From the event

Rabat
(Maroc)

26-27 Nov 2007

Discours

du Secrétaire général délégué, Claudio Bisogniero
à la conférence parrainée par la Division Diplomatie publique de l’OTAN

Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames, Messieurs,

Tout d'abord, laissez-moi vous dire combien je suis heureux d'être ici, à Rabat, aujourd’hui..  C'est ma première visite au Maroc depuis que j'ai pris mes fonctions de secrétaire général délégué à l'OTAN il y a deux mois et, au rythme où va notre coopération, je suis certain qu’elle ne sera pas la dernière.  
Je tiens à vous remercier, Monsieur le Secrétaire Général, pour l'aperçu très intéressant que vous venez de nous donner.  Je voudrais, par votre intermédiaire, remercier le ministère marocain des Affaires étrangères d'avoir organisé cette conférence, en collaboration avec la Division Diplomatie publique de l'OTAN.

Mon discours d'ouverture, ce soir, est, à mes yeux, l'occasion idéale d'esquisser le contexte dans lequel s'inscriront les questions plus spécifiques qui sont à votre programme de demain.  C'est pourquoi je voudrais vous parler, en termes généraux, de la raison d'être profonde de la coopération entre l'OTAN et le Maroc, et des opportunités qui s'offrent à nous aujourd'hui.  Mais je terminerai aussi en disant quelques mots au sujet d'un problème particulier que nous avons tous dans le maintien de cette coopération – à savoir comment gagner et conserver le soutien de nos opinions publiques.

La raison d'être de l'engagement de l'OTAN avec le Maroc, comme avec d'autres partenaires de ce que nous appelons le Dialogue méditerranéen, est à vrai dire très simple.  Elle procède de l'instabilité du contexte sécuritaire qui affecte aujourd'hui tous nos pays.  Car nous sommes tous confrontés au fléau du terrorisme.  Nous devons tous faire face à la menace représentée par la prolifération des armes de destruction massive.  Les États faibles constituent eux aussi un risque important pour la sécurité et la stabilité, et pas seulement dans leur région, mais bien au-delà.

Comment donc répondre à cette multitude de défis complexes ? Et bien en recherchant des approches nouvelles pour la coopération en matière de sécurité – des approches qui dépassent les limites géographiques, culturelles ou religieuses établies.  Cette ouverture et cet engagement sont aujourd'hui la marque de l'OTAN.  L'Alliance est devenue un instrument de sécurité très flexible, non seulement au service de ses membres, mais aussi, et de plus en plus, au service de la communauté internationale au sens large.

Si la défense collective reste une vocation essentielle de l'Alliance, nos 26 pays membres s'accordent à penser qu'une vision purement territoriale de la sécurité est trop étroite pour faire face aux nouveaux défis de sécurité.  Que nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre que ces défis arrivent jusqu'à nous.  Et que nous devons plutôt être prêts à les affronter au moment et à l'endroit où ils surgiront –même s’il faudrait pour ce faire envoyer nos forces loin des frontières traditionnelles de l'Europe.

D'ailleurs, à l'heure où je vous parle, plus de 50 000 soldats sont déployés sous le commandement opérationnel de l'OTAN sur trois continents.  Sans doute le plus connu de nos engagements opérationnels est l'Afghanistan, où pas moins de 40 000 hommes et femmes courageux contribuent à promouvoir la paix et la démocratie et à faire en sorte que le pays n'exporte plus jamais le terrorisme et l'instabilité chez ses voisins et dans le monde entier.

Dans le même temps – avec l'aide, important, de soldats marocains –, l'OTAN assure le maintien de la paix au Kosovo, tandis que les pourparlers sur le statut futur se poursuivent.  Les navires de l'OTAN patrouillent en Méditerranée dans le cadre d'une opération de lutte contre le terrorisme, "l'opération Active Endeavour".  Nous apportons à l'Union africaine une aide en termes de transport et de soutien logistique pour son opération au Darfour.  Nous formons les forces de sécurité iraquiennes et afghanes.  

Et nous avons aussi participé à de grandes opérations d'aide humanitaire et de secours en cas de catastrophe, notamment au Pakistan après le séisme dévastateur qui a frappé ce pays il y a deux ans.

