Revue de l'OTAN
Mise à jour: 24-Sep-2002 Revue de l'OTAN

Edition Web
Vol. 43- No. 3
Mai 1995
p. 30-33

La Cellule de coordination du Partenariat:
un nouvel acteur de l'évolution des relations entre l'OTAN et les pays partenaires

Général de division Gunnar Lange
Armée de terre du Danemark,
Directeur de la Cellule de coordination du Partenariat

La Cellule de coordination du Partenariat, à Mons, en Belgique, est un élément clé du programme de Partenariat pour la paix. Placée sous l'autorité du Conseil de l'Atlantique nord, elle a pour rôle de coordonner les efforts des pays partenaires pour rendre leurs structures militaires interopérables avec celles de /'OTAN dans les domaines du maintien de la paix, des missions humanitaires et des opérations de recherche et de sauvetage. Elle est également chargée de coordonner la planification initiale commune d'activités comme des stages de formation e' des sverrires.

La défense collective par les seize membres de l'Alliance nord-atlantique demeure la fonction essentielle de l'OTAN, mais les dangers qui menacent aujourd'hui leur sécurité et la stabilité de l'Europe tout entière sont plus divers et plus complexes que ceux auxquels l'OTAN a dû faire face pendant ses quatre premières décennies d'existence. L'Alliance en a donc conclu que dans ces conditions, elle a besoin de forces, structures et procédures lui permettant non seulement d'assurer la défense collective, mais aussi de réagir efficacement à des situations imprévues, parmi lesquelles sa participation à des opérations en faveur de la paix avec les forces de pays non-membres de l'OTAN, ainsi que sa contribution à une approche élargie des problèmes liés à la sécurité. Tel est le contexte dans lequel l'initiative du Partenariat pour la paix (PfP) a été lancée, en janvier 1994, lors du Sommet de Bruxelles.


Le PfP marque une évolution à la fois qualitative et quantitative de la coopération extrêmement fructueuse entre l'OTAN et les pays partenaires au sein du Conseil de coopération nord-atlantique (CCNA). Il a pour objectif d'étendre et d'intensifier la coopération politique et militaire et, de ce fait, de renforcer la stabilité comme indiqué dans le document cadre émis lors du Sommet. Les Etats participant au CCNA et d'autres pays membres de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) qui pouvaient et désiraient apporter leur contribution au programme ont été invités à rejoindre l'OTAN au sein du nouveau Partenariat. Dans le même temps, il fut indiqué que la participation au PfP jouerait un rôle important dans l'évolution du processus d'élargissement de l'OTAN.

Le PfP offre à l'OTAN et aux pays partenaires un large éventail de possibilités de coopérer - et avec l'adhésion récente de Malte, dernier pays en date à avoir signé (le 26 avril), on compte maintenant vingt-six pays partenaires.
L'objectif militaire fondamental du PfP est l'interopérabili-té entre les forces de l'OTAN et celles des pays du PfP dans un certain nombre de secteurs incluant, à court terme, des domaines comme le maintien de la paix, les opérations humanitaires, la recherche et le sauvetage, et d'autres encore, qui seront définis en fonction d'accords futurs. Pour coordonner cette énorme entreprise, il fallait une organisation centrale. Une des conséquences directes du Sommet de Bruxelles a été la création officielle de la Cellule de coordination du Partenariat (PCC) l'année dernière. Placée sous mon commandement, elle est installée à Mons, en Belgique. Elle a été inaugurée par le Secrétaire général délégué de l'OTAN, Sergio Balanzino, en avril 1994, dans un bâtiment situé à l'intérieur du Grand quartier général des puissances alliées en Europe (SHAPE). Elle a cependant déménagé peu de temps après, en raison de l'exiguïté des lieux, pour s'installer dans un bâtiment rénové tout proche. La Cellule cohabite donc avec le SHAPE, ce qui lui permet de trouver auprès de lui à la fois des informations au nom du CAE et le soutien technique et administratif nécessaire.

Le rôle de la Cellule est double: d'une part, elle est chargée de coordonner dans la pratique la satisfaction des besoins de chaque partenaire pour qu'il puisse adapter ses structures militaires et les rendre interopérables avec celles de l'OTAN; d'autre part, elle est chargée de la planification initiale conjointe d'activités comme l'entraînement et les exercices. La Cellule est perçue comme une locomotive qui dirige les activités du PfP grâce à une attitude de coopération très positive de tous les participants.

En ce qui concerne son organisation, la Cellule se divise en quatre éléments principaux: l'Etat-major permanent, les équipes de liaison des partenaires, les équipes de liaison de l'OTAN, et un officier d'Etat-major représentant le Commandement suprême allié de l'Atlantique (SACLANT).

