Edition Web
Vol. 39- No. 6
Déc. 1991
p. 9-14
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L'élaboration
de la nouvelle stratégie de l'OTAN
Michael Legge,
Secrétaire général adjoint pour les plans et la politique
de défense, et président du Groupe pour le réexamen
de la stratégie
Dès le sommet de Londres, en juillet 1990, les chefs d'Etat et
de gouvernement ont reconnu que l'Alliance allait devoir s'adapter pour
tenir compte des développements spectaculaires survenus en Europe
(1). L'année dernière déjà,
plusieurs aspects de la politique alliée ont été
profondément remaniés. L'un des changements les plus importants
a trait au réexamen approfondi de la stratégie politique
et militaire de l'Alliance. Les résultats de ce réexamen
ont été énoncés dans le nouveau ' concept
stratégique' de l'Alliance, approuvé et publié au
sommet de Rome (2) [à cet égard, il
faut noter que c'est la première fois que l'OTAN publie un document
relatif à sa stratégie].
La nouvelle stratégie de l'OTAN traduit une évolution majeure
dans l'histoire de l'Alliance, en même temps qu'elle constitue la
base conceptuelle de la poursuite de ses objectifs de sécurité.
Elle englobe une conception large de la sécurité, qui met
l'accent à la fois sur la démarche politique et sur une
réduction substantielle, accompagnée d'une restructuration,
des forces militaires de l'Alliance. Tout en réaffirmant plusieurs
des principes essentiels de la politique de sécurité de
l'Alliance, le nouveau concept stratégique présente des
particularités originales, qui le différencient fondamentalement
des approches passées. Cet article, consacré à l'élaboration
de la nouvelle stratégie, tente d'expliquer comment ont été
développées les idées qui ont inspiré le concept
stratégique et quelles en sont les principales différences
par rapport aux stratégies antérieures.
Evolution de la stratégie de l'OTAN
Un bref rappel des concepts précédents permettra de mieux
comprendre la fonction et l'importance du nouveau concept stratégique
de l'OTAN. La signature du Traité de Washington instituant l'Alliance
en 1949 poursuivait un objectif général et un objectif particulier.
Comme stipulé dans le préambule, les signataires étaient,
d'une façon générale, "soucieux de favoriser
dans la région de l'Atlantique Nord le bien-être et la stabilité",
et plus particulièrement "résolus à unir leurs
efforts pour la défense collective". Compte tenu du climat
de l'époque, l'objectif plus large de l'Alliance - parvenir à
des relations pacifiques et amicales - ne pouvait être poursuivi
qu'une fois établie la confiance dans un système de défense
collective, ce qui explique le caractère d'urgence conféré
à cet aspect dans le Traité proprement dit. L'Article 9
instituait le Conseil de l'Atlantique Nord et lui donnait pour tâche
immédiate de créer un Comité de défense qui
serait à son tour chargé de recommander des mesures pour
l'application des Articles 3 et 5 (défense collective et résistance
à une attaque armée). Ce Comité, composé des
ministres de la Défense de l'Alliance, travailla à partir
d'un document préparé par le Comité militaire, créé
peu de temps auparavant. Les travaux du Comité de défense
aboutirent, en décembre 1949, à la première stratégie
de l'Alliance, formulée dans le document DC6 sous le nom de Concept
stratégique pour la défense de la zone de l'Atlantique Nord.
Ce document avait une fonction essentiellement pratique, à savoir
encourager les plus larges coopération et coordination possible
entre les forces militaires des pays membres de l'OTAN, en s'inspirant
des travaux déjà entrepris dans le cadre du Traité
de Bruxelles de 1948, qui avait donné naissance à l'Union
occidentale (la future Union de l'Europe occidentale). Comme le laisse
supposer son titre, ce document visait un objectif très précis:
définir un dispositif de forces efficace pour l'OTAN face à
la menace clairement perçue venant d'Union soviétique. Il
n'est pas inutile de rappeler que plusieurs des principes fondamentaux
maintenus au cours de l'évolution de la stratégie de l'OTAN
ont vu le jour dans ce premier concept stratégique: ces principes
sont la nature purement défensive de l'Alliance, l'accent mis sur
la prévention des conflits, l'importance de la collectivité,
le rôle des armements nucléaires, et l'unité stratégique
dans la diversité géographique.
