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Updated: 19-Dec-2001 NATO Speeches

Discours
à la séance
d'ouverture
de la Session
Ministérielle
du Conseil
Atlantique
23 avril 1954

Discours de Lord Ismay


Il y a 19 jours, l'OTAN clbrait son Cinquime Anniversaire. Cinq ans sont bien peu de chose dans la vie des hommes et des nations; pourtant que de transformations se sont produites. La Communaut de l'Atlantique Nord n'est plus une vue de l'esprit mais une ralit, une ralit si contrte que la Russie sovitique a demand en faire partie.

Ceux d'entre nous qui, jour aprs jour, se consacrent aux affaires de l'OTAN s'impatientent parfois ou se sentent dus ou dcourags devant la lenteur des progrs ou la difficult de la tche. A ceux-l je demande de jeter un regard sur le chemin qui a t parcouru depuis le jour o le Trait a t sign. Ils verront alors leurs problmes ou leurs difficults actuelles sous une perspective plus exacte et ils se sentiront par l mme rconforts et encourags.

Nous avons parmi nous aujourd'hui trois des Ministres des Affaires Etrangres qui ont sign personnellement le Trait: M. Pearson du Canada, M. Bech du Luxembourg et M. Lange de la Norvge. Ils ne me contrediront pas si je dis que, bien que les principes sur lesquels repose le Trait sont demeurs, et doivent toujours demeurer immuables, l'Organisation telle qu'elle existe aujourd'hui ressemble fort peu celle qu'avaient imagine ses fondateurs.

Comme ceux-ci ont fait preuve de sagesse! Ils n'ont pas tent de fixer des rgles rigides. Ils se sont rendu compte qu'ils se lanaient dans une exprience de coopration internationale sans prcdent et que la structure de l'Organisation et ses rgles ne pouvaient tre dtermines qu' l'usage. C'est prcisment ce qui s'est pass.

A l'origine, un certain nombre de comits ont t crs pour tudier les multiples aspects du problme. Ces comits ont dblay le terrain qui leur tait assign, dfini les problmes, puis cd la place d'autres comits et d'autres organismes. Ceux-ci leur tour ont pouss l'tude des problmes un pas plus loin, puis ont cd la place d'autres, et ainsi de suite. Ce n'est qu' la Confrence de Lisbonne, il y a peine plus de deux ans, que fut mise au point la structure de l'OTAN telle qu'elle existe aujourd'hui.

Sir John Hunt, le Chef de l'quipe qui a vaincu l'Everest, disait, en parlant des quipes qui l'avaient prcd: "Leur importance rside dans le fait que chacune d'elles, quel que soit le point qu'elle ait atteint, est venue ajouter son exprience celles de ses prdcesseurs". Quant nous, qui travaillons actuellement l'OTAN et pour l'OTAN, nous sommes pleinement conscients que ceux qui nous ont prcds "sont venus eux aussi ajouter leur exprience celle de leurs prdcesseurs" et qu'ils ont aussi rendu notre tche plus facile. Nous n'ignorons pas non plus que nous sommes encore loin du sommet. Tout ce que nous pouvons esprer faire c'est d'ajouter notre exprience "celle de nos prdcesseurs" et de faciliter aussi la tche de ceux qui nous suivront.

Les ralisations de l'OTAN au cours de ces cinq annes sont videntes. Nous avons un Conseil qui sige en permanence, qui est dot d'un pouvoir effectif de dcision et qui se runit une fois, deux fois, ou mme trois fois par semaine, et au besoin, dans un dlai d'une demi-heure. Nous avons un Secrtariat International qui travaille comme une seule et mme quipe depuis deux ans, auquel treize pays sont reprsents, et auquel le quatorzime le sera prochainement. Nous avons une organisation militaire commune, avec un rseau de commandements couvrant l'Ocan Nord Atlantique et le Continent Europen, du Cap Nord l'Afrique du Nord, de la Manche au Caucase. Sur le plan militaire, nous nous sommes forg un bouclier qui n'est pas encore assez puissant pour rsister une attaque gnrale, mais qui, de l'avis du Commandant Suprme en Europe, est suffisamment fort pour rsister aux armes que la Russie sovitique entreitent actuellement hors de ses frontires. Nous avons accompli des ralisations impressionnantes dans le domaine de l'infrastructure; nous disposons maintenant de 120 arodromes utilisables, alors qu'il n'y en avait que 15 lorsque le Gnral Eisenhower vint en Europe assumer les fonctions de Commandant Suprme. Je ne parlerai pas des amliorations considrables que nous avons apportes aux tlcommunications, des dpts de carburant que nous construisons et de nombreux autres travaux en cours.

Ce sont l des ralisations concrtes que chacun peut constater, mais il en est une autre, encore plus importante, bien qu'invisible. Je veux parler de l'union qui s'est ralise au sein de l'OTAN et qui ne cesse de crotre. Vous la verrez se manifester partout.

Si vous vous rendez au Collge de Dfense de l'OTAN, vous verrez des groupes d'officiers de huit ou dix nations diffrentes, travaillant en commun et djeunant ensemble, s'enrichissant mutuellement par l'change de leurs ides et formant des amitis qui dureront toute la vie.

Cette union, vous la constaterez aussi si vous venez au SHAPE. J'ai entendu rcemment le Gnral Gruenther faire la dclaration suivante: "Au cours de mes trente cinq annes de service j'ai fait partie de nombreux quartiers gnraux, mais je n'ai jamais vu d'exprience plus heureuse que celle du SHAPE".

Vous la retrouverez encore si vous assistez aux manoeuvres internationales, terrestres, navales et ariennes, qui ont lieu pratiquement d'un bout de l'anne l'autre dans toute la zone de dfense Nord Atlantique. N'taient les diffrences d'uniformes, vous pourriez croire que les armes de tous ces pays ont toujours servi sous le mme drapeau.

Vous ferez la mme constatation au Secrtariat International du Palais de Chaillot. Aucun d'entre nous ne se considre comme citoyen de son propre pays, mais estime, avec fiert, qu'il appartient une quipe internationale, voue au service de toute l'Alliance.

Enfin, vous constaterez la mme union aux sances du Conseil Atlantique. Mme pendant la brve priode - deux ans peine - o j'ai eu le privilge d'tre asoci aux travaux de cet organisme, la situation s'est modifie de faon remarquable: il semble qu'il nous faille beaucoup moins de temps aujourd'hui qu'il y a deux ans pour nous mettre d'accord sur des points litigieux. Cela tient videmment ce que les membres du Conseil ont acquis une comprhension plus nette des points de vue de leurs collgues, et cette comprhension a fait natre une tolrance et un respect mutuels, ainsi qu'une amiti durable.

Nous entrons maintenant dans une phase difficile. Le danger qu'une attaque peut paratre moins proche et les Soviets continueront faire tout leur possible pour nous diviser. Plus vous portez un fardeau longtemps, plus il vous semble lourd. Et il est certain que les pays de l'OTAN supportent tous depuis longtemps de trs lourdes charges de dfense. Mais la menace n'en subsiste pas moins, et ce serait trahir tous les efforts et sacrifices accomplis que de s'estimer satisfaits, de relcher nos efforts ou, pis encore, de nous laisser dsunir. Nous sommes sur la bonne voie: notre destin est entre nos mains! Si nous savons tre constants et fidles les uns aux autres, et si nous restons unis comme nous le sommes actuellement, nous viterons les horreurs indicibles d'une troisime Guerre Mondiale.

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