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Mise à jour: 26-Nov-2001 Revue de l'OTAN

Web edition
Vol. 49 - No. 3
Automne 2001
p. 18-21

Essai

Imaginer l'OTAN en 2011

Michael Rhle regarde dans sa boule de cristal et imagine quoi l'Alliance et l'environnement de scurit euro-atlantique pourraient ressembler dans dix ans.

Confrence sur le partenariat

L'OTAN a organis une confrence internationale pour marquer le dixime anniversaire de la cration du Conseil de coopration nord-atlantique et clbrer une dcennie de relations toujours plus troites entre les membres de l'Alliance et les Partenaires.

Cette confrence, intitule Dix ans de partenariat et de coopration, a eu lieu le vendredi 26 octobre au sige de l'OTAN et a runi des participants des 46 membres du Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA).

Elle avait pour buts de passer en revue les vnements majeurs enregistrs dans la formation de la stratgie de partenariat de l'OTAN et d'valuer les rsultats obtenus jusqu'ici, mais galement d'examiner l'volution future des relations entre les membres de l'Alliance et les Partenaires et d'tudier la faon dont le CPEA pourrait se dvelopper dans les annes venir.

Le Secrtaire gnral de l'OTAN, Lord Robertson, a prononc cette occasion son principal discours de l'anne sur le partenariat et la coopration. Cette intervention et celles d'autres orateurs de premier plan ont t diffuses en direct sur le site web de l'OTAN.

Le Bureau de l'information et de la presse de l'OTAN a par ailleurs publi une brochure spciale d'une vingtaine de pages en rapport immdiat avec la confrence. Intitule Le partenariat en action, cette brochure voque la naissance et le dveloppement de l'ide du partenariat et expose la manire dont celui-ci fonctionne en pratique.

D'autres informations sur la confrence, la diffusion sur le Web et la brochure Le partenariat en action sont disponibles ds maintenant sur le site web de l'OTAN.

En 1984, un clbre chercheur norvgien spcialiste des tudes sur la paix tablit une liste de ce qu'il considrait comme les Etats europens les plus srs. Il avait plac en tte la Suisse, ce qui n'tait gure surprenant. En revanche, son choix pour les deuxime et troisime places paraissait trange mme l'poque, car il s'agissait de l'Albanie et de la Yougoslavie. Son raisonnement tait aussi simple qu'inquitant: tant donn que l'OTAN et le Pacte de Varsovie taient manifestement sur le sentier de la guerre, les pays les plus loigns des "blocs militaires" taient promis au meilleur avenir.

Il peut tre tentant de ramener cette malencontreuse analyse une vision caractristique du dbut des annes 80. Pourtant, les sinistres prdictions concernant l'avenir de l'OTAN n'ont pas connu de sort vraiment meilleur que celui des prdictions formules au sujet des Balkans. L'actuelle primaut de l'OTAN s'agissant de la scurit euroatlantique ne doit pas faire oublier qu'il y a seulement une dcennie, l'avenir de l'Alliance semblait plutt sombre. En fait, au dbut des annes 90, mme les atlantistes les plus convaincus avaient des doutes quant l'avenir d'une organisation dont la mission paraissait avoir t mene son terme. Si l'on avait alors prdit qu'en 1999, l'OTAN accueillerait en son sein trois anciens membres du Pacte de Varsovie et mnerait une opration arienne prolonge dans les Balkans, de telles prdictions auraient probablement t juges impensables, voire ridicules.

Spculer sur l'avenir reste une dmarche hasardeuse, mais d'une relle utilit. Mme si les prdictions ne se concrtisent pas toujours, la prvision est un exercice qui , en soi, aide centrer la rflexion sur les problmes essentiels. Elle oblige ainsi rflchir un "avenir privilgi", aux moyens d'y parvenir et aux variables qui pourraient entrer en jeu.

Une telle approche semble particulirement approprie dans un environnement de scurit aussi propice l'volution que celui de l'Europe d'aujourd'hui, aprs la fin de la Guerre froide. Dans ce cadre volutif, des institutions telles que l'OTAN jouent un rle majeur pour l'orientation de la scurit euroatlantique. Cela revient dire que les institutions sont devenues des conceptrices de programmes. Non seulement elles permettent une action collective en cas de crise, mais elles favorisent l'tablissement de nouvelles relations de scurit et abordent ainsi les questions concernant la stabilit de l'Europe au sens large, et mme son ordre politique long terme.

