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Mise à jour : 8-février-2001 Revue de l'OTAN

Edition Web
Vol. 49 - No. 1 Printemps 2001
p. 21
 

Analyse

La reconstruction dans le cadre de la CIMIC


Le général Ortuño: une perspective à long terme
( © NATO - 34KO)

Duge est un village perdu dans les montagnes de Crnoljeva,au Kosovo, près du croisement des routes d'Urosevac et de Prizren. Comptant environ 200 habitants, il est largement coupé du reste de la province en hiver, et, comme beaucoup d'autres endroits du Kosovo, il a subi de très importantes destructions au cours des combats de 1998 et 1999. Aujourd'hui, la vie commence à retrouver son cours normal, en grande partie grâce aux efforts déployés par une équipe de coopération civilo-militaire (CIMIC) de la KFOR.

Après les dommages causés à la principale route menant à Duge, les habitants du village ont eu beaucoup de mal à en sortir et à y rentrer, ont été privés d'accès immédiat aux soins de santé et n'ont plus pu conduire leurs enfants à l'école. Réparer les trois kilomètres de route reliant Duge au monde extérieur était d'une importance critique pour le retour à la vie du village, et cette opération entrait dans le millier de projets de reconstruction recensés l'an dernier par une équipe de la CIMIC.

La CIMIC représente le processus de coopération et de coordination entre un commandant de l'OTAN et les populations et organisations civiles de son théâtre d'opérations. Ce processus implique l'établissement de mécanismes de liaison et la coordination des besoins des organisations militaires et civiles. Il peut aussi conduire, dans des circonstances exceptionnelles, à une participation militaire à des tâches qui incomberaient normalement à des civils.

La participation de la CIMIC à la reconstruction a été un élément essentiel de la stratégie du deuxième commandant de la KFOR, le Général espagnol Juan Ortuño, qui s'était fixé pour buts d'"offrir à la province une perspective économique à long terme" et de la doter d'"un mécanisme permettant de faciliter l'arrivée des fonds octroyés par les donateurs internationaux aux niveaux des régions et des municipalités." En outre, cette démarche n'a pas seulement reçu un accueil très favorable des organisations civiles, des agences internationales et des collectivités locales; elle a aussi contribué à faire naître une compréhension mutuelle entre celles-ci et les militaires.

Après une étude sur le terrain réalisée en mars 2000, d'où il est ressorti qu'il manquait à la communauté internationale les moyens d'évaluer les besoins de reconstruction à l'échelle du Kosovo, les services de planification du Grand quartier général des puissances alliées en Europe (SHAPE) ont créé le Groupe sur le développement du Kosovo. Ce groupe a été détaché sous l'autorité du département de l'Union européenne chargé de la reconstruction au Kosovo. La Belgique, le Danemark, la Finlande, la France, l'Allemagne, la Grèce, l'Italie et l'Espagne y ont affecté 18 officiers dûment formés, qui ont travaillé en équipes de trois dans les cinq secteurs de la province ainsi qu'à Pristina. Les coûts ont été partagés entre les participants, les pays concernés assurant le versement des soldes, la KFOR fournissant les locaux d'hébergement et de travail, et l'Union européenne prenant en charge les frais de transport et de stationnement, de même que les dépenses supplémentaires.

A partir de juillet 2000, les équipes du Groupe sur le développement du Kosovo ont sillonné la province, en recensant et en classant par ordre de priorité les projets de reconstruction, comme celui de Duge, en coopération avec les collectivités locales et les quelque 120 organisations non gouvernementales opérant au Kosovo. Ces projets, qui couvrent tous les aspects de la reconstruction, de la remise en état de l'infrastructure au rétablissement de l'économie, bénéficient à présent d'un financement de l'UE.

Les premiers effectifs du Groupe sur le développement du Kosovo ont quitté la province à la fin janvier, date d'expiration de leur mandat. Leurs successeurs assureront la supervision des projets jusqu'au mois de juillet de cette année, où les structures civiles de l'UE devraient être prêtes à prendre le relais.

Depuis l'arrivée dans les Balkans des soldats de la paix dirigés par l'OTAN, en décembre 1995, la gamme des activités auxquelles les militaires ont été appelés à participer n'a cessé de s'étendre. Cependant, même si les tâches et lesqualifications exigées des soldats sont allées en augmentant, l'expérience de la CIMIC en matière de reconstruction s'est révélée extrêmement positive, en contribuant à améliorer les relations à la fois avec la population locale et avec les autres organismes internationaux travaillant sur le terrain.

S'appuyant sur l'expérience acquise en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo, le SHAPE a élaboré un document de politique qui énonce les grandes lignes directrices de l'action de la CIMIC, en en définissant le concept et les modalités d'application. Ce document détermine surtout l'équilibre nécessaire pour faire en sorte que la participation à des tâches du domaine civil n'intervienne que lorsqu'il n'existe pas d'autres possibilités. Il a déjà été agréé par les Etats membres de l'OTAN et devrait bientôt être approuvé par le Conseil de l'Atlantique Nord.

En vue d'améliorer la coordination sur le terrain, le SHAPE a également établi des relations de travail avec les principales organisations internationales et ONG intéressées par la coordination civilo-militaire, telles que l'Union européenne, le Comité international de la Croix-Rouge et les institutions des Nations Unies. Par ailleurs, un autre document, plus complet, sur les orientations de la CIMIC a été élaboré en vue d'exposer en détail la façon dont la CIMIC devrait s'exercer sur le terrain. Ce document est maintenant soumis à l'accord des Etats membres.