Revue de l'OTAN
Mise à jour: 11-Sep-2002 Revue de l'OTAN

Edition Web
Vol. 43- No. 2
Jan. 1995
p. 7-11

L'UEO et l'OTAN:
perspectives de rééquilibrage de leurs relations

Hans van Mierlo
Ministre des Affaires étrangères des Pays-Bas

L'OTAN et l'UEO peuvent toutes deux jouer un grand rôle dans l'intégration de l'Europe centrale et orientale au sein des structures de sécurité occidentales, processus qui passe impérativement par l'établissement des relations appropriées avec des partenaires comme la Russie et l'Ukraine. Ces événements auront également des incidences sur les rapports entre les pays européens et sur les relations transatlantiques, ïout en restant convaincus que la présence des Etats-Unis et du Canada demeure indispensable, les Européens veulent faire plus pour assurer leur sécurité et s'efforcent de renforcer le pilier européen de l'Alliance en accroissant les capacités opérationnelles européennes. Ce nouvel équilibre entre les piliers européen et américain devrait peut-être s'exprimer à travers un "Contrat atlantique" qui pourrait transcender la coopération politico-militaire en prenant en compte d'autres éléments du vaste éventail des intérêts stratégiques communs.

Membre actif de l'Union de l'Europe occidentale (UEO) depuis sa création, les Pays-Bas ont eu l'occasion de participer d'encore plus près aux travaux de l'organisation en assurant la présidence de l'UEO durant le deuxième semestre de 1994. Nous venons de passer le flambeau à nos amis portugais, qui assument cette responsabilité pour la première fois.

J'aimerais entrer dans le détail de notre position vis-à-vis de l'UEO et envisager son avenir, notamment en ce qui concerne ses relations avec l'OTAN. Permettez-moi de commencer par quelques observations sur l'évolution de la configuration de sécurité en Europe.

La conception de la structure de sécurité européenne est une question de toute première importance, puisqu'elle est au cœur même de la sécurité du Continent. Il s'agit d'un cadre complexe, au sein duquel les différents acteurs de la sécurité européenne occupent des places bien spécifiques, ce qui fait que tout changement nécessite un examen approfondi. En fait, ce problème est une priorité sur le calendrier international, surtout depuis l'ouverture du débat sur l'élargissement des institutions de sécurité d'Europe occidentale.

Sur le plan de la sécurité, une étape importante a été franchie lors du Sommet de l'OTAN de janvier 1994, au cours duquel nous avons réaffirmé l'ouverture de l'OTAN à l'adhésion d'autres pays européens et lancé le Partenariat pour la paix. Ce programme invite les partenaires à travailler aux côtés de l'Alliance dans le cadre de nouveaux efforts politiques et militaires. En décembre dernier, nous avons donné un tour plus concret à ces perspectives d'adhésion en entamant une nouvelle étude OTAN sur l'élargissement, sur les principes qui régiront ce processus et sur les implications de l'appartenance à l'Alliance.
Au niveau économique et politique, l'Union européenne a ouvert une perspective d'intégration à un certain nombre de pays d'Europe centrale et de la Baltique qui ont signé ou sont sur le point de signer des "Accords européens".

Il est important que ces différents processus se déroulent en parallèle, car les intégrations économique, politique et militaire sont étroitement liées et deviennent, en fait, quasiment indivisibles. A cet égard, la question délicate, sur le plan politique, de l'accession des pays candidats individuellement ou par lots successifs devra être examinée.

Ces perspectives d'intégration croissantes favoriseront sans nul doute un sentiment de plus grande sécurité au sein des Etats candidats et contribueront à rassurer les électeurs de ces pays sur le bien-fondé du choix de leurs gouvernements, à savoir l'intégration aux structures de l'Europe occidentale.
Dans le même temps, il devient cependant également évident que ces différents processus d'intégration, et notamment l'élargissement de l'OTAN, ne peuvent être réussis - c'est-à-dire renforcer la sécurité et la stabilité dans l'ensemble de l'Europe - que s'ils vont de pair avec l'instauration de relations appropriées avec la Russie, l'Ukraine et, le cas échéant, le Bélarus.

