de contrôle de la circulation aérienne. Ils ont fait observer qu’il reste dans ce domaine plusieurs défis à relever : partage du renseignement, partage entre pays de données sur la perception de la situation, problèmes de financement, rapidité des évaluations de la menace, protection des événements très médiatiques, et nécessité de concilier le respect des libertés individuelles et les restrictions de sécurité qui s’imposent. Les participants ont souligné qu’on ne pouvait répondre efficacement à ces défis qu’en renforçant les partenariats militaires avec les agences civiles, tout en améliorant les communications et la coordination entre agences. Ils ont insisté sur le fait que l’Initiative du COR sur l'espace aérien en coopération contribuera de façon significative à renforcer la sécurité antiterroriste en offrant un mécanisme efficace permettant de faire face aux menaces affectant la sécurité en vol. Coordination interministérielle et verticale24. Un autre groupe d’experts s’est intéressé au processus d’interaction et de partage d'informations entre les agences nationales et internationales impliquées dans la lutte contre le terrorisme. Les participants ont débattu de l’importance d’élaborer une approche globale de la planification d’urgence, de façon à éviter un sous-investissement dans les situations d’urgence non terroristes ; ils ont également souligné la nécessité de désigner une agence responsable dès le début du processus, l’importance d'établir des communications efficaces en attribuant des fréquences supplémentaires réservées, la nécessité d’adresser au public le même message, et la nécessité de garantir une coordination internationale accrue en utilisant, par exemple, une base de données OTAN sur les urgences dans le domaine civil qui serait mise à la disposition des Partenaires. Mise en place d'institutions et de législations adaptées aux besoins25. Les experts juridiques ont examiné les moyens de renforcer les dispositifs législatifs nationaux et internationaux sur le terrorisme, notamment les textes existants en matière de contrôle des exportations, de sécurité des transports et des sites, de réglementation destransactions financières, de lois sur l’immigration et d’accords d’extradition, de mise en détention de présumés terroristes, de réforme du partage du renseignement, ainsi que les conventions des Nations Unies sur le contre-terrorisme et autres instruments pertinents, comme le plan d'action de l'UE. Ils ont également discuté de l’importance des libertés individuelles et de la nécessité de prendre celles-ci en compte lors de l’élaboration de la législation qui s’impose dans le contexte de la lutte contre le terrorisme, s’agissant en particulier des campagnes d'information du public. En ce qui concerne l’amélioration de l’efficacité des institutions dans la lutte contre le terrorisme, le groupe a estimé qu’il fallait une structure de coordination claire, une meilleure intégration verticale et horizontale, un renforcement des liens entre civils et militaires, une amélioration de l’analyse et du partage du renseignement, et une intensification des efforts visant à réduire les luttes internes au sein des administrations. Nature des opérations et organisations terroristes26. Un groupe d’experts de la sécurité et du renseignement a examiné en détail l’expérience des pays s’agissant de la nature et de l’évolution des réseaux et cellules terroristes opérant sur leur territoire, de leur financement et de leur gestion des ressources, ainsi que des mouvements et liens terroristes transfrontières. Les experts ont fait observer que le principal danger provient de plus en plus de petites cellules locales, qui n’ont pas nécessairement de liens directs avec des organisations terroristes de plus grande envergure, comme Al‑Qaida, mais qui adhèrent à son idéologie, et, d’une manière générale, au djihad international. Ces groupes sont généralement composés d’individus radicalisés, de plus en plus jeunes, qui planifient des agressions terroristes avec le peu de ressources disponibles qu’ils sont parvenus à rassembler en se livrant à des actes de petite délinquance. Le processus de recrutement et de radicalisation de ces individus s’accompagne souvent d’une utilisation intensive de l'Internet, qui peut amener à une dérive incontrôlée et imprévisible vers les milieux islamistes. On doit donc supposer que la carrière des jeunes terroristes peut également être influencée par l’Internet. Les dirigeants de ces groupes ont eu le plus souvent une expérience directe de différents « points chauds », comme la Tchétchénie, l’Afghanistan et l’Iraq. Les participants ont souligné l’importance cruciale de la coopération transnationale en matière de renseignement et dans d’autres domaines ; ils ont également indiqué qu’il fallait chercher à comprendre la mentalité des terroristes et encourager activement la tolérance entre les cultures. Négociations et sauvetage en cas de prise d'otages 27. Un groupe d’experts médicaux et psychologues s’est intéressé à la question des négociations et des opérations de sauvetage en cas de prise d’otages. Ils ont souligné la difficulté de concilier le principe général du refus de négocier avec les terroristes et la nécessité d’utiliser tous les moyens disponibles pour préserver la vie des otages. Les participants ont procédé à un échange de vues sur des techniques de négociation efficaces : atténuer le sentiment d’urgence, éviter de marchander, faire des concessions et proposer un échange d’otages, ou encore instaurer une communication véritable. Ils ont également souligné la nécessité de faire appel à des professionnels et à des négociateurs suffisamment qualifiés, appartenant notamment à des organisations internationales de renom, comme la Croix-Rouge. Points Des Débats A Noter 28. La conférence du COR sur le thème « Enseignements tirés de récents attentats terroristes : mise en place d'institutions et de capacités nationales » a constitué une tribune sans équivalent qui a permis d’échanger des informations et de confronter les expériences entre certains des décideurs et personnels de première intervention des pays du COR qui sont le plus directement concernés par la mise en œuvre de stratégies nationales dans la lutte contre le terrorisme. Les participants ont salué cette occasion qui leur était donnée de confronter leurs points de vue et leurs expériences, et d’échanger des informations en configuration COR. Parmi les principaux thèmes débattus à cette conférence, on retiendra :
. |
|
|