Cette tude des possibilits qu'a l'OTAN de faonner l'environnement de scurit euro-atlantique de la prochaine dcennie comportera trois phases. Elle exposera les grandes lignes d'un scnario favorable pour 2011, dfinira certaines des principales conditions et variables lies ce scnario et prsentera des suggestions concernant ce que l'OTAN doit faire ds maintenant pour contribuer sa concrtisation.

Un scnario favorable pour 2011

On peut sans doute dire avant tout de l'"OTAN 2011" que sa composition se sera tendue. Aprs plusieurs vagues d'largissement, l'Alliance comptera alors 25 membres ou plus. Sa composition restera donc suprieure celle d'une Union europenne en largissement. Cependant, le nombre des membres communs demeurera suffisant pour permettre aux deux organisations de poursuivre leur rapprochement institutionnel. La crainte de voir le processus de prise de dcisions de l'OTAN compromis par l'augmentation du nombre de ses membres aura t dissipe. Le rle politique et militaire unique des Etats-Unis dans le domaine de la scurit euro-atlantique subsistera et continuera de conforter les Allis dans leur volont de rechercher des solutions communes.

L'ambition de l'UE de se doter d'une Politique europenne en matire de scurit et de dfense (PESD) se sera manifeste par un rle militaire encore plus marqu de l'Europe dans les Balkans, ainsi que par des initiatives de politique trangre plus cohrentes concernant le Caucase, le Proche-Orient et l'Afrique du Nord. Principalement grce une rationalisation des pratiques d'acquisition et une mise en commun des moyens militaires europens, les pays de l'UE auront obtenu une certaine amlioration de leurs capacits de dfense. Il subsistera toutefois des dficits au niveau des capacits indispensables la gestion des conflits de forte intensit, ce qui ncessitera le maintien de liens troits entre l'Union europenne et l'OTAN.

Les relations UE-OTAN auront largement dpass le cadre de la PESD pour inclure des consultations rgulires sur l'Europe du sud-est, la Mditerrane, la Russie, le terrorisme et, en particulier, la prvention des crises. Il y aura aussi rgulirement des runions ministrielles UE-OTAN immdiatement conscutives, ce qui soulignera la volont de l'Europe et de l'Amrique du Nord de maintenir la cohrence des institutions et des politiques.

L'OTAN aura encore des troupes dployes dans les Balkans, mais l'ampleur de sa prsence militaire aura t largement rduite, grce aux progrs politiques et conomiques accomplis dans la rgion. La Bosnie-Herzgovine et la Yougoslavie auront depuis longtemps rejoint le Partenariat pour la paix et seront toutes deux officiellement candidates une adhsion l'OTAN.

Les risques de prolifration se faisant toujours plus importants, les Allis auront tabli une politique coordonne visant prvenir la prolifration des armes de destruction massive par des moyens diplomatiques et conomiques. Les Etats-Unis auront dploy un systme de dfense de base contre les missiles stratgiques. Plusieurs Allis europens auront mis en place des systmes de dfense contre les missiles tactiques dans leurs forces armes. Ce nouveau rapport entre la dissuasion et la dfense sera galement reflt dans la stratgie militaire de l'OTAN, qui comportera des lments de contre-prolifration et mettra davantage l'accent sur la dfense active et la lutte contre le terrorisme.

Le Conseil de partenariat euroatlantique (CPEA) aura tabli des liens officiels avec l'Orga n i s a t i o n pour la scurit et la coopration en Europe et sera devenu un organe directeur pour les secours en cas de catastrophe l'chelle europenne. Les changes concernant le terrorisme se seront intensifis. Le CPEA aura galement acquis un rle de facilitateur de la coopration rgionale dans le Caucase et en Asie centrale, o il servira de cadre l'tude de problmes tels que le contrle des frontires et la scurit dans le domaine de l'nergie.

