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Mise jour: 03-Jan-2003 Publications OTAN

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Avant-propos du Secrétaire général

Vers le Sommet de l'OTAN de novembre 2002, à Prague

La présente édition du Manuel de l'OTAN est publiée au moment où l'on commence vraiment à mesurer toutes les incidences des événements du 11 septembre 2001 sur la sécurité internationale. Désormais, la tâche fondamentale pour l’ensemble de la communauté internationale est de faire face aux nouvelles menaces et de surmonter le défi que représente le terrorisme international. En ce qui concerne l'OTAN, en particulier, cela a signifié prendre des mesures efficaces pour faire en sorte de pouvoir continuer à apporter une contribution essentielle à ce but primordial. Et les circonstances ont prouvé très clairement que l’Alliance est plus nécessaire que jamais.

La raison en est simple. Les crises immédiates deviennent souvent les déclencheurs de défis stratégiques à long terme auxquels on ne peut riposter efficacement que grâce à une coopération effective et de grande envergure. Tous nos pays membres, y compris les Etats-Unis, doivent pouvoir compter sur des partenaires à long terme pour faire face à ce genre de défis.

La région des Balkans en est l'exemple parfait. A un moment où l'ancienne inimitié entre l'Est et l'Ouest disparaissait et où naissait l'espoir de voir « la fin de l'histoire », la communauté internationale a été désagréablement ébranlée par les conflits dans l'ex Yougoslavie. Au début des années 90, l'Europe et les Etats-Unis ont adopté, face à la crise, des approches différentes qui ont eu pour conséquence une réponse euro-atlantique inefficace et une tension évidente dans les relations transatlantiques.

Il était toutefois inévitable que l'Europe et l'Amérique du Nord se rendent compte que la seule voie à suivre était la coopération, par l'intermédiaire de l'OTAN. La stabilisation des Balkans est un but stratégique à long terme qui, c'est évident, sert non seulement les intérêts de tous les pays de la région mais aussi ceux de la communauté internationale dans son ensemble.

Pour réussir dans ce contexte, il faut une action politique coordonnée et menée en coopération et des forces multinationales performantes, capables de mettre en œuvre les décisions politiques. Ces éléments, seule l'OTAN pouvait les fournir et, grâce à l'OTAN, la communauté euro-atlantique a été en mesure de réaliser des progrès remarquables, non seulement en Bosnie-Herzégovine, mais aussi au Kosovo. Plus récemment, nous avons pu enregistrer un nouveau succès, non pas en mettant fin à un conflit à grande échelle comme en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo, mais en agissant, à l'avance, pour éviter que n'éclate un conflit ouvert dans l'ex-République yougoslave de Macédoine (1).

Loin de diviser l'Alliance, ces opérations nous ont en fait rapprochés et ont réaffirmé que l’OTAN conserve toute son utilité. Dans le même temps, en répartissant la responsabilité de contribuer à la gestion des crises et aux opérations de soutien de la paix, en y incluant de nombreux pays non membres de l’OTAN, ces activités ont renforcé et consolidé les relations de l'Alliance avec ses Partenaires du CPEA, avec la Russie, avec l'Ukraine et avec les pays participant au Dialogue méditerranéen.

Ce que nous avons accompli dans les Balkans ne représente qu'un seul exemple du rôle positif et central que les pays de l'OTAN ont pu jouer en œuvrant avec les pays partenaires en dehors de l'Alliance afin de relever les défis en matière de sécurité qui se sont posés ces dernières années. Et ce vaste agenda illustre encore davantage la raison pour laquelle l'OTAN reste aussi pertinente et nécessaire aujourd'hui.

On trouvera dans un autre chapitre de ce livre une longue liste de réalisations supplémentaires. Nous avons, notamment, apporté notre aide aux nouvelles démocraties pour leur permettre de gérer la transition vers les structures démocratiques et l'économie de marché, englobé des régions auparavant instables dans les structures de sécurité plus vastes de l'Europe moderne grâce à l'élargissement et grâce à une coopération quotidienne pratique et fructueuse, établi avec la Russie une relation solide qui tient compte des intérêts des deux partenaires et les place sur un pied d'égalité, pris des mesures pour renforcer le processus de maîtrise des armements et le contrôle de la prolifération des armes de destruction massive; l'Alliance atlantique s'est adaptée afin de pouvoir surmonter tous ces défis et contribuer à l'édification d'une région euro-atlantique plus sûre.

Ces réalisations se fondent sur la constatation que l'Europe et l'Amérique du Nord ont la même culture, les mêmes valeurs et des intérêts communs. L'expérience acquise pendant plus de cinquante ans de coopération a permis de développer à la fois la capacité d'agir de façon décisive et efficace et la confiance mutuelle qui permet de le faire.