Pour faire entrer ces pays dans nos réseaux, nous devrions utiliser à la fois des voies bilatérales et multilatérales. Je pense en particulier aux Accords de partenariat et de coopération avec l'Union européenne, au Conseil de coopération nord-atlantique (CCNA), au Partenariat pour la paix et au "dialogue élargi" entre la Russie et l'OTAN, qui devrait se transformer en coopération totale. Par ailleurs, il serait possible de mieux exploiter les approches régionales et sous-régionales offertes par l'OCSE.(1) L'initiative récente de la Russie, qui a engagé des discussions avec l'OCSE sur un Modèle de sécurité européenne pour le XXIe siècle, est pour nous une bonne occasion de coopérer activement et dans un esprit d'ouverture.
Dans ce contexte, nous devrions poursuivre vigoureusement nos efforts en vue de convaincre la Russie que l'élargissement de l'OTAN (ou encore de l'Union européenne ou de l'UEO) n'est dirigé contre aucun pays. A cet égard, l'Alliance devrait d'ailleurs essayer, notamment en Russie, d'améliorer l'image qu'ont d'elle la population et les autorités en créant un bureau d'information sur l'OTAN.

De surcroît, je suis persuadé qu'il serait très nettement dans l'intérêt des candidats à l'adhésion, d'Europe centrale et de la Baltique, d'établir des relations de voisinage étroites et transparentes avec la Russie, l'Ukraine et le Bélarus. Autrement dit, nous devons convaincre ces trois pays que de "nouvelles lignes de division", si elles sont perçues comme telles, ne sont en fait que des formes différentes d'intégration qui n'excluent ni une coopération renforcée dans le présent ni des accords plus étroits dans l'avenir. Notre approche est inclusive, et non exclusive.

L'UEO et l'Europe centrale et orientale

L'OTAN et l'UEO doivent toutes deux contribuer à faciliter l'intégration en douceur des pays d'Europe centrale et orientale dans les structures de sécurité occidentales. En ce qui concerne l'UEO, c'est sous la présidence néerlandaise qu'a été instauré le statut d'"associé partenaire", qui a été proposé à neuf pays d'Europe centrale et de la Baltique lors de la réunion ministérielle du Kirchberg, à Luxembourg, en mai dernier. Et je pense que nous avons obtenu quelques résultats remarquables lors du Conseil des ministres de l'UEO à Noordwijk, aux Pays-Bas, au mois de novembre.

Tout d'abord, nous avons engagé, avec la participation des associés partenaires, une large réflexion sur la nouvelle situation européenne en matière de sécurité. Elle pourrait, à terme, déboucher sur la rédaction d'un Livre blanc sur la sécurité européenne, ainsi que cela a été suggéré par la France. C'est la première occasion, pour ces pays, d'avoir une influence directe sur la définition d'une politique européenne de sécurité. Ce processus devrait faire naître des perceptions communes qui aboutiront à un alignement progressif de nos orientations respectives en matière de sécurité.

Deuxièmement, nous avons approuvé un document contenant des conclusions préliminaires sur la définition d'une Politique européenne de défense commune (PEDC). Ce document n'est qu'une première étape, puisqu'il entend servir de fondement aux travaux ultérieurs relatifs à la mise en œuvre d'une politique européenne de défense. Il en indique la portée et les objectifs, et énumère un certain nombre d'éléments d'une PEDC - les acquis, en quelque sorte - qui ont déjà été définis au sein de l'UEO, de l'Union européenne et de l'OTAN. Sur cette base, ce document identifie divers domaines qui devraient être examinés dans des délais assez brefs afin que l'UEO puisse devenir une organisation de sécurité souple et opérationnelle, susceptible de réagir rapidement. La plus grande partie de ce texte est donc consacrée aux mesures visant à renforcer le rôle opérationnel de l'UEO. Dans ce contexte, le concept de Groupes de forces interarmées multinationales (GFIM) est d'une importance cruciale.

Les associés partenaires ont été informés de l'avancement de la réflexion à divers stades de la rédaction du document, et ils ont pris part aux délibérations finales.

Troisièmement, à Noordwijk, nous avons discuté de l'éventuelle participation des pays d'Europe centrale et de la Baltique aux activités opérationnelles de l'UEO. Leurs propositions vont désormais être prises en compte, au cas par cas, afin qu'ils soient inclus dans nos plans de déploiement et de rotation. Cela élargit les possibilités offertes à ces pays de participer aux missions ne relevant pas de l'Article V du Traité de Bruxelles modifié, également dites "missions de Petersberg", comme des opérations d'assistance humanitaire, de maintien de la paix et de gestion des crises. Cette initiative constitue un intéressant effort de l'UEO pour compléter les activités de l'OTAN dans le cadre du Partenariat pour la paix.

