Mise à jour: 16-Feb-2000 | Revue de l'OTAN |
Edition Web
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Un moment
déterminant pour l'OTAN:
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Le Secrétaire général de l'OTAN, Javier Solana (à droite) aux côtés du Président des Etats-Unis, Bill Clinton, s'adresse à la presse lors du Sommet du 50e anniversaire de l'OTAN, tenu à Washington en Avril dernier. (Photo Belga - 21Kb) |
Lors du Sommet
du 50e anniversaire, tenu en avril à Washington, les dirigeants
de l'Alliance ont pris une série de décisions clés
visant à mieux préparer l'OTAN aux défis de sécurité
qu'elle risque de devoir affronter au cours de la première moitié
du siècle prochain. Le fait que ces problèmes aient été
abordés alors même que se déroulait la crise la plus
grave que l'Europe ait connue depuis les débuts de l'Alliance atteste
la volonté de l'OTAN d'agir face à une dangereuse menace
pour la stabilité sur le continent. Dans sa réponse à
la crise du Kosovo, l'Alliance a très clairement montré
qu'elle défendra les valeurs fondamentales de la communauté
atlantique: la liberté, la démocratie, les droits de l'homme
et le règne du droit.
La 50e année d'existence de l'OTAN est déjà devenue l'une des plus importantes de l'histoire de l'Organisation.
Ces derniers mois seulement, l'Alliance a mené avec succès
dans les Balkans une campagne aérienne complexe et intense, et
elle dirige à présent une Force multinationale de mise en
oeuvre au Kosovo (KFOR), sur la base de la Résolution
1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies. Les opérations
menées ont eu un seul et même objectif: inverser l'effroyable
politique de purification ethnique du régime de Belgrade et permettre
aux Kosovars
albanais déplacés de regagner leurs foyers dans des conditions
de paix et de sécurité.
Dans le même temps, l'Alliance continue de faire largement avancer son projet d'adaptation de l'OTAN au XXIe siècle.
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Si on les considérait séparément, on constaterait que ces deux activités impliquent déjà de grands efforts. Ensemble, elles montrent bien l'ampleur du défi que l'Alliance doit à présent relever au plan politique, alors que nous entrons dans le deuxième demi-siècle de l'existence de l'OTAN.
Le Sommet de Washington du mois d'avril s'est donc situé à un moment très opportun, car il a offert aux Chefs d'Etat et de gouvernement des pays alliés la possibilité de réfléchir à la crise du Kosovo et à l'adaptation de l'Alliance. Dans les deux cas, nos dirigeants ont approuvé sans réserve la ligne d'action suivie par l'OTAN.
J'ai la conviction que les efforts déployés par l'OTAN pour apporter une paix durable au Kosovo ont été - et continuent d'être - la juste et bonne réponse à une politique indéfendable de répression et de violence menée dans les derniers mois du XXe siècle. L'Alliance ne pouvait se contenter de regarder le gouvernement yougoslave faire délibérément subir des atrocités aux Kosovars albanais (purification ethnique, massacres, suppression de l'identité de tout un peuple). De telles atrocités ne pouvaient rester sans réponse si nous avions le pouvoir d'intervenir.
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Depuis le début de la crise du Kosovo, la communauté internationale
et l'OTAN n'ont épargné aucun effort pour parvenir à
une solution pacifique. Le déclenchement des opérations
militaires a été un dernier recours, après que le
régime de Belgrade eut rejeté toutes les propositions de
règlement politique. C'est alors que l'Alliance a lancé
ses actions militaires, qui avaient uniquement pour but de mettre fin
à la violence et d'inverser la politique répressive des
dirigeants yougoslaves. Elles n'ont jamais visé le peuple serbe.