En 2002, en particulier, un bond en avant considérable et sans précédent a été réalisé dans les relations de travail entre l'OTAN et la Russie avec la création du nouveau Conseil OTAN-Russie. Outre sa fonction de consultation et de coopération, cette instance constitue un mécanisme d'établissement de consensus, de décision conjointe et d'action conjointe et traduit la détermination des pays membres de l'OTAN et de la Russie à œuvrer étroitement, en tant que partenaires égaux, en vue d'identifier les domaines d'intérêt commun et de lutter ensemble contre les menaces et les risques communs pesant sur la sécurité.

Les événements du 11 septembre n'ont fait que renforcer ces liens. La réaction internationale aux attentats terroristes a montré qu'il n'est pas possible pour un pays - quelle que soit sa puissance - de faire face seul aux défis que nous connaissons actuellement en matière de sécurité mondiale. La prolifération des armes de destruction massive, les conflits régionaux, la criminalité organisée et les catastrophes écologiques constituent des problèmes internationaux à long terme qui exigent des solutions multinationales à long terme.

Le terrorisme ne fait pas exception. La réaction immédiate aux attentats terroristes contre les Etats-Unis a été, inévitablement, le choc et l'horreur devant l'ampleur de la tragédie humaine qu'ils ont provoquée. Toutefois, au cours des semaines et des mois qui ont suivi, ces attentats ont également servi d'injonction pour nous engager tous à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour qu’une telle tragédie ne se renouvelle pas, à une échelle peut-être encore plus catastrophique, aux Etats-Unis, en Europe ou ailleurs.

Il ne suffit plus de se contenter de prendre uniquement des mesures de maintien de l'ordre pour prévenir le terrorisme. C'est devenu désormais une question de sécurité nationale et internationale. Les réseaux de terrorisme internationaux représentent une grave menace pour notre paix et notre sécurité et pour le fonctionnement du système international. C'est pourquoi la lutte contre le fléau du terrorisme est devenue un défi stratégique à long terme.

Pour pouvoir relever ce défi, il nous faut des alliances stratégiques à long terme. L'OTAN donne l'exemple du rôle clé que peuvent jouer de telles alliances. Elle ne constitue pas seulement une enceinte unique en son genre pour la coordination de l'action politique, mais aussi un cadre irremplaçable pour la coordination d'opérations militaires, lorsqu'elles sont requises.

L'invocation de l'article 5 après les attentats du 11 septembre 2001 a illustré la solidarité politique totale qui règne au sein de l'Alliance et sur laquelle il est possible de compter en période de crise - héritage de plusieurs décennies de confiance et de coopération entre les membres de la communauté atlantique. Le rôle politique de l'OTAN a été bien plus large encore. Les bases de la vaste coalition internationale contre le terrorisme ont été jetées, ces dernières années, par les politiques d'ouverture et de partenariat de l'OTAN avec d'autres régions du monde. Le Partenariat pour la paix et le Conseil de partenariat euro-atlantique ont tissé une relation de confiance et de coopération croissantes entre les démocraties occidentales et les pays clés d'Asie centrale et du Caucase. Cette confiance et cette coopération ont contribué à susciter un soutien politique et pratique pour les actions que la coalition a menées en Afghanistan.

L'OTAN a aussi joué un rôle militaire plus direct sur le plan du soutien logistique, mettant à disposition des AWACS pour patrouiller l'espace aérien des Etats-Unis et libérant ainsi les avions américains pour des opérations de lutte contre le terrorisme, établissant une présence navale de l'OTAN en Méditerranéen orientale et agissant contre les cellules d'Al-Qaida dans les Balkans. En ce qui concerne les actions militaires directes en Afghanistan, un certain nombre d'Alliés y ont participé aux côtés des Etats-Unis, et des forces des pays membres de l'OTAN forment également le noyau de la Force internationale d'assistance à la sécurité (ISAF), qui contribue à la stabilisation du pays.

Ce rôle central que jouent les forces de l'OTAN n'est pas le résultat d’une coïncidence. Les opérations militaires contre des terroristes armés exigent des forces militaires interopérables, bien entraînées et équipées, habituées à travailler ensemble dans des situations dangereuses. Ces forces doivent être légères, capables de se déployer rapidement et de mener des opérations soutenues, à longue distance et dans la durée. De telles forces ne se créent pas en un jour. Elles se constituent à la longue, par des activités de planification et de formation conjointes, et l'utilisation de normes communes pour les achats et les télécommunications.

Il appartient à l'OTAN de faire en sorte de pouvoir continuer à remplir aussi ce rôle, en même temps qu'elle accomplit les nombreuses autres fonctions essentielles de l'Alliance. Dans la perspective du Sommet de Prague, qui se tiendra en novembre 2002, et par la suite, il faudra donc prendre de nouvelles mesures pour poursuivre le processus d'adaptation et de changement dans lequel cette Organisation s’est montrée si experte depuis sa création en 1949.

