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Updated: 12-Mar-2001 NATO Speeches

Bruxelles
29 mai 1989

Discours d'ouverture à la Réunion du Conseil de l'Atlantique Nord au Niveau des Chefs d'Etat et de Gouvernement

Discours du Secrétaire générale, Manfred Wörner

C'est pour moi un honneur et un privilège que d'ouvrir cette réunion du Conseil de l'Atlantique Nord au niveau des Chefs d'Etat et de gouvernement. Qu'il me soit d'abord permis de souhaiter chaleureusement la bienvenue à tous les participants.

Notre réunion se situe dans une période de changement tout à fait passionnante. Nous sommes confrontés aux défis nés de notre propre succès. C'est là une réalité encore plus évidente aujourd'hui qu'au dernier Sommet de l'OTAN, il y a quinze mois. Nous pouvons être particulièrement fiers de ce que nous avons accompli depuis cette époque, notamment de l'heureuse conclusion de la conférence de Vienne sur la CSCE et des débuts prometteurs des importants pourparlers de Vienne sur la maîtrise des armements conventionnels.

Ces dernières semaines, la célébration de notre quarantième anniversaire a été pour nous l'occasion de jeter un regard sur le passé. Aujourd'hui, le moment est venu de nous tourner vers l'avenir, non seulement pour évaluer la portée du changement que nous observons tout autour de nous, mais aussi pour définir plus avant la voie que notre Alliance va devoir suivre.

Nous vivons des temps qui portent la marque de notre succès. L'OTAN nous a donné la paix - la plus longue paix en Europe depuis l'époque des Romains. Elle a aussi ouvert des perspectives de changement. L'Est se tourne vers l'Ouest. Cent cinquante ans après le Manifeste communiste, le communisme a manisfestement échoué. Son idéologie d'un autre âge et son inefficacité contrastent de façon saisissante avec nos valeurs et nos conceptions, de même qu'avec notre système, qui permet de répondre aux aspirations des hommes.

Les événements suivent la direction que nous avons conçue, et ils la suivront encore si nous maintenons notre initiative.

Nous traversons une période qui présente de grandes possibilités, mais aussi des risques potentiels considérables. Ces deux éléments se retrouvent à tous les tournants de l'Histoire, et tous deux exigent une gestion d'une égale habileté. Sans préjuger de l'avenir, je crois que nous pouvons dire que le monde de l'après-guerre, tel que nous l'avons connu, touche à sa fin. Le moment est venu de combiner les enseignements du passé et notre succès avec les possibilités que nous voyons apparaître pour faire avancer notre ambitieux programme.

L'occasion nous est donnée de rapprocher le monde de la vision que nous en avons : des frontières ouvertes, plus de liberté, moins d'armes et le règne du droit. Une Europe sans division, où tous les citoyens jouissent des droits de l'homme et où tous les peuples puissent exercer leur droit à l'auto-détermination. Un ordre mondial caractérisé, non pas par la confrontation, mais par la coopération entre l'Est et l'Ouest pour résoudre les problèmes pressants qui se posent à l'humanité. Notre Alliance n'a jamais été statique. Elle a toujours été dynamique, et son objectif demeure de surmonter le statu quo, tout en préservant la paix et la liberté que nous avons durement gagnées.

Le risque que nous devons éviter est celui de l'autosatisfaction. Les périodes historiques de profondes mutations, comme celle que nous traversons, suscitent inévitablement l'incertitude, la fragilité et l'instabilité. Il nous faut maintenir la base de notre stabilité : une défense solide. Et surtout, nous ne pouvons pas, au moment où des résultats longtemps recherchés semblent arriver à notre portée, nous permettre de baisser notre garde.

Plaçons toujours à la fois les possibilités et les risques dans une perspective équilibrée, et ne commettons pas l'erreur de nous attacher uniquement aux unes ou aux autres. Car c'est la dualité de notre défi historique qui, à l'évidence, définit le rôle et les tâches futurs de l'Alliance.