Aujourd'hui, avec le retrait des forces serbes et le déploiement
de la KFOR, l'espoir renaît pour le peuple du Kosovo. Notre unité
et notre détermination ont contraint le président Milosevic
à faire droit aux exigences de la communauté internationale:
arrêt de la violence, retrait des forces serbes du Kosovo, déploiement
d'une force de sécurité internationale, retour des réfugiés
dans leurs foyers, recherche pour la province d'une solution politique
durable reposant sur l'autonomie au sein de la République fédérale
de Yougoslavie.
Le conflit du Kosovo a maintenant pris fin. Les actions hostiles menées par les forces armées et la police serbes contre les civils kosovars ont cessé, à l'exception de quelques incidents isolés. En même temps, le déploiement de la KFOR est bien lancé. Lorsqu'elle aura atteint son plein effectif, la KFOR comptera quelque 50.000 hommes et femmes. Elle assurera la sécurité nécessaire aux civils déplacés de l'intérieur au Kosovo, aux déportés et réfugiés regagnant leurs foyers et aux organismes humanitaires internationaux leur apportant un soutien. Elle fera également respecter les droits de tous les habitants du Kosovo, quelle que soit leur origine ethnique.
Plusieurs milliers de réfugiés kosovars passent en Albanie au poste frontière de Morina, le 4 mai, en signalant que le convoi a essuyé des tirs de la police serbe, qui a emmené plusieurs hommes. (AP photo - 71Kb) |
Les réfugiés kosovars installés dans les camps de
fortune d'Albanie et de l'ex-République yougoslave de Macédoine(1)
se préparent à rentrer chez eux. Victimes de la politique
de répression du président Milosevic, ils ont été
expulsés par centaines de milliers. L'Alliance aide les deux pays
et d'autres pays voisins de la Yougoslavie à maintenir leur stabilité
- en fait, elle a commencé à leur prêter assistance
dès l'été dernier, lorsque sont apparus les premiers
signes d'un risque de déstabilisation. Les actions humanitaires
de l'OTAN ont revêtu une importance cruciale pour la fourniture
de secours d'urgence aux flots de réfugiés qui semblaient
ne jamais cesser de franchir les frontières. Par ailleurs, à
mesure que les troupes de la KFOR se déploieront, elles mettront
tout en oeuvre pour répondre aux besoins immédiats des milliers
de personnes déplacées de l'intérieur au Kosovo,
jusqu'à ce que les organismes de secours civils soient en mesure
de prendre le relais.
Si nous avons pu mener à bien la campagne aérienne, c'est
que Belgrade a compris que l'Alliance ne céderait pas sur les conditions
fixées par la communauté internationale. Le Sommet de Washington
a renforcé le message que nous lancions à Belgrade: l'OTAN
allait poursuivre sa mission jusqu'à son total accomplissement.
Cependant, le Sommet n'a pas été consacré uniquement au Kosovo. Il a aussi constitué une réunion de travail au cours de laquelle de nouvelles initiatives ont été adoptées et d'autres menées à leur terme, toujours dans un seul et même but: préparer l'OTAN à faire face aux défis de sécurité qui l'attendent.
Le Sommet a fourni une occasion de lancer des travaux sur une série
d'initiatives visant à renforcer la sécurité dans
l'Europe du sud-est. Ces initiatives viendront en complément d'autres
actions menées par l'Union européenne et l'Organisation
pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
L'OTAN dispose d'un certain nombre de moyens pour apporter son concours
à ces actions. Nous avons créé de nouveaux arrangements
de consultation entre l'Alliance et les Etats voisins de la Yougoslavie
pour les questions relatives à l'Europe du sud-est. Par ailleurs,
nous utiliserons les mécanismes en place dans le cadre du Partenariat
pour la paix (PPP) et du Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA)
pour concrétiser notre promesse d'assistance. Nous allons, par
exemple, promouvoir la coopération régionale au sein du
CPEA et mettre sur pied des programmes OTAN spéciaux de coopération
en matière de sécurité pour les pays de la région.
Nous allons aussi mettre davantage l'accent sur le caractère régional
de nos activités et de nos exercices dans le cadre du PPP.