Quinze pays partenaires ont, à ce jour, envoyé des officiers à la Cellule: L'Albanie, l'Autriche, la Bulgarie, l'Estonie, la Finlande, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Moldova, la Pologne, la République tchèque, la Roumanie, la Slovaquie, la Suède et l'Ukraine. D'autres pays, notamment la Géorgie, ont prévu de le faire ultérieurement. Tous les représentants ne relèvent que de leurs autorités nationales et transmettent directement à la Cellule les informations et décisions de leur pays. Pour la plupart, leurs familles sont installées soit dans des logements du SHAPE, soit dans la région de Mons. Ces officiers sont parrainés et aidés par des pays de l'OTAN et font intimement partie de la communauté unie et en rapide expansion de la cellule.

Exception faite de l'Islande, chacun des membres de l'OTAN est représenté au sein de la Cellule par un officier de liaison qui est le principal relais de l'information entre ces pays et les organes de la Cellule. Les équipes de liaison de l'OTAN sont constituées de membres des représentants militaires nationaux du SHAPE et sont pleinement informées des activités de leurs pays dans le cadre du PfP, que ce soit au sein de l'OTAN ou sur une base bilatérale.

Le directeur et le directeur adjoint de la Cellule sont nommés par le Conseil de l'Atlantique nord sur avis du Comité militaire. La Cellule comprend un état-major permanent constitué d'officiers venant de pays membres de l'Alliance et d'un représentant du SACLANT. Elle est la plaque tournante où se déroulent en permanence les actions de coordination et l'organe central de surveillance et d'évaluation des activités militaires dans le cadre du PfP.

Pour atteindre les objectifs du PfP, il faut qu'une organisation fournisse des directives et des orientations. Conformément à son mandat, la Cellule est placée sous l'autorité du Conseil. Son directeur lui rend compte, en général via le Comité militaire. La mise en œuvre des activités militaires prévues dans le cadre du PfP sont du ressort d'une part de l'OTAN et des pays partenaires et, d'autre part, de l'OTAN et des autorités militaires nationales. La Cellule coordonne cette exécution, mais n'a aucun pouvoir dans le cadre de cette mise en œuvre. Elle dépend essentiellement de la participation et de la contribution volontaire des pays, des grands commandements de l'OTAN et des autres organismes et autorités de l'OTAN.

Les tâches de la Cellule

La Cellule est chargée de diverses tâches, notamment:

  • Assurer la planification militaire nécessaire à la mise en œuvre des programmes du Partenariat;
  • Traiter des Programmes de partenariat individuels, qui présentent les besoins spécifiques d'un pays pour qu'il atteigne les objectifs définis par le Partenariat - au rythme et au degré que ledit pays détermine;
  • Garantir une bonne coordination, financièrement équilibrée, entre les contributions et les demandes;
  • Coordonner, contrôler et rendre compte des résultats des activités et exercices d'entraînement ou d'autres activités militaires agréées aux termes du programme de travail du Partenariat;
  • Analyser et évaluer les activités d'entraînement et des exercices organisés dans le cadre du PfP, de même que participer à l'établissement du programme de travail du PfP, ainsi qu'au processus de planification et d'évaluation des forces du PfP.

D'une façon générale, la tâche essentielle de la Cellule consiste donc à définir les besoins des partenaires et, en liaison avec les grands commandements de l'OTAN, à établir un programme de mise en œuvre reposant à la fois sur ces besoins, sur les propositions de l'OTAN contenues dans le programme de travail du Partenariat et sur les activités proposées par des pays de l'OTAN.

Il est évident que la Cellule aborde un domaine totalement nouveau quant aux activités de l'OTAN. En effet, les pays partenaires - et, dans une certaine mesure, les membres de l'OTAN - amorcent un changement d'orientation en matière de doctrine et de procédure qui diffère quelque peu de ce à quoi ils étaient habitués jusqu'ici. La Cellule vise donc à aider les pays partenaires à se développer le plus avantageusement possible et à exploiter au maximum leurs capacités. Cela concerne tout particulièrement les unités et le personnel dans le domaine de la formation de base et l'instruction spécialisée ainsi que l'établissement de normes de préparation au niveau des unités tactiques et opérationnelles. Dans le même temps, l'OTAN continue de s'occuper de ce qu'elle fait le mieux, se concentrant sur les questions de coopération et d'interopérabilité multinationales aux niveaux opérationnel et stratégique.
Une des exigences initiales du Conseil nord-atlantique était qu'au moins un exercice ait lieu, en 1994, dans le cadre du PfP. Or l'enthousiasme a été tel, parmi tous les partisans de l'initiative du PfP, qu'il y en a eu trois en plus des nombreux échanges et exercices bilatéraux ou multilatéraux. Le programme relatif aux exercices de 1995 a été arrêté et sa mise en œuvre vient de commencer après la récente approbation du Conseil. Il s'agit là d'un programme d'exercices ambitieux et motivant qui prévoit également des réunions de travail, des séminaires et des périodes d'étude permettant aux partenaires de s'initier aux techniques et aux procédures de l'OTAN.