Enfin, l'UEO débat à l'heure actuelle des moyens de nouer des relations plus étroites avec la Russie et l'Ukraine. Nous établirons sans doute bientôt des contacts réguliers et intensifiés avec ces deux pays, ce qui permettra d'instaurer des dialogues durables en matière de sécurité, sur des questions d'intérêt commun.

Les relations entre l'OTAN et l'UEO

L'Europe devrait, selon moi, assumer plus largement la responsabilité de sa sécurité et de celle de ses alliés. Elle devrait continuer, peu à peu, à mettre au point une politique de défense européenne assurant une participation européenne à la défense collective, dans une mesure correspondant à son importance, ainsi qu'un engagement actif dans la prévention des conflits et la gestion des crises en Europe ou ailleurs. Telle est l'évolution logique des choses, considérant les conditions nouvelles de la sécurité européenne et le poids économique et politique de ce continent dans les relations internationales. Ces conditions justifient une nouvelle évaluation de l'interprétation du partage des charges. En fait, l'objectif d'un juste équilibre intérieur au sein de l'Alliance a été défini dans la Déclaration du Sommet de l'OTAN de janvier 1994, lorsqu'elle parle de l'émergence de l'identité européenne de sécurité et de défense et de renforcement du pilier européen de l'Alliance par le biais de l'UEO. Une des conditions importantes de la création de ce nouvel équilibre est le renforcement de ses capacités opérationnelles. L'UEO, ou des "coalitions d'hommes de bonne volonté" au sein de l'UEO (ce qui pourrait inclure des Etats non-membres), devrait pouvoir mener des opérations liées à la sécurité en Europe et à la protection de ses intérêts dans d'autres régions. Et il est clair que le meilleur moyen d'y parvenir consiste à mettre en œuvre le concept de Groupes de forces interarmées multinationales, qui permettrait d'utiliser la structure militaire intégrée de l'OTAN et d'autres capacités nationales avec une certaine souplesse. L'UEO s'est déjà exprimée au sujet du concept de GFIM, et j'espère que l'approfondissement de ce concept aura progressé de façon satisfaisante d'ici à la réunion du Conseil de l'Atlantique nord à Noordwijk en mai 1995. Pour moi, si la solution du problème des GFIM est déterminante en ce qui concerne la crédibilité du rôle opérationnel de l'UEO et même de l'OTAN, elle constitue aussi un test pour les relations entre ces deux organisations.

Tout cela indique que les Européens veulent en faire plus pour assurer leur sécurité. Comme je l'ai déjà mentionné, cela correspond à notre objectif de renforcement du pilier européen de l'Alliance en augmentant les capacités opérationnelles de l'Europe. Cela pourrait cependant aussi laisser penser que nous pourrions aisément nous passer de nos alliés nord-américains. Or il n'en est rien. Un des enseignements tirés de l'effort international entrepris en Yougoslavie est justement que l'Europe ne peut agir seule. Il ne fait nul doute que nous continuerons d'avoir besoin de l'engagement et du soutien de nos alliés transatlantiques pour maintenir et rétablir la paix au sein de notre continent et au-delà. Tant d'un point de vue politique que du point de vue de l'efficacité opérationnel le, la participation des Etats-Unis et du Canada aux affaires de sécurité en Europe et alentours demeure impérative.
Nous devons donc pouvoir encore compter sur le soutien de ces deux pays. Mais d'après le débat politique qui s'y est engagé sur la réévaluation des intérêts de sécurité nord-américains, il apparaît que l'Europe ne pourra s'assurer la poursuite de l'engagement nord-américain que si elle joue elle-même un plus grand rôle, tant dans sa défense collective qu'en matière de gestion des crises. C'est pourquoi je pense que l'UEO devrait évoluer en une organisation opérationnelle plus forte, suffisamment équipée pour prendre des mesures immédiates en cas de crise.