Le Partenariat pour la paix se sera encore dvelopp en tant qu'lment central de la coopration militaire paneuropenne, et, avec le CPEA, il servira faire en sorte que les Partenaires, en particulier ceux qui seront membres de l'UE sans encore appartenir l'OTAN, restent troitement associs l'Alliance. Le Partenariat couvrira l'ensemble de la coopration militaire entre les pays de l'OTAN et les pays partenaires, y compris la planification et la rforme de la dfense. Il mettra davantage l'accent sur la coopration rgionale et la prvention des crises, notamment par le biais de programmes de coopration scuritaire cibls, de mesures de confiance, de dploiements prventifs et de mcanismes de consultation.

Mme si les multiples dmarches en vue de l'adhsion de la Russie l'Alliance n'auront pas encore port leurs fruits, les relations OTAN-Russie se seront nettement amliores, au point de ressembler une quasi-association. Dans le contexte de l'adhsion des Etats baltes l'OTAN, une solution satisfaisante aura t trouve au problme de Kaliningrad, l'enclave russe situe entre la Lituanie et la Pologne. Le dialogue aura t tendu toute la gamme des questions spcifies dans l'Acte fondateur OTAN-Russie de 1997, telles que la non-prolifration, la rforme de la dfense et les plans civils d'urgence. Les relations comporteront galement une importante coopration militaire au-del des Balkans, notamment dans le cadre d'une brigade exprimentale de maintien de la paix OTAN-Russie. Elles incluront en outre une coopration en matire d'armements, par exemple dans le domaine de la dfense contre les missiles tactiques.

Les relations de l'OTAN avec les Nations Unies auront t affermies au niveau officiel comme au niveau conceptuel. Au niveau officiel, l'tablissement d'un bureau de liaison permanent au sige de l'ONU soulignera le caractre essentiel du rle de l'OTAN dans la gestion des crises l'chelle europenne. Au niveau conceptuel, l'exprience acquise par l'OTAN dans les Balkans constituera une partie importante de la rforme par les Nations Unies de leur propre approche du maintien de la paix.

L'importance stratgique grandissante du sud de la Mditerrane aura lev le Dialogue mditerranen au-del de son rle de simple ramification des activits d'ouverture de l'OTAN.

Son volution aura t comparable celle du Partenariat pour la paix, et elle sera marque par une coopration militaire significative, notamment dans le domaine de la gestion des crises, et par l'accent mis sur la non-prolifration. Compte tenu de l'importance croissante de la rgion Asie-Pacifique, les confrences semestrielles Japon-OTAN auront fait place un plus large Dialogue Asie-OTAN, sur le modle du Dialogue mditerranen.

C'est certainement l un scnario favorable, o l'OTAN jouera un rle majeur, mais nullement singulier, dans la gestion du changement. La principale diffrence entre 2011 et 2001 sera le fait que les relations ad hoc entre grandes institutions qui s'taient instaures par ncessit dans les Balkans seront devenues de solides relations officielles, facilitant une approche globale de la gestion des crises, et aussi, il faut l'esprer, de leur prvention. Le rajustement interne de l'OTAN de l'aprs-Guerre froide, largement men bien la fin des annes 90, aura t complt par la mise en place de divers mcanismes additionnels, la mesure des nouveaux dfis qui seront apparus aprs 2000.

Les conditions essentielles

Du point de vue de l'analyse, il serait au moins discutable, sinon totalement inutile, d'esquisser pour l'avenir un scnario favorable sans considrer, au minimum, les conditions les plus importantes de sa ralisation. En fait, ces conditions en disent autant sur la voie suivre que le scnario lui-mme.

A l'vidence, l'volution de la Russie dans un sens positif sera une condition dterminante. Si l'exprience dmocratique de la Russie devait chouer, ou si son existence mme en tant qu'Etat devait tre compromise par une fragmentation politique et conomique, il semblerait impossible d'arriver l'avenir privilgi esquiss plus haut. Certes, un dclin de la Russie ne provoquerait pas ncessairement une nouvelle Guerre froide, mais une Russie en proie des crises serait un lment trs prjudiciable au dveloppement de toutes les institutions euro-atlantiques.

Parmi les autres conditions figure la cohrence des processus d'largissement de l'Union europenne et de l'OTAN, qui sont les acteurs institutionnels cls de l'Europe. Si l'largissement de l'une de ces institutions, ou des deux, devait marquer le pas et si les diffrences de composition devaient s'accrotre, les chances de voir s'laborer des politiques cohrentes et efficaces — dont le potentiel a t rcemment dmontr dans les Balkans — subiraient un nouveau recul.