La stratégie formulée pour la première fois en 1949
fut modifiée et remplacée à plusieurs reprises dans
les années 1950, suite aux développements politiques en
Union soviétique et aux changements affectant l'équilibre
des forces. En 1950, le Comité militaire approuva un document -
le MC 14 - qui devait être un supplément au concept stratégique
et précisait les orientations d'un plan à moyen terme visant
à développer un certain potentiel militaire à l'appui,
précisément, de la stratégie de l'Alliance. En décembre
1952, le Conseil approuva le MC 147 1, où était définie
l'assise stratégique de la planification et de la coordination.
Ce document remplaçait le DC 6, sans l'altérer fondamentalement.
L'année 1957 fut marquée par un changement de stratégie
majeur, avec l'adoption du MC 14/2 (basé sur une directive politique
émise un an plus tôt par le Conseil à l'intention
des autorités militaires de l'OTAN). Le MC 14/2 envisageait le
recours immédiat aux armements nucléaires de l'Alliance
en cas d'attaque importante - une stratégie dite de représailles
massives. L'accumulation accélérée de l'arsenal nucléaire
soviétique mit cependant en doute la crédibilité
de cette approche et alimenta un débat - qui allait durer près
de dix ans - sur la future stratégie de l'Alliance. En 1967 enfin,
après le retrait de la France de la structure militaire intégrée
de l'OTAN, l'Alliance adopta le célèbre concept de la riposte
graduée, consigné dans le document MC 14/3 (il faut toutefois
noter que ni l'expression "riposte graduée", ni celle
de "représailles massives" n'apparaissent comme telles
dans les documents officiels). La stratégie de la riposte graduée,
accompagnée des concepts abondamment développés et
expliqués de dissuasion et de défense, s'est avérée
la plus durable de toutes, au point d'être considérée
comme l'une des particularités typiques de l'Alliance.
Comme les stratégies précédentes, la riposte graduée
cherchait essentiellement à répondre aux exigences spécifiques
d'une défense crédible. Elle présupposait une menace
où le potentiel militaire du Pacte de Varsovie constituait un "élément
d'un poids considérable" et s'attachait dès lors à
essayer de contrer ce potentiel militaire. A cet égard, la stratégie
de la riposte graduée définissait en détail la notion
de dissuasion - caractéristique dès le départ de
la stratégie alliée - mais elle examinait aussi en détail
la nature de la réponse de l'Alliance à une agression. Les
objectifs politiques plus larges de l'Alliance n'en étaient pas
écartés pour autant. Le rapport Harmel sur les futures tâches
de l'Alliance, adopté par le Conseil deux jours à peine
après l'approbation du MC 14/3 par les ministres de la Défense,
soulignait que l'Alliance était résolue à progresser
pour résoudre les problèmes politiques sous-jacents, tels
que la division de l'Allemagne. Le rapport Harmel reconnaissait néanmoins
que la fonction première de l'Alliance était de préserver
une puissance militaire adéquate à des fins de dissuasion
et, si nécessaire, de défense. Il considérait l'établissement
d'un équilibre de forces comme une condition préalable à
la création du climat de stabilité, de sécurité
et de confiance nécessaire à l'Alliance pour mener à
bien sa seconde mission: le développement de relations plus stables,
propices à l'étude des problèmes sous-jacents. Cette
double démarche, visant d'une part à maintenir une défense
collective crédible basée sur les principes du document
MC 14/ 3, et d'autre part à favoriser une politique de détente
par le dialogue avec l'Union soviétique et les pays du Pacte de
Varsovie, allait devenir le fondement même de la politique alliée
pendant deux décennies, jusqu'à ce que les événements
spectaculaires de l'automne 1989 commencent à transformer de manière
irréversible l'environnement stratégique européen.
Le développement du nouveau concept stratégique
Au sommet de Londres déjà, il apparut clairement que, dans
le nouveau contexte, l'Alliance allait devoir adopter une démarche
stratégique totalement différente. La Déclaration
de Londres annonce en effet l'intention des Etats membres de renforcer
la composante politique de l'Alliance et définit les grands axes
d'un nouveau dispositif de forces dans la structure militaire intégrée
de l'OTAN, reflet de changements radicaux par rapport au passé.
Elle confirme et développe la décision, prise quelques semaines
plus tôt par les ministres de la Défense réunis en
Comité des plans de défense, de revoir la stratégie
militaire de l'OTAN et d'adapter les doctrines et concepts opérationnels
sur lesquelles elle repose. Ce que la Déclaration de Londres ne
précise pas clairement, c'est la manière dont les composantes
politiques et militaires de la stratégie de l'Alliance - composantes
établies de longue date et quelque peu séparées -
devront être développées et modifiées simultanément,
de façon à la fois harmonieuse et cohérente.