A cette fin, elle devrait continuer de développer son potentiel opérationnel, y compris dans le domaine des opérations civilo-mili-taires conjointes. Elle mène d'ailleurs actuellement de telles opérations, avec un très grand succès, dans l'ex-Yougoslavie. Je veux parler de la mission de douane sur le Danube, qui aide les Etats riverains à appliquer les sanctions commerciales contre la Serbie et le Monténégro, ainsi que de la mission de police de l'UEO à Mostar. Ce type d'activité présentant des aspects non militaires, l'UEO envisage maintenant d'introduire un élément mixte civilo-militaire dans son processus de planification. En outre, à Noordwijk, elle a fait les premiers pas vers la création d'une force d'intervention humanitaire qui pourrait intervenir lors d'opérations de secours et d'évacuation.

Cependant, l'UEO devrait aussi se doter progressivement de capacités de maintien de la paix et de moyens de gestion des crises renforcés. Pour cela, elle pourrait s'appuyer sur les Forces relevant de l'UEO (FRUEO). D'où l'importance de développer ses capacités en parallèle avec l'élaboration du concept de GFIM.

Dans le même temps, nous devons poursuivre le renforcement de l'OTAN, notamment aux fins des opérations qu'elle est le mieux à même de mener, à savoir celles qui se situent dans le haut du spectre. Si elles suivaient cette approche complémentaire, l'OTAN comme l'UEO devraient être en mesure d'entreprendre des opérations séparément, ensemble ou selon d'autres configurations ad hoc, en fonction de chaque cas.

Modifier l'Union européenne

Je me limiterai ici à dire quelques mots des conséquences possibles, y compris pour l'Alliance, de la révision prochaine dans le cadre de l'Union européenne. En effet, en 1996 aura lieu, par le biais de la Conférence intergouvernementale (CIG), la révision du Traité de Maastricht sur l'Union européenne, révision qui aura des répercussions sur l'UEO. Qui plus est, l'UEO elle-même révisera sa propre Déclaration de Maastricht. Il reste à voir si cette conférence se soldera par l'intégration pleine et entière de l'UEO au sein de l'Union Européenne (en annexe au deuxième pilier, la PESC, ou au titre de quatrième pilier, totalement nouveau). Mais il est probable qu'elle aboutisse à quelque forme institutionnalisée d'intégration plus poussée de l'UEO au sein de l'UE. Cela aura de toute évidence des incidences sur le cadre institutionnel de l'identité européenne de sécurité et de défense qui est en train d'émerger, laquelle sera alors centrée sur la nouvelle "Union européenne renforcée".
Mars 1995

L'intégration de l'UEO au sein de l'Union européenne, sous quelque forme que ce soit, soulève diverses questions.

  1. Devrait-il y avoir une garantie de sécurité du type UEO dans le Traité de Maastricht révisé? Si oui, comment résoudre la question des membres de l'UE qui n'appartiennent pas à l'UEO (les actuels observateurs de l'UEO)? Ou, s'agissant de la défense collective de l'UE, devrions-nous rendre l'UE et l'OTAN directement interdépendantes en renvoyant au Traité de Washington? Dans ce cas, que faire des Etats qui sont membres de l'UE ou de l'OTAN, mais pas des deux?

  2. Devrait-il y avoir une clause sur les missions de Petersberg, ce qui impliquerait une extension de la solidarité politique actuelle dans des actions communes en matière de prévention des conflits et de gestion des crises à une dimension militaire explicitement prévue par le traité?

  3. Dans le même ordre d'idées, faut-il une clause afférente aux forces relevant de l'Union européenne (qui prendraient la succession des FRUEO?)

En fait, ces questions impliqueraient la définition par l'Union européenne d'une PESC et d'une Politique européenne de défense commune (PEDC) cohérentes, comme l'indique l'Article J.4 du Traité de Maastricht. Cela soulève également la question de la mesure dans laquelle ces politiques devraient demeurer strictement consensuelles ou de la possibilité d'y apporter des aménagements.

Les prochaines phases de préparation de cet ensemble de politiques cohérentes ne seront pas simples. Je pense en particulier à la
position des membres de l'OTAN qui font partie de l'Europe, mais pas de l'UE, et notamment de la Turquie, de la Norvège et de l'Islande. Par le biais de leur statut de membre associé au sein de l'UEO, ils participent pleinement à l'élaboration d'une PEDC. Et si l'UEO intègre peu à peu l'Union, en entraînant par la suite une intégration progressive de la Politique étrangère et de sécurité commune et de la Politique européenne de défense commune, le fait que ces pays ne participent pas à la PESC pourra faire de la définition de ces politiques un véritable défi.