Ces mesures, qui complètent l'aide politique et économique
apportée par d'autres institutions, constituent une nouvelle preuve
du fait que la communauté internationale se préoccupe non
seulement de la crise actuelle, mais aussi de la situation qui suivra.
Nous nous efforcerons de veiller à ce que les Balkans ne soient
pas condamnés à une instabilité perpétuelle.
La situation au Kosovo montre que la diplomatie doit pouvoir s'appuyer
sur une force militaire crédible. Pour exercer un effet décisif
sur une crise, sans faire courir aux populations civiles des risques excessifs
ni exposer inutilement nos propres troupes, il faut un commandement unifié
et du matériel moderne. L'OTAN possède l'un et l'autre,
et le Sommet a donné à l'Alliance l'assurance de continuer
à disposer des moyens et capacités nécessaires à
l'accomplissement de sa tâche.
Les dirigeants des pays alliés entament un débat approfondi sur le Kosovo au début du Sommet du 50e anniversaire de l'OTAN, le 23 avril, à Washington. (Photo Reuters - 62Kb) |
La nouvelle structure de commandement de l'OTAN, optimisée pour
toute la gamme des missions de l'Alliance, dont la gestion des crises,
et pour l'apport de contributions de nos Partenaires, va garantir que
l'Alliance reste capable de réagir de façon rapide et efficace
aux défis, quels qu'ils soient. Notre nouvelle Initiative sur les
capacités de défense
a spécifiquement pour objectif de répondre au défi
qui consiste à maintenir l'interopérabilité des forces
alliées à une époque où la technologie évolue
rapidement. Elle aidera l'OTAN à préserver son avance technologique.
Le Concept stratégique
révisé de l'Alliance, également adopté au
Sommet de Washington, établit un nouvel équilibre entre
la tâche traditionnelle de l'OTAN, celle de la défense collective,
et ses nouvelles missions de gestion des crises. Il permettra ainsi à
l'Alliance de demeurer un instrument efficace pour la sécurité
et la stabilité dans la région euro-atlantique.
La crise du Kosovo représente un défi pour tous les pays de la région euro-atlantique. Tous ont intérêt à ce que la sécurité et la stabilité y soient maintenues, et tous devraient pouvoir apporter leur contribution. C'est pourquoi l'OTAN a créé des mécanismes tels que le Partenariat pour la paix (PPP) et le Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA), afin de réunir tous les pays de notre continent dans une approche commune de la sécurité. Ces mécanismes montrent à présent toute leur utilité. L'OTAN apporte une assistance humanitaire aux pays partenaires limitrophes de la Yougoslavie pour leur permettre de venir en aide aux Kosovars victimes de l'épuration ethnique exercée par les forces de sécurité yougoslaves.
Le maintien de la stabilité de ces pays demeure indispensable
à la stabilité de l'Europe en général. Au
Sommet ont été approuvées des améliorations
au PPP visant à donner aux Partenaires un plus grand rôle
dans les opérations de réponse aux crises dirigées
par l'OTAN et à rendre notre coopération commune plus efficace
au plan opérationnel. De même, le CPEA s'est vu accorder
une dimension plus opérationnelle, en particulier grâce à
l'accent mis sur les actions humanitaires et les secours en cas de catastrophe.
Dans le cadre des réunions de Washington, les dirigeants des pays
alliés ont rencontré le Président de l'Ukraine, M.
Leonid Koutchma, lors du premier Sommet OTAN-Ukraine. Bien que la Russie
n'ait pas souhaité assister aux réunions, les dirigeants
alliés ont exprimé leur désir de maintenir avec elle
de solides systèmes de consultation et de coopération par
l'intermédiaire du Conseil conjoint permanent OTAN-Russie. Ils
ont souligné que l'OTAN et la Russie sont trop importantes pour
s'ignorer mutuellement. Les relations de l'OTAN avec les six pays du Dialogue
méditerranéen ont également été relancées
par de nouvelles initiatives visant à approfondir la coopération
dans la région méditerranéenne.
La crise du Kosovo montre que notre continent souffre toujours de divisions qu'il importe de surmonter. Nous demeurons résolus à supprimer toutes les lignes de division qui existeraient encore, comme nous l'avons prouvé en accueillant au sein de l'Alliance la Hongrie, la Pologne et la République tchèque. Ce processus va se poursuivre, et la porte de l'OTAN restera ouverte à de futurs membres. A cette fin, le Sommet a inauguré un Plan d'action pour l'adhésion comportant une série de mesures qui aideront les pays candidats à mieux se préparer à une adhésion future. Nous allons ainsi faire en sorte que le processus d'élargissement de l'OTAN continue de créer des incitations à la réforme en Europe centrale et orientale, et donc à une stabilité à long terme de notre continent.
Le Secrétaire général de l'OTAN, Javier Solana, est accueilli par des réfugiés kosovars au camp de Cegrane, dans l'ex-République yougoslave de Macédoine(1) le 12 may. (Photo Belga - 46Kb) |
L'avenir de l'OTAN va aussi impliquer un plus grand rôle pour les Alliés européens et un rééquilibrage des relations vitales entre les deux rives de l'Atlantique. C'est pourquoi, lors du Sommet, les dirigeants des pays de l'OTAN se sont félicités du nouvel élan imprimé aux efforts visant à renforcer la dimension européenne de sécurité et de défense et ont réaffirmé que l'Alliance appuyait ces efforts. Les participants ont pris note des importants progrès réalisés dans la construction de l'Identité européenne de sécurité et de défense au sein de l'Alliance sur la base des décisions arrêtées à Berlin en 1996, et ils ont demandé que cette action soit menée plus avant. Se fondant sur les dispositions établies entre l'OTAN et UEO, l'Alliance se tient prête à définir et à adopter les arrangements nécessaires à une étroite coopération avec l'UE à mesure que cette organisation assumera un plus grand rôle en matière de sécurité. La participation de tous les Alliés européens à cette évolution revêt une importance particulière pour l'Alliance. La nouvelle structure de commandement de l'OTAN et la mise en uvre du concept de Groupes de forces interarmées multinationales (GFIM) fourniront à l'Alliance de précieux moyens, non seulement pour ses propres opérations, mais aussi pour le soutien d'opérations européennes n'impliquant pas l'ensemble de l'Alliance.
La crise du Kosovo montre avant tout que l'Europe et l'Amérique du Nord doivent demeurer unies. Leur unité et leur résolution restent nos atouts les plus précieux. C'est grâce à cette unité et à cette résolution que nous avons préservé notre sécurité pendant toute la Guerre froide; c'est grâce à elles que nous l'avons emporté dans la crise du Kosovo, que nous sommes arrivés à une solution politique et que nous nous employons maintenant à faire rentrer l'Europe du sud-est dans l'ensemble du continent. Le soutien sans réserve que nous ont apporté nos nombreux pays partenaires au Sommet de Washington est venu confirmer une vérité fondamentale: les pays de l'Europe et de l'Amérique du Nord ont non seulement un héritage commun, mais une destinée commune.
Les coups du sort n'attendent pas que nous y soyons préparés. En vérité, nous aurions aimé célébrer le 50e anniversaire de notre Alliance dans d'autres circonstances. Nous aurions tous préféré n'avoir qu'à mettre en relief les réussites de l'OTAN plutôt que d'être préoccupés par une crise frappant une région où notre continent se montre sous son plus mauvais jour. Mais en décidant de nous impliquer en faveur de la paix et de la stabilité à long terme dans les Balkans, nous avons fait clairement savoir que dans notre communauté atlantique, les valeurs ont un sens.
Tel a été le principal message de notre Sommet de Washington, message qui renforcera les nombreuses initiatives issues de cette réunion historique dans l'intérêt de la stabilité et de la sécurité en Europe, message digne de notre communauté atlantique.