Dans toutes ces différentes missions et opérations, l'Alliance s'efforce de travailler en équipe, agissant à la fois dans l'intérêt des autres acteurs de la communauté internationale et en étroite coopération avec eux.  Nous avons bien conscience qu'en Afghanistan, dans les Balkans, au Darfour ou ailleurs, les acteurs civils aussi doivent s’engager avec nous, car il ne saurait y avoir de sécurité sans développement, ni de développement sans sécurité.  C'est pourquoi l'OTAN tient à impliquer des institutions internationales comme les Nations Unies, l'Union européenne, et la Banque mondiale – mais aussi des organisations non gouvernementales – dans une approche globale, une « approche globale » des défis de sécurité qui nous attendent.

Par ailleurs, nous sommes résolus à développer une coopération plus étroite non seulement avec d'autres organisations, mais aussi avec d’autres pays, où qu'ils se trouvent sur la carte – des pays qui ont conscience qu'eux non plus ne sont pas à l'abri des nouvelles menaces – des pays qui expriment l’intérêt de travailler avec nous pour s'attaquer, dans un même effort, à ces défis communs.

Le Maroc est l'un de ces pays – un pays de premier plan, qui a un solide passé de contribution à la sécurité internationale et de coopération avec l'OTAN. Je viens d’évoquer la participation de votre pays lorsque j'ai parlé de l'engagement de l'OTAN au Kosovo.  Et bien la précieuse contribution que le Maroc apporte là-bas s'inscrit dans le prolongement de sa participation à l'opération de stabilisation menée avec succès par l'OTAN en Bosnie-Herzégovine.  Et nous voulons espérer qu'elle sera suivie sous peu d'une contribution à l'opération Active Endeavour, comme j’ai dit notre opération de lutte contre le terrorisme en Méditerranée.

Notre coopération s’inscrit dans le cadre général du Dialogue méditerranéen.  Un processus que l’OTAN a entamé en 1994 pour promouvoir le dialogue, la coopération et la compréhension mutuelle dans toute la région méditerranéenne.  Dès le départ, le Dialogue a suscité un intérêt considérable.  Aujourd’hui, sept pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient y participent.

Le Maroc a adhéré à cette initiative en 1995, et il est devenu, en l’espace de douze ans, l’un de ses participants les plus actifs.  Le Maroc a toujours souligné, à juste titre, de souligner l’importance d’un dialogue politique plus étroit parallèlement à une coopération pratique renforcée.

Ce n’est pas par hasard que a toute première réunion entre le Conseil de l'Atlantique Nord et les représentants des sept pays du Dialogue méditerranéen a eu lieu l'an dernier, ici à Rabat.  Et ce fut là un passage important dans l’histoire du Dialogue.  Le Maroc a aussi pris part à plusieurs réunions conjointes de nos chefs d’état-major de la défense, dont la dernière s’est déroulée à Bruxelles il y a tout juste deux semaines.  Enfin, nous nous réjouissons de la participation active du Maroc à la réunion des ministres des Affaires étrangères des pays de l'OTAN et du Dialogue méditerranéen, qui aura lieu la semaine prochaine, également à Bruxelles.

À notre dialogue politique s’ajoute notre coopération pratique, qui s’est elle aussi considérablement élargie ces dernières années et qui va désormais bien au-delà de notre coopération dans les opérations menées sur le terrain.  Le Maroc s’intéresse de plus en plus à la lutte contre le terrorisme, et aussi à la coopération entre militaires, à la coopération dans le domaine de la gestion des crises et de la préparation aux catastrophes, ainsi qu’à l’organisation d’activités communes de diplomatie publique, comme la conférence d’aujourd’hui.  Il s’intéresse également à la coopération avec l’OTAN en matière d’armements et de logistique, mais aussi à la coopération dans le domaine des sciences et de l’environnement, un champ de coopération relativement nouveau mais prometteur, qui fera l’objet d’une séance spéciale demain dans le cadre de cette conférence.

Les possibilités de coopération pratique entre le Maroc et l’OTAN sont grandes.  En fait, étant donné l’ampleur croissante de notre coopération, il serait utile d’essayer de mieux la structurer et de mieux la cibler.  Nous – c’est-à-dire l’OTAN et le Maroc – pourrions ainsi tirer le meilleur parti du temps et des efforts que nous y consacrons.  