Le dveloppement judicieux d'une Politique europenne en matire de scurit et de dfense reprsente une autre grande variable. Si la PESD s'en tient son actuelle philosophie atlantiste, elle pourrait rpondre au moins certaines des demandes formules par les Etats-Unis concernant le partage du fardeau. En revanche, si la PESD en arrivait tre perue par l'UE comme un moyen de s'affirmer, ou mme de "contrebalancer " un unilatralisme des Etats-Unis, elle deviendrait, pour les relations transatlantiques, un handicap plutt qu'un atout.

Le maintien de l'intrt des Etats-Unis pour l'Europe sera galement crucial. Si l'intrt des Etats-Unis pour la scurit de l'Europe reste lev, d'ventuels ajustements dans les relations transatlantiques, tels qu'un plus grand rle de l'UE en matire de scurit ou une focalisation plus marque des Etats-Unis sur l'Asie, pourraient s'effectuer sans dommages pour la structure transatlantique. Mais si l'intrt des Etats-Unis pour l'Europe diminuait, en raison d'une dgradation des relations transatlantiques ou de l'existence pour les Amricains d'autres proccupations prsentant un caractre d'urgence l'chelle mondiale, l'OTAN serait prive du leadership dont elle a besoin pour jouer un rle effectif d'agent du changement.

Faire face l'volution de la technologie militaire sera aussi ncessaire la ralisation d'un scnario favorable. La dfense antimissile, par exemple, pourrait largement contribuer assurer une protection contre la prolifration, et elle devrait donc faire partie intgrante de l'"OTAN 2011". Cependant, si elle tait mal gre politiquement, elle pourrait galement provoquer un dphasage entre l'Europe et les Etats-Unis. Un accroissement de l'cart technologique transatlantique diminuerait l'importance des Allis europens aux yeux des Revue de l' OTAN 20 Automne 2001 Etats-Unis et aviverait le dbat sur le partage du fardeau. Il risquerait aussi de renforcer les tendances unilatralistes existant aux Etats-Unis, ce qui ferait alors grandir le ressentiment prouv en Europe.

Des ressources suffisantes sont une autre des conditions qu'implique un scnario optimiste pour 2011. Consacrer la dfense des crdits insuff isants aurait pour effet de restreindre les rles scuritaires potentiels de l'Union europenne et de l'OTAN, et de rendre ainsi le scnario moins favorable. Dans le contexte d'un dbat plus passionn sur le partage du fardeau, le fait de ne pas f inancer de manire adquate des programmes comme le Grand objectif de l'Union europenne ou l'Initiative de l'OTAN sur les capacits de dfense pourrait avoir des ramifications politiques qui dpasseraient de loin la valeur militaire immdiate de ces programmes. Dans le mme ordre d'ides, un renforcement de l'industrie de dfense europenne et/ou une restriction des politiques amricaines concernant la coopration entre les industries de dfense pourraient se traduire par l'dif ication d'une "forteresse Europe" et d'une "forteresse Amrique", ce qui serait extrmement prjudiciable aux relations transatlantiques.

Enfin, il y a l'volution des risques et menaces en Europe et alentour. C'est l, naturellement, la premire des variables, dont les consquences ont potentiellement la plus vaste porte, comme le montrent les attentats terroristes qui ont frapp New York et Washington le 11 septembre. Si l'volution de la scurit en Europe et alentour demeure essentiellement favorable, certains isolationnistes amricains et certains "europhiles " pourraient tre tents de considrer que l'engagement militaire des Etats-Unis en Europe n'est plus ncessaire. Il ne faut pourtant pas en conclure que l'OTAN ne peut que prosprer dans un environnement explosif, ni que ce serait forcment le cas. Des dsaccords entre Allis sur la faon d'aborder une autre guerre dans les Balkans, par exemple, pourraient mme provoquer des ralignements stratgiques parmi les Allis et affaiblir l'OTAN. Il est clair que la construction de la scurit europenne par des moyens pacifiques demeure l'option privilgie de l'Alliance.