Le Conseil a confié la préparation de la nouvelle stratégie
militaire de l'Alliance à un Groupe ad hoc chargé de réexaminer
la stratégie militaire, mieux connu sous le nom de Groupe pour
le réexamen de la stratégie. Créé en juillet
1990, moins d'un mois après le sommet de Londres, ce groupe présentait,
dès le mois d'août, une première ébauche d'un
projet de nouveau concept stratégique. Après un premier
débat au sein du Groupe pour le réexamen de la stratégie
en septembre, le premier projet intégral fut distribué en
octobre 1990.
Très tôt, les membres du Groupe se sont accordés
à reconnaître que la nouvelle stratégie militaire
ne devait pas refléter uniquement le cadre actuel de sécurité,
mais aussi la réponse politique de l'Alliance à l'évolution
des circonstances. L'absence de la France aux travaux du Groupe pour le
réexamen de la stratégie a toutefois été à
l'origine de certaines complications. Le réexamen de la stratégie
avait été décidé à Londres par les
quinze pays membres de l'Alliance concernés par les plans de défense
collective et reflétait l'état d'un document, le M 14/3,
n'ayant pas été approuvé par la France. Pourtant,
au vu de l'évolution des travaux, et alors qu'il apparaissait de
plus en plus clairement que l'élément politique allait jouer
un rôle substantiel dans la nouvelle stratégie, la France
décida, en février 1991, de rejoindre le Groupe et de participer
pleinement à la préparation d'un nouveau concept. Cette
décision a été saluée par tous et a permis
aux participants d'approcher la sécurité sous un angle élargi,
englobant aspects politiques et aspects militaires. Au terme des travaux,
les seize Etats membres s'étaient mis d'accord sur la grande majorité
du texte, la France ne réservant sa position que sur quelques paragraphes
traitant des plans de la défense collective - un point sur lequel
elle a toujours adopté une approche distincte.
Les objectifs de l'Alliance
Le Groupe pour le réexamen de la stratégie a poursuivi
ses travaux selon une procédure logique. Il a commencé par
redéfinir les objectifs de l'Alliance dans le nouveau contexte
de sécurité et en est rapidement arrivé à
reconnaître que la plupart des objectifs de l'Alliance restaient
d'application - nature purement défensive de l'Alliance, indivisibilité
de la sécurité alliée, nature collective de la défense
de l'Alliance, et importance cruciale du lien transatlantique. Il fallait
cependant replacer ces objectifs dans le nouveau cadre politique pour
tenir compte non seulement de l'évolution de l'environnement militaire
mais aussi des développements dans le domaine, par exemple, de
la maîtrise des armements, de la CSCE et de la nouvelle identité
de sécurité et de défense européennes. Cette
tâche a été grandement facilitée dès
que le Conseil eût formulé les fonctions essentielles de
sécurité, publiées dans une déclaration approuvée
par les ministres des Affaires étrangères réunis
en sommet à Copenhague, en juin 1991 (3). Le
texte de cette déclaration a été ultérieurement
repris textuellement dans le nouveau concept stratégique. Etant
donné leur importance cruciale, nous avons estimé utile
de rappeler ces quatre fonctions essentielles de sécurité:
- "I. fournir l'une des bases indispensables à un
environnement de sécurité stable en Europe, fondé
sur le développement d'institutions démocratiques
et sur l'engagement de régler les différends de
manière pacifique, dans lequel aucun pays ne serait en
mesure de recourir à l'intimidation ou à la coercition
contre un Etat européen, quel qu'il soit, ni d'imposer
son hégémonie par la menace ou le recours à
la force;
- II. servir aux Alliés, conformément aux dispositions
de l'Article 4 du traité de l'Atlantique Nord, d'enceinte
de consultation transatlantique sur toute question affectant leurs
intérêts vitaux, notamment en cas d'événements
représentant un risque pour leur sécurité,
et de cadre de coordination appropriée de leurs efforts
dans des domaines d'intérêt commun;
- III. exercer une fonction de dissuasion contre toute menace
visant le territoire d'un Etat membre de l'OTAN, et une fonction
de défense en cas d'agression;
- IV.préserver l'équilibre stratégique en
Europe."