À cet effet, l’Alliance a donné à ses partenaires méditerranéens la possibilité de conclure avec elle un programme de coopération individuel.  C’est ce qu’ont fait Israël et, tout dernièrement, l’Égypte.  D’autres pays du Dialogue sont prêts à suivre et nous espérons bien pouvoir conclure un tel programme avec le Maroc, dans un avenir proche.

À propos de l’avenir, les exigences opérationnelles auxquelles nos forces doivent satisfaire vont sans doute augmenter plutôt que diminuer.  C’est pourquoi il importe que nous rapprochions les hommes et les femmes de nos armées afin d’améliorer leur aptitude à coopérer.  Mais je suis convaincu que, de plus en plus, l’intensité et l’efficacité de notre coopération à long terme dépendront aussi de notre capacité à informer nos opinions publiques – afin de gagner leur soutien – et à susciter chez elles un intérêt soutenu pour notre action.

Je suis certain, Mesdames, Messieurs, que la plupart d’entre vous connaissent déjà bien l’OTAN.  Vous avez peut-être rencontré mon prédécesseur ou même le secrétaire général, de Hoop Scheffer, à l’occasion des visites qu’ils ont effectuées dans votre pays ces dernières années.  Certains d’entre vous se sont peut-être même rendus au siège de l’OTAN, à Bruxelles, ou ont participé à l’une des nombreuses activités de coopération entre l’Alliance et le Maroc.

Mais, pour nombre d’observateurs occasionnels, que ce soit ici au Maroc ou de l’autre côté de la Méditerranée, il est beaucoup moins facile d’associer « OTAN » et « Maroc », et l'idée même d’une coopération entre les deux est difficile à concevoir.  Nous devons voir la réalité en face : les stéréotypes restent très vivaces dans tous nos pays et nous devons faire tout ce que nous pouvons pour les battre en brèche.  Il nous faut donc nous adresser à nos opinions publiques et les informer – pour continuer de dialoguer et de coopérer dans un esprit ouvert, transparent et constructif.  L’OTAN n’est certainement pas dirigé contre le monde musulman : au contraire, il dialogue et coopère avec lui, et protège, du Kosovo à l’Afghanistan, des populations en majorité  musulmanes.  L’OTAN n’est pas davantage un instrument au service de tel ou tel de ses membres : au contraire, c’est une organisation basée sur des règles de consensus et de la solidarité entre Alliés, sur un pied d’égalité.  L’OTAN ne cherche certes pas à être le seul « gendarme du monde » : agissant, au Kosovo ou en Afghanistan, sous mandat des Nations Unies, l’OTAN cherche à s’appuyer sur un vaste réseau de partenaires dans une approche concentrée de la sécurité internationale, l’approche globale que j’ai déjà mentionnée.

Rétablir sans cesse ces vérités est un défi, tout d’abord et surtout pour les gouvernants de nos pays.  C’est un défi également pour mes collaborateurs et moi-même qui, au siège de l’OTAN, nous occupons du processus du Dialogue méditerranéen.  Mais, vous aussi, Mesdames, Messieurs, vous aussi pouvez y apporter votre contribution importante.  En tant que fonctionnaires, officiers, universitaires, journalistes ou étudiants, vous êtes mieux placés que nombre de vos concitoyens pour observer l’évolution du rôle de l’OTAN dans le contexte de sécurité instable que nous connaissons aujourd’hui et pour voir les avantages que le Maroc peut de ce dialogue  tirer.  J’espère que vous continuerez de le faire, et j’espère que vous ferez part de vos constatations non seulement à vos pairs, mais aussi à un public plus large.

Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames, Messieurs,

Depuis que l’OTAN s’est ouverte aux pays du bassin méditerranéen, le Maroc s’est montré l’un des partenaires les plus actifs de l’Alliance dans la région.  Dans le cadre de sécurité actuel, il est de notre intérêt commun de continuer à approfondir notre dialogue politique et à renforcer notre coopération pratique.

Cette conférence est une excellente occasion de débattre des grands défis communs et de réfléchir aux potentialités de notre relation.  Aussi, je tiens à renouveler ma gratitude, au ministère marocain des Affaires étrangères, pour cette initiative et pour l’hospitalité.  Je terminerai en souhaitant à tous une réunion très fructueuse et efficace.

Je vous remercie de votre attention.