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Mise jour: 03-Feb-2003 Publications OTAN

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Chapitre 2: La transformation de l'Alliance
Le Concept stratégique de l'Alliance

Lors du Sommet de Washington en avril 1999, les pays de l'OTAN ont approuvé une stratégie destinée à mettre l'Alliance en mesure de répondre aux problèmes de sécurité et aux possibilités qui se présenteront au XXIe siècle ainsi qu'à guider son évolution politique et militaire future.

Le Concept stratégique actualisé apporte des directives générales pour l'élaboration de politiques et de plans militaires détaillés. Il décrit l'objectif et les tâches de l'Alliance et examine ses perspectives stratégiques compte tenu de l'environnement stratégique en évolution ainsi que des défis et des risques pour la sécurité. Le Concept énonce l'approche de la sécurité au XXIe siècle adoptée par l'Alliance, en réaffirmant l'importance du lien transatlantique et du maintien des capacités militaires de l'Alliance. Il examine le rôle d'autres éléments clés de l'approche globale en matière de stabilité et de sécurité de l'Alliance, à savoir l'Identité européenne de sécurité et de défense; la prévention des conflits et la gestion des crises; le Partenariat, la coopération et le dialogue; l'élargissement; la maîtrise des armements, le désarmement et la non-prolifération. Le Concept donne aussi des orientations pour les forces de l'Alliance fondées sur les principes de la stratégie de l'Alliance et les caractéristiques de son dispositif de forces. Cette partie comprend des sections traitant des missions des forces militaires de l'Alliance et des orientations pour son dispositif de forces, ainsi que des caractéristiques des forces conventionnelles et nucléaires.

Le Concept stratégique a été publié pour la première fois en 1991. La nouvelle version, celle de 1999, comme la précédente, est l'énoncé officiel des objectifs de l'Alliance et fournit, au plus haut niveau, des orientations concernant les moyens politiques et militaires devant permettre d'y parvenir.

La stratégie de l'OTAN a été initialement formulée sous le nom de "Concept stratégique pour la défense de la zone de l'Atlantique Nord". Elaboré entre octobre 1949 et avril 1950, ce Concept exposait une stratégie d'opérations de grande envergure pour la défense de territoires. Au milieu des années 50 fut établie la stratégie des "représailles massives". L'accent y était mis sur la dissuasion, l'OTAN menaçant de riposter à toute agression contre ses pays membres par tous les moyens à sa disposition, dont, en particulier, les armes nucléaires.

L'étude d'éventuels changements à apporter à cette approche stratégique a commencé vers la fin des années 50 et s'est poursuivie jusqu'en 1967, année pendant laquelle, après un débat intense au sein de l'Alliance, les "représailles massives" furent remplacées par la stratégie de la "riposte graduée". Il s'agissait essentiellement d'offrir à l'OTAN les avantages de la souplesse et de la possibilité de créer une incertitude dans l'esprit de tout agresseur potentiel quant à la riposte de l'OTAN en cas de menace pour la souveraineté ou l'indépendance de l'un quelconque de ses pays membres. Le Concept avait pour but de faire en sorte que toute forme d'agression soit perçue comme comportant des risques inacceptables.

Ces stratégies étaient énoncées dans des documents classifiés qui fournissaient des orientations pour les gouvernements et des éléments de référence pour les activités de planification militaires. Ces documents n'étaient pas destinés au grand public. Si les Concepts de base étaient bien connus, il n'était guère possible d'en débattre les détails en public, car leur efficacité dépendait largement du secret qui les entourait. Ils reflétaient les réalités de la Guerre froide, la division politique de l'Europe et la situation conflictuelle idéologique et militaire qui a caractérisé les relations Est-Ouest pendant de longues années.

Cependant, alors que la Guerre froide se poursuivait, l'Alliance a également cherché à en réduire les dangers et à jeter les bases de progrès dans le sens d'une relation plus positive avec l'Union soviétique et les autres membres du Pacte de Varsovie. Le Rapport Harmel, publié en 1967, a ainsi fait de la défense et du dialogue, y compris la maîtrise des armements, les deux piliers de l'approche de l'Alliance en matière de sécurité.