D'un côté, notre tâche est d'influer activement sur le cours des événements. Non seulement nous nous félicitons du changement qui se produit en Union soviétique et en Europe de l'Est, mais nous allons l'encourager et en tirer pleinement parti. Nous allons offrir à l'Est notre coopération et le maintien de l'impulsion et des encouragements donnés à la réforme. Notre modèle montre à l'Est le chemin d'une prospérité et d'une sécurité plus grandes au fil du temps. Nous récompenserons ceux qui auront eu le courage de faire des choix difficiles. Mais en retour, nous lançons un défi aux dirigeants de l'Est sur le terrain politique et dans toute la gamme de nos préoccupations communes - des droits de l'homme et des sociétés ouvertes à la réduction des armements. Maintenant que nos politiques et nos concepts portent leurs fruits, le rôle politique de notre Alliance va prendre toute sa dimension, comme jamais auparavant.

D'un autre côté, il serait téméraire d'abandonner ce qui est pour nous le seul terrain sûr et solide : la réussite incontestable et l'expérience inestimable de l'effort commun au sein de notre Alliance. C'est la communauté la plus forte - moralement, politiquement, économiquement, militairement - que l'Occident ait jamais connue au cours de sa longue histoire.

Dans cette optique, nous devons garder une défense forte et un dispositif de dissuasion ferme, digne de confiance. Même si les relations Est-Ouest évoluent dans le sens le plus favorable que nous puissions imaginer, nous aurons à nos portes, pendant de nombreuses années encore, une puissance militaire redoutable et imprévisible. Nous n'avons pas à suspecter en perma-nence les intentions de ce puissant voisin; mais les intentions ne peuvent pas constituer une base durable pour nos relations. Nous ne pouvons pas bâtir notre propre sécurité sur l'hypothèse de sa bonne volonté constante. Nous nous devons en fait, devant nos peuples et devant l'histoire, de soutenir l'effort que nous faisons pour que le recours à la force des armes demeure superflu dans la conduite de nos affaires. Un potentiel militaire suffisant est donc nécessaire, pour préserver la stabilité et la dissuasion.

Il nous faut maintenir nos armes conventionnelles et nucléaires à un niveau qui atteste bien le caractère indivisible de la sécurité de notre Alliance. Les armes nucléaires sont l'ultime garantie d'une stratégie de prévention de la guerre. Les armes conventionnelles ont, comme le prouve l'histoire, fort mal rempli ce rôle. Il est bien certain que nous voulons ramener les armes - tant nucléaires que conventionnelles - à l'Est et à l'Ouest au niveau minimum que requiert l'intérêt légitime de la sécurité de l'Est et de l'Ouest. Maintes et maintes fois nous avons démontré cette volonté par nos actes. Nos plans de défense aussi bien que notre approche de la maîtrise des armements reposent sur ce principe fondamental. Et les quantités minima qui nous sont nécessaires doivent être maintenues à niveau.

Une relation transatlantique saine est aujourd'hui, comme elle l'a toujours été, la pierre angulaire de notre sécurité et un modèle pour les aspirations des hommes. C'est pourquoi nous devons encore la renforcer, lui donner la forme de l'association transatlantique la plus égale et la plus équilibrée. Nous devons continuer à réexaminer la répartition des rôles, des risques et des responsabilités au sein de notre Alliance et aider, par nos encouragements, son pilier européen à évoluer de la même façon que la force politique et économique que nous voyons actuellement apparaître en Europe occidentale.

La clé de la bonne gestion des relations Est-Ouest est la bonne gestion des relations Ouest-Ouest. C'est seulement en restant unis que nous pourrons déterminer le cours des événements; divisés, et même forts de nos succès et de notre dynamisme, nous ne pourrons tous, sans exception, que subir des événements que d'autres auront déterminés.

Je m'en remets à votre sagesse, à votre courage et à vos qualités de dirigeant pour faire guider notre Alliance, à l'entrée de sa cinquième décennie, vers des succès plus grands encore. Je sais que vous ne voudrez pas laisser passer cette occasion pour nous historique. Comment d'ailleurs pourrions-nous échouer? Car ce sont nos sociétés qui sont les plus ouvertes et les plus dynamiques, nos économies qui sont les plus prospères, nos peuples qui sont les plus novateurs et nos valeurs qui inspirent l'appel à la liberté que nous entendons résonner partout autour du monde occidental. Ainsi, nous avons tout lieu de regarder vers l'horizon notre cinquantième anniversaire avec confiance et optimisme.

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