Revue de l'OTAN
Mise à jour: 23-Oct-2002 Revue de l'OTAN

Edition Web
Vol. 44- No. 2
Mars 1996
p. 19-23

Négocier une nouvelle donne transatlantique

Stanley R. Sloan

Dans cet article, l'auteur soutient que le "pourquoi" et le "comment" de l'avenir de l'OTAN devraient être déterminés avant que les Alliés n'abordent le "qui" et le "quand" de l'élargissement de l'Alliance. Il conviendrait donc d'entreprendre une étude qui conduirait à un nouvel énoncé des missions de l'OTAN et à un plan de réorganisation permettant de les accomplir. Ayant ainsi finalisé la nouvelle donne, les Alliés pourraient alors passer aux préparatifs des négociations d'accession. Mais la mise au point d'une nouvelle donne se heurte à de sérieux défis. La réforme devra permettre l'adhésion de nouveaux membres, l'établissement d'une relation constructive avec la Russie, la prise en compte des aspirations à un pilier européen au sein de l'OTAN une plus grande participation de la France et le maintien de l'intérêt et de l'engagement des Etats-Unis.

Au cours des quatre dernières années, les Etats membres de l'Alliance atlantique ont négocié une nouvelle donne transatlantique. Jusqu'ici, ces négociations ont été largement déterminées par les problèmes de l'actualité: la Bosnie, l'élargissement et les relations avec la Russie. Au moment où les Alliés s'engagent dans l'opération militaire la plus ambitieuse de l'histoire de l'OTAN, il peut paraître injuste de demander plus. Mais quelle que soit la conclusion de la crise bosniaque, les pays de l'OTAN doivent décider du "pourquoi" et du "comment" de l'avenir de l'Organisation avant de passer au "qui" et au "quand" l'élargissement de l'Alliance.

Les Alliés devraient donc maintenant aborder la phase finale du processus de réforme en s'accordant pour redéfinir la mission de l'OTAN et pour réorganiser ses structures. Le défi se présente avec d'autant plus d'urgence que plusieurs démocraties nouvelles souhaitent accéder à l'Alliance et que la Russie est préoccupée par la mission de l'OTAN. Mais il reflète aussi la nécessité de rééquilibrer les charges et les responsabilités au sein de l'Alliance et de faire en sorte que les opinions publiques et les parlements des pays alliés soient convaincus que l'OTAN sert toujours leurs intérêts vitaux.

Certains prétendent que le processus de mise au point de la nouvelle donne devrait être repoussé jusqu'à ce que l'issue de la crise bosniaque soit claire. D'autres disent que les Alliés devraient attendre les résultats de la Conférence intergouvernementale (CIG) de l'Union européenne, qui abordera cette année la question de la coopération future, au niveau européen, en matière de défense. Cependant, si les Alliés pensent qu'ils auront besoin de l'OTAN dans l'avenir, ils ne peuvent rester les bras croisés.

C'est pourquoi les ministres des Affaires étrangères des pays membres de l'OTAN devraient, lorsqu'ils se réuniront à Berlin, au mois de juin, autoriser le lancement d'une étude sur la réforme de l'OTAN. Cette étude devrait conduire à un nouvel énoncé des missions de l'OTAN dans le monde de l'après-Guerre froide et à un plan de réorganisation permettant de les accomplir. Les résultats devraient en être approuvés lors d'un Sommet de l'OTAN à la mi-97.

Une fois la nouvelle donne mise au point, les Alliés pourraient se préparer à ouvrir les négociations d'accession, en 1998, avec tous les Etats qui auraient montré la volonté et la capacité de remplir les conditions qu'imposé l'appartenance à l'OTAN. Un tel calendrier ferait des négociations sur l'élargissement de l'OTAN et de l'UE des processus parallèles, puisque tous deux débuteraient en 1998, les dates d'accession dépendant des spécificités de chaque pays candidat.

Changement et continuité

Les gouvernements des Etats-Unis, du Canada et des pays membres européens de l'OTAN sont bien convaincus que le maintien de l'Alliance transatlantique servira leurs intérêts vitaux. Mais il n'y a pas de consensus dans les pays membres, ni entre eux, quant à ce que devraient être les missions de l'Alliance dans la période de l'histoire qui suit la Guerre froide.