Avec la fin de la Guerre froide, la situation politique en Europe et la situation militaire générale se sont trouvées transformées. Un nouveau Concept stratégique a pris forme au cours des deux années qui ont suivi la chute du . Il a été débattu et analysé au sein de l'Alliance avant d'être mis Mur de Berlin au point en novembre 1991. Assez éloigné des Concepts précédents, il privilégiait la coopération avec les anciens adversaires, au lieu de la confrontation. La sécurité des pays membres restait l'objectif fondamental de l'OTAN, mais venait s'y ajouter l'obligation spécifique d'œuvrer dans le sens d'une amélioration et d'un élargissement de la sécurité de l'Europe tout entière. A d'autres égards aussi, le Concept stratégique de 1991 présentait des différences spectaculaires par rapport aux Concepts précédents : il était publié, dans un document pouvant faire l'objet de débats et de commentaires des parlements, des spécialistes de la sécurité, des journalistes et du grand public.

En 1997, les dirigeants des pays de l'OTAN ont estimé qu'il fallait réexaminer le Concept et l'actualiser pour prendre en compte les changements intervenus en Europe depuis son adoption, tout en confirmant l'attachement de l'Alliance à la défense collective et au lien transatlantique et en faisant en sorte que la stratégie de l'OTAN soit pleinement adaptée aux défis du XXIe siècle. Des travaux intensifs ont été entrepris dans tous les pays de l'Alliance afin que la version révisée du Concept soit achevée pour le Sommet de Washington.

Comme pour tous les autres sujets traités par l'Alliance, l'approbation du Concept exigeait un consensus de tous les pays membres, sur le fond comme sur la forme du document. Dans le contexte de l'adhésion de trois nouveaux pays membres, des représentants de la Hongrie, de la Pologne et de la République tchèque ont assisté aux débats dès leur début.

Le Concept de 1999 confirme que l'objectif essentiel et immuable de l'Alliance est de sauvegarder la liberté et la sécurité de ses membres par des moyens politiques et militaires. Il réaffirme les valeurs que constituent la démocratie, les droits de l'homme et la primauté du droit et exprime l'engagement des Alliés non seulement à se défendre mutuellement mais également à contribuer à la paix et à la stabilité dans toute la région euro-atlantique.

La stratégie définit également les tâches fondamentales de l'Alliance en matière de sécurité, tant en ce qui concerne la défense collective, qui est l'essence même de l'Alliance depuis sa création, qu'en ce qui concerne les nouvelles activités dans les domaines de la gestion des crises et du Partenariat que l'Alliance entreprend en vue de renforcer la sécurité et la stabilité dans la région euro-atlantique.

Le Concept décrit l'environnement stratégique et évalue les risques et les défis qui pourraient menacer la sécurité. Il constate que ces dernières années ont été marquées par un changement constant mais généralement positif, et que l'Alliance a joué un rôle essentiel dans le renforcement de la sécurité euro-atlantique depuis la fin de la Guerre froide.

En ce qui concerne les risques, le document réaffirme les conclusions du Concept stratégique de 1991, à savoir que la menace d'une guerre générale en Europe a pratiquement disparu, mais que les membres de l'Alliance et d'autres Etats de la région euro-atlantique doivent affronter d'autres risques et incertitudes comme les conflits ethniques, les violations des droits de l'homme, l'instabilité politique, la fragilité économique, et la prolifération des armes nucléaires, biologiques et chimiques et de leurs vecteurs.

L'une des caractéristiques principales de la stratégie de l'Alliance de 1991 était sa définition d'une approche large de la sécurité, englobant des moyens politiques et militaires complémentaires et mettant l'accent sur la coopération avec d'autres Etats partageant les objectifs de l'Alliance. Cette approche globale demeure un trait marquant du nouveau Concept stratégique et comprend les éléments essentiels suivants :

La préservation du lien transatlantique : le Concept stratégique affirme que la sécurité de l'Europe et celle de l'Amérique du Nord sont indivisibles et souligne par conséquent l'importance d'un Partenariat fort et dynamique entre l'Europe et l'Amérique du Nord.

Le maintien de capacités militaires efficaces : la stratégie insiste sur l'existence de capacités militaires efficaces dans toutes les circonstances prévisibles, de la dissuasion et de la défense collective aux opérations de réponse aux crises. Le Concept stratégique fournit également des orientations spécifiques sur les capacités nécessaires.