En ce qui concerne les neuf associés partenaires de l'UEOd'Europe centrale et de la Baltique, on peut s'attendre à ce qu'ils soient de plus en plus impliqués dans les processus de définition des politiques au sein de l'UEO tout en ayant devant eux la perspective d'une accession de plein droit à l'UE et, par conséquence, d'une participation à la conception d'une PESC et d'une PEDC au sein de celle-ci.

Vers une nouvelle relation atlantique?

Comme nous venons de le voir, la configuration européenne de sécurité connaît actuellement une réorientation cruciale. Après la disparition du Pacte de Varsovie, les organisations de sécurité occidentales ont engagé un processus d'élargissement graduel. Il débouchera sur une plus grande stabilité économique et politique en Europe, à condition que nous procédions avec prudence et, dans le même temps, que nous réussissions à établir en parallèle de véritables dialogues et des relations de coopération avec la Russie et l'Ukraine et, le cas échéant, avec le Bélarus.

Il va sans dire que ces événements auront des conséquences tant sur les relations entre les pays européens que sur les relations transatlantiques au sein de l'Alliance, autrement dit sur les rapports entre l'Union européenne "renforcée" et l'Amérique du nord.

On peut se demander s'il ne conviendrait pas de formuler un quelconque "Contrat ou Accord atlantique" afin de définir l'équilibre entre les piliers européen et atlantique de l'OTAN et de mieux refléter le nouveau partage des charges au sein de l'Alliance. Un tel accord devrait sans nul doute inclure une disposition relative au rapport entre les garanties contenues dans le Traité de Washington et celles du Traité de Maastricht révisé dont il a été question précédemment. En outre, il devrait inclure des clauses sur les GFIM, ce qui assurerait la capacité opéra-tionelle de l'"Union européenne renforcée".
Une question annexe concerne, dans le contexte des conditions nouvelles de la sécurité européenne, la nécessité ou non de limiter ce contrat aux seules relations de sécurité transatlantiques. Je pense ici à l'intervention plutôt provocante, mais aussi passionnante, de Christoph Bertram, rédacteur en chef du journal Die Zeit, lors de la 40è assemblée générale de l'Association du Traité atlantique à la Haye, le 26 octobre 1994. Sa suggestion d'élargir le cadre des relations entre les piliers européen et transatlantique de l'OTAN pourrait être intéressante. Comme il l'a dit: "Nous ne pouvons plus nous permettre de laisser les relations Etats-Unis/Europe entre les mains des ministres des Affaires étrangères et de la défense ou des chefs d'état-major: il faut réunir les ministres de la santé, du travail, des affaires sociales et de l'environnement. Si ces derniers n'ont rien à se dire, les premiers ne tarderont pas, dans leur sillage, à ne plus avoir de calendrier commun."

En effet, le Contrat atlantique dont j'ai parlé pourrait très bien transcender la coopération politico-militaire et être une base nouvelle de relations élargies entre l'Union européenne et l'Amérique du nord. Considérant le vaste éventail des intérêts stratégiques conjoints - Bertram en mentionne quelques-uns d'une grande importance - le Contrat atlantique devrait prévoir des rencontres ayant pour objet de donner forme à une relation transatlantique renforcée.
Tout en entamant une étude en vue de préparer l'élargissement à une échéance appropriée, l'OTAN devrait réfléchir à ses orientations fondamentales et à ses structures centrales afin d'établir un nouvel équilibre entre ses constituants d'Europe et d'Amérique. Ce serait un moyen de conférer un sens nouveau au rôle de l'OTAN comme premier forum de consultation entre ses membres et l'occasion d'arrêter des politiques sur la base des engagements des Alliés en matière de sécurité et de défense aux termes du Traité de l'Atlantique nord. Un Contrat atlantique pourrait alors être le cadre d'un partenariat transatlantique de plus grande portée.


(1) La Conférence sur la Sécurité et la Coopération en Europe (CSCE)a été rebaptisée Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe, ou OCSE, lors du récent sommet de Budapest