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Risques et défis
Outre la redéfinition des objectifs, le Groupe pour le réexamen
de la stratégie s'est également attaché à
analyser les futurs risques qui pourraient menacer la sécurité
de l'Alliance. Il est clair que l'ancienne menace massive, monolithique
et immédiate que faisaient peser sur l'OTAN l'Union soviétique
et le Pacte de Varsovie a maintenant disparu. Aujourd'hui pourtant, nous
nous trouvons dans une situation où plusieurs pays à la
périphérie de l'Alliance sont confrontés à
des difficultés d'ordre économique, social et politique
susceptibles de provoquer des crises, qui pourraient à leur tour
présenter pour la sécurité des Alliés toute
une série de risques imprévisibles, de nature et d'orientation
diverses. L'une des tâches les plus difficiles du Groupe pour le
réexamen de la stratégie a consisté, précisément,
à identifier ces risques sur une toile de fond politique en perpétuelle
évolution - les seize mois durant lesquels le Groupe a poursuivi
ces travaux ont été marqués par l'unification de
l'Allemagne, la dislocation du Pacte de Varsovie, la guerre du Golfe,
l'échec du coup d'Etat en Union soviétique et la guerre
civile en Yougoslavie. Au terme de son analyse, le Groupe pour le réexamen
de la stratégie est parvenu à évaluer, de manière
soigneusement équilibrée, les risques que pourraient engendrer
des instabilités en Europe centrale et orientale - et en particulier
en Union soviétique - ainsi qu'à la périphérie
méridionale de l'Alliance.
Eléments clés de la nouvelle stratégie
C'est dans ce contexte d'objectifs, de risques potentiels et de défis
pour l'Alliance qu'il faut situer le nouveau concept stratégique,
qui couvre deux grands thèmes: "une conception large de la
sécurité" et les "orientations pour la défense".
En ce qui concerne la conception large de la sécurité, deux
aspects fondamentaux méritent qu'on s'y attarde. Le premier a trait
à l'extension de la démarche préconisée par
le rapport Harmel; composée à l'origine de deux facettes,
le dialogue et la défense, cette démarche en compte désormais
une troisième: la coopération. La détermination de
l'Alliance à coopérer avec les pays d'Europe centrale et
orientale a été signalée pour la première
fois dans la Déclaration de Londres, par le message d'amitié
adressé par les pays membres de l'OTAN aux anciens adversaires
de l'Alliance, et réitérée à Rome, dans la
Déclaration sur la paix et la coopération (4).
Par ailleurs, le nouveau concept stratégique insiste davantage
sur l'importance de la gestion des crises et de la prévention des
conflits, car il existe aujourd'hui davantage de chances de parvenir à
résoudre une crise à un stade anticipé si l'on sélectionne
avec attention les mesures politiques et militaires adéquates.
Bien qu'elles se situent au coeur même de la stratégie militaire,
les orientations pour la défense se sont avérées
l'un des chapitres les moins difficiles à rédiger. La plupart
des principes qui inspirent un dispositif de défense efficace sont
demeurés inchangés; les principaux amendements portent sur
la manière dont les forces de l'Alliance seront organisées
pour relever les défis posés par le nouveau contexte de
sécurité. Une grande partie des caractéristiques
majeures de ce dispositif avait déjà été stipulée
dans la Déclaration de Londres: forces réduites et abaissement
des niveaux de préparation pour plusieurs d'entre elles; souplesse
et mobilité accrues en vue de remplacer l'ancienne défense
linéaire statique (concept de la défense modulaire); accroissement
du rôle des forces multinationales; capacité accrue de montée
en puissance des forces, par l'envoi de renforts, la mobilisation et la
reconstitution d'unités; allégement des programmes d'entraînement
et d'exercices; atténuation du rôle des armements nucléaires
et réduction très substantielle des arsenaux nucléaires
substratégiques de l'OTAN en Europe. En fait, les travaux portant
sur cet aspect de la nouvelle stratégie étaient déjà
suffisamment avancés en mai 1991 pour permettre aux ministres de
la Défense de prendre d'importantes décisions sur la restructuration
des forces conventionnelles avant l'approbation du concept dans son intégralité.
Ces décisions ont été suivies par l'annonce, en octobre
1991, de réductions de 80% du potentiel nucléaire substratégique
en Europe (5). En ce qui concerne ces nouvelles orientations
pour la défense, la majeure partie du débat a porté
non pas tant sur la nécessité de rapprocher des positions
sur des questions de principe mais sur la question de savoir jusqu'à
quel niveau de détail ces orientations devraient être rendues
publiques, les autorités militaires de l'OTAN ayant de leur côté
reçu pour mission de préparer un document classifié
distinct sur la mise en uvre de la nouvelle stratégie.