Le développement de l'Identité européenne de sécurité et de défense au sein de l'Alliance : le Concept stratégique confirme que l'Identité européenne de sécurité et de défense continuera à être développée au sein de l'Alliance sur la base des décisions prises par les Ministres des affaires étrangères de l'Alliance à Berlin en 1996 et par la suite. Ce processus exigera une coopération étroite entre l'OTAN, l'Union de l'Europe occidentale et, lorsqu'il y aura lieu, l'Union européenne. (1)

Tous les Alliés européens pourraient ainsi apporter une contribution plus cohérente et plus efficace aux missions et activités de l'Alliance. Le Concept renforcera le Partenariat transatlantique et aidera les Alliés européens à agir eux mêmes selon les besoins par ce que l'Alliance sera prête à mettre ses moyens et capacités à disposition, au cas par cas et par consensus, pour des opérations dirigées par des Européens dans lesquelles elle ne serait pas engagée militairement, en tenant compte de la pleine participation de tous les Alliés européens, si ceux-ci faisaient un choix dans ce sens.

La prévention des conflits et la gestion des crises : le Concept attribue un rôle important à l'Alliance dans la prévention des conflits et la gestion des crises, étant donné que des opérations de réponse aux crises comme celles menées en Bosnie et au Kosovo risquent de demeurer un aspect clé de la contribution de l'OTAN à la paix et à la sécurité euro-atlantique.

Le Partenariat, la coopération et le dialogue : l'accent est mis sur la détermination de l'Alliance à poursuivre sa politique établie depuis longtemps déjà de Partenariat, de coopération et de dialogue avec tous les pays démocratiques de la région euro-atlantique, dans le but de préserver la paix, de promouvoir la démocratie et de contribuer à la prospérité et au progrès. Cette action vise à renforcer la sécurité de tous, n'exclut personne, et aide à surmonter les divisions qui pourraient déboucher sur des conflits. Les principaux instruments de cette politique demeurent le Conseil de Partenariat euro-atlantique, le Partenariat pour la paix, les relations spéciales avec la Russie et l'Ukraine et le Dialogue méditerranéen.

L'élargissement : le Concept confirme l'ouverture de l'Alliance à l'adhésion de nouveaux membres, conformément à l'article 10 du Traité de Washington, et réaffirme que l'OTAN compte lancer de nouvelles invitations dans les années à venir.

La maîtrise des armements, le désarmement et la non-prolifération : finalement, le Concept stratégique énonce la politique de soutien de l'Alliance à la maîtrise des armements, au désarmement et à la non-prolifération. Il souligne l'intention de l'Alliance de continuer à veiller à ce que ses objectifs en matière de sécurité et en matière de défense restent en harmonie et affirme également qu'elle cherchera à accroître la sécurité et la stabilité au niveau de forces le plus bas qui puisse être atteint tout en maintenant sa capacité d'accomplir la gamme complète de ses missions.

La dernière partie du Concept stratégique fixe des orientations pour les forces de l'Alliance, en traduisant les objectifs et les tâches des sections précédentes en instructions pratiques (bien que nécessairement générales) destinées aux planificateurs des forces et des opérations de l'OTAN. La stratégie fixée prévoit la poursuite de la mise en place des capacités militaires requises pour l'accomplissement de toute la gamme des missions de l'Alliance, de la défense collective au soutien de la paix et à d'autres opérations de réponse aux crises.

Parmi les capacités mises en relief comme particulièrement importantes figurent un potentiel efficace de prise à partie de forces adverses, l'aptitude au déploiement et la mobilité, la surviabilité des forces et des infrastructures, la durabilité et l'interopérabilité, y compris l'interopérabilité avec les forces de pays partenaires. En outre, la stratégie souligne le rôle indispensable que les forces de l'Alliance jouent dans la prise en compte des risques associés à la prolifération des armes nucléaires, biologiques et chimiques et de leurs vecteurs.

Le Concept stratégique stipule également que l'Alliance conservera dans un avenir prévisible une combinaison appropriée de forces nucléaires et de forces conventionnelles basées en Europe et maintenues à jour, le cas échéant, au niveau minimum suffisant.

Le Concept stratégique de 1999 demeure le principal énoncé officiel des objectifs de l’Alliance et des différents moyens politiques et militaires qui doivent lui permettre de les atteindre. Il fournit le contexte conceptuel des décisions prises ultérieurement par les pays membres en réponse aux nouveaux défis comme le terrorisme et dans le cadre de la poursuite de l’adaptation et de la transformation que doit entreprendre l’Alliance afin de pouvoir s’acquitter de l’ensemble de ses engagements et de ses responsabilités.

  1. L'évolution des politiques relatives à l'Identité européenne de sécurité et de défense et aux rôles respectifs de l'OTAN, de l'Union de l'Europe occidentale et de l'Union européenne est décrite dans les chapitres 4 et 15.