Le Sommet marquera une nouvelle étape dans le processus d'élargissement de l'OTAN qui se poursuit. Il permettra de renforcer les relations de l'OTAN avec ses Partenaires et avec les pays participant au Dialogue méditerranéen et de prendre de nouvelles mesures pour donner encore plus de force aux relations OTAN-Russie et pour développer encore le partenariat entre l'OTAN et l'Ukraine.

Il fera également en sorte que l'Alliance puisse contribuer encore plus efficacement à la lutte contre le terrorisme. Certaines mesures ont déjà été prises. L'échange de données du renseignement entre les Alliés s'intensifie. Nous recourons à notre Centre sur les armes de destruction massive pour axer nos activités de façon plus systématique sur la protection de nos forces et de nos populations contre les armes nucléaires, biologiques et chimiques, sur les dangers de la prolifération et sur la défense contre les missiles balistiques. Et nous réexaminons nos capacités de défense pour les adapter plus précisément aux besoins de la lutte contre le terrorisme. D'autres mesures s'ajouteront à la liste.

La nécessité d'améliorer l'ensemble des capacités de défense des membres européens de l'Alliance figure également en tête sur la liste des priorités. Il est indispensable de moderniser les forces armées européennes si l'on veut que les membres européens de l'OTAN soient en mesure d'assumer une plus grande part du fardeau du maintien de notre sécurité transatlantique commune. Leur engagement à l'égard de cet objectif vers lequel nous tendons, qui est fondé sur les relations saines, réalistes et pratiques nouées entre l'Alliance et l'Union européenne, est absolument essentiel. Il n'est plus tolérable que les pays membres de l'OTAN et de l'Union européenne continuent d'avoir une capacité militaire qui ne corresponde pas à leur puissance politique et économique.

Les troupes de maintien de la paix qui forment la Force de stabilisation en Bosnie, et les forces qui se trouvent au Kosovo et dans l'ex-République yougoslave de Macédoine , sont essentiellement constituées, à 85%, de forces européennes. L'Union européenne assume également la plus grosse partie des coûts de la reconstruction et du développement. Mais bien que quelque 50 000 soldats européens prennent part à ces opérations, la difficulté réside dans leur maintien sur le terrain. Peu de pays européens sont en mesure de déployer efficacement des troupes en grand nombre au dehors de leurs frontières et de leur apporter le soutien nécessaire pendant des mois, voire des années. Et pourtant, aujourd'hui, l'engagement à long terme peut s'avérer nécessaire. Les pays européens membres de l'OTAN comptent plus de 2 millions d'hommes et de femmes en uniforme, mais lors d'une opération militaire d'envergure, ils sont fortement tributaires des moyens des Etats-Unis pour les mouvements, le commandement et l'approvisionnement. La mise en place de capacités de gestion des crises efficaces est fondamentale, à la fois pour que l'Europe puisse jouer un rôle correspondant à ses aspirations et pour la crédibilité et l'efficacité futures du partenariat transatlantique.

Il est essentiel que le processus de modernisation réussisse. L’Alliance de l’Atlantique Nord n’est pas un partenariat des beaux jours et ne constitue pas non plus un mariage de convenance. Elle se fonde sur une solidarité bien enracinée et sur des intérêts communs, et depuis plus de cinquante ans, ces liens se sont révélés inébranlables en période de crise. L’OTAN a prouvé à maintes reprises qu’elle peut gérer efficacement les ressources politiques et militaires communes de ses pays membres afin d’atteindre des objectifs communs et de rendre inopérantes les menaces communes. A un moment où les menaces nouvelles et meurtrières pour la sécurité mondiale risquent de nous préoccuper tous pendant des années, la valeur de cette relation coopérative unique est inestimable. Mais, pour qu'elle perdure, de nouvelles capacités seront nécessaires afin de faire face au terrorisme, d'assurer une meilleure protection contre les armes de destruction massive et d'établir une relation transatlantique plus durable et plus équilibrée. Le Sommet de Prague sera donc, sans conteste, un sommet de transformation et d'engagement.

Il n’y a pas d’absolu dès lors qu’il s’agit d’instaurer l’environnement le plus stable possible pour le développement politique, économique et social futur de nos pays, mais seulement des choix difficiles. C’est aux gouvernements que revient la tâche de faire les bons choix, mais il appartient à l’opinion publique de prendre part activement au débat et, si nécessaire, de remettre en question les points de vue traditionnels. Des organisations comme l’OTAN doivent donc être prêtes à fournir autant d’informations que possible. Sans quoi, le débat sur ces questions graves et complexes risque d‘être déséquilibré et de prêter à confusion. J’ai donc le plaisir de recommander ce livre à l’attention de tous ceux qui pourraient avoir l’occasion de le consulter. Une meilleure compréhension des informations qu’il contient ne peut que contribuer à étayer les débats publics dont les questions de sécurité doivent constamment faire l’objet. Après le 11 septembre 2001, il est plus que jamais nécessaire de centrer ce débat sur une sobre évaluation des besoins actuels en matière de sécurité.

  1. La Turquie reconnaît la République de Macédoine sous son nom constitutionnel