Le résultat final
Il a fallu seize mois environ au Groupe pour le réexamen de la
stratégie pour finaliser le nouveau concept stratégique.
Bien que les grands axes aient été définis après
quelques mois de travail, le texte final du concept a été
précédé de douze versions, ayant chacune fait l'objet
d'une analyse minutieuse et d'un débat. Si l'on se souvient que
les débats sur le concept stratégique précédent
- consigné dans le document MC 14/3 - avaient duré une dizaine
d'années, le délai de finalisation du nouveau document,
qui porte la référence C-M(91)88 depuis son approbation
par le Conseil de l'Atlantique Nord, apparaît plus que raisonnable.
En dépit d'une longue liste de questions fondamentales, la tâche
la plus difficile du Groupe pour le réexamen stratégique
n' aura pas été, à la réflexion, de résoudre
les divergences de position essentielles entre les Alliés. Les
grands axes, tant politiques que militaires, de la nouvelle stratégie,
avaient été définis à Londres, mais il restait
à en finaliser les détails et à classer les idées
dans un ordre logique. Les développements majeurs survenus dans
l'intervalle ont confirmé la clairvoyance de la Déclaration
de Londres où les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Alliance
avaient déjà pressenti un changement d'attitude majeur,
alors même que les caractéristiques du nouvel environnement
de sécurité n'étaient pas encore clairement définies.
Le principal défi pour le Groupe a été de parvenir
à une conception équilibrée, cohérente et
unifiée dans le cadre d'un réexamen de la stratégie
alliée qui, dans la pratique, s'est avéré particulièrement
large et complet. Cette tâche était d'autant plus difficile
que la nouvelle stratégie devait remplir deux rôles très
différents: d'un point de vue interne, il était urgent que
les autorités militaires et les planificateurs de la défense
de l'Alliance puissent développer un nouveau dispositif de forces,
mais à un stade antérieur, les membres du Groupe pour le
rééxamen de la stratégie avaient cependant reconnu
qu'il serait hautement souhaitable de publier le document final, afin
que la politique de sécurité de l'Alliance soit diffusée
le plus largement possible. Il n'a donc pas été toujours
aisé de concilier des exigences parfois contradictoires quant à
la planification de la défense interne et au caractère public
du document en cours d'élaboration. Le résultat final reflète
un équilibre subtil entre les éléments politiques
et militaires de la nouvelle stratégie.
Le nouveau concept stratégique espère l'avènement
d'un cadre de sécurité dans lequel les événements
pleinement leurs fruits. Les changements nécessaires au sein de
l'Alliance ont déjà été entamés. Se
référant aux orientations énoncées dans le
concept, les autorités militaires de l'OTAN ont encore une tâche
minutieuse et importante à accomplir avant que ne soit totalement
transformé un dispositif de forces mis en place il y a quarante
ans pour contrer une menace aujourd' hui disparue. Tout en réaffirmant
la résolution des Etats membres à sauvegarder leur sécurité,
leur souveraineté et leur intégrité territoriale,
le nouveau concept doit permettre à l'Alliance de relever les défis
très différents des années 1990 et au-delà,
en adoptant vis-à-vis de la sécurité une approche
beaucoup plus large que le ne permettaient les circonstances passées.
L'objectif visé est atteint par la création d'une finalité
commune et une harmonisation de moyens aussi fortes que possible entre
les Alliés dans le cadre de la poursuite d'objectifs de sécurité
communs. A cet égard, la nouvelle stratégie de l'OTAN s'inscrit
dans le prolongement des réussites du passé tout en les
consolidant, et envisage un avenir où nous pourrons assurer l'établissement
d'un ordre de paix juste et durable en Europe.
(1) Le texte de la Déclaration de Londres a
été publié dans la Revue de l'OTAN, N°4, août
1990, pages 32-33.
(2) Le texte du nouveau Concept stratégique
est publié dans la rubrique Documentation de ce numéro.
(3) Le texte des déclarations et du communiqué
a été publié dans la Revue de l'OTAN, N° 3, juin
1991, p. 28-33
(4) Le texte de la Déclaration de Rome est publié
intégralement dans la rubrique Documentation de ce numéro.
(5) Le texte du communiqué du Groupe des plans
nucléaires est publié dans la rubrique Documentation de
ce numéro.

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