Depuis la fin de la Guerre froide, les pays de l'OTAN ont assez bien réussi à adapter les politiques et les programmes de l'Alliance aux nouvelles réalités internationales en Europe. Ils ont créé le Conseil de coopération nord-atlantique (CCNA) et le programme du Partenariat pour la paix (PfP) afin de promouvoir les consultations et la coopération entre les Alliés et les anciens Etats du Pacte de Varsovie, les ex-Républiques soviétiques et les anciens pays neutres. Ils se sont engagés dans la voie d'un élargissement et ont commencé à instaurer une relation particulière entre l'OTAN et la Russie. Ils sont aussi convenus d'ajouter des quartiers généraux de Groupes de forces interarmées multinationales (GFIM) à la structure de forces de l'OTAN afin de doter l'Alliance d'un dispositif souple lui permettant de réunir des ensembles de forces spécialement adaptés à des crises ou à des circonstances particulières.

Cependant, les Alliés hésitent à apporter des changements de structure fondamentaux à l'Organisation elle-même, et, de ce fait, l'initiative des GFIM n'a pas encore pu être mise en œuvre. Cette hésitation a plusieurs causes. L'une d'elle est l'idée de base selon laquelle "on ne change pas une équipe qui gagne": l'unité des Alliés a été une grande force qui a permis de mettre fin à la Guerre froide en précipitant la chute du Pacte de Varsovie et de l'Union soviétique, et la structure éprouvée de l'OTAN a contribué à créer cette unité. Dans cette optique, il faudrait que les nouvelles dispositions structurelles proposées soient manifestement meilleures que celles qui sont en place pour que l'on réussisse à vaincre l'inertie née des succès passés.

Une autre source de résistance tient au fait que presque tout changement structurel de l'OTAN réduirait probablement le rôle des Etats-Unis au sein de l'Alliance par rapport à celui des Alliés européens. Trouver une formule qui permette d'introduire des changements sans nuire à la qualité de l'engagement des États-Unis reste un dilemme. En outre, même si les gouvernements des pays européens admettent que "l'Europe" devrait assumer une plus grande responsabilité collective au sein de l'Alliance, un effort de défense européen véritablement unitaire risque de ne pas voir le jour avant des décennies.
Un autre problème fondamental est celui de l'absence d'un consensus entre les Alliés sur ce que devrait être la mission future de l'OTAN. Certains observateurs continuent de voir l'Alliance surtout comme une assurance contre un réveil de la puissance russe. Pour d'autres, l'OTAN est un vecteur de stabilité et de démocratisation dans les nouvelles démocraties d'Europe centrale. D'autres encore considèrent l'Alliance comme un instrument permettant de mettre au point des réponses multilatérales aux nouveaux problèmes qui se posent en matière de sécurité, notamment dans le domaine de la gestion des crises en Europe et au-delà. Certains hauts fonctionnaires américains, dont des membres du Congrès, voient l'OTAN comme un moyen d'assurer un partage effectif des charges avec leurs alliés. Pour de nombreux Européens, l'OTAN est avant tout un moyen de maintenir les Etats-Unis à l'intérieur de l'Europe. D'autres enfin pensent au cadre rassurant que l'Alliance représente pour l'Allemagne.

Certains partisans de l'élargissement de l'OTAN ont affirmé qu'il apporterait la principale réponse au problème de la mission future de l'Organisation. Mais en fait, l'élargissement est devenu une partie de ce problème.

En outre, la crise bosniaque a mis les Etats membres de l'OTAN dans l'obligation de décider du rôle que l'Alliance devrait jouer dans de telles circonstances et du type de relations qu'elle devrait avoir avec les Nations unies et d'autres institulions, notamment l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), l'Union de l'Europe occidentale (UEO) et l'Union européenne (UE).

Si les pays membres veulent que l'Alliance soit plus qu'une police d'assurance, et s'ils entendent l'ouvrir à de nouveaux membres dans les prochaines années, il faudra que certaines questions relatives à sa structure soient abordées à bref délai. Et si, en particulier, l'OTAN doit servir à trouver des réponses à un large éventail de nouveaux problèmes relatifs à la sécurité en Europe et au-delà, il pourrait devenir de plus en plus important d'assouplir les processus de prise de décision et de mise en œuvre de l'Alliance par rapport à ce qu'ils étaient au temps de la Guerre froide.