Le programme des exercices du PfP prévus pour 1996 est en cours d'établissement dans le cadre d'un plan quinquennal qui définira le calendrier des exercices jusqu'au tournant du siècle. Il s'agit de veiller à ce qu'ils aient une pertinence militaire, à ce qu'ils aillent dans le sens de l'interopérabilité et à ce qu'ils favorisent la réalisation des objectifs définis dans le document cadre du PfP. Une approche graduée a été adoptée afin qu'une instruction et une préparation appropriées à tous les niveaux puissent précéder les exercices réels, qui constitueront un test plus probant.

Il est intéressant de noter, en ce qui concerne la mise en œuvre des exercices organisés dans le cadre du PfP, qu'il ne s'agit pas d'une tâche de l'OTAN, mais que c'est plutôt à chaque pays qu'il incombe d'entraîner ses unités. L'OTAN doit néanmoins indiquer les niveaux à atteindre afin que les différents pays connaissent très exactement les critères requis en matière d'entraînement. Des travaux sont également en cours en vue de mettre en place une base de données qui permettra à la Cellule de coordonner l'activité militaire avec efficacité et à un coût réduit. Par ailleurs, le Cycle de planification des forces du PfP est lui aussi en cours de mise en place. Il constituera une base d'identification et d'évaluation des forces et capacités susceptibles d'être mises à disposition par des pays partenaires en vue d'entraînement, d'exercices et d'opérations avec des forces de l'Alliance. Là encore, l'accent est mis sur l'interopérabilité dans les domaines du maintien de la paix, des missions humanitaires et des opérations de recherche et de sauvetage.

La Cellule de planification est financée par les seize pays membres de l'OTAN. Toutes les équipes de liaison des partenaires ayant des bureaux dans les locaux de la Cellule, à Mons, la remboursent en payant un loyer. Le budget est soumis au processus d'examen et d'approbation habituel du Conseil de l'Atlantique nord. Bien qu'elle ne fasse pas partie du groupe budgétaire du Commandement des forces alliées en Europe, la Cellule recourt aux services de la division du budget et des finances du SHAPE pour préparer et présenter son budget annuel. L'exercice 94, celui de sa création, et l'exercice 95, le premier qui couvrira une année entière, sont considérés, sur le plan budgétaire, comme des exercices de transition. L'étendue de la mission de la Cellule de coordination et les modalités précises de son fonctionnement ne seront vraiment définies qu'une fois que son mandat aura été revu, fin 95, et que les questions de tableau d'effectifs auront été réexaminées, en 1996. Le premier budget reflétant l'intégralité des dépenses de la Cellule sera donc sans doute celui qui sera proposé et approuvé pour 1997.

L'objectif militaire identifiable du PfP est celui de l'inter-opérabilité des forces de l'OTAN et des pays partenaires dans les trois domaines précédemment indiqués (maintien de la paix, missions humanitaires et opérations de recherche et de sauvetage) et dans d'autres domaines qui pourront être agréés ultérieurement. Pour pouvoir y parvenir, il faut que la documentation, plus particulièrement en ce qui concerne les procédures de commandement, soit transmise aux partenaires. Or certains ont cru -et croient encore, dans de nombreux domaines - que seules des informations non classifiées pourraient leur être fournies. Il y a peu de chances que la documentation de ce type soit d'une grande utilité dans la recherche de l'interopérabilité. Il est donc prévu dans le règlement du Partenariat, et dans l'esprit même de cette initiative, que certains documents qui, jusque là, avait une classification OTAN, puissent recevoir la classification PfP. La question clé que les auteurs d'un document doivent se poser est la suivante: "L'information demandée par nos partenaires peut-elle favoriser la progression vers l'interopérabilité?" Si la réponse est affirmative, la classification appropriée doit alors être appliquée, mais avec le préfixe "PfP" et non "OTAN". Le document demeure un document d'accès restreint de l'OTAN, mais l'OTAN choisit de le partager avec ses partenaires.

La Cellule est une organisation caractérisée par son évolution rapide. Directement placée sous l'égide du Conseil de l'Atlantique nord, elle fait déjà beaucoup en tant qu'organe de liaison entre l'OTAN et les pays partenaires. Elle constitue un point de rencontre unique pour l'Alliance et ses partenaires, les grands commandements de l'OTAN, et des éléments d'Etat-major. Bref, c'est un nouvel acteur qui joue un rôle important dans l'évolution des relations entre l'OTAN et les pays partenaires.