Ce que l'OTAN doit faire ds maintenant pour que le scnario favorable se concrtise

Rester en activit: l'actuelle architecture de scurit europenne est loin d'tre parfaite, mais elle comporte une puissante dynamique de coopration qui offre de nombreux lments programms de dissuasion contre les actions sclrates ou la poursuite d'intrts nationaux par tous les moyens. En revanche, si l'OTAN devait disparatre, certains pays craindraient d'tre marginaliss. Cela risquerait de faire natre un plus grand sentiment d'inscurit dans toute l'Europe et de conduire des politiques qui inverseraient l'volution positive que le continent a connue ces dix dernires annes. Si le cadre de l'OTAN a videmment des limites, il n'existe aucune autre formule institutionnelle viable pour ce qui est de l'avenir prvisible.

Tenir le cap: qu'il s'agisse de l'largissement de l'OTAN, de la participation de la Russie, de la PESD ou des Balkans, aucun changement radical de politique n'est prsent ncessaire. En fait, comme le lecteur attentif l'OTAN l'aura dj devin, si le programme actuel de l'Alliance tait pleinement mis en uvre, il pourrait, pour l'essentiel, permettre la ralisation du scnario favorable esquiss plus haut, avec peut-tre une ou deux nouvelles initiatives. Par contre, un brusque demi-tour sur l'une quelconque de ces questions ne pourrait que rouvrir les conflits du milieu des annes 90. L'OTAN poursuivra l'tablissement de nouveaux mcanismes permettant de rpondre aux mutations de l'environnement de scurit, notamment en intensifiant la coordination de sa lutte contre le terrorisme international, mais les paramtres de base sont d'ores et dj en place.

Bien s'entendre sur l'essentiel: malgr ce que pourraient parfois faire croire les positions excessives adoptes dans l'actuel dbat transatlantique, aucun divorce entre l'Europe et les Etats-Unis par suite de "diffrends insurmontables" concernant l'effet de serre et les organismes gntiquement modifis n'est en vue. Un simple coup d'il sur les lments fondamentaux de la scurit transatlantique suffit placer les choses dans leur juste perspective. On voit bien, par exemple, que les Etats-Unis ne vont pas refuser l'Europe le droit de mener une politique de scurit distincte, pas plus que l'Europe ne va imposer aux Etats-Unis une politique de vulnrabilit stratgique en faisant obstacle la mise en place d'une dfense antimissile. On voit aussi que l'OTAN s'est engage dans les Balkans de faon irrversible, et que succomber la tentation d'un dsengagement ne pourrait que relancer la discorde entre les deux parties qui avait marqu la premire moiti des annes 90. On voit enfin que l'Europe et l'Amrique du Nord partagent beaucoup d'autres intrts stratgiques, tels que la prvention de la prolifration, la lutte contre le terrorisme et le maintien de marchs libres. La coopration trans-atlantique devra donc se poursuivre. Comme l'a confirm la dcision de l'Alliance d'invoquer son engagement de dfense collective en rponse aux attentats terroristes commis New York et Washington, l'OTAN a une trop grande valeur stratgique pour que l'on puisse laisser des querelles sur des questions de tactique lui porter prjudice.

Le prsent essai a pour thme implicite la mutation de l'OTAN. Par rapport l'Alliance sous sa forme actuelle, l'"OTAN 2011" sera plus large, un peu plus "europenne" et peut-tre aussi un peu plus "mridionale" dans ses choix stratgiques. En outre, l'volution de l'Alliance dpendra de plus en plus des dveloppements qui interviendront l'extrieur, dans les Balkans, au sein de l'Union europenne, dans la Mditerrane et en Russie. Cependant, aucun de ces changements ne devrait avoir pour effet, en 2011, de priver l'OTAN des caractristiques fondamentales qui l'ont rendue aussi prcieuse que durable, en particulier sa forte dimension transatlantique et sa comptence militaire unique. Marlene Dietrich a dit un jour que la plupart des femmes cherchent changer un homme, et que, lorsqu'elles y sont parvenues, il ne leur plat plus. Mme si elle aura bien chang, l'"OTAN 2011" devrait, au contraire, tre une Alliance qui plaira toujours ses membres et Partenaires, dont elle aura toute l'approbation.


  1. Michael Rhle est Chef de la Section plans politiques et rdaction de discours de la Division des affaires politiques de l'OTAN.