Au cœur de ce problème réside la question de savoir si la structure militaire de l'OTAN devrait continuer de refléter un rôle dominant des Etats-Unis ou s'il faudrait élaborer de nouvelles approches traduisant des rôles plus équilibrés des Etats-Unis et de l'Europe au sein de l'Alliance. Les États-Unis et les Alliés européens vont devoir aborder ce problème de front s'ils souhaitent arriver à des options plus souples pour répondre aux nouveaux défis qui les attendent en matière de sécurité.

Le context du changement

La mise au point de la nouvelle donne se heurte donc à de sérieux défis. Il s'agit de répondre simultanément à des exigences fondamentales et, parfois, concurrentes. La réforme devra permettre l'entrée de nouveaux membres dans l'Alliance, laisser la porte ouverte à une relation construc-tive avec la Russie, prendre en compte les aspirations européennes à l'édification d'un pilier européen au sein de l'OTAN, assurer une participation régularisée de la France et préserver l'intérêt et l'engagement des Etats-Unis.

Le terrain est en partie préparé: l'étude sur l'élargissement de l'OTAN a exposé les raisons et les modalités de cet élargissement. La participation russe à la Force de mise en œuvre de la paix en Bosnie (IFOR) et les arrangements spéciaux de consultation à 16 + 1 avec la Russie pourraient marquer le début d'un rapprochement OTAN-Russie. L'IFOR pourrait créer des précédents pour des opérations futures des GFIM. Le retour de la France à une participation pleine et entière au Comité militaire de l'OTAN et sa participation plus active aux réunions des ministres de la défense des pays de l'OTAN sont de grands pas vers une régularisation de la relation entre l'OTAN et la France. Mais il reste à faire davantage.

Le partage des charges et des responsabilités

Si l'Alliance entend préserver une certaine unité de but dans le
monde de l'après-Guerre froide, les Alliés devront revoir l'approche de l'OTAN en matière de coopération militaire dans le sens à'un partage, et non d'une division des charges et responsabilités militaires. Ces dernières années, la tendance était à la division: l'Amérique disait aux Européens que la crise bosniaque était leur affaire, tandis que certains Européens cherchaient comment remplacer les approches transatlantiques des problèmes de sécurité par des solutions européennes.

II est peu probable que l'Alliance puisse survivre si les tendances à la division persistent. Il faut, au contraire, que les Alliés reviennent à une approche de partage impliquant un engagement réitéré de tous les gouvernements des pays membres de coopérer afin de promouvoir la paix et la stabilité internationales.
Une approche de partage signifie en outre qu'il ne devrait y avoir aucune frontière géographique artificielle à la coopération militaire n'entrant pas dans le cadre de l'Article 5. Autrement dit, les seules limites à ce type de coopération seraient la volonté et la capacité des Alliés de participer à une action donnée. L'engagement de défense mutuelle contenu dans l'Article 5 du Traité de l'Atlantique Nord'" demeurera sans doute limité par sa couverture géographique telle que précisée à l'Article 6 - à savoir le territoire des Etats membres - mais rien, dans le Traité, ne limite géographiquement la coopération militaire n'entrant pas dans le cadre de l'Article 5.

Redéfinir la mission de l'OTAN

L'OTAN est et sera toujours une alliance politique aussi bien que militaire. Au début de l'après-Guerre froide, on entendait couramment dire que l'OTAN devrait s'adapter aux circonstances nouvelles en se "politisant davantage". Il est toutefois de plus en plus clair que l'unicité fonctionnelle de l'Alliance réside toujours dans son utilité comme moyen de promouvoir et de mettre en œuvre la coopération politico-militaire entre les Etats membres et les pays partenaires. Au moment où tous les pays membres réduisent la taille et les capacités de leurs forces armées, la possibilité de former des coalitions pour faire face à un large éventail de situations qui menacent la paix revêt une importance croissante. Comme l'a dit en substance David Greenwood, analyste britannique des questions de défense, l'OTAN est en train de passer d'une alliance existante à une coalition en puissance; on pourrait peut-être, en allant encore un peu plus loin, parler de coalitions en puissance variables.
La défense collective demeure au cœur des engagements des Etats-Unis et de leurs alliés envers l'Alliance. Mais elle ne sera pas l'activité centrale de l'OTAN au cours de la période à venir. D'ailleurs, si elle le restait alors que l'on s'efforce d'élargir l'Alliance tout en maintenant une relation constructive avec la Russie, cela créerait des dissensions sur le plan politique. En fait, les activités ordinaires de l'OTAN s'écartent graduellement de la défense collective pour s'orienter vers un partage des responsabilités collectives dans une vaste gamme de domaines liés à la sécurité. Si cette évolution se poursuit, la mission de l'OTAN sera de plus en plus axée sur les objectifs suivants, qui se renforcent mutuellement:

  • Préserver les habitudes de coopération militaire, en préparant les commandants et les forces à participer à des opérations militaires multilatérales, afin d'assurer un haut niveau de préparation et d'interopé-rabilité entre les forces de l'Alliance et des pays partenaires en vue des missions que les pays de l'OTAN pourraient convenir d'entreprendre, qu'elles soient ou non dirigées en passant par la structure de commandement intégrée.
  • Promouvoir la paix, en développant les relations militaires de coopération avec les pays partenaires, y compris la Russie, par le biais du programme du Partenariat pour la paix et du Conseil de coopération nord-atlantique, et aussi par l'emploi en coopération des forces militaires alliées pour apporter, si la nécessité s'en présente, une aide humanitaire et des secours en cas de catastrophe, et en ayant recours à la coopération au sein de l'OTAN pour dissuader des états réprouvés de lancer des agressions et pour décourager la prolifération des armes de destruction massive.
  • Rétablir la paix, en menant des opérations militaires multilatérales visant à rétablir ou à imposer la paix après une agression ou d'autres sources de conflit militaire.

Tant qu'aucun pays de l'OTAN ne sera confronté au type de menace que faisait autrefois peser l'Union soviétique, la stratégie et les déploiements de forces de l'Alliance prendront une forme sensiblement différente de celle qu'ils avaient au temps de la Guerre froide. Cela signifie que, sauf si la situation devait changer, l'engagement de défense mutuelle prévu à l'Article 5 restera mis de côté par l'OTAN. Il pourra être immédiatement invoqué en cas de nécessité, mais il ne constituera pas la préoccupation quotidienne de l'Alliance. Cela devrait aider les Alliés à canaliser des ressources de défense limitées vers les nouveaux défis tout en donnant à la Russie et à d'autres pays non membres de l'OTAN l'assurance que leurs intérêts ne seront pas menacés par la coopération militaire qui se développe autour du noyau des Etats membres de l'Alliance.

Réaffirmer le leadership et L'engagement des Etats-Unis

L'une des grandes variables du processus sera la question de savoir si, oui ou non, les Etats-Unis pourront retrouver la confiance de leurs alliés dans leur leadership et le soutien du peuple américain à un rôle international du pays fondé sur une collaboration avec les démocraties animées des mêmes sentiments. Cela ne voudrait pas nécessairement dire qu'ils devraient déployer plus d'hommes en Europe ou augmenter leurs dépenses de défense. En revanche, cela demanderait que les politiques de l'exécutif et du législatif américains soient plus claires sur le rôle des Etats-Unis dans le monde, et singulièrement en Europe. Certes, l'initiative américaine dans la crise bosniaque a réaffirmé le leadership des Etats-Unis en matière de politique étrangère, mais elle risque de ne pas constituer une assise très solide pour l'avenir de l'OTAN.

Quelle que soit l'issue de l'effort engagé pour donner une chance à la paix en Bosnie, il serait peut-être bon que la Chambre des représentants et le Sénat débattent d'une Déclaration conjointe du Congrès réaffirmant l'attachement de la nation aux objectifs du Traité de l'Atlantique nord, lesquels n'ont pas vieilli et reflètent encore les valeurs communes et les intérêts partagés des Etats membres.

Cette déclaration conjointe pourrait souligner le fait que les nouvelles formes de coopération indiquées ci-dessus dans l'énoncé de la mission sont indispensables aux Etats-Unis si ceux-ci cherchent à promouvoir la paix et la stabilité internationales sans devenir le gendarme du monde.

Rééquilibrer L'Alliance

Lors de sa conférence de presse inaugurale au siège de l'OTAN, en décembre dernier, le Secrétaire général, M. Javier Solana, a déclaré que les Alliés devraient avancer dans la transformation de l'OTAN, notamment pour "refléter les responsabilités européennes croissantes en matière de défense et de sécurité". Il est peu probable que dans l'avenir prévisible, les membres européens de l'OTAN renoncent totalement à leur souveraineté dans le cadre d'une approche supranationale de la défense. En revanche, il est vraisemblable qu'ils mettront au point, entre eux, les approches coopératives qui se révéleront nécessaires ou intéressantes sur le plan budgétaire, politique ou militaire. L'OTAN devra être suffisamment souple pour s'adapter à un tel processus.

