Lors de la
réunion spéciale
du Conseil de l'Atlantique Nord
Bruxelles
13 juin 2001
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Intervention
de
Monsieur Jacques Chirac,
Président de la République française
Notre rencontre d'aujourd'hui intervient à un
moment important. Les évolutions stratégiques,
européennes et régionales, imposent à
l'évidence une réflexion sur les conditions
de notre sécurité.
I - Tout d'abord, ce Sommet nous donne l'occasion de
souhaiter la bienvenue au nouveau Président des
Etats-Unis qui participe pour la première fois
à nos rencontres. C'est aussi l'occasion de redire
que l'Alliance est le cadre naturel et indispensable de
la solidarité transatlantique. La France estime
que ce lien de sécurité, qui unit les deux
rives de l'Atlantique, a fait ses preuves. A l'aube du
XXIème siècle, il garde toute sa vitalité
et toute sa raison d'être.
Le développement de l'Europe de la Défense,
qui a accompli des pas décisifs au cours des dernières
années, se fera, bien sur, en parfaite harmonie
avec l'OTAN. Les progrès de la Défense européenne
sont irréversibles car ils participent du mouvement
général et profond de la construction européenne.
L'avènement d'une Union européenne, occupant
pleinement sa place sur la scène internationale,
est inscrit dans le cours de l'histoire. C'est aussi un
facteur de stabilité accrue. Parallèlement,
le lien transatlantique reste indispensable, car il est
le fondement de la défense collective des alliés.
Dans ce contexte, l'Europe de la défense est une
nécessité pour les Européens et un
atout pour l'OTAN.
II - Aujourd'hui, nous sommes également engagés
dans un large débat sur les nouvelles conditions
de l'équilibre stratégique, débat
qui a été ouvert il y a plusieurs années,
avec la fin de la guerre froide, dont nous n'avons pas
encore fini de tirer les conséquences.
Un débat plus spécifique est ouvert sur
le projet américain antimissiles. La France est
disposée à prendre toute sa part à
cette discussion. Elle rappelle son attachement à
trois principes essentiels :
- la nécessité de préserver les
équilibres stratégiques. Le traité
ABM en est un pilier. Si l'on envisage un nouveau cadre,
tenant compte de l'émergence d'un monde multipolaire,
il faudra veiller à ce qu'il comporte des dispositions
contraignantes assurant la stabilité internationale
;
- l'urgence de relancer les efforts de lutte contre
la prolifération, et cela quelle que soit la
suite donnée au projet antimissiles. S'agissant
des régimes de non-prolifération balistique
en particulier, de nouvelles pistes doivent être
explorées afin notamment de rendre universel
le code de conduite issu du MTCR. La France a proposé
que l'Union européenne, qui a toujours joué
un rôle moteur en matière de non-prolifération,
prenne des initiatives à ce sujet ;
- enfin, je rappelle l'attachement de la France à
la dissuasion nucléaire qui, à un niveau
de suffisance minimale et dans la permanence du concept
de non emploi, reste l'ultime garant de la sécurité
face à toute menace susceptible de porter atteinte
à ses intérêts vitaux.
III - S'agissant des Balkans, et alors qu'un général
français s'apprête à prendre le commandement
de la KFOR, je souhaiterais évoquer les dangers
de la crise qui affecte la Macédoine. Nous avons
su, tous ensemble, combattre et vaincre une politique
d'épuration ethnique qui faisait honte au continent
européen. La
chute de Milosevic et l'avènement de la démocratie
à Belgrade ont permis d'engager une nouvelle dynamique
de paix dans les Balkans. Mais celle-ci reste fragile.
Nous devons clairement marquer que nous n'accepterons
pas l'ouverture d'un nouveau cycle de violences et d'intolérances,
mettant en péril la stabilité de la région
tout entière. Nous ne devons exclure aucune mesure
pour y mettre un terme.
Je serais favorable à ce que nous évoquions
plus en détail les mesures à prendre à
l'occasion du déjeuner.
Monsieur le Secrétaire Général,
Dans ce monde qui a changé, les Européens
et les Américains ont des valeurs et des intérêts
communs. Ils ont les moyens de les garantir. Ils n'y parviendront
que sur la base d'une coopération équilibrée,
fondée sur la concertation et la confiance.
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