Une façon de s'adapter à un plus grand rôle de l'Europe au sein de l'Alliance consisterait à faciliter le commandement européen d'opérations conduites en grande partie par des forces européennes sans porter préjudice à la structure de commandement intégrée de l'OTAN ni briser l'unité de commandement. Peut-être un jour viendra-t-il où les Alliés seront prêts à accepter un Commandant suprême allié européen. Mais dans l'avenir proche, il serait impossible de réunir un consensus de l'Alliance sur une telle réforme. Des propositions antérieures visant une alternance à ce poste entre officiers américains et européens se sont déjà heurtées à une résistance du même genre.(2)

Pourtant, un certain nombre de changements plus modestes permet-
traient d'avancer vers un accroissement des responsabilités européennes au sein de l'Alliance. Il a été proposé, par exemple, que le Commandant suprême des forces alliées en Europe (SACEUR) et le Commandement suprême allié de l'Atlantique (SACLANT) restent des officiers américains, et leurs adjoints des officiers européens, mais que le SACEUR et le SACLANT adjoints soient désignés par les membres de l'Union de l'Europe occidentale ou de l'Union européenne, ce qui serait un moyen de rapprocher le pilier européen de l'OTAN du commandement militaire de l'OTAN. Ces désignations seraient approuvées par le Conseil de l'Atlantique nord afin d'assurer la participation des pays de l'OTAN qui ne sont pas membres de l'UEO ou de l'UE. Les deux officiers européens pourraient aussi, logiquement, être les officiers du rang le plus élevé dans toute structure de défense de l'UEO ou de l'UE.

Selon cette nouvelle approche, si les Alliés décidaient d'engager, en dehors du cadre de l'Article 5, une mission à laquelle les Etats-Unis participeraient pleinement, c'est le SACEUR (ou le SACLANT) qui en serait responsable, comme ce serait le cas selon les procédures actuelles de l'OTAN. Les directives du Conseil seraient envoyées au SACEUR par l'intermédiaire du Comité militaire de l'OTAN, puis à un commandant des Groupes de forces interarmées multinationales par l'intermédiaire d'un Haut commandement subordonné.

Si le Conseil de l'Atlantique nord décidait que l'opération devrait être conduite en grande partie par les Alliés européens avec un soutien des Etats-Unis, le SACEUR (ou le SACLANT) adjoint assumerait la direction des opérations, en disposant pleinement des ressources de la structure de commandement intégrée.

Dans un troisième scénario, si le Conseil décidait que les Alliés européens devraient assumer pleinement la responsabilité de l'opération, à l'exclusion de tout rôle des Etats-Unis, le SACEUR (ou le SACLANT) adjoint prendrait sa fonction de commandement européenne (dans le cadre de l'UEO ou de l'UE) et dirigerait l'opération indépendamment du soutien des Etats-Unis ou de l'OTAN.

Une telle organisation permettrait aux Alliés européens d'assumer le leadership et les charges au sein de la structure de l'OTAN alors qu'ils n'auraient pas encore mis au point, dans le cadre de l'UEO ou de l'UE, une structure suffisante pour soutenir des opérations demandant beaucoup de moyens militaires. Si ce système fonctionnait, il pourrait servir à éviter les doubles emplois de structures et de ressources qui pourraient résulter de la création de capacités séparées de l'UEO et de l'UE. Par ailleurs, cette approche présenterait aussi l'avantage de ne pas perturber les relations de commandement normales du SACEUR adjoint ou du SACLANT adjoint avec les GFIM par l'intermédiaire d'un Haut commandement subordonné.
D'autres suggestions, plus modestes, relatives à un renforcement des rôles de commandement européens sont maintenant à l'étude, y compris l'idée de confier à un Européen le commandement des forces alliées du Sud Europe. Le SACLANT, le général Sheehan, a par ailleurs avancé d'intéressantes propositions visant à conférer une plus grande souplesse à la structure de commandement de l'OTAN. Dans le courant de cette année, les Alliés devraient commencer à examiner sérieusement toutes ces idées.


(1) L'Article 5 stipule que "Les parties conviennent qu'une attaque armée contre l'une ou plusieurs d'entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties..."
(2) Cf., par exemple, l'analyse de l'auteur dans The Future of US-European Security Coopération, CKS Report for Congress 92-907 S, 4 